Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2014 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1504537/1-2 du 6 juillet 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 octobre 2015, M.B..., représenté par Me Boukhari Saou, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1504537/1-2 du 6 juillet 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 novembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Boukhari Saou sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le préfet de police devait, préalablement au rejet de sa demande de titre de séjour, saisir la commission du titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il a justifié avoir sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ;
- l'avis du médecin chef du service médical de la préfecture de police de Paris au vu duquel le préfet de police s'est prononcé sur sa demande tendant au renouvellement de son titre de séjour n'est pas suffisamment motivé ;
- le préfet de police a entaché sa décision d'une erreur de fait ;
- le préfet de police, en rejetant sa demande, a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est fondée sur des circonstances inexactes ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle ;
- le décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale, dès lors que l'obligation de quitter le territoire français sur laquelle, elle est fondée, est illégale.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 25 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Blanc,
- et les observations de Me Boukhari Saou, avocat de M.B....
1. Considérant que M.B..., ressortissant égyptien, né en 1975, a sollicité, au cours du mois de mai 2013, le renouvellement du titre de séjour dont il était titulaire en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que son admission exceptionnelle au séjour en application de l'article L. 313-14 du même code, en se prévalant de la durée de sa résidence sur le territoire national ; que par un arrêté du 27 novembre 2014, le préfet de police a rejeté la demande de M. B...et a assorti ce refus de séjour d'une obligation à quitter le territoire français, en fixant le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 6 juillet 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;
3. Considérant que M. B...soutient qu'il est arrivé en France au cours de l'année 1996 et qu'il s'est établi à partir de cette date sur le territoire national ; que si le préfet de police, aux termes de l'arrêté litigieux du 27 novembre 2014, a contesté que le requérant ait résidé sur le territoire national au cours des années 2004 à 2006, M.B..., pour justifier du caractère habituel de sa résidence en France au cours de ces trois années, a versé au dossier de nombreuses ordonnances médicales, des résultats d'examen médicaux et radiographiques, plusieurs attestations de l'aide médicale d'Etat dont il a bénéficié, ainsi qu'une attestation établie le 18 avril 2006 par le consulat d'Egypte, certifiant son immatriculation auprès de ces services consulaires en France depuis 1996 ; qu'au titre de l'année 2007, pour laquelle le préfet de police, dans son mémoire de première instance, a également contesté la résidence habituelle du requérant en France, celui-ci a produit des relevés d'un compte bancaire ouvert à son nom auprès de la Banque postale, faisant état de nombreux mouvements correspondant, pour la plupart, à des retraits d'espèces par carte bancaire et des remises de chèque ; qu'eu égard à la nature et au nombre de pièces produites par le requérant, celui-ci doit être regardé comme ayant suffisamment justifié du caractère habituel de sa résidence en France au cours de la période contestée ; que la circonstance que l'ensemble des ordonnances médicales dont se prévaut M. B...ne comporteraient pas l'indication de son prénom ou de son lieu de résidence n'est pas de nature à remettre en cause la valeur probante de ces documents, laquelle est confortée par les factures d'achat des médicaments correspondants, établies par les pharmacies auxquelles le requérant s'est adressé ; que, par ailleurs, si lors de son audition par les services de la préfecture, les 17 mai 2013 et 23 mai 2014, M. B...a déclaré être entré en France les 1er avril 2013 et 21 août 2014, il est constant qu'à ces dates, il était encore titulaire d'un récépissé de demande de renouvellement de carte de séjour, qui, accompagné de son ancien titre de séjour, l'autorisait à quitter temporairement le territoire national ; qu'ainsi, dès lors que M. B... a justifié du caractère habituel de sa résidence depuis plus de dix années en France à la date de l'arrêté contesté, le préfet de police était tenu de saisir la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avant de pouvoir rejeter la demande dont il était saisi ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code du séjour des étrangers et du droit d'asile doit par suite être accueilli ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 novembre 2014 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant qu'il y a lieu, sous réserve que Me Boukhari Saou, conseil de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat de la somme de 1 000 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1504537/1-2 du 6 juillet 2015 du Tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du préfet de police du 27 novembre 2014 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Me Boukhari Saou, avocat de M.B..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Me Boukhari Saou, au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 11 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. David Dalle, président assesseur,
- M. Blanc, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 février 2016.
Le rapporteur,
P. BLANCLe président,
C. JARDINLe greffier,
C. BUOTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA03907