Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...D...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 23 avril 2013 par laquelle le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination d'un éventuel éloignement d'office, ainsi que la décision du 22 juillet 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours hiérarchique.
Par un jugement n° 1307994/10 du 3 novembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 février 2015, MmeD..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1307994/10 du 3 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du
23 avril 2013, ensemble la décision du ministre de l'intérieur du 22 juillet 2013 rejetant son recours hiérarchique ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :
- le préfet a entaché cet arrêté d'un vice de procédure, dès lors qu'il n'a pas saisi la commission du titre de séjour ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elle est la mère d'une petite fille née en 2011, qu'elle a ainsi constitué une cellule familiale en France et que son compagnon y est en situation régulière ; qu'elle est intégrée professionnellement sur le territoire français en ce qu'elle possède un contrat de travail à durée indéterminée ; qu'elle risque de subir des atteintes graves à son intégrité physique en cas de retour en République démocratique du Congo ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 alinéa 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle réside en France depuis 2007 et vit depuis lors avec son compagnon, ressortissant congolais en situation régulière et bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée ; qu'ils ont créé ensemble une cellule familiale sur le territoire français ; qu'elle établit l'ancienneté de leur vie commune ; qu'elle est intégrée au sein de la société française où se trouvent toutes ses attaches ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle a subi des violences et des menaces liées à son engagement au sein du mouvement de libération Congo-France et qu'elle est personnellement exposée à des risques en cas de retour en République démocratique du Congo en raison de ses activités militantes ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York des droits de l'enfant, dès lors que cette décision a pour conséquence de la séparer de son compagnon et de sa fille ; qu'elle établit la régularité du séjour de son compagnon sur le territoire français ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
- cette décision est illégale dès lors qu'elle se fonde sur la décision portant refus de titre de séjour elle-même illégale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu l'arrêt n° 15PA00712 du 9 mars 2015, par lequel par le président de la Cour administrative d'appel de Paris, saisi d'un recours de MmeD..., a réformé la décision n° 2014/056781 du 16 janvier 2015 du bureau d'aide juridictionnelle de Paris n'accordant à celle-ci que l'aide juridictionnelle partielle, au taux de 25 %, et lui a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 70 %.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 18 mai 2015, la présente affaire a été dispensée d'instruction sur le fondement de l'article R. 611-8 du code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme Appèche a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeD..., née le 17 juillet 1972 à Kinshasa en République démocratique du Congo, pays dont elle a la nationalité, est entrée en France, selon ses déclarations, le 30 juin 2007, afin de solliciter l'asile ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande par une décision du 22 novembre 2007 ; qu'elle a dès lors déposé une demande de titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" auprès de la préfecture du Val de Marne ; que, par un arrêté du 23 avril 2013, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande, lui a enjoint de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la notification de cette décision et a fixé le pays de sa destination, en cas d'éloignement d'office passé ce délai ; que, par une décision du
22 juillet 2013, le ministre de l'intérieur a rejeté le recours hiérarchique de l'intéressée dirigé contre cet arrêté ; que Mme D...relève régulièrement appel du jugement
n° 1307994/10 du 3 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
2. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ;
3. Considérant que Mme D...fait valoir qu'elle réside en France depuis 2007, qu'elle vit depuis lors avec son compagnon, compatriote congolais en situation régulière et bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée, que de leur union est née une petite fille le 5 mars 2011, qu'elle établit l'ancienneté de leur vie commune et qu'elle est parfaitement intégrée au sein de la société française où se trouvent toutes ses attaches ; qu'il ressort néanmoins des pièces du dossier que l'intéressée ne parvient pas à démontrer une résidence stable et régulière depuis 2007, date à laquelle elle est entrée irrégulièrement sur le territoire français ; qu'elle n'établit pas que sa fille, par ailleurs non scolarisée, ne pourrait pas la suivre dans son pays, la République démocratique du Congo, où la requérante a d'ailleurs vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans ; qu'elle ne parvient pas à prouver la régularité de la situation de son compagnon, dès lors qu'elle ne produit qu'un récépissé de demande de carte de séjour et que le préfet du Val-de-Marne a mentionné, dans la décision attaquée, que
M. C...séjournait irrégulièrement sur le territoire français ; qu'en outre, elle n'établit pas l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale en République démocratique du Congo ; que, par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que cependant, et en tout état de cause, il ressort notamment des pièces du dossier que rien ne s'oppose à ce que la vie familiale du couple et du jeune enfant se poursuive en République démocratique du Congo; que la décision en litige n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
5. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour, laquelle n'impose pas, par elle-même, à Mme D...de retourner dans son pays ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l' autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que Mme D...ne remplissant pas les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale", la commission n'avait pas à être saisie ;
7. Considérant que, si Mme D...fait valoir que le préfet a entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et familiale, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 ci-dessus que ce moyen doit être écarté comme non fondé ;
8. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée par
Mme D...à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écartée ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles
L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président,
- Mme Appèche, président assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 février 2016.
Le rapporteur,
S APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00865