La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2015 | FRANCE | N°15PA01027

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 03 décembre 2015, 15PA01027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 février 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par jugement n° 1404434/3-2 du 28 janvier 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2015, M.B..., représen

té par Me Yomo, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404434/3-2 du 28 janv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 février 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par jugement n° 1404434/3-2 du 28 janvier 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2015, M.B..., représenté par Me Yomo, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404434/3-2 du 28 janvier 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté préfectoral du 5 février 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'ordonner la production de son entier dossier par l'administration ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet de police n'a pas examiné sa demande au regard des dispositions des articles R. 5221-17 et R. 5221-20 du code du travail ;

- la commission du titre de séjour devait être saisie dès lors qu'il justifie résider en France depuis 2002, y compris et contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, pour l'année 2006 ;

- le refus de séjour est insuffisamment motivé en droit et en fait ;

- le préfet a subordonné à tort son admission exceptionnelle au séjour à une durée de dix années de résidence ;

- il n'était pas tenu de produire un contrat de travail ni de justifier de son expérience professionnelle ;

- le préfet n'a pas vérifié son aptitude à exercer l'activité professionnelle pour laquelle il postule ;

- le préfet n'a pas visé la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, ni fait référence aux critères qu'elle mentionne ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa situation n'était pas constitutive d'un motif d'admission exceptionnelle au séjour, au sens de l'article L. 313-14 et que le refus de séjour ne portait pas atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le préfet s'est borné à examiner l'atteinte portée par la décision au droit au respect de sa vie familiale, mais non de sa vie privée ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet ne pouvait, le 2 septembre 2014, refuser de réexaminer sa situation dans le cadre de l'exécution du jugement du 4 juin 2014, au motif que l'obligation de quitter le territoire du 5 février 2014 n'avait pas encore été annulée ;

- le préfet a motivé la décision fixant le pays de renvoi de manière stéréotypée et n'a pas procédé à un examen particulier des circonstances de l'affaire.

La requête a été communiquée le 27 juillet 2015 au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dalle a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que, M.B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 6 janvier 1980, entré en France le 24 août 2002, selon ses déclarations, a sollicité le 25 juin 2013 la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 5 février 2014, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 28 janvier 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

2. Considérant que l'obligation de motivation impose seulement à l'autorité administrative d'énoncer, dans sa décision, les motifs de droit et de fait en considération desquels elle a édicté cette dernière, de telle sorte que l'intéressé puisse, à la seule lecture de la décision, connaître ces motifs ; que la décision qui refuse la délivrance d'un titre de séjour à M. B...ne trouve pas son fondement dans les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel se rapporte aux cas dans lesquels l'autorité préfectorale peut décider de faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; que dès lors, l'obligation de motivation en droit du refus de titre de séjour litigieux n'imposait pas au préfet de police de préciser quelles dispositions de cet article il entendait mettre en oeuvre ; que, par ailleurs, l'arrêté préfectoral du 5 février 2014 vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne que M. B...ne justifie pas de l'intensité d'une vie privée et familiale sur le territoire national, qu'il se déclare célibataire, parent d'un enfant de nationalité congolaise né en France en 2008, que la circonstance d'être père d'un enfant né en France et résidant sur le territoire national ne lui ouvre aucun droit au séjour, qu'il ne justifie pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger et que compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ; qu'en ce qui concerne l'atteinte portée à ce droit, le préfet de police a par suite suffisamment motivé la décision de refus de séjour au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;

4. Considérant que le préfet de police a estimé que M. B...ne justifiait pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans ; qu'en ce concerne l'année 2006, M. B...se borne à produire la première page d'une déclaration de revenus ne comportant aucun revenu, non signée et portant l'indication manuscrite " 5 juin 2007 " ; que cette pièce n'est pas de nature à établir sa présence en France en 2006 et, par suite, au cours des dix années ayant précédé la décision contestée ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de saisine préalable de la commission du titre de séjour ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant que la procédure permettant d'obtenir une carte de séjour pour motif exceptionnel, prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est distincte de celle de l'article L. 5221-2 du code du travail de sorte qu'il n'est pas nécessaire que l'autorisation de travail soit délivrée préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance de la carte de séjour temporaire ; qu'il s'ensuit que la circonstance que le préfet de police n'aurait pas examiné, au regard des dispositions des articles R. 5221-17 et R. 5221-20 du code du travail, la demande d'autorisation de travail que M. B...avait jointe à sa demande de titre de séjour, n'a pas d'incidence sur la légalité du refus de séjour qui lui a été opposé ;

6. Considérant que M. B...fait valoir qu'il est le père d'un enfant de nationalité congolaise, né en France en 2008 ; que, cependant, il est domicilié..., domicilié... ; qu'il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il entretiendrait des liens avec cet enfant et contribuerait à son entretien et à son éducation ; que, dans ces conditions, la décision de refus de séjour ne peut être regardée comme portant une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M.B..., ni comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des motifs de l'arrêté attaqué que le préfet de police aurait subordonné la délivrance du titre de séjour sollicité par M. B...sur le fondement de l'article L. 313-14 à la condition que ce dernier réside en France depuis plus de dix ans ; que, pour apprécier si M. B...pouvait prétendre à la délivrance, sur le fondement de cet article, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", le préfet était en droit de prendre en compte la circonstance que l'intéressé n'avait ni produit un contrat de travail, ni justifié de son expérience professionnelle ; que le préfet n'était pas tenu de viser la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, ni de faire référence aux critères qu'elle mentionne, dès lors que ladite circulaire est dépourvue de caractère règlementaire et ne contient pas de lignes directrices susceptibles d'être invoquées devant le juge ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. Considérant que, par un jugement n° 1400230 du 4 juin 2014, le Tribunal administratif de Paris a annulé, pour un motif de légalité externe, la décision implicite née du silence gardé par le préfet de police sur la demande de titre de séjour présentée, le 25 juin 2013, par M.B..., sans prévoir aucune mesure d'exécution ; que la circonstance que, le 2 septembre 2014, soit postérieurement à l'arrêté attaqué du 5 février 2014, M. B...se serait présenté à la préfecture de police afin que soit réexaminée sa demande de titre de séjour " dans le cadre de l'exécution du jugement du 4 juin 2014 " et qu'à cette occasion, il se serait vu opposer un refus par l'agent au guichet, n'a aucune incidence sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire en date du 5 février 2014 ;

9. Considérant qu'il ne ressort pas des motifs de l'arrêté attaqué que le préfet de police n'aurait pas examiné si sa décision obligeant M. B...à quitter le territoire français porte atteinte au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée ;

10. Considérant, enfin, que, pour les motifs énoncés au point 6 ci-dessus, la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut être regardée comme méconnaissant les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

11. Considérant que l'arrêté préfectoral du 5 février 2014 vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne que " l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, ou dans son pays de résidence où il est effectivement admissible " ; qu'il contient par suite, en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination, une motivation suffisante, conforme aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M.B... ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- M. Blanc, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 décembre 2015.

Le rapporteur,

D. DALLELe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15PA01027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01027
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : YOMO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-12-03;15pa01027 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award