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31/12/2015 | FRANCE | N°14PA00135

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 31 décembre 2015, 14PA00135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société CELID a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 10 novembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail a déclaré M. A...B...inapte à tous postes dans l'entreprise ainsi que la décision par laquelle le ministre du travail a implicitement rejeté son recours hiérarchique contre ladite décision.

Par un jugement n° 1208204/3-2 du 6 novembre 2013, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et

un mémoire, enregistrés le 14 janvier et le 3 juin 2014, la société CELID, dont le siège est 2 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société CELID a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 10 novembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail a déclaré M. A...B...inapte à tous postes dans l'entreprise ainsi que la décision par laquelle le ministre du travail a implicitement rejeté son recours hiérarchique contre ladite décision.

Par un jugement n° 1208204/3-2 du 6 novembre 2013, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 janvier et le 3 juin 2014, la société CELID, dont le siège est 2 bis rue Dupont de l'Eure à Paris (75020), représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1208204/3-2 du 6 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 novembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail a déclaré M. B...inapte à tous postes dans l'entreprise ainsi que la décision par laquelle le ministre du travail a implicitement rejeté son recours hiérarchique contre ladite décision ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions.

Elle soutient que :

- l'avis du médecin du travail du 7 décembre 2010 a été émis dans des conditions irrégulières, cet avis n'ayant pas été notifié à l'entreprise et M. B...ayant lui-même saisi la médecine du travail afin d'être déclaré inapte et s'étant prévalu de la qualité de " responsable technique - couvreur " alors qu'il était salarié de la société CELID en qualité de responsable technique ;

- l'inspecteur du travail a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en retenant comme seul motif d'inaptitude définitive à tous postes dans l'entreprise l'état de santé de M. B...consécutif à son accident de travail et des séquelles qui en ont résulté ; que l'intéressé ne peut reprendre son poste pour une raison étrangère à son accident du travail, à savoir sa maladie.

La requête a été communiquée à M. B...et au ministre du travail qui n'ont pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Polizzi,

- et les conclusions de M. Roussel, rapporteur public.

1. Considérant que M. A...B..., salarié de la société CELID en qualité de responsable technique depuis le 2 novembre 2000, a été victime d'un accident de travail le 31 août 2009 dont le caractère professionnel a été reconnu ; qu'à la suite d'une visite médicale, le 7 décembre 2010, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude du salarié à son poste de travail au sein de l'entreprise en raison du danger immédiat pour sa santé ; que, le 22 juillet 2011, la société CELID a contesté cet avis d'inaptitude auprès de l'inspection du travail ; qu'après avoir recueilli l'avis du médecin inspecteur régional du travail émis le 22 septembre 2011, l'inspecteur du travail a, par une décision du 10 novembre 2011, déclaré M. B...inapte définitivement à tous postes dans l'entreprise ; que la société CELID a, le 10 janvier 2012, formé un recours hiérarchique auprès du ministre du travail contre cette décision ; que le ministre n'ayant pas statué sur cette demande dans un délai de quatre mois, une décision implicite de rejet est née le 4 mai 2012 ; que la société CELID demande à la Cour l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête dirigée à l'encontre de ces deux décisions et l'annulation de celles-ci ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 4624-1 du code du travail : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. / L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. " ; qu'aux termes de l'article R. 4624-18 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Tout salarié bénéficie d'un examen médical à la demande de l'employeur ou à sa demande. La demande du salarié ne peut motiver aucune sanction. " ; qu'aux termes de l'article R. 4624-31 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail qu'après avoir réalisé : / 1° Une étude de ce poste ; 2° Une étude des conditions de travail dans l'entreprise ; 3° Deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires. " ;

3. Considérant que la société requérante soutient que l'avis du médecin du travail en date du 7 décembre 2010 prononçant l'inaptitude de M. B...à son poste de travail dans l'entreprise en raison du danger immédiat est irrégulier en ce qu'il ne lui a pas été notifié et ne correspond pas à l'activité réelle de l'intéressé qui occupe au sein de la société CELID un poste responsable technique et non de " responsable technique - couvreur " ; qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 4624-1 et R. 4624-31 du code du travail qu'en cas de difficulté ou de désaccord sur les propositions formulées par le médecin du travail concernant l'aptitude d'un salarié à occuper son poste de travail, il appartient à l'inspecteur du travail, saisi par l'une des parties, de se prononcer définitivement sur cette aptitude ; que son appréciation, qu'elle soit confirmative ou infirmative de l'avis du médecin du travail, se substitue à cet avis et seule la décision rendue par l'inspecteur du travail est susceptible de faire l'objet d'un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ; que les moyens critiquant la procédure au terme de laquelle le médecin du travail avait donné son avis sont donc sans incidence sur la légalité de la décision rendue par l'inspecteur du travail ; que la circonstance que M. B...a sollicité la médecine du travail est sans incidence sur la régularité de l'avis médical dès lors que le salarié peut bénéficier d'un examen médical à sa propre demande en application des dispositions précitées de l'article R. 4624-18 du code du travail ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'avis du médecin du travail serait intervenu dans des conditions irrégulières doit être écarté ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. (...) / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. " ;

5. Considérant que la société CELID soutient que l'inspecteur du travail a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en retenant comme seul motif d'inaptitude définitive à tous postes dans l'entreprise l'état de santé de M. B...consécutif à son accident de travail et des séquelles qui en ont résulté, sans prendre en compte les possibilités de reclassement du salarié compte tenu des emplois existants dans l'entreprise et des possibilités de mutation, transformation de poste ou d'aménagement du temps de travail, en application des dispositions précitées de l'article L. 1226-10 du code du travail ; qu'il est constant que l'accident dont a été victime M. B...le 31 août 2009 a été reconnu comme un accident du travail ; que l'inspecteur du travail se prononce sur l'aptitude du salarié en tenant compte des circonstances de droit et de fait prévalant à la date à laquelle il prend sa propre décision ; qu'il ressort de la décision attaquée du 10 novembre 2011 que celle-ci mentionne " l'état de santé du salarié consécutif au grave accident de travail dont il a été victime le 30 août 2009 et les séquelles laissées par cet accident " et se réfère notamment à l'avis du médecin du travail, émis le 7 décembre 2010 ; que ce dernier a conclu à l'inaptitude de M. B...à son poste de travail en raison du danger immédiat pour sa santé sans formuler d'indication sur l'éventuel reclassement de l'intéressé dans l'entreprise ; qu'en l'absence de proposition de la part du médecin du travail, il appartient en principe à l'employeur, tenu à une obligation de reclassement, de solliciter du médecin du travail ses propositions éventuelles de reclassement en cas d'inaptitude du salarié ; que toutefois, il n'est pas contesté que M. B...était l'unique salarié au sein de la société CELID, circonstance qui rendait nulles les possibilités de reclassement ; que si la société soutient que 98% de son chiffre d'affaires est réalisé par des opérations autres que de couverture et que, par suite, M. B...aurait pu continuer à travailler, sauf en ce qui concerne la partie couverture, elle ne l'établit pas ; qu'ainsi, l'inspecteur du travail a pu, après avis du médecin du travail et du médecin-inspecteur du travail, prononcer l'inaptitude définitive de M. B... à tous postes dans l'entreprise sans examiner les éventuelles possibilités de mutations, de transformations de postes d'aménagement du temps de travail au sens de l'article L. 1226-10 du code du travail ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CELID n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société CELID est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société CELID, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- MmeD..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 31 décembre 2015.

Le rapporteur,

F. POLIZZILe président,

M. BOULEAULe greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00135
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Francis POLIZZI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BERGOIN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-31;14pa00135 ?
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