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19/01/2016 | FRANCE | N°13PA03128

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 19 janvier 2016, 13PA03128


Vu procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Union pour la publicité extérieure a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler partiellement l'arrêté du 7 juillet 2011 par lequel le maire de Paris a publié un nouveau règlement de la publicité, des enseignes et des pré-enseignes à Paris et les décisions implicites de rejet, nées du silence gardé par le maire de Paris sur ses demandes datées des 10 novembre 2011 et 14 février 2012, d'abrogation partielle de ce règlement.

Par un jugement n° 1204409/7-3 du 20 juin 2013, le tribuna

l administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une ...

Vu procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Union pour la publicité extérieure a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler partiellement l'arrêté du 7 juillet 2011 par lequel le maire de Paris a publié un nouveau règlement de la publicité, des enseignes et des pré-enseignes à Paris et les décisions implicites de rejet, nées du silence gardé par le maire de Paris sur ses demandes datées des 10 novembre 2011 et 14 février 2012, d'abrogation partielle de ce règlement.

Par un jugement n° 1204409/7-3 du 20 juin 2013, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 août 2013, et des mémoires, enregistrés les

9 octobre 2013, 12 mars 2014, 13 juin 2014, 9 janvier 2015 et 11 décembre 2015, l'Union pour la publicité extérieure, représentée par la SCP D...Fattacini, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204409/7-3 du 20 juin 2013 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2011 édictant le nouveau règlement de publicité, des enseignes et pré-enseignes à Paris ;

3°) d'annuler les décisions implicites nées du silence gardé par le maire de Paris sur ses demandes d'abrogation partielle de ce règlement, datées des 10 novembre 2011 et

14 février 2012 ;

4°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce que le rejet de son moyen tiré de ce que l'article P 4.1.1 du règlement aboutissait à l'interdiction de toute publicité numérique n'est pas motivé ; de même le jugement est insuffisamment motivé au regard de son argumentation concernant les bâches sur échafaudages, qui faisait état notamment du décret du

30 janvier 2012 ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur de qualification juridique des faits en estimant justifiées les restrictions excessives apportées à la taille de l'affichage publicitaire sur les échafaudages ; l'article P 2.3.3.2 du règlement local de publicité porte une atteinte excessive aux principes de la liberté du commerce et de l'industrie et de la liberté de la publicité et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de l'évolution du droit, et notamment de la publication du décret du 30 janvier 2012 et la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-282 QPC ; il est entaché d'erreur de droit en tant qu'il réglemente un dispositif que l'article L. 581-9 du code de l'environnement soumet à autorisation préalable " au cas par cas ", ou, dès lors que le règlement a été adopté en application de l'article 39 de la loi du 12 juillet 2010, en tant qu'il réglemente et soumet à autorisation un dispositif qui n'était pas visé par la loi antérieure ; il est entaché de détournement de pouvoir car il fait obstacle à la loi en rendant impossible l'installation de dispositifs publicitaires de grand format ; il induit en outre une discrimination injustifiée entre les bâches de chantier publicitaires et les bâches de chantier enseignes, outre celle résultant de l'article L. 621-29-8 du code du patrimoine au bénéfice des monuments historiques ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en estimant que l'article L. 581-9 du code de l'environnement, qui institue une autorisation au cas par cas pour la publicité lumineuse, n'empêchait pas le règlement de procéder à une interdiction générale des écrans et donc de toute publicité numérique ; les mesures concernant la publicité lumineuse et notamment l'interdiction de toute publicité numérique sont disproportionnées ;

- la publicité sur les véhicules non équipés à des fins essentiellement publicitaires, notamment les véhicules de transport en commun, ne fait pas l'objet d'une réglementation nationale et n'entre donc pas dans le champ d'application du code de l'environnement ; elle ne peut faire l'objet d'une réglementation municipale.

Par un premier mémoire en intervention volontaire, enregistré le 28 octobre 2013 et présenté par l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS), la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) et le Syndicat national des professionnels de l'immobilier (SNPI), un second mémoire en intervention volontaire, enregistré le 31 mars 2014 et présenté par l'Union nationale de la propriété immobilière de Paris (UNPI Paris), la chambre FNAIM du Grand Paris et le syndicat des copropriétaires du 7/9 place des Ternes, et un mémoire complémentaire commun enregistré le 25 septembre 2014, ces sept intervenants, représentés par la SCP Boré et Salve de Bruneton, demandent à la Cour :

1°) de faire droit aux conclusions de la requête de l'Union pour la publicité extérieure et d'annuler le jugement attaqué, l'arrêté du 7 juillet 2011 et les décisions implicites de rejet ;

2°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 5 000 euros à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à intervenir au soutien de la contestation des dispositions litigieuses ;

- le jugement est insuffisamment motivé quant au rejet du moyen relatif aux bâches publicitaires de chantier ;

- l'arrêté litigieux a été pris au terme d'une procédure irrégulière et est entaché d'incompétence ;

- l'interdiction a priori des bâches de chantier de plus de 16 m² remet en cause le système d'autorisation au cas par cas de ces installations institué par la loi ;

- la restriction supplémentaire apportée à l'usage des bâches de chantier est disproportionnée, alors que les dispositions nationales réglementent déjà de manière drastique cet usage ; cette restriction n'est pas justifiée par l'objectif de protection du cadre de vie ; elle porte une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie et à la propriété privée car elle équivaut à une interdiction absolue, les annonceurs n'étant pas intéressés par une publicité d'aussi petite dimension ;

- le règlement en litige crée une rupture d'égalité entre les propriétaires de monuments historiques et les propriétaires d'immeubles non protégés car les bâches de chantier sont autorisées sans restriction de taille sur les monuments historiques ; cette rupture d'égalité n'est pas justifiée par l'objectif de protection du cadre de vie mais par celui de réserver l'avantage financier que constitue la possibilité d'apposer une bâche d'échafaudage publicitaire aux propriétaires de monuments classés ; il y a détournement de pouvoir ;

- le règlement crée également une rupture d'égalité injustifiée entre chantiers de rénovation ordinaires et les bâches apposées à titre d'" enseignes " lors de la rénovation de bâtiments dans lesquels est exercée une activité ;

- l'interdiction de toute publicité de plus de 16 m² sur les bâches de chantier, temporaires, n'est pas justifiée quand les dimensions des bâches publicitaires apposées sur les murs aveugles ne sont réglementées que par le règlement national et peuvent rester en place durant huit ans.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2014, la ville de Paris, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'UPE la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car tardive en tant qu'elle demande l'annulation de l'arrêté ;

- la demande d'abrogation du 10 novembre 2011 portait sur des dispositions qui ne sont plus contestées ; la demande d'annulation de son rejet implicite ne peut qu'être rejetée ;

- les premiers juges n'ont pas omis de répondre au moyen sur la publicité numérique dans la mesure où les publicités numériques ne sont qu'une forme de publicité lumineuse ;

- l'argumentation fondée sur le décret du 30 janvier 2012, qui n'était pas entré en vigueur au moment des décisions litigieuses, étant inopérante, les premiers juges n'étaient pas tenus d'y répondre ;

- la requérante confond les bâches de chantier et les bâches publicitaires, qui ne sont pas visées par l'article P 2.3.3.2 du règlement local de publicité ;

- les dimensions maximales fixées pour les bâches de chantiers sont supérieures à celles autorisées pour la plupart des autres supports publicitaires ; les restrictions apportées par le règlement sont justifiées par la protection du cadre de vie ;

- la différence de régime entre les bâches de chantiers publicitaires et les bâches de chantier enseignes est justifiée par la différence de situation ; de même la distinction opérée entre les immeubles classés monuments historiques et les autres bâtiments est justifiée par l'intérêt général ;

- la jurisprudence ne censure pas, par principe, l'interdiction d'un type de dispositif publicitaire ; la publicité numérique cumule tous les types de nuisances ce qui justifie sa limitation drastique ; son interdiction à Paris n'est pas absolue puisqu'un signe découpé, admis en toiture terrasse, peut fonctionner selon un mode d'affichage numérique ;

- la ville était fondée à réglementer la publicité sur les véhicules terrestres qui ne sont pas équipés à des fins essentiellement publicitaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code du patrimoine ;

- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, et notamment son article 39 ;

- le décret n° 2012- du 30 janvier 2012, et notamment son article 17 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 17 décembre 2015 :

- le rapport de M. Gouès,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- les observations de Me D...pour l'UPE, de Me A...E...pour l'UNPI et les autres intervenants et de Me B...pour la ville de Paris.

Une note en délibéré présentée par Me D...pour l'Union pour la publicité extérieure a été enregistrée le 17 décembre 2015.

1. Considérant que l'Union pour la publicité extérieure a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les articles P 1.3.2, P 2.3.3.2, P 4.1.1 et P 5.2 du nouveau règlement de la publicité, des enseignes et des pré-enseignes à Paris instauré par arrêté municipal du 7 juillet 2011 et les décisions implicites nées du silence gardé par le maire de Paris sur ses demandes d'abrogation partielle de ce règlement datées des 10 novembre 2011 et

14 février 2012, reçues les 12 novembre 2011 et 16 février 2012 ; qu'elle relève appel du jugement du 20 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les interventions :

2. Considérant que l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS), la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), le Syndicat national des professionnels de l'immobilier (SNPI), l'Union nationale de la propriété immobilière de Paris (UNPI Paris), la chambre FNAIM du Grand Paris et le syndicat des copropriétaires du 7/9 place des Ternes ont intérêt à l'annulation du jugement attaqué ; qu'ainsi leur intervention est recevable ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que l'Union pour la publicité extérieure soutient que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en tant qu'il n'a pas répondu au moyen selon lequel la " publicité numérique " serait interdite sur le territoire de la ville de Paris ; que, toutefois, les premiers juges ont répondu, au point 6 de leur jugement, à l'argumentation de l'UPE relative aux restrictions selon elle excessives apportées par l'article P 4.1.1 du règlement local de publicité à la " publicité lumineuse ", dont la " publicité numérique " ne constitue qu'une forme particulière, qui n'est pas visée en tant que telle par le règlement local litigieux ; qu'eu égard à l'argumentation de première instance, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement sur ce point ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, que l'UPE fait valoir que le jugement ne répond pas au moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré de ce que, depuis l'entrée en vigueur du décret du 30 janvier 2012 réglementant les bâches publicitaires apposées sur les échafaudages, les dispositions du nouveau règlement local de publicité de la ville de Paris étaient devenues trop restrictives ; que, toutefois, ce décret n'est entré en vigueur que le 1er juillet 2012, postérieurement à la décision de refus d'abrogation litigieuse, et le moyen était ainsi inopérant ; que, par conséquent, les premiers juges n'étaient pas tenus d'y répondre ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation sur ce point du jugement attaqué ne peut également qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de la demande d'annulation partielle du règlement local de publicité ;

En ce qui concerne la légalité externe :

5. Considérant que par une délibération du 10 juillet 2009, le conseil municipal de Paris a demandé au préfet de lancer une procédure de modification du règlement municipal sur la publicité et les enseignes alors en vigueur ; que conformément aux dispositions de l'article 39 de la loi du 12 juillet 2010, l'élaboration du nouveau règlement local de publicité s'est poursuivie selon le régime en vigueur avant cette publication et s'est conclue par l'approbation du projet de règlement par la délibération 2011 DU 64 des 20 et 21 juin 2011 du conseil municipal de Paris ; que le nouveau règlement a été instauré par arrêté du 7 juillet 2011 du maire de Paris, publié au bulletin municipal officiel de la ville le 11 juillet 2011 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 581-14 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - La délimitation des zones de publicité autorisée, des zones de publicité restreinte ou des zones de publicité élargie, ainsi que les prescriptions qui s'y appliquent, sont établies à la demande du conseil municipal. / Le projet de réglementation spéciale est préparé par un groupe de travail dont la composition est fixée par arrêté préfectoral. (...) Le projet établi par le groupe de travail et qui a recueilli l'avis favorable de la commission départementale compétente en matière de sites est arrêté par le maire après délibération du conseil municipal (...) " ;

7. Considérant que le nouveau règlement local de publicité a reçu l'avis favorable de la commission départementale compétente en matière de sites et approuvé par délibération du conseil municipal ; que l'arrêté du 7 juillet 2011 qui l'édicte a été signé, conformément aux dispositions précitées, par M.C..., maire de Paris ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

8. Considérant que le moyen invoqué par les intervenants et tiré de ce que le règlement aurait été adopté au terme d'une procédure irrégulière n'est assorti d'aucune précision permettant d'en examiner le bien-fondé ;

En ce qui concerne la légalité interne :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 581-9 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable à compter du 14 juillet 2010 : " Dans les agglomérations, et sous réserve des dispositions des articles L. 581-4 et L. 581-8, la publicité est admise. Elle doit toutefois satisfaire, notamment en matière d'emplacements, de densité, de surface, de hauteur, d'entretien et, pour la publicité lumineuse, d'économies d'énergie et de prévention des nuisances lumineuses au sens du chapitre III du présent titre, à des prescriptions fixées par décret en Conseil d'Etat en fonction des procédés, des dispositifs utilisés, des caractéristiques des supports et de l'importance des agglomérations concernées (...) " ; que les dispositions de l'actuel article L. 581-14, comme celles des articles L. 581-10 et L. 581-11 applicables antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 12 juillet 2010, permettent au règlement local de publicité de définir une ou plusieurs zones où s'applique une réglementation plus restrictive que les prescriptions du règlement national ; que ces dispositions confèrent aux autorités locales, en vue de la protection du cadre de vie et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, un large pouvoir de réglementation de l'affichage, qui leur permet notamment d'interdire dans ces zones toute publicité ou certaines catégories de publicité en fonction des procédés ou des dispositifs utilisés ; qu'il leur appartient cependant d'exercer ce pouvoir de police dans le respect du principe d'égalité et sans porter une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie et à la concurrence, ainsi qu'à la liberté de l'affichage et la publicité ;

S'agissant de l'article P 1.3.2 du règlement local de publicité et le rejet de la demande d'abrogation du 10 novembre 2011 :

10. Considérant que l'Union pour la publicité extérieure qui avait expressément abandonné en première instance ses conclusions relatives à l'article P 1.3.2 du règlement local de publicité, seul concerné par la demande d'abrogation du 10 novembre 2011, persiste à demander en appel l'annulation de la décision implicite de rejet née sur cette demande ; qu'elle ne formule cependant aucun moyen à l'appui de cette conclusion ; qu'ainsi elle ne peut qu'être rejetée ;

S'agissant de l'article P 2.3.3.2 du règlement local de publicité relatif aux publicités sur les échafaudages de chantier :

11. Considérant, d'une part, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 581-9 du code de l'environnement, applicable à compter du 14 juillet 2010 : " Peuvent être autorisés par arrêté municipal, au cas par cas, les emplacements de bâches comportant de la publicité et, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites, l'installation de dispositifs publicitaires de dimensions exceptionnelles liés à des manifestations temporaires. Les conditions d'application du présent alinéa sont déterminées par le décret mentionné au premier alinéa " ; que le décret n° 2012-118 du 30 janvier 2012 a édicté, aux articles R. 581-53 du code de l'environnement, des dispositions réglementaires applicables aux bâches et dispositifs de grand format, limitant par exemple la surface d'affichage à 50% de la surface totale de la bâche ;

12. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article P 2.3.3.2 du règlement local de publicité : " Les publicités sur les échafaudages de chantier ne peuvent excéder 16 m² de surface ni s'élever à plus de 7,50 mètres au dessus du niveau du sol " ;

13. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'article L. 581-9 du code de l'environnement prévoit que les emplacements de bâches comportant de la publicité sont autorisés par arrêté municipal " au cas par cas " ne prive pas la ville de Paris de son pouvoir de réglementer, dans le cadre des pouvoirs qu'elle tient des textes rappelés au point 9 ci-dessus, la dimension des publicités que ces bâches supportent, et ce avant même l'édiction, par décret du 30 janvier 2012, de règles nationales ; que la limitation, au sein d'une composition couvrant la totalité de la bâche, de la taille du message publicitaire, n'enlève pas à une telle bâche la qualité de dispositif de grande dimension visé par la loi ; que l'entrée en vigueur du décret du

30 janvier 2012 réglementant, au niveau national, ce type de publicité est, contrairement à ce que la requérante soutient, postérieure au rejet implicite de sa demande d'abrogation et n'imposait pas en tout état de cause à la ville de modifier les règles locales, qui sont plus restrictives ; que si la requérante, dans son mémoire du 11 décembre 2015, fait valoir que le règlement serait illégal pour avoir soumis à autorisation préalable l'installation des bâches de chantier alors qu'une telle autorisation au cas par cas n'était pas prévue par la législation, applicable à la procédure d'élaboration du règlement parisien, antérieure à la loi du 12 juillet 2010, tel n'est pas en tout état de cause l'objet des dispositions, seules critiquées devant les premiers juges, de l'article P 2.3.3.2 du règlement local ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que les publicités sur bâches d'échafaudage ont, du fait de la grande dimension de la toile sur laquelle elle s'inscrivent et du positionnement de

celle-ci le long des immeubles, un impact visuel très fort dans le paysage urbain et peuvent rester en place, selon les dispositions de l'article P 2.3.3.3 du règlement local pendant une durée pouvant aller jusqu'à deux ans ; que la limitation des dimensions et de la hauteur maximale des messages publicitaires supportés par les bâches de chantier est ainsi justifiée par la protection du cadre de vie, sans que les requérante et intervenants puissent utilement soutenir qu'une bâche publicitaire serait plus harmonieuse qu'une bâche non publicitaire ou qu'elle contribue à l'amélioration du cadre de vie en facilitant le financement des ravalements ; qu'ainsi il ne ressort pas des pièces du dossier que les prescriptions du règlement de publicité relatives aux bâches d'échafaudage seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

15. Considérant, en troisième lieu, que la requérante et les intervenants soutiennent que les prescriptions litigieuses du règlement municipal sont si contraignantes que l'installation de bâches d'échafaudage publicitaires ne pourrait être économiquement viable ; qu'à supposer même cette circonstance établie, l'impossibilité de fait de recourir à ce type de publicité à Paris ne porterait pas, compte tenu de l'objectif de protection du cadre de vie poursuivi, une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie, à la liberté de la publicité et de l'affichage ou au droit de propriété ;

16. Considérant, en quatrième lieu, que l'Union pour la publicité extérieure et les intervenants soutiennent que le règlement local de publicité crée une discrimination injustifiée dès lors que les restrictions qu'elles contestent ne s'appliqueraient pas aux bâches de chantier assimilables à des " enseignes " lorsque ces bâches sont apposées sur un immeuble accueillant une activité, durant les travaux de réhabilitation de ce bâtiment ; qu'à supposer que les dispositions de l'article E 3.2.3 du règlement local de publicité autorisent, lorsque l'enseigne temporaire est constituée par une bâche, une dérogation aux limites de taille et de hauteur prévues par l'article E 3.1.3 du même règlement, la différence de traitement avec les dispositifs de publicité visés par l'article P 2.3.3.2 est justifiée par la différence de nature entre une bâche enseigne, qui impose un lien entre la publicité apposée sur la bâche et la destination de l'immeuble concerné et qui présente l'utilité d'identifier l'immeuble pendant la durée des travaux, et une bâche publicitaire, qui supporte tout type de publicité et n'est pas destinée à informer sur l'activité exercée dans l'immeuble ; qu'ainsi une telle différence de traitement, justifiée par une différence de situation, n'est pas illégale ;

17. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que l'article L. 621-29-8 du code du patrimoine dispose : " Par dérogation à l'article L. 581-2 du code de l'environnement, dans le cadre de l'instruction des demandes d'autorisation de travaux sur les immeubles classés ou des demandes d'accord de travaux sur les immeubles inscrits, l'autorité administrative chargée des monuments historiques peut autoriser l'installation de bâches d'échafaudage comportant un espace dédié à l'affichage. / Les recettes perçues par le propriétaire du monument pour cet affichage sont affectées par le maître d'ouvrage au financement des travaux (...) " ; que l'article R. 621-90 du même code qui réglemente les conditions de délivrance de cette autorisation " au vu de la compatibilité du contenu de l'affichage, de son volume et de son graphisme avec le caractère historique et artistique du monument et de son environnement ", prescrit seulement, en ce qui concerne la surface maximale dévolue à l'affichage, qu'elle ne peut excéder 50 % de la surface totale de la bâche ;

18. Considérant que si l'article P 2.3.3 du règlement local de publicité ne s'applique pas aux autorisations délivrées par le préfet de région en application de l'article L. 621-29-8 du code du patrimoine, cette différence de situation a été voulue par le législateur qui a prévu par les dispositions précitées de l'article L. 621-29-8 du code du patrimoine que l'affichage sur les bâches d'échafaudage lors des travaux de restauration des monuments historiques ne serait pas régi par le code de l'environnement mais par le seul code du patrimoine ; que si la requérante soutient qu'en soumettant l'affichage sur les immeubles qui ne sont pas régis par la loi sur les monuments historiques à des conditions de dimension plus sévères que celles prévues pour les monuments historiques par le code du patrimoine, la ville de Paris a créé une discrimination illégale au détriment des premiers, il est constant que les propriétaires de monuments historiques ne se trouvent pas, tant en ce qui concerne l'autorisation, la surveillance que le coût des travaux de rénovation de ces bâtiments, dans la même situation que les propriétaires d'immeubles non protégés ; que d'ailleurs les dispositions du code du patrimoine ne créent au profit des propriétaires de monuments historiques, sur laquelle toute publicité est en principe interdite, aucun droit à se voir délivrer l'autorisation de bâche publicitaire qu'elles prévoient ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du règlement local de publicité créeraient une discrimination illégale au détriment des propriétaires d'immeubles non protégés doit être écarté ; que le détournement de pouvoir invoqué n'est pas établi ;

S'agissant de l'article P 4.1.1 du règlement local de publicité relatif à la publicité lumineuse :

19. Considérant, d'une part, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 581-9 du code de l'environnement issu de la loi du 10 juillet 2010 : " L'installation des dispositifs de publicité lumineuse autres que ceux qui supportent des affiches éclairées par projection ou par transparence est soumise à l'autorisation de l'autorité compétente " ; que le décret du

30 janvier 2012 a prévu, aux articles R. 581-15 et R. 581-34 à R. 581-41 du code de l'urbanisme, de nouvelles règles concernant la publicité lumineuse ;

20. Considérant, d'autre part, que l'article P 4.1.1 du règlement local de publicité, qui s'applique dans les zones de publicité restreinte A et B qui couvrent la plus grande partie du territoire parisien, prévoit : " (...) La publicité lumineuse, notamment les écrans, est interdite à l'exception des dispositifs publicitaires installés sur les toitures-terrasses. La publicité clignotante, défilante, animée ou à luminosité variable est interdite " ; que le lexique annexé au règlement précise que les dispositifs publicitaires ne supportant que des affiches éclairées par projection ou transparence ne sont pas considérés comme de la publicité lumineuse ; qu'enfin l'article 4.2.3 du règlement limite les dispositifs publicitaires lumineux installés sur les

toitures-terrasses à " des lettres ou des signes découpés fixés notamment par leur base et équipés d'une source lumineuse ", en excluant qu'ils comportent " un panneau de fond autre que celui strictement nécessaire à la dissimulation des fixations ", panneau qui ne peut excéder cinquante centimètres de hauteur et doit être d'une couleur déterminée par celle de la toiture terrasse ;

21. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'article L. 581-9 du code de l'environnement soumet à autorisation préalable l'installation de tous les dispositifs de publicité lumineuse autres que affiches éclairées par projection ou transparence ne prive pas l'autorité compétente de la faculté de réglementer localement l'implantation et les caractéristiques de ces dispositifs afin d'assurer la protection du cadre de vie ; que cette possibilité de réglementer peut aller jusqu'à l'interdiction de certains types de dispositifs ;

22. Considérant, en deuxième lieu, que si la disposition litigieuse du règlement local de publicité interdit, de fait, le développement de la publicité numérique à Paris, une telle restriction n'apparaît pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la nécessité de lutter contre la dégradation des paysages urbains et les nuisances ; qu'elle ne porte pas à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté de la publicité et de l'affichage une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ;

S'agissant de l'article P 5.2 du règlement local de publicité relatif à la publicité sur les véhicules :

23. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 581-15 du code de l'environnement : " La publicité sur les véhicules terrestres, sur l'eau ou dans les airs peut être réglementée, subordonnée à autorisation ou interdite, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / Toutefois, les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables à la publicité relative à l'activité exercée par le propriétaire ou l'usager d'un véhicule, sous réserve que ce véhicule ne soit pas utilisé ou équipé à des fins essentiellement publicitaires " ; que l'article R. 581-49 du même code en vigueur à la date des décisions attaquées ne réglementait que la publicité sur les véhicules terrestres utilisés ou équipés aux fins essentiellement de servir de support à de la publicité ou à des pré-enseignes, alors que l'article R. 581-48 modifié par décret du 30 janvier 2012, entré en vigueur le 1er juillet 2012, prévoit en outre dans son dernier alinéa l'interdiction de la publicité lumineuse sur tous les véhicules terrestres ;

24. Considérant, d'autre part, que l'article P 5.2 du règlement local de publicité litigieux réglemente à Paris la publicité sur les " véhicules terrestres non équipés ou non utilisés à des fins essentiellement publicitaires ", en limitant la surface pouvant être affectée à la publicité à 16 m² pour les véhicules de transport public et 2 m² pour les autres véhicules, en interdisant le recouvrement des vitres des véhicules par un film adhésif, tout type de publicité lumineuse et la publicité en volume, enfin en interdisant aux véhicules supportant de la publicité de séjourner en zone de publicité interdite, en zone de publicité restreinte D et sur les ponts ;

25. Considérant que l'Union pour la publicité extérieure soutient que dans la mesure où le décret prévu à l'article L. 581-15 du code de l'environnement ne réglementait pas la publicité sur les véhicules non spécialement équipés, la ville de Paris ne pouvait se doter de dispositions les concernant ; que, toutefois, il résulte des dispositions combinées des articles L. 581-9,

L. 581-14 et L. 581-15 du code de l'environnement que la ville de Paris était compétente, même en l'absence, à la date des décisions attaquées, de dispositions réglementaires nationales concernant les véhicules non spécialement équipés, pour fixer comme elle l'a fait par les dispositions litigieuses des mesures plus restrictives que celles résultant de la loi, dans la mesure où il s'agit de mesures concernant l'emplacement, la surface, le matériau ou le support de la publicité et que ces mesures ne méconnaissent ni les dispositions précitées de l'article L. 581-15 du code de l'environnement ni celles de l'article R. 581-48 alors en vigueur ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

26. Considérant que si l'Union pour la publicité extérieure fait également valoir qu'en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 581-15 du code de l'environnement, la publicité relative à l'activité exercée par le propriétaire ou l'usager d'un véhicule ne peut être réglementée, il ne ressort pas des dispositions du règlement de la ville de Paris qu'il aurait entendu réglementer ce type de publicité, hormis dans le cas, prévu par la loi, où un tel véhicule serait détourné de son usage normal à des fins publicitaires ;

27. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'Union pour la publicité extérieure n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

28. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la ville de Paris, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que l'Union pour la publicité extérieure demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

29. Considérant que l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS), la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), le Syndicat national des professionnels de l'immobilier (SNPI), l'Union nationale de la propriété immobilière de Paris (UNPI Paris), la chambre FNAIM du Grand Paris et le syndicat des copropriétaires du 7/9 place des Ternes, intervenants volontaires, n'étant pas parties à la présente instance, les dispositions précitées font obstacle à ce qu'une condamnation soit prononcée à leur profit au titre des frais exposés pour leur intervention ;

30. Considérant qu'en revanche il y a lieu de mettre à la charge de l'Union pour la publicité extérieure une somme de 1 500 euros à verser à la ville de Paris sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), de l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS), de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), du Syndicat national des professionnels de l'immobilier (SNPI), de l'Union nationale de la propriété immobilière de Paris (UNPI Paris), de la chambre FNAIM du Grand Paris et du syndicat des copropriétaires du 7/9 place des Ternes est admise.

Article 2 : La requête de l'Union pour la publicité extérieure (UPE) est rejetée.

Article 3 : Il est mis à la charge de l'Union pour la publicité extérieure la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), de l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS), de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), du Syndicat national des professionnels de l'immobilier (SNPI), de l'Union nationale de la propriété immobilière de Paris (UNPI Paris), de la chambre FNAIM du Grand Paris et du syndicat des copropriétaires du 7/9 place des Ternes tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union pour la publicité extérieure, à la ville de Paris, à l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI), à l'Union des syndicats de l'immobilier (UNIS), à la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), au Syndicat national des professionnels de l'immobilier (SNPI), à l'Union nationale de la propriété immobilière de Paris (UNPI Paris), à la chambre FNAIM du Grand Paris et au syndicat des copropriétaires du 7/9 place des Ternes.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2015, où siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- M. Gouès, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 janvier 2016.

Le rapporteur,

S. GOUESLa présidente,

S. PELLISSIER

Le greffier,

F. TROUYET

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA03128


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13PA03128
Date de la décision : 19/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Serge GOUES
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; SCP GATINEAU - FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-01-19;13pa03128 ?
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