Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 août 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1418834/2-3 du 29 janvier 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 20 février 2015, M. A...B..., représenté par Me Neffati, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1418834/2-3 du 29 janvier 2015 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 11 août 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- le préfet de police n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation ;
- le préfet de police devait saisir la commission du titre de séjour, dès lors qu'il pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ;
- l'arrêté attaqué a méconnu les stipulations du a) du 1 de l'article 10 de l'accord
franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, dès lors qu'à la date à laquelle il a déposé sa demande de délivrance d'un titre de séjour, son divorce n'avait pas encore été prononcé ;
- l'arrêté attaqué méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il justifie, en effet, d'attaches familiales en France et d'une insertion professionnelle ;
- le préfet de police ne l'a pas invité à faire viser son contrat de travail par les services de la main-d'oeuvre étrangère ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- il entend se prévaloir de l'argumentation exposée à l'encontre du refus de titre de séjour ;
- le préfet de police ne pouvait l'obliger à quitter le territoire français dès lors qu'il pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ;
- la décision attaquée méconnait les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'en cas d'exécution de la mesure d'éloignement, il ne pourra se défendre dans le cadre de la présente procédure.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Terrasse,
- et les observations de Me Neffati, avocat de M. A...B....
1. Considérant que M. A...B..., ressortissant tunisien, a contracté mariage avec une ressortissante française, le 17 août 2010 en Tunisie ; qu'il est entré en France le 12 mai 2012 sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité de conjoint de français ; que, par un arrêté du 11 août 2014, le préfet de police a refusé de faire droit à sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français, au motif que le mariage avait été dissous par un jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 17 septembre 2013 ; que M. A...B...relève appel du jugement du 29 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 août 2014 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée vise les articles 10 et 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié et l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui en constituent le fondement ; qu'elle indique que
M. A...B...ne remplit pas les conditions prévues à l'article 10 a) de l'accord franco-tunisien précité, dès lors que son mariage a été dissous par un jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 17 septembre 2013 et qu'il ne saurait davantage se prévaloir des stipulations de
l'article 3 de l'accord précité faute de produire un contrat de travail visé par les services de la main-d'oeuvre étrangère ; que l'arrêté relève, en outre, que l'intéressé n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère et la majeure partie de sa fratrie ; que cette décision qui énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent, est ainsi suffisamment motivée au sens de la loi du 11 juillet 1979 ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des mentions de la décision attaquée et de l'ensemble des pièces du dossier que le préfet a examiné dans son entier la situation particulière du requérant avant de lui refuser un titre de séjour et de l'obliger à quitter la France ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien susvisé : " 1. Un titre de séjour de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : a) Au conjoint tunisien d'un ressortissant français, marié depuis au moins un an, à condition que la communauté de vie entre époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé sa nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (... ) " ;
5. Considérant que par un jugement du 17 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Bobigny a prononcé la dissolution du mariage de M. A...B... ; que si le requérant soutient que le divorce n'avait pas encore été prononcé à la date à laquelle il a déposé sa demande de renouvellement de titre de séjour, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté, qui s'apprécie à la date à laquelle il a été pris ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum (...) reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour (...) portant la mention "salarié". " ;
7. Considérant que M. A...B...soutient que le préfet de police ne l'a pas informé, lors du dépôt de sa demande de renouvellement de son titre de séjour, de ce que la délivrance d'une carte de séjour salarié était soumise à la production d'un contrat de travail visé conformément aux stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-tunisien ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la " fiche de salle " remplie par le requérant le 14 janvier 2014 et produite par le préfet en première instance que le requérant s'est borné à demander le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français ; que si le préfet a néanmoins, à titre gracieux, recherché si l'intéressé pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur un autre fondement que celui demandé, il ne saurait lui être reproché de ne pas l'avoir invité à constituer le dossier correspondant, ce que l'intéressé ne soutient d'ailleurs pas avoir été en mesure de faire ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, où à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
9. Considérant que si M. A...B...soutient avoir fixé le centre de sa vie privée et familiale en France, où il dit exercer une activité professionnelle dans le secteur de la restauration et où réside sa soeur, titulaire d'une carte de résident, il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans charge de famille en France ; qu'il est entré récemment sur le territoire national, le 12 mai 2012 ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Tunisie où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans et où résident ses parents et plusieurs membres de sa fratrie, sans qu'il puisse utilement faire valoir qu'il subvient à leurs besoins depuis la France ; qu'ainsi, compte tenu des conditions de son séjour sur le territoire national, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
10. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer (...) une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ;
11. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que, lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour, le préfet est tenu de consulter la commission du titre de séjour des seuls cas de ressortissants étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code déjà mentionné, ou par les stipulations équivalentes de l'accord franco-tunisien, et non de tous les cas d'étrangers se prévalant de ces dispositions ou stipulations ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. A...B...n'était pas au nombre des ressortissants étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour ; que, dès lors, le préfet de police n'était pas tenu, en application de cet article, de saisir la commission du titre de séjour ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A...B...ne peut utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de ce que la décision de refus de titre de séjour qui la précède serait illégale ;
13. Considérant que si un ressortissant étranger ne peut faire l'objet d'une mesure prescrivant à son égard une obligation de quitter le territoire français en application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque la loi ou une convention ou un accord bilatéral relatif à la circulation et au séjour conclu entre la France et un autre Etat prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, M. A...B...ainsi qu'il a été dit précédemment ne remplissait pas les conditions lui permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour ; qu'il ne peut donc soutenir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire ;
14. Considérant, enfin, que M. A...B... soutient qu'en cas de mise à exécution de l'obligation de quitter le territoire français, il ne pourrait plus revenir en France pour se défendre " dans le cadre de la procédure au fond ", ce qui constituerait une violation des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, il a bénéficié devant le tribunal administratif d'un recours suspensif jusqu'à ce que le juge statue, par le jugement litigieux, tant sur l'obligation de quitter le territoire français que sur le refus de titre de séjour ; que de même la Cour statue par un seul arrêt sur l'ensemble des conclusions du requérant ; que dès lors ce moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- Mme Terrasse, président assesseur,
- Mme Amat, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2015.
Le rapporteur,
M. TERRASSELa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
F.TROUYET La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA00808