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17/02/2016 | FRANCE | N°14PA04562

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 17 février 2016, 14PA04562


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sada a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires qui lui ont été réclamés au titre des années 2008, 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1301730/3 du 8 septembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 novembre 2014 et 29 mai 2015, la société Sada, devenue société Pharcor, représe

ntée par Me G...D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sada a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires qui lui ont été réclamés au titre des années 2008, 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1301730/3 du 8 septembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 novembre 2014 et 29 mai 2015, la société Sada, devenue société Pharcor, représentée par Me G...D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 8 septembre 2014 ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les rémunérations versées aux dirigeants non salariés au sens du droit du travail et de la sécurité sociale ne sont pas soumises à la taxe sur les salaires ;

- il convient de tenir compte des dispositions de l'article 231 du code général des impôts dans leur rédaction postérieure à l'année d'imposition issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ;

- l'instruction 5 L-5-02 du 12 septembre 2002 précise que sont considérées comme des rémunérations en application de l'article 231 du code général des impôts toutes les sommes versées aux travailleurs salariés en contrepartie ou à l'occasion du travail ;

- la présomption d'affectation au secteur financier des rémunérations versées aux dirigeants de sociétés holding mixte est une présomption simple et non irréfragable ;

- l'instruction du 22 novembre 2011 (BOI 5-L-11, 30 novembre 2011), qui prévoit que l'entreprise peut apporter la preuve que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, est invocable ;

- la société Pharcor a renversé ladite présomption en apportant la preuve que seul

M. F...A...exerçait effectivement des fonctions relevant du secteur financier, dès lors que les deux autres dirigeants étaient seulement investis de fonctions de direction purement techniques ou opérationnelles ;

- s'agissant de l'assujettissement des salariés, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la preuve incombait à la société Pharcor ;

- il appartient à l'administration d'établir que les salariés dont les rémunérations ont été taxées étaient affectés au secteur financier ;

- les salariés en cause n'ont pas été affectés au secteur financier.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 février 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société Pharcor ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 novembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au

7 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public.

1. Considérant que la société anonyme Pharcor (anciennement société Sada), société holding qui, d'une part, réalisait des prestations de services au profit de ses filiales Biocodex et Phardex et, d'autre part, gérait les participations financières dans ses filiales à raison desquelles elle percevait des dividendes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service vérificateur l'a assujettie à la taxe sur les salaires au titre des années 2008 à 2010, en incluant dans l'assiette de cette taxe les rémunérations versées à son président-directeur général, à ses deux directeurs généraux délégués, à son responsable financier et à son comptable ; que la société Pharcor fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires qui lui ont été réclamés en conséquence au titre desdites années ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du Code de la sécurité sociale (...) à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée / (...) " ; que lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts au sens de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts alors en vigueur, la taxe sur les salaires doit être déterminée par secteur, en appliquant aux rémunérations des salariés affectés spécifiquement à chaque secteur le rapport d'assujettissement propre à ce secteur ; que, toutefois, la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ;

Sur l'assujettissement des rémunérations des dirigeants de la société Sada à la taxe sur les salaires :

3. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale alors en vigueur, figurant au chapitre Ier du titre IV du livre II, dispose : " Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 311-2 du Code de la sécurité sociale : " Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat " ; qu'aux termes de l'article L. 311-3 dudit code : " Sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2, même s'ils ne sont pas occupés dans l'établissement de l'employeur ou du chef d'entreprise, même s'ils possèdent tout ou partie de l'outillage nécessaire à leur travail et même s'ils sont rétribués en totalité ou en partie à l'aide de pourboires : / (...) 12°) Les présidents du conseil d'administration, les directeurs généraux(...) des sociétés anonymes et des sociétés d'exercice libéral à forme anonyme (...) " ;

4. Considérant que les présidents et directeurs généraux d'une société anonyme étant obligatoirement affiliés au régime général de la sécurité sociale en application des dispositions précitées des articles L. 311-2 et L. 311-3 du code de la sécurité sociale, les sommes qui leur sont versées par la société à raison de leurs fonctions sont réputées l'être au titre de rémunérations et sont soumises à cotisations sociales ; qu'elles entrent par conséquent dans l'assiette des cotisations sociales telle que définie par l'article L. 242-1 du même code, sans que puisse y faire obstacle la circonstance que leurs bénéficiaires sont des mandataires sociaux et non des salariés placés dans un lien de subordination avec la société ; que, dès lors, en dépit du fait que l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale n'est pas inclus dans les chapitres Ier et II du titre IV du livre II de ce code, auxquels l'article 231 du code général des impôts renvoie pour la seule détermination du montant des rémunérations, ces sommes sont au nombre des rémunérations qui, en application des dispositions de ce dernier article, doivent être prises en compte pour le calcul de la taxe sur les salaires ; que la société Pharcor ne conteste pas utilement cette prise en compte en se prévalant des dispositions de l'article 231 du code général des impôts dans leur rédaction postérieure à l'année d'imposition issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ou des règles applicables en matière de cotisations " Assedic " ; qu'enfin la société Pharcor ne saurait non plus se prévaloir d'une interprétation a contrario de l'instruction 5 L-5-02 du

12 septembre 2002, en tant qu'elle prévoit que sont considérées comme des rémunérations en application de l'article 231 du code général des impôts toutes les sommes versées aux travailleurs salariés en contrepartie ou à l'occasion du travail, pour faire obstacle à l'imposition en litige sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les fonctions de directeur général d'une société anonyme ou d'une société par actions simplifiée confèrent à leurs titulaires, en vertu de l'article L. 225-56 du code de commerce, les pouvoirs les plus étendus dans la direction de la société et que le président du conseil d'administration est investi, aux termes de l'article L. 225-51 du même code, d'une responsabilité générale ; que, s'agissant d'une société holding, ces pouvoirs s'étendent en principe au secteur financier, même si le suivi des activités est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés à ce secteur et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible ; que, toutefois, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires ;

6. Considérant que si la société Pharcor, qui admet que M. F... A...dirigeait le secteur financier de la société, fait valoir qu'il exerçait d'autres fonctions au sein des filiales Biocodex et Phardex et que son activité financière ne représentait qu'une faible part de son temps de travail au regard de l'ensemble de ses autres activités, une telle circonstance n'est pas de nature à établir que M. F...A..., qui avait la qualité de président-directeur général, était dépourvu de tout contrôle et responsabilité sur le secteur financier de la société Sada ; que par ailleurs, la société Pharcor fait valoir que MM. C...A...et H...E...n'avaient, au cours des années en cause, pas d'attribution dans le secteur financier ; qu'elle ne l'établit pas en invoquant les seules explications orales fournies à l'occasion des entretiens et recours hiérarchiques avec le service et en se bornant à produire un organigramme de la filiale Biocodex et des fiches descriptives des fonctions exercées par les dirigeants de la société Sada au sein de cette société et de ses filiales, documents n'ayant d'ailleurs aucune date certaine, une convention d'assistance entre la société Sada et sa filiale Biocodex, en date du 5 décembre 1989, qui désigne MM. F...et C...A...comme étant chargés des relations entre la société requérante et sa filiale dans les domaines de la direction générale, et qui ne fait pas apparaître que les dirigeants de la société Sada ainsi désignés auraient été privés de tout contrôle et responsabilité sur le secteur financier de la société requérante, et un procès-verbal de la séance du conseil d'administration qui s'est tenue le 11 avril 2012, dès lors que ce document n'a pas été établi antérieurement à la vérification de comptabilité et que, compte tenu de ce qui vient d'être dit, il n'est assorti d'aucun document juridique de nature à établir l'exactitude et l'antériorité des mentions de ce procès-verbal ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale a pu légalement inclure les rémunérations versées au titre des années 2008, 2009 et 2010 par la société requérante à MM. C...A...et M. E...dans le champ de la taxe sur les salaires et les imposer, pour chaque année d'imposition en litige, à proportion du rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ; qu'enfin la société Pharcor ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction du 22 novembre 2011, référencée 5 L-1-11 et publiée au bulletin officiel des impôts n° 82 du

30 novembre 2011, dès lors qu'elle est postérieure aux années d 'imposition en litige et qu'elle ne fait d'ailleurs pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui précède ;

Sur l'assujettissement des rémunérations des salariés de la société Sada à la taxe sur les salaires :

7. Considérant que la société Pharcor admet que M. I...avait une activité en matière financière ; que la circonstance que le temps consacré au secteur financier par l'intéressé, au regard de ses autres activités qui consistaient à suivre la comptabilité, la paie, l'audit et le contrôle de gestion pour toutes les sociétés du groupe, était très faible, ne saurait suffire à faire regarder M. I...comme n'ayant pas, même partiellement, été affecté au secteur financier ; qu'en l'absence de tout élément en sens contraire, MmeB..., qui était notamment chargée du traitement comptable des immobilisations et de la comptabilité de la filiale belge, ne peut être regardée comme n'ayant pas été partiellement affectée au secteur financier de l'entreprise ; que, faute de production par la société des contrats de travail des intéressés, les fiches de définition de fonction produites au dossier, établies postérieurement aux opérations de contrôle ne permettent pas de remettre en cause les constatations qui précèdent ; que dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'attribuer à la société requérante la charge d'une preuve qui résulte, en tout état de cause, de l'instruction, l'administration fiscale a pu légalement inclure les rémunérations versées au titre des années 2008, 2009 et 2010 par la société requérante à

M. I...et Mme B...dans le champ de la taxe sur les salaires et les imposer, pour chaque année d'imposition en litige, à proportion du rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Pharcor n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Pharcor est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Pharcor et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France Est.

Délibéré après l'audience du 3 février 2016, à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller,

Lu en audience publique le 17 février 2016.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

P. LIMMOIS

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA04562


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA04562
Date de la décision : 17/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : GUITTER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-17;14pa04562 ?
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