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17/12/2015 | FRANCE | N°14PA04761

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 17 décembre 2015, 14PA04761


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2014 et 31 mars 2015, présentés pour la commune de Montarlot, représentée par son maire, par Me C... ;

La commune de Montarlot demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305607, 1307236 du 30 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé les arrêtés en date des 6 novembre 2012, 4 mai 2013, 2 novembre 2013 et 13 janvier 2014 relatifs à la situation de M. D...et lui a enjoint de prendre, dans le délai de trois mois, une décision maintenant le placement d

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2014 et 31 mars 2015, présentés pour la commune de Montarlot, représentée par son maire, par Me C... ;

La commune de Montarlot demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305607, 1307236 du 30 septembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé les arrêtés en date des 6 novembre 2012, 4 mai 2013, 2 novembre 2013 et 13 janvier 2014 relatifs à la situation de M. D...et lui a enjoint de prendre, dans le délai de trois mois, une décision maintenant le placement de M. D...en congé de maladie imputable au service jusqu'à sa retraite pour invalidité ;

2°) de mettre à la charge de M. D...le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'appréciation portée par le tribunal administratif est erronée ; elle s'est conformée aux avis médicaux et notamment à celui du comité médical et de la commission de réforme laquelle a d'ailleurs confirmé le 19 novembre 2014, après avoir à nouveau consulté le docteurE..., que l'état de santé de M. D...était sans lien avec le service et a refusé de l'admettre à la retraite pour invalidité imputable au service ;

- le comportement fautif de M.D..., qui s'est soustrait à une contre-expertise en février 2013 et a ainsi participé au retard avec lequel a pu être réglée sa situation, ne peut être reproché à la commune ;

- la commune a suivi la procédure prévue par l'article 17 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- elle s'est conformée à l'avis de la commission de réforme réunie le 10 septembre 2013, qui a estimé que l'état de santé de M. D...était sans lien avec l'accident de service à compter du 19 janvier 2009 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2015, présenté pour M. D... par la Scp Dumont-Bortolotti-Combes-Junguenet, qui conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune d'exécuter le jugement du 30 septembre 2014 sous astreinte de 200 euros par jour de retard et à ce que soit mise à la charge de la commune de Montarlot la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- les avis de la commission de réforme ne lient pas l'administration ;

- il ne saurait lui être reproché de ne pas s'être rendu à la contre-expertise prévue le

14 février 2013 alors qu'il avait reçu la convocation le 9 seulement et devait réunir son dossier médical ;

- la commission n'a pas à être consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration ;

- il devait être placé en position de congé de maladie imputable au service à compter de l'accident du 2 avril 2008 et percevoir l'intégralité de son salaire ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris en date du 27 février 2015 maintenant à M. D...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2015 :

- le rapport de Mme Terrasse, président,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public ;

1. Considérant que M.D..., adjoint technique de deuxième classe titulaire de la commune de Montarlot, a été victime, le 2 avril 2008, d'un accident reconnu imputable au service consistant en un traumatisme du genou droit ; qu'il a été opéré le 16 mai puis réopéré le 7 novembre 2008 pour une rupture des ligaments croisés antérieurs du même genou ; que depuis cet accident, le requérant n'a jamais repris ses fonctions ; que par un premier jugement du 30 novembre 2012, devenu définitif, le tribunal administratif de Melun a annulé un arrêté du maire de Montarlot, en date du 30 juin 2008, en tant qu'il ne reconnaissait pas l'imputabilité au service des arrêts de travail et soins de M. D...jusqu'au 7 novembre 2008, ainsi que les arrêtés des 3 juin 2009, 14 mars et 1er décembre 2011 plaçant l'intéressé en disponibilité d'office ; qu'à la suite de ce jugement, le maire, par deux arrêtés des 6 décembre 2012 et 4 mai 2013 a prolongé la disponibilité d'office de M. D..., pour les périodes allant du 4 novembre 2012 au 3 mai 2013 puis du 4 mai 2013 au 3 novembre 2013, dans l'attente de la réunion de la commission de réforme ; que, par un arrêté du 2 novembre 2013, l'intéressé a été placé en congé pour accident de service pour la période comprise entre le 3 avril 2008 et le 19 janvier 2009 puis en congé de maladie ordinaire avec plein traitement à partir du 20 janvier 2009 et jusqu'à l'issue de la procédure, et notamment jusqu'à l'avis du comité médical ; qu'enfin par un nouvel arrêté rectificatif du 13 janvier 2014, M. D...a été placé en congé de maladie ordinaire à plein traitement du 20 janvier au 19 avril 2009 puis à demi-traitement du 20 avril 2009 au 19 janvier 2010 et enfin en disponibilité d'office du 20 janvier 2010 au 19 juin 2014 ;

2. Considérant que M. D...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les deux arrêtés des 6 décembre 2012 et 4 mai 2013 le plaçant en disponibilité d'office puis, en cours de procédure, l'arrêté du 2 novembre 2013 en tant que le maire l'a placé en congé de maladie ordinaire à compter du 20 janvier 2009 et l'arrêté du 13 janvier 2014 réglant sa situation postérieurement au 20 janvier 2009 ; que par le jugement du 30 septembre 2014 dont la commune relève appel, le tribunal administratif de Melun a annulé ces quatre arrêtés au motif que les arrêts de travail devaient être regardés en lien avec l'accident de service y compris après le 20 janvier 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et d'injonction :

3. Considérant qu'il résulte du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale qu'en cas de maladie consécutive à un accident de service, le fonctionnaire a droit au paiement de l'intégralité de son traitement et au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par l'accident et que l'imputation au service de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ;

4. Considérant qu'en vertu de l'article 16 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, la commission de réforme est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions rappelées au point 3 ; qu'il en résulte que lorsqu'elle apprécie l'état de santé d'un agent à la suite d'un accident de service, l'imputabilité de l'état de l'agent à un tel accident et la date de consolidation de la blessure, la commission de réforme se borne à émettre un avis ; que le pouvoir de décision appartient à la seule autorité administrative dont relève l'agent, éclairée par cet avis ; que par suite la commune de Montarlot ne peut se borner à faire valoir qu'elle s'est conformée à l'avis formulé par la commission de réforme réunie le 10 septembre 2013 ;

5. Considérant que comme dit ci-dessus, M. D...n'a pas repris son service depuis un traumatisme au genou droit qui serait survenu durant ses fonctions le 2 avril 2008 ; que le DrB..., médecin agréé par l'administration, s'est borné, lors de sa première expertise du 10 mars 2009, à constater que l'état de M. D... n'était pas consolidé sans se prononcer sur l'imputabilité ni sur la possibilité, à terme, d'une reprise de travail ; que la contre-expertise faite à la demande de l'intéressé et acceptée par la commune, réalisée par le DrF..., généraliste, se limite à indiquer qu'une reprise de travail " semble impossible " et à suggérer de recueillir l'avis d'un spécialiste ; que la seconde expertise du DrB..., en date du 18 février 2011, constate l'impossibilité définitive de reprendre toutes fonctions et fixe une date de consolidation " au printemps 2009 " ; qu'à la suite d'une nouvelle expertise, finalement effectuée le 13 avril 2013 par le DrE..., la commission de réforme a, dans sa séance du 10 septembre 2013, émis l'avis que la prise en charge de l'intéressé au titre de l'accident de travail devait prendre fin au 19 janvier 2009 ; qu'enfin le médecin de prévention, le Docteur Vulmière, a rédigé le 20 août 2013 un rapport concluant que la totalité des congés de l'intéressé devait être prise en charge au titre de l'accident de service ;

6. Considérant que le docteurE..., spécialiste de chirurgie orthopédique et traumatologique, a affirmé sans ambiguïté dans son rapport d'expertise du 18 avril 2013, après avoir examiné l'intéressé et l'ensemble de son dossier médical, et notamment les comptes rendus des deux opérations du ligament croisé antérieur subies en mai 2008 et novembre 2008 par M.D..., que l'accident du 2 avril 2008 est une entorse bénigne et simple sur un état antérieur pathologique ancien, résultant d'une rupture du même ligament opérée en 1984, état antérieur non aggravé par cet accident ; qu'il en a conclu que n'étaient en rapport avec l'accident de service que les arrêts et soins jusqu'au 4 mai 2008 ; que l'expert conclut qu'à cette date l'agent était guéri avec retour à un état antérieur pathologique et non imputable au service, tous les soins et arrêts à partir du 5 mai 2008 relevant d'une prise en charge au titre de la maladie ordinaire ; que ces constatations, et notamment celle de l'existence d'un état pathologique antérieur, ne sont pas utilement démenties par les autres pièces du dossier, et notamment l'attestation du docteur Bercovy, médecin ayant opéré M. D...en 1984, selon laquelle il ne présentait aucun symptôme entre l'opération de 1984 et 2008 ou le fait, mis en avant par le Docteur Vulmière dans le rapport du 20 août 2013, que l'opération de 1984 avait été " un franc succès " et que M. D...n'avait " aucune restriction d'aptitude " depuis son embauche ;

7. Considérant que par les arrêtés contestés, la commune a néanmoins admis que les arrêts de travail et les soins étaient en lien avec l'accident de service jusqu'au 19 janvier 2009 et estimé que M. D...devait bénéficier d'un congé de maladie ordinaire du 20 janvier 2009 au 19 janvier 2010, à plein traitement pendant trois mois et à mi-traitement par la suite, puis être placé en position de disponibilité d'office jusqu'au 19 juin 2014 ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 qu'elle est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé ces arrêtés, en tant qu'ils concernent la période postérieure au 19 janvier 2009, au motif que l'état de santé actuel de M. D... devant être regardé comme résultant de l'accident de service, il devait continuer à être placé en congé de maladie avec plein traitement, et ce jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité ;

8. Considérant que pas plus en première instance qu'en appel M. D...n'a fait valoir, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés des 6 décembre 2012, 4 mai 2013, 2 novembre 2013 et 13 janvier 2014, d'autre moyen que celui, infondé, tiré de ce que son état de santé actuel était en lien avec l'accident de service ; que, dès lors, la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé ces arrêtés et lui a fait injonction de placer M. D... en congé de maladie pour accident de service au-delà du 19 janvier 2009 et jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité, de reconstituer sa carrière pendant cette période et de liquider au profit de l'intéressé les sommes impliquées par cette position administrative rémunérée à plein traitement ;

9. Considérant, en revanche, et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, que les conclusions présentées par M. D...tendant à ce que la cour ordonne à la commune de Montarlot d'exécuter le jugement attaqué ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Montarlot, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... demande, en première instance et en appel, au titre des frais exposés lui et non compris dans les dépens ;

11. Considérant, d'autre part, que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. D...la somme que la commune de Montarlot demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement du 30 septembre 2014 du tribunal administratif de Melun sont annulés.

Article 2 : Les demandes d'annulation et d'injonction présentées par M. D...devant le tribunal administratif de Melun sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de commune de Montarlot et celles de M. D...tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Montarlot et à M. A... D....

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- Mme Terrasse, président assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2015.

Le rapporteur,

M. TERRASSELa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

E. CLEMENT La République mande et ordonne au ministre de la décentralisation et de la fonction publique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA04761


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14PA04761
Date de la décision : 17/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Marianne TERRASSE
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : DUMONT-BORTOLOTTI-COMBES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-17;14pa04761 ?
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