Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du
19 août 2013 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.
Par un jugement n° 1400382-4 du 26 mars 2015, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 1er juillet 2015, M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1400382-4 du 26 mars 2015 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 19 août 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 15 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à MeC..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une irrégularité du fait du défaut de saisine de la commission du titre de séjour, en méconnaissance des dispositions des articles L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur de droit et d'un défaut de motivation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 22 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Mosser, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant congolais né le 31 décembre 1965, entré en France en 1994 selon ses déclarations, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 19 août 2013, le préfet du Val-de-Marne a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du
26 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
3. Considérant, d'une part, que si M. B...fait valoir qu'il résidait en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, les pièces produites ne permettent pas de l'établir, en raison de leur faible nombre, alors qu'elles n'ont exigé, pour certaines, que la présence ponctuelle de l'intéressé ; qu'en particulier, excepté une attestation de présence à un don de sang, l'intéressé ne produit aucune pièce au titre de l'année 2004 et se borne à produire au titre des années 2005 à 2011, des confirmations de rendez-vous médicaux, quelques coupons de carte de transport et quelques reçus de paiement établis par la RATP qui n'établissent que la présence de l'intéressé sur le territoire français aux dates indiquées, et non sur l'ensemble de la période ;
4. Considérant, d'autre part, que si le requérant se prévaut de l'ancienneté de son séjour en France, cette circonstance, au demeurant non établie ainsi qu'il a été dit au point 3, n'est pas de nature à établir que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels ; que, par ailleurs, les circonstances qu'il dispose d'une promesse d'embauche et que sa soeur réside en France ne sauraient davantage être regardées comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées ; que, par suite,
M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code précité ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L.313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
6. Considérant que M. B...fait valoir qu'il est entré en France en 1994 et y demeure auprès de sa soeur et de son fils dont il s'occupe seul, que sa fille qui vit et travaille en Belgique lui rend très souvent visite ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 3, les pièces produites au dossier ne permettent pas d'établir la résidence habituelle en France de M. B...depuis 1994 comme il le soutient ; que le requérant n'établit pas, par la seule production d'une attestation de fin de stage en date du 27 juin 2015, que son fils, qui a suivi sa scolarité en Belgique, résidait en France à la date de l'arrêté attaqué ; que si M. B...se prévaut de son intégration professionnelle, il n'en apporte pas la preuve ; que s'il fait valoir qu'il n'a plus de contact avec les membres de sa famille dans son pays d'origine, il ne l'établit pas ; que, par suite, la décision de refus du 19 août 2013 n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, la décision précitée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
7. Considérant que le préfet n'est tenu, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour, et non de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ; que M. B...n'établissant pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en France, le préfet du Val-de-Marne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :
8. Considérant que, pour les motifs exposés aux points 2 à 7, M. B...n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
9. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qui reprennent ce qui a été développé à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;
Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :
10. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la directive 2008/115/CE du
16 décembre 2008 susvisée : " Lorsqu'ils mettent en oeuvre la présente directive, les Etats membres tiennent dûment compte : a) de l'intérêt supérieur de l'enfant, b) de la vie familiale, c) de l'état de santé du ressortissant concerné d'un pays tiers et respectent le principe de non-refoulement " ; qu'aux termes de l'article 7 de ladite directive : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. (...) / 2. Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 de ladite directive : " Lorsqu'ils mettent en oeuvre la présente directive, les Etats membres tiennent dûment compte : a) de l'intérêt supérieur de l'enfant, b) de la vie familiale, c) de l'état de santé du ressortissant concerné d'un pays tiers et respectent le principe de non-refoulement " ; qu'aux termes du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du
16 juin 2011 : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;
11. Considérant que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire, soit le délai de droit commun le plus long susceptible d'être accordé en application de l'article 7 de la
directive 2008/115/CE, n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique, distincte de celle faisant obligation à l'étranger de quitter le territoire français ; que, par ailleurs, il ne résulte pas des pièces du dossier que le préfet se soit senti lié par les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant un délai de 30 jours et ait, par là-même, méconnu l'étendue de sa compétence et commis une erreur de droit ; qu'enfin, compte tenu de ce qui a été dit au point 10 ci-dessus, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées ; qu'il résulte des éléments de la situation personnelle de l'intéressé exposés au point 6, que le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en n'accordant pas à l'intéressé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Driencourt, président de chambre,
- Mme Mosser, président assesseur,
- M. Cheylan, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 11 décembre 2015.
Le rapporteur,
G. MOSSERLe président,
L. DRIENCOURTLe greffier,
A-L. PINTEAU La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
3
N° 15PA02590