Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 mars 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse.
Par un jugement n° 1414226/5-2 du 5 février 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé la décision attaquée, ensemble la décision implicite du ministre de l'intérieur rejetant son recours hiérarchique, d'autre part, enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la demande de M. B... au regard de la conformité de son nouveau logement dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 avril 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 21 octobre 2015, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1414226/5-2 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- M. B...ne remplit pas les conditions de ressources fixées par les dispositions de l'article L. 411-5 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée n'est pas entachée d'erreur de fait dans la mesure où le requérant n'a pas informé en temps utile le service chargé d'examiner sa demande de regroupement familial de l'acquisition à venir d'un appartement de 85 m² sis rue de Passy à Paris.
Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2015, présenté par M.B..., représenté par Mes Tavernier et Dizier ; il demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- d'enjoindre au préfet de police de faire droit, dans un délai de trente jours à compter de la notification du présent arrêt, à sa demande de regroupement familial, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- La requête du préfet de police est irrecevable dans la mesure où elle méconnait les dispositions de l'article R. 412-1 du code de justice administrative ;
- le jugement attaqué est conforme aux dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et doit être confirmé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- et les observations de Me Dizier, avocat de M.B....
1. Considérant que le préfet de police relève appel du jugement du 05 février 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 10 mars 2014 refusant à M. B...le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, au motif que M. B...ne remplissait ni les conditions de stabilité et de régularité de ressources ni celles relatives à la superficie du logement nécessaire à une famille composée de quatre personnes, fixées par l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur les conclusions du préfet de police et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du Code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ; / 2° le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France dans la même région géographique [...] " ;
3. Considérant en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...justifie disposer de plusieurs comptes bancaires et notamment d'un compte personnel ouvert depuis l'année 2007 auprès de la banque HSBC dont le solde était créditeur de près de 100 000 euros à la date de la décision contestée ; que le solde de ce compte a toujours été créditeur des mois de mars 2013 à mars 2014, le solde le plus bas sur ces douze mois étant de 50 000 euros environ ; qu'en outre, le requérant a acquis deux appartements dont l'un de 85 m² situé rue de Passy est destiné à accueillir sa famille ; qu'ainsi M. B...rapporte la preuve de la stabilité de ses ressources, sans que puisse lui être opposée la circonstance qu'elles proviendraient d'une activité localisée hors de France dans la mesure où d'une part, la preuve des revenus non salariaux peut être rapportée par tous moyens et où d'autre part, M. B...s'est engagé en possédant une titre de séjour mention " visiteur " à n'exercer aucune activité salariée sur le territoire national ; que dès lors, le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que le requérant ne remplirait pas les conditions de ressources fixées par l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que si M. B...résidait lors de l'enregistrement de sa demande dans un logement qui n'était pas conforme aux prescriptions de l'article R. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il a acquis un logement de 85 m² le 16 décembre 2013 et que son changement d'adresse a été notifié au préfet de police le 31 janvier 2014 ; que partant, la décision contestée en date du 10 mars 2014 qui se fonde sur la non-conformité de la superficie du logement est entachée d'une erreur de fait ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 10 mars 2014 refusant au requérant le regroupement familial et lui a enjoint de réexaminer sa demande au regard de la conformité de son nouveau logement dans un délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant qu'il ressort de l'enquête domiciliaire tenue le 29 mai 2015, que l'appartement de M.B..., situé dans le 16e arrondissement de Paris, est conforme aux normes de salubrité et d'équipement ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. B... l'autorisation de regroupement familial en faveur de son épouse dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. B...l'autorisation de regroupement familial en faveur de son épouse dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A...B...et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Hamon, président,
- M. Privesse, premier conseiller,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 décembre 2015.
Le rapporteur,
L. D'ARGENLIEULe président assesseur,
En application de l'article R. 222-26 du code
de justice administrative
P. HAMON
Le greffier,
A-L. CALVAIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01426