La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2016 | FRANCE | N°15PA01650

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 15 juin 2016, 15PA01650


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Pharmacie du boulevard Ney a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, d'une part, au titre des exercices clos en 2008 et 2009, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge, ainsi que des rappels de droits en matière de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 pour un montant total de 129 774 euros, et d'autre part, au ti

tre de l'exercice clos en 2010, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Pharmacie du boulevard Ney a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, d'une part, au titre des exercices clos en 2008 et 2009, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge, ainsi que des rappels de droits en matière de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 pour un montant total de 129 774 euros, et d'autre part, au titre de l'exercice clos en 2010, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge, ainsi que des majorations y afférentes, et de l'amende à elle infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts.

Par un jugement n°s 1309216, 1408588/1-2 du 3 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 22 avril 2015, la SELARL Pharmacie du boulevard Ney, représentée par Me A...C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n°s 1309216, 1408588/1-2 du 3 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge, d'une part, au titre des exercices clos en 2008 et 2009 ainsi que des rappels de droits en matière de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 pour un montant total de 129 774 euros, et d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2010, ainsi que des majorations y afférentes, et de l'amende à elle infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité de la procédure :

Sur la procédure diligentée en 2011 :

- les opérations d'extraction et de saisie des fichiers du logiciel Alliance effectuées par le service dans le cadre du contrôle inopiné du 2 mars 2011 constituent en réalité des traitements informatiques au sens des dispositions du II de l'article 47 A du livre des procédures fiscales, traitements irréguliers dès lors qu'ils correspondent à l'examen au fond des documents comptables et non à une simple constatation matérielle de l'existence et de l'état des documents comptables ;

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales qui prévoient que le contribuable soit informé de sa faculté de se faire assister d'un conseil de son choix ;

- le logiciel Alliance Plus est un logiciel de gestion d'officines qui n'est pas visé par les textes spécifiques applicables aux vérifications des systèmes informatisés ; l'administration l'a induite en erreur sur l'étendue de ses obligations en évoquant des dispositions du livre des procédures fiscales qui ne s'appliquaient pas au cas particulier et à défaut d'information écrite sur la nature des investigations souhaitées et des options prévues ; elle n'a pas été mise en mesure de choisir en connaissance de cause la modalité de traitement informatique parmi les trois options offertes par les dispositions de l'article L.47 A II du livre des procédures fiscales, à défaut d'avoir été informée tant de la finalité des traitements informatiques que de la nature de ces traitements ; le délai de trente jours prévu par les dispositions de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales n'a pas été respecté pour cette option dont l'échéance a été fixée au 11 avril 2011 ; l'administration n'a pas respecté l'option choisie par M.B..., gérant de la société, en l'obligeant à extraire lui-même des fichiers du logiciel Alliance Plus ;

- les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sur le droit au procès équitable, et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, sont applicables aux procédures diligentées à son encontre, dès lors que celles-ci sont imbriquées avec l'instruction pénale conduite par le juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Nîmes, son identité apparaissant sur un fichier ;

- le principe de l'égalité des armes n'a pas été respecté dès lors qu'elle n'a pas eu accès au dossier pénal en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- les stipulations prévues par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ont été méconnues en l'absence de recours effectif pour obtenir la nullité de la saisie du 23 juin 2009 de la pièce opposée au contribuable ; l'obligation de communication de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales porte sur des documents originaux ; l'administration n'a pas satisfait à sa demande de communication du mot de passe permettant d'accéder à la commande de suppression des recettes ;

Sur la procédure diligentée en 2012 :

- il n'y a pas eu de débat oral et contradictoire lors des opérations de vérification sur place de l'exercice clos en 2010 ;

- la transmission des fichiers informatiques ne procède pas de sa propre initiative, et le vérificateur s'est contenté de faire contresigner au comptable de la société l'inventaire des fichiers ainsi remis en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47-A-I du livre des procédures fiscales ;

Sur le fond :

- la reconstitution de recettes doit être considérée comme radicalement viciée dans son principe dès lors qu'elle se fonde sur un postulat de base affirmant que toute lacune dans la chronologie des factures correspond à une omission de recettes, alors que l'administration aurait dû procéder à une reconstitution du montant à partir des factures d'achats de produits, de l'inventaire des stocks et de l'historique des ventes ;

Sur la majoration pour manoeuvres frauduleuses :

- l'administration n'a pas respecté au cours de la procédure d'établissement des pénalités les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car elle n'a pas eu accès au dossier pénal ;

- pour justifier l'application de la majoration de 80 % prévue à l'article 1729-c du code général des impôts l'administration doit établir la mauvaise foi et les manoeuvres frauduleuses, ce qu'elle n'a pas fait ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SELARL Pharmacie du boulevard Ney ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Par ordonnance du 24 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 15 avril 2016 à

12 heures.

Vu :

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- les conclusions de M. Egloff, rapporteur public.

1. Considérant que la SELARL Pharmacie du boulevard Ney qui exploite une officine de pharmacie sise à Paris (75018), relève régulièrement appel du jugement n°s 1309216, 1408588/1-2 du 3 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge, d'une part, au titre des exercices clos en 2008 et 2009 ainsi que des rappels de droits en matière de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009, et d'autre part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2010, ainsi que des majorations y afférentes, et de l'amende à elle infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition diligentée en 2011 :

2. Considérant que la SELARL Pharmacie du boulevard Ney, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2008 et 2009 pour l'impôt sur les sociétés et sur la période du 1er janvier 2008 au 31 janvier 2011 pour la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à la suite de ce contrôle des rappels et rehaussements ont été mis en recouvrement, pour

21 712 euros en droits et 18 800 euros en pénalités au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, et 46 978 euros en droits et 42 284 euros en pénalités au titre de l'impôt sur les sociétés, soit un montant total de 129 774 euros ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / (...) / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. " ; que l'appelante fait valoir, comme elle le faisait en première instance, que les opérations d'extraction et de saisie des fichiers du logiciel Alliance effectuées par l'administration dans le cadre du contrôle inopiné du

2 mars 2011 constituent en réalité des traitements informatiques irréguliers car procédant d'une vérification de comptabilité, dès lors qu'ils correspondent à l'examen au fond des documents comptables et non à une simple constatation matérielle de l'existence et de l'état des documents comptables ;

4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction qu'avant de procéder à tout contrôle inopiné, le 2 mars 2011, l'administration a remis en mains propres à M.B..., gérant de l'exposante, un avis de vérification de comptabilité, dont il a été accusé réception le jour même, et qui fait apparaître l'intention de l'administration de procéder, le même jour, à la constatation des éléments physiques de l'exploitation et de l'existence et de l'état des documents comptables de l'intéressée ; qu'il ressort des mentions de l'état contradictoire des constatations matérielles effectuées dans le cadre de la procédure de contrôle inopiné, état contresigné par M.B..., que celui-ci a, à la demande du vérificateur, sauvegardé des fichiers informatiques utilisés par le logiciel Alliance ; que la copie de ces fichiers, a été gravée sur un CD-Rom fourni par l'administration ; que ce support a été placé dans une enveloppe fermée sur laquelle le cachet du service a été apposé et qui a été remise à M.B..., celui-ci s'engageant à ne pas l'ouvrir et à la présenter ultérieurement au cours de la procédure ; qu'aucun support de sauvegarde ni aucune copie de fichiers n'ont été emportés par le vérificateur ; qu'ainsi, ces opérations n'ont eu ni pour objet ni pour effet pour l'administration de procéder à l'analyse critique des fichiers en cause ou à leur emport physique ; que, par suite, la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait procédé à l'examen au fond de ses documents comptables dès sa visite inopinée, sans respecter le délai raisonnable prévu les dispositions de l'article L 47 du livre des procédures fiscales pour permettre au contribuable de se faire assister par un conseil lors de la vérification de comptabilité ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " (...) / Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contrôle porte sur l'ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l'élaboration des déclarations rendues obligatoires par le code général des impôts ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements / (...) " ; que l'appelante fait grief à l'agent chargé du contrôle de l'avoir induite en erreur sur l'étendue de ses droits et obligations en procédant au contrôle de son logiciel de gestion d'officine, qui, selon elle, n'appartient pas au système comptable informatisé de l'entreprise, en l'absence de connexion informatique entre ce logiciel Alliance et le logiciel comptable de l'officine ; que, toutefois, comme le relève l'administration, le rapport établi par un expert informatique près la cour d'appel d'Aix-en-Provence et obtenu dans le cadre de son droit de communication fait apparaître que le logiciel Alliance dispose de fonctions permettant à l'utilisateur de supprimer l'historique de la caisse en cours et que les fonctionnalités " traitement écriture Règlements " et " traitement écriture Factures " disponibles dans ledit logiciel, ne peuvent avoir pour finalité que de permettre à l'exploitant d'occulter une partie des recettes en espèces de l'officine ; qu'ainsi, le logiciel en cause permettant de modifier des données comptables informatisées constitue, par suite, un élément de traitement comptable informatisé servant à soustraire une partie des recettes payées en espèces afférentes à des opérations commerciales autres que celles engageant des tiers ; que ce logiciel, même s'il n'est pas connecté au logiciel de comptabilité de la société, fait donc office de logiciel de caisse et concourt à la formation des résultats comptables ; qu'il pouvait, dès lors, faire l'objet dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la SELARL Pharmacie du boulevard Ney, d'un contrôle sur le fondement de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du II de l'article 47 A du livre des procédures fiscales : " (...) / II.-En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : / a) Les agents de l'administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable / b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. Dans ce cas, l'administration précise par écrit au contribuable, ou à un mandataire désigné à cet effet, les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer. Les résultats des traitements sont alors remis sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget / c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L'administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n'en conserve pas de double. L'administration communique au contribuable, sous forme dématérialisée ou non au choix du contribuable, le résultat des traitements informatiques qui donnent lieu à des rehaussements au plus tard lors de l'envoi de la proposition de rectification mentionnée à l'article L. 57 / Le contribuable est informé des noms et adresses administratives des agents par qui ou sous le contrôle desquels les opérations sont réalisées " ; qu'aux termes de l'article L. 57 du même livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation / (...) / En cas d'application des dispositions du II de l'article L. 47 A, l'administration précise au contribuable la nature des traitements effectués / (...) " ; que l'appelante fait valoir qu'elle n'a été informée, ni de la nature des investigations souhaitées, ni de la nature des traitements informatiques envisagés par l'administration, avant d'exercer l'option prévue par le II de l'article L. 47 A précité du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que, lors de son intervention sur place le 4 avril 2011, le vérificateur a informé la requérante de la possibilité pour elle de choisir l'une des options prévues par les dispositions précitées du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, option selon laquelle, soit l'administration effectue la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable, soit, le contribuable effectue lui-même tout ou partie des traitements informatiques, soit le contribuable demande que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise ; que le service a remis en main propre au représentant de la société lors de son intervention sur place le 4 avril 2011, un courrier qui précise la nature tant des données à contrôler, notamment les ventes et règlements enregistrés, les taux de taxe sur la valeur ajoutée appliqués aux articles vendus, les stocks, les entrées et les sorties de produits, que des traitements informatiques à effectuer, notamment un contrôle de cohérence et d'exhaustivité, des rapprochements et un contrôle des procédures de correction et d'annulation utilisées sur le système de caisse notamment à partir des éléments de traçabilité intégrés ; qu'ainsi, l'administration a suffisamment informé l'exposante sur la nature des investigations souhaitées pour lui permettre d'effectuer son choix en toute connaissance de cause, choix qu'elle a fait par lettre du 5 avril 2011 ; que, contrairement à ce que soutient l'intéressée, il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 47 A et L. 57 du livre des procédures fiscales que l'administration n'est tenue d'informer le contribuable de la nature des traitements informatiques qu'elle envisage de réaliser que si ledit contribuable a choisi d'effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification ; que le moyen susanalysé de la SELARL Pharmacie du boulevard Ney, qui a exercé une option en faveur, non pas de la réalisation par ses soins des traitements envisagés, mais de la simple remise au vérificateur des copies des fichiers nécessaires à la réalisation par le service desdits traitements doit, par suite, être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification " ; que l'appelante fait valoir que l'administration lui a demandé d'exercer l'une des options prévues au II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales sans respecter le délai de réponse de trente jours prévu par les dispositions de l'article L. 11 du même livre ; que, toutefois, la demande adressée au contribuable d'effectuer un tel choix est un élément du dialogue auquel donne lieu la vérification de comptabilité dans laquelle elle s'insère et n'est pas soumise, notamment, au délai de trente jours prévu par les dispositions de l'article L. 11 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, la SELARL Pharmacie du boulevard Ney ne peut pas utilement soutenir que, par la lettre du 4 avril 2011, l'administration aurait méconnu les dispositions de

l'article L. 11 du livre des procédures fiscales en fixant au 11 avril 2011 la date avant laquelle elle devait lui faire connaître son choix, le délai imparti étant, en tout état de cause, suffisant ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que l'appelante soutient que les rappels d'impôts auxquels elle a été assujettie ont été établis à la suite d'une procédure d'imposition irrégulière, dès lors qu'ils sont fondés sur des informations tirées d'un " listing-mot de passe xls ", obtenues dans le cadre d'une perquisition pénale illicite ; que l'administration a obtenu, sur le fondement des dispositions des articles L. 81, L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, communication auprès de l'autorité judiciaire de pièces, relatives au module de fraude fiscale intégré au logiciel Alliance utilisé par l'appelante et à l'obtention du mot de passe nécessaire pour l'activer, saisies dans le cadre d'une instruction pénale dirigée à l'encontre des gérants d'une autre officine de pharmacie ; que, toutefois, si les faits révélés par cette enquête pénale ont conduit l'administration fiscale à mettre en oeuvre des vérifications de comptabilité à l'encontre de la société Pharmacie du boulevard Ney, c'est uniquement sur le fondement des éléments concernant ce contribuable et recueillis au cours des procédures de contrôle fiscal engagées à son encontre, que l'administration a rectifié les bases imposables de la société et non grâce aux informations qui lui avaient été communiquées par l'autorité judiciaire ; que, dans ces conditions, la transmission à l'administration fiscale d'informations de la part de l'autorité judiciaire demeure sans incidence sur la procédure d'imposition de la société requérante, dès lors que ces informations n'ont pas servi à l'établissement des rappels d'impôts mis à sa charge ; que, par suite, la SELARL Pharmacie du boulevard Ney ne peut utilement soutenir que les informations tirées du fichier intitulé " listing-mot de passe xls ", auraient été obtenues à l'issue d'une saisie judiciaire irrégulière ; qu'elle ne peut davantage utilement faire valoir qu'elle n'a pu, faute pour l'article 173 du code de procédure pénale de prévoir une telle possibilité, disposer d'une voie de recours pour contester la régularité de la saisie opérée au domicile de tiers ; qu'elle n'est, au surplus, et en tout état de cause, pas recevable, faute de produire un mémoire distinct à cette fin, à contester la constitutionnalité de cet article du code de procédure pénale ;

9. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L.76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; que l'appelante ne peut utilement faire valoir qu'elle a sollicité en vain la communication de l'original de la lettre par laquelle elle a demandé le mot de passe permettant d'utiliser les fonctions incriminées du logiciel Alliance, ce document détenu par l'autorité judiciaire et dont l'administration ne dispose pas n'ayant pas fondé les redressements d'imposition ; que, dès lors, la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à soutenir que les dispositions des articles L. 76 B et L. 16 du livre des procédures fiscales, auraient été méconnues, ni à faire valoir que le principe de l'égalité des armes n'aurait pas été respecté faute pour elle d'avoir eu accès à ce document du dossier pénal ;

10. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution " ; que l'appelante soutient que faute pour elle de pouvoir exercer un recours effectif pour contester la régularité de la saisie susmentionnée décidée par l'autorité judiciaire, elle a été privée des garanties prévues par les dispositions et stipulations susénoncées dont celle de l'égalité des armes ; que, toutefois, et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, c'est sur le fondement des manquements comptables constatés au cours de la procédure de contrôle diligentée à l'encontre de la société requérante que l'administration a rectifié sa base imposable et non sur le fondement des informations préalables communiquées par l'autorité judiciaire ; que, par suite, le moyen susanalysé, présenté par la SELARL Pharmacie du boulevard Ney, qui a été mise en mesure de contester utilement les rappels d'impôts mis à sa charge, doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à soutenir que les impositions et pénalités mises en recouvrement par avis du 26 novembre 2012, l'ont été à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la régularité de la procédure diligentée en 2012 :

12. Considérant que l'appelante a également fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur l'exercice clos le 31 décembre 2010 à l'issue de laquelle, après proposition de rectification en date du 15 octobre 2012, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés ont été mis en recouvrement pour un montant de 29 783 euros en droits et 25 970 euros de pénalités, ainsi qu'une amende de 89 349 euros infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, soit un montant total de 145 102 euros ;

13. Considérant, en premier lieu, que la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire dès lors que la vérification s'est déroulée dans les locaux de la société et qu'elle ne démontre pas que le vérificateur se serait refusé à tout débat ;

14. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que dans le cadre de la seconde vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en 2012, la société requérante, après avoir été dûment informée de la possibilité pour elle, conformément aux dispositions de l'article

L. 47 A-I du livre des procédures fiscales, de satisfaire à son obligation de représentation de ses documents comptables en remettant une copie des fichiers des écritures comptables sous forme dématérialisée a, en toute connaissance de cause, choisi de remettre au vérificateur une copie des fichiers informatisés contenant ses écritures comptables, cette remise ayant été formalisée par un document écrit en date du 18 juillet 2012 contresigné par le gérant de la société ; que contrairement à ce que soutient la SELARL Pharmacie du boulevard Ney, l'emport de ce fichier informatique a ainsi été régulièrement effectué après accord de son gérant ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à soutenir que les impositions et pénalités mises en recouvrement par avis du 12 novembre 2013, l'ont été à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur le bien-fondé des impositions :

16. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur s'est fondé sur des éléments de nature à établir que la société Pharmacie du Boulevard Ney était dotée d'un logiciel dont l'une des fonctionnalité permettait de faire disparaître de son fichier de factures, les encaissements en espèces concernant les opérations ne mettant pas en cause des tiers, tels que mutuelles et assurances, ces extractions entraînant la suppression de l'opération en cause, sans pour autant modifier la numération séquentielle de l'ensemble des opérations, la numération des autres opérations restant inchangée ; que dans le cadre des traitements opérés lors des opérations de contrôle, le service vérificateur a mis en évidence, au titre des périodes vérifiées, des ruptures dans la chronologie des factures ; que dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient la société requérante, le vérificateur a pu à bon droit considérer, en l'absence de tout autre élément d'explication, que ces ruptures correspondaient à des suppressions de factures et de règlements opérées à l'aide du logiciel à finalité frauduleuse dont disposait la société ; qu'il suit de là que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires mise en oeuvre, consistant, après avoir dénombré les opérations supprimées, à leur appliquer une valeur moyenne déterminée en fonction des caractéristiques propres à l'activité de la société, serait radicalement viciée dans son principe et excessivement sommaire ;

Sur le bien-fondé des pénalités :

17. Considérant que l'appelante fait valoir que l'administration n'a justifié ni de sa mauvaise foi ni de manoeuvres frauduleuses tant au plan matériel, à savoir l'utilisation du menu outil d'administration, qu'intentionnel, c'est-à-dire l'utilisation du mot de passe nécessaire pour l'activation du menu outil d'administration ; que, toutefois, ainsi que l'ont noté les premiers juges, pour justifier l'application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prévue par l'article 1729 du code général des impôts, le rapport de l'expertise diligentée dans le cadre de l'instruction pénale, a fait apparaître que le logiciel Alliance utilisé par l'exposante était doté d'un module permettant de dissimuler des recettes et ne pouvant avoir d'autre finalité que la fraude fiscale, que l'activation de ce module nécessitait l'entrée d'un mot de passe après une manoeuvre consciente de l'utilisateur, que le droit de communication exercé par l'administration a révélé que la requérante a expressément demandé le mot de passe permettant d'accéder à cette fonctionnalité ; que les contrôles fiscaux ont établi que des agissements délibérés ont créé une situation occultant des opérations imposables tout en donnant à la comptabilité l'apparence de la sincérité ; que, dans ces conditions, et alors que la contribuable se borne à faire valoir que l'administration n'apporte pas la preuve qu'elle a, en la personne de son gérant, demandé le mot de passe à la société éditrice du logiciel Alliance, l'exposante ne contredit pas sérieusement l'administration qui établit l'existence d'une manoeuvre délibérée et frauduleuse tendant à éluder l'impôt et motive suffisamment son application ; que, dès lors, la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à demander la décharge de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la SELARL Pharmacie du boulevard Ney n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ; que ses conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué et à la décharge des impositions, majorations et amende litigeuses doivent, par suite être rejetées ; qu'il y a, par suite, lieu de rejeter les conclusions de l'appelante au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de juridiction administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SELARL Pharmacie du boulevard Ney est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Pharmacie du boulevard Ney et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France Ouest.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 juin 2016.

Le rapporteur,

A. LEGEAILe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

S. APPECHE

Le greffier,

S. DALL'AVALa République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15PA01650


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01650
Date de la décision : 15/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-15;15pa01650 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award