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12/11/2015 | FRANCE | N°14PA04632

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 12 novembre 2015, 14PA04632


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1315948 du 23 septembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M.C....

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rocédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2014, et un mémo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1315948 du 23 septembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2014, et un mémoire en réplique enregistré le 21 septembre 2015, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1315948 du 23 septembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens.

M. C...soutient que :

- les réponses aux observations du contribuable sont insuffisamment et incorrectement motivées ;

- les sommes en provenance des sociétés BFM et FD2F ne pouvaient être imposées à son nom dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

- le jugement ne fait pas référence à son mémoire en réplique.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 août 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête et soutient que les moyens invoqués par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Platillero a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. et Mme C...ont fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle, à l'issue duquel des propositions de rectification leur ont été adressées le 23 décembre 2010 au titre de l'année 2007 et le 5 janvier 2011 au titre de l'année 2008 ; que ces rectifications ayant été contestées, le service leur a adressé deux réponses aux observations du contribuable le 24 février 2011 au titre de chacune des années précitées ; que des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de l'intérêt de retard et de la majoration pour manquement délibéré, ont été mises en recouvrement dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2007 et 2008 ; qu'à la suite du rejet de sa réclamation, M. C...a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la décharge des cotisations précitées, d'un montant, en droits et pénalités, de 248 198 euros ; que, par jugement du 23 septembre 2014, le Tribunal a rejeté cette demande ; que M. C...fait appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique ... Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ... " ;

3. Considérant que M. C...soutient que le jugement attaqué ne fait pas référence à son mémoire enregistré le 4 septembre 2014 ; qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué et le document annexé contenant les visas, signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, n'analysent pas ce mémoire, qui n'est pas visé et a été produit avant la clôture de l'instruction ; que ce mémoire contenait un moyen nouveau relatif aux pénalités et des pièces nouvelles, qui, selon le requérant, étaient de nature à établir qu'une partie des sommes imposées ne pouvaient constituer des revenus de capitaux mobiliers ; que le Tribunal n'a pas répondu explicitement dans les motifs du jugement aux éléments nouveaux ainsi produits ; que, dans ces conditions, M. C...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. C... devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée " ;

6. Considérant qu'en réponse aux propositions de rectification qui lui ont été adressées, M. C... a soutenu que les sommes mentionnées sur des chèques émis par les sociétés BFM et FD2F, dont il était associé, ne pouvaient être imposées sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, dès lors qu'elles trouvaient leur contrepartie dans des débits des comptes courants d'autres associés qui détenaient des créances sur ces sociétés et constituaient des avances amicales entre personnes physiques ; que, dans ses réponses aux observations du contribuable, le service a indiqué qu'il n'a pas constaté l'existence de prêts enregistrés, contesté le caractère opposable de contrats de prêts qui n'ont pas fait l'objet des formalités légales, rejeté le caractère probant des attestations produites et opposé le montant des à nouveaux des comptes courants d'associés dans les sociétés précités ; que les réponses aux observations du contribuable sont ainsi suffisamment motivées ; que, par ailleurs, dès lors que la régularité de la motivation de la réponse aux observations du contribuable ne dépend pas du bien-fondé des motifs opposés par l'administration, M. C...ne peut utilement soutenir que la motivation retenue par le service serait erronée en droit ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit ainsi être écarté ;

Sur les moyens tirés du caractère rétroactif des lois de finances :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances : " Dans les conditions et sous les réserves prévues par la présente loi organique, les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'Etat, ainsi que l'équilibre budgétaire et financier qui en résulte ... L'exercice s'étend sur une année civile ... " ; qu'ainsi, la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007, portant loi de finances pour 2008, publiée au Journal officiel le 27 décembre 2007, et la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008, portant loi de finances pour 2009, publiée au Journal officiel le 28 décembre 2008, ont déterminé les ressources de l'Etat et prévu leur application à l'impôt sur le revenu dû, respectivement, au titre des années 2007 et 2008 ; que les contributions sociales en litige, assises suivant les mêmes règles que l'impôt sur le revenu, ont été autorisées par la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 portant financement de la sécurité sociale pour 2008, publiée au Journal officiel le 21 décembre 2007, et la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 portant financement de la sécurité sociale pour 2009, publiée le 18 décembre 2008 ;

8. Considérant que, d'une part, M. C...ne saurait utilement faire valoir que les lois mentionnées au point 7 méconnaîtraient, en ce qu'elles seraient rétroactives, une règle posée par les dispositions, elles-mêmes de nature législative, de l'article 2 du code civil ; que, d'autre part, le requérant ne saurait utilement invoquer les principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de " bonne foi " garantis par le droit communautaire à l'encontre de dispositions des lois précitées modifiant des règles relatives à son imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, dès lors que sa situation n'est pas régie par le droit communautaire ;

Sur le bien-fondé des impositions :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : ... 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ... " ;

10. Considérant qu'il est constant que les sociétés BFM et FD2F ont émis des chèques qui ont été encaissés sur des comptes bancaires personnels ouverts au nom de M.C..., associé de ces sociétés, dans trois établissements bancaires ; que l'administration a imposé les sommes correspondantes sur le fondement des dispositions précitées de l'article 109 du code général des impôts ; que si M. C...fait valoir que les sociétés précitées se seraient acquitté d'une partie de leurs dettes vis-à-vis d'autres associés et auraient ainsi versé les sommes en litige pour le compte de ceux-ci vis-à-vis desquels elles étaient débitrices, il n'apporte aucun élément permettant de justifier la réalité de telles dettes et le motif de versements effectués à son nom par ces sociétés pour le compte de tiers ; que, par ailleurs, en se bornant à produire des attestations dépourvues de valeur probante et à se prévaloir de la concordance partielle entre des mouvements sur les comptes courants des autres associés dans les sociétés BFM et FD2F et ses comptes bancaires personnels, M. C... n'apporte aucun élément de nature à établir que les sommes en litige constitueraient des " avances amicales " entre associés, ainsi qu'il le soutient ; que si M. C...qui, contrairement à ce qu'il soutient, n'a pas justifié d'un remboursement des sommes avant la clôture des exercices, fait également valoir que certains chèques ont été débités de ses propres comptes courants d'associé dans les sociétés précitées, cette circonstance reste sans incidence sur l'imposition des sommes correspondantes dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'à cet égard, d'une part, dès lors que les sommes en litige ont effectivement été mises à sa disposition par des sociétés dont il était associé, M. C...n'est pas fondé à soutenir qu'une partie de ces sommes devaient être imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au nom des autres associés des sociétés BFM et FD2F, au seul motif que des montants équivalents figurent en débit des comptes courants de ces associés dans ces sociétés ; que, d'autre part, l'origine et la nature desdites sommes étant identifiées, M. C...n'est pas plus fondé à soutenir que ces sommes n'étaient imposables qu'en tant que revenus d'origine indéterminée ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a imposé, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 109 du code général des impôts, les sommes mentionnées sur des chèques émis par les sociétés BFM et FD2F et encaissés sur ses comptes bancaires personnels par M.C..., qui n'invoque par ailleurs aucun moyen relatif au surplus des sommes restant en litige ;

11. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, est sans incidence la circonstance que les sociétés BFM et FD2F auraient fait l'objet de vérifications de comptabilité, à l'issue desquelles les écritures portées dans les comptes courants d'associés n'auraient pas été remises en cause ; que, de même, les circonstances que les comptes courants des autres associés étaient créditeurs et auraient permis de réaliser des avances entre associés et que les numéros de chèques émis par les sociétés précitées ont été inscrits dans la comptabilité de ces sociétés aux comptes courants des autres associés sont sans portée pour établir la réalité de prêts amicaux entre associés ;

Sur les majorations :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ... entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ... " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs... la preuve de la mauvaise foi ... incombe à l'administration " ;

13. Considérant que l'administration a appliqué la majoration prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts sur des sommes détournées par M. C... de la société BFM, sur les sommes versées par chèques par cinq sociétés dont le requérant était associé et sur des crédits bancaires non justifiés ; qu'en se fondant sur la nécessaire connaissance de la nature des crédits et de leur origine et sur la nécessité de justifier, le cas échéant, leur caractère non imposable, l'administration établit suffisamment l'intention délibérée de M. C... d'éluder l'impôt et, par suite, le bien-fondé des majorations contestées ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens :

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; qu'aux termes de l'article R. 761-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts ... Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties ... " ;

16. Considérant qu'il y a lieu de laisser les dépens de première instance à la charge de M. C...; que, par ailleurs, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C...demande au titre des frais qu'il a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1315948 du 23 septembre 2014 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande de M. C...devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Ile-de-France Ouest.

Délibéré après l'audience du 29 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M. Platillero, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 novembre 2015.

Le rapporteur,

F. PLATILLEROLe président,

S.-L. FORMERY Le greffier,

S. JUSTINELa République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°14PA04632


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA04632
Date de la décision : 12/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : LABINY

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-11-12;14pa04632 ?
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