La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/02/2016 | FRANCE | N°15PA00300

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 23 février 2016, 15PA00300


Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2015, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par MeC... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1411272/6-1 du 5 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 3 juin 2014 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit fait injonction au préfet de lui délivrer un titre de séjour da

ns un délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de ret...

Vu la requête, enregistrée le 20 janvier 2015, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par MeC... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1411272/6-1 du 5 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 3 juin 2014 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit fait injonction au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. B...soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ;

- le préfet de police n'a pas saisi la commission du titre de séjour alors qu'il était tenu de le faire ;

- la décision méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- la décision est illégale par suite de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas suffisamment motivée ;

- la décision est illégale par suite de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2015, présenté par le préfet de police qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet de police soutient que les moyens de la requête de M. B...ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 31 janvier 2016, présenté pour M. B...par MeC..., par lequel il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2016, le rapport de Mme Julliard ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant ukrainien né le 11 mars 1967, est entré sur le territoire français le 28 août 2002 selon ses déclarations ; que l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a opposé un refus à sa demande d'asile par une décision du 16 février 2004, confirmée par la Commission de recours des réfugiés (CRR) le 3 décembre 2004 ; que, reçu le 26 mars 2014 par la préfecture de police, M. B...a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par une décision du 3 juin 2014, le préfet de police a opposé un refus à sa demande et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. B... relève appel du jugement du 5 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant que l'arrêté contesté, après avoir visé le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, énonce les motifs de fait pour lesquels le préfet de police estime que M. B...ne peut prétendre au bénéfice de ces dispositions, en relevant, notamment, que l'intéressé ne peut justifier d'une présence de dix années sur le territoire français, que son épouse fait l'objet d'une décision identique à la sienne, que ses enfants sont dépourvus de titre de séjour et que la cellule familiale peut se reconstituer à l'étranger ; que la décision de refus de titre de séjour comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il suit de là que le moyen tiré d'une motivation insuffisante de cette décision doit être écarté ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

4. Considérant que M. B... soutient résider sur le territoire depuis l'année 2002, avec son épouse et leur fils et qu'au regard de l'ancienneté de son séjour en France, il est porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, toutefois, les pièces qu'il produit, notamment au titre des années 2005 à 2007 insuffisamment nombreuses et probantes, ainsi que l'a relevé le tribunal, ne permettent pas d'établir la réalité de sa présence habituelle en France au cours de cette période ; qu'il ressort également des pièces du dossier que son épouse est également en situation irrégulière sur le territoire français ; qu'il n'apporte aucun élément attestant son intégration au sein de la société française et ne fait état d'aucun obstacle à la reconstitution de sa vie familiale avec son épouse et de son fils majeur dans leur pays d'origine ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le préfet de police n'a pas méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort, en outre, d'aucune pièce du dossier que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.B... ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

6. Considérant, d'une part, qu'eu égard à la situation personnelle de M. B... rappelée au point 4, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation en estimant qu'il ne faisait pas état d'un motif exceptionnel ou de considérations humanitaires justifiant une régularisation exceptionnelle, notamment en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, d'autre part, que les pièces produites par M. B... ne suffisant pas à établir qu'il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans à la date du refus de titre de séjour litigieux, comme il a également été exposé au point 4, le préfet de police n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de prendre sa décision en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de saisine de cette commission ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée par M. B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que, lorsque ce refus est lui-même motivé et que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été visées, comme en l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 2, la motivation de cette obligation doit être regardée comme suffisante et satisfait aux exigences prévues à l'avant-dernier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code précité ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision en cause sur la situation personnelle de M. B..., doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4 du présent arrêt ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, que la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée en droit et en fait par le visa des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par la mention portée dans ses motifs que l'intéressé n'établit pas être exposé à des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par l'indication qu'il est de nationalité ukrainienne et qu'il pourra être reconduit d'office à la frontière du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il établirait être légalement admissible ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté ;

12. Considérant que, pour les motifs précédemment exposés, M. B... n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination, de l'illégalité des décisions par lesquelles le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la décision portant fixation du pays de destination serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.B... ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 4 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 23 février 2016.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

5

N° 10PA03855

2

N° 15PA00300


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00300
Date de la décision : 23/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : DA COSTA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-23;15pa00300 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award