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14/12/2015 | FRANCE | N°14PA03439

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 14 décembre 2015, 14PA03439


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie de constater qu'elle a été évincée de manière irrégulière de l'appel d'offre relatif au marché public concernant la reprise des charpentes couvertures du Lycée Jules Garnier de Nouméa, de dire qu'elle pourra déposer un nouveau dossier, à défaut de régularisation de prononcer la résiliation du contrat conclu entre la Nouvelle-Calédonie et l'attributaire du marché, à titre subsid

iaire de condamner la Nouvelle-Calédonie à lui verser une somme de 50 000 000 F CFP...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie de constater qu'elle a été évincée de manière irrégulière de l'appel d'offre relatif au marché public concernant la reprise des charpentes couvertures du Lycée Jules Garnier de Nouméa, de dire qu'elle pourra déposer un nouveau dossier, à défaut de régularisation de prononcer la résiliation du contrat conclu entre la Nouvelle-Calédonie et l'attributaire du marché, à titre subsidiaire de condamner la Nouvelle-Calédonie à lui verser une somme de 50 000 000 F CFP avec intérêts à compter de la notification du jugement et de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie une somme de 300 000 F CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300301 du 22 mai 2014 le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 1er août 2014, 5 février et 5 mars 2015, la SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques représentée par la SELARL d'avocats Berquet demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 mai 2014 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) de constater qu'elle a été évincée du marché de manière irrégulière ;

3°) de condamner la Nouvelle-Calédonie à lui verser une somme de 240 581 970 F CFP soit 2 016 076, 91 euros avec intérêts courant à compter du 18 septembre 2013 en réparation du préjudice subi du fait de cette éviction ;

4°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'offre qu'elle avait remise était complète et l'enveloppe la contenant comprenait bien outre la seconde enveloppe, les pièces administratives requises, en application des articles 26 et suivants de la délibération n° 136 CP du 1er mars 1967, et le rejet de cette offre est dès lors entaché de détournement de pouvoir et d'abus de droit ;

- le tribunal a à tort retenu la solution contraire nonobstant les témoignages produits et en se fondant sur les constatations des membres de la commission ;

- le procès-verbal de la commission est dénué de motivation, se bornant à faire état d'une présentation non conforme des offres 3 et 4 sans préciser en quoi consistait la non-conformité ni indiquer à quelles offres correspondaient ces chiffres ;

- cette éviction irrégulière a occasionné à la requérante une perte de chances d'obtenir le marché dont elle est fondée à demander l'indemnisation à hauteur d'une somme de

50 000 000 F CFP correspondant à environ 25 % du montant du marché conclu, c'est-à-dire au bénéfice qu'elle aurait pu escompter si elle l'avait obtenu ;

- à compter du moment où l'administration avait reçu l'enveloppe contenant l'offre elle en était gardienne et doit voir sa responsabilité engagée du fait que les pièces administratives contenues dans cette enveloppe ont été subtilisées entre le dépôt de l'enveloppe et son ouverture par la commission.

Par mémoires en défense, enregistrés les 16 décembre 2014 et 16 avril 2015, la Nouvelle-Calédonie, représentée par la SELARL D et S Legal conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 25 mars 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 avril 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- la délibération du congrès n° 136 du 1er mars 1967 portant réglementation de marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle, rapporteur,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

1. Considérant que, le 8 juillet 2013, date limite de dépôt des offres, la SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques (ECM) a déposé un dossier de candidature en réponse à l'appel d'offre de la Nouvelle-Calédonie pour la reprise des charpentes et couvertures du lycée Jules Garnier de Nouméa ; que la commission technique de dépouillement des offres, réunie le 12 juillet 2013, a écarté son offre pour défaut de production des documents exigés par le règlement particulier d'appel d'offre ; que la société ECM a porté le litige devant le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en contestant la réalité de ce motif et en sollicitant du tribunal qu'il constate qu'elle aurait été évincée de manière irrégulière de l'appel d'offre, qu'il dise qu'elle pourra déposer un nouveau dossier, à défaut qu'il prononce la résiliation du contrat conclu entre la Nouvelle-Calédonie et l'attributaire du marché, et à titre subsidiaire qu'il condamne la Nouvelle-Calédonie à lui verser une somme de 50 000 000 F CFP avec intérêts à compter de la notification du jugement en réparation du préjudice qu'elle aurait subi ; que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté cette requête par jugement du 22 mai 2014 dont elle interjette appel, en ne sollicitant plus, cependant, que le constat de son éviction irrégulière et la condamnation de la Nouvelle-Calédonie à l'indemniser du préjudice allégué ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 26 de la délibération susvisée du 1er mars 1967 : " Les offres doivent être présentées de la manière suivante : une enveloppe extérieure fermée adressée à l'autorité de qui émane l'appel d'offres, portant en suscription la référence à l'appel d'offres auquel il est répondu et la mention: "A n'ouvrir qu'en séance de dépouillement", à l'exclusion de toute désignation de l'expéditeur et contenant d'une part, les pièces prévues par les cahiers des charges, d'autre part, une seconde enveloppe fermée renfermant la soumission proprement dite. " ; que l'article 3 du règlement particulier d'appel d'offre relatif à la présentation des offres stipule qu'outre la seconde enveloppe prévue par les dispositions précitées, l'enveloppe extérieure présentée par les candidats doit contenir dix pièces administratives éventuellement complétées par des annexes ; que l'article 5 du même règlement dispose que : " toute offre non accompagnée des pièces prévues ci-dessus ou présentée de façon non conforme aux stipulations du présent règlement d'appel d'offres sera déclarée nulle (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du procès-verbal de la commission technique de dépouillement des offres réunie le 12 juillet 2012 que la candidature de la société ECM a été écartée en raison de son irrégularité au regard des dispositions précitées de l'article 26 de la délibération du 1er mars 1967 ; que la société requérante s'est ensuite vu préciser, notamment par message du 29 août 2013, que cette irrégularité provenait de ce que lors de l'ouverture de la première enveloppe, celle-ci ne contenait qu'une deuxième enveloppe et non les pièces requises par l'article 3 du règlement particulier d'appel d'offre ;

4.Considérant en premier lieu que la requérante ne peut utilement à l'appui de sa requête de plein contentieux tendant à l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi invoquer le défaut de motivation dont serait entaché le procès-verbal de la commission technique de dépouillement des offres ;

5. Considérant en deuxième lieu que, comme en première instance, la société ECM conteste la réalité du motif de son éviction et soutient avoir déposé un dossier complet composé d'une première enveloppe comprenant, outre la deuxième enveloppe, les dix pièces administratives requises par le règlement particulier d'appel d'offre ; qu'elle se borne toutefois à produire à cette fin deux témoignages rédigés en septembre 2013 de " gérants de sociétés " dont on ignore les liens exacts avec la requérante, qui indiquent avoir été présents dans les locaux de celle-ci juste au moment où son gérant et sa secrétaire complétaient le dossier, et avoir vu cette dernière glissant la deuxième enveloppe ainsi que divers feuillets dans la première ; que, ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal administratif, ces témoignages sont expressément contredits par le procès-verbal du 12 juillet 2013 signé par les cinq membres de la commission technique de dépouillement des offres ; que la requérante n'établissant pas qu'elle aurait été évincé irrégulièrement de l'appel d'offres, elle n'est pas fondée à solliciter sur ce fondement l'indemnisation d'une perte de chances de remporter le marché, qu'au demeurant elle n'établit ni n'allègue avoir eu des chances sérieuses de remporter ;

6. Considérant par ailleurs que si elle fait valoir en appel que l'absence, lors de l'ouverture des enveloppes, des pièces administratives requises ne pourrait résulter que de ce qu'elles auraient été subtilisées entre le dépôt de son offre le 8 juillet 2013 et la réunion de la commission technique de dépouillement le 12 juillet suivant, les témoignages produits ne suffisent pas, à eux seuls, à établir la réalité d'une telle soustraction ; que la société ECM n'est ainsi pas fondée à invoquer la faute qu'aurait commise l'administration par défaut de surveillance des enveloppes qui lui étaient confiées, ni par suite à tenter de rechercher sa responsabilité sur ce fondement ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées par la Nouvelle-Calédonie sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Nouvelle-Calédonie présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Etudes Constructions Montages Charpentes Métalliques et au gouvernement de Nouvelle-Calédonie. Copie en sera adressée à la société Pacific Leader SARL.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet président assesseur ,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 décembre 2015.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLE

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLOLa République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA03439


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03439
Date de la décision : 14/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-02-03 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Mode de passation des contrats. Appel d'offres.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SELARL BERQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-14;14pa03439 ?
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