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03/03/2016 | FRANCE | N°15PA02708

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 03 mars 2016, 15PA02708


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office passé ce délai.

Par un jugement n° 1502509/2-2 du 15 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :<

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Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés respectivement

les 9 juillet et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 30 janvier 2015 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office passé ce délai.

Par un jugement n° 1502509/2-2 du 15 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés respectivement

les 9 juillet et 28 octobre 2015, MmeD..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1502509/2-2 du 15 juin 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral du 30 janvier 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de titre de séjour était fondée sur le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur les articles L. 313-10 et

L. 313-14 de ce même code ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle justifie d'une vie commune de plus de cinq ans, qu'elle parle couramment le français, qu'elle n'a aucune famille proche en Colombie et que l'ensemble de ses intérêts privés et familiaux sont désormais en France ;

- l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, dès lors que l'arrêté attaqué aurait des répercussions psychologiques graves sur son fils.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2015, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme Appèche a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeD..., née le 11 décembre 1981 en Colombie, pays dont elle a la nationalité, et entrée en France, selon ses déclarations, le 23 septembre 2006, a sollicité son admission au séjour le 31 octobre 2012, sur le fondement des dispositions

du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 15 novembre 2012, le préfet de police a rejeté sa demande ; que, par un jugement du 13 juin 2013, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de délivrer à l'intéressée une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ; que, par un arrêt du 6 mars 2014, la Cour administrative d'appel de céans a annulé ce jugement ; que, par suite, Mme D...s'est vue retirer la carte de séjour délivrée en exécution dudit jugement; qu'elle a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention "salariée" ; que, par un arrêté du 30 janvier 2015, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite en cas d'éloignement d'office passé ce délai ; que Mme D...relève régulièrement appel du jugement n° 1502509/2-2

du 15 juin 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que Mme D...reprend en appel le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas examiné sa demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'elle avait, selon elle, fait une demande expresse en ce sens ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République / (...) " ;

4. Considérant que Mme D...fait valoir qu'elle est entrée sur le territoire français le 23 septembre 2006 et qu'elle y réside depuis lors, qu'elle justifie d'une vie commune de plus de cinq ans avec M. B...A..., qu'elle parle couramment le français, qu'elle n'a aucune famille proche en Colombie et que l'ensemble de ses intérêts privés et familiaux sont désormais en France ; qu'il ressort toutefois des éléments du dossier qu'elle a, d'une part, fait l'objet d'une première décision portant obligation de quitter le territoire, en date du 28 décembre 2009, à laquelle elle n'a pas déféré ; qu'elle ne parvient pas, d'autre part, à établir s'être maintenue sur le territoire français depuis la date du 23 septembre 2006 figurant sur son ancien passeport et qu'en tout état de cause, elle s'y serait maintenue pour l'essentiel de manière irrégulière et de surcroit au mépris d'une précédente mesure d'éloignement ; que, si la requérante produit, notamment, des attestations, une déclaration de vie commune, une facture d'électricité, deux avis d'imposition faisant apparaître un montant d'impôt nul, des quittances de loyer ainsi qu'un contrat de bail signé le 21 juin 2013 et parvient à démontrer la réalité de sa vie commune avec M. B...A..., son compatriote, à compter de cette dernière date, elle n'établit toutefois et en tout état de cause pas l'ancienneté alléguée de sa résidence en France ; que nonobstant la circonstance que sa mère, et son demi-frère vivent en France et que son père est décédé en 2006, MmeD..., âgée de trente quatre ans ne justifie pas, eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, avoir tissé en France des liens personnels et familiaux d'une intensité et d'une ancienneté telles qu'elle devrait être regardée comme pouvant obtenir de plein droit une titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code susmentionné et ne pouvant, en conséquence, faire légalement l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'elle ne justifie pas davantage, tant au regard de la durée que des conditions de son séjour, de motifs exceptionnels ni de considérations humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste en ne lui octroyant pas un titre de séjour sur le fondement de ce dernier article et en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en estimant qu'elle ne remplissait pas les conditions pour prétendre utilement à un titre de séjour en raison des attaches privées et familiales qu'elle avaient en France et en assortissant le refus de titre de séjour qu'il lui a opposé d'une obligation de quitter le territoire français ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que la circonstance que le fils de MmeD..., âgé de 4 ans à la date de la décision attaquée, est scolarisé en France ne suffit pas à établir que l'arrêté attaqué, qui n'implique aucune séparation de cet enfant d'avec sa mère, porterait atteinte à l'intérêt supérieur de celui-ci ; que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, rien ne s'oppose à ce que son fils reparte en Colombie avec elle, et le cas échéant avec son père, également de nationalité colombienne, la circonstance que ce dernier soit titulaire d'une carte de séjour temporaire l'autorisant à résider en France, ne faisant pas obstacle à ce qu'il fasse le choix de retourner dans son pays avec son fils et la mère de ce dernier ; qu'au surplus, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet enfant ne pourrait poursuivre sa scolarité hors de France et notamment en Colombie ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 février 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- M. Legeai, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 mars 2016.

Le rapporteur,

S. APPECHELe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL' AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02708


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02708
Date de la décision : 03/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : ORE-DIAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-03-03;15pa02708 ?
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