La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2015 | FRANCE | N°15PA01673

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 23 octobre 2015, 15PA01673


Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2015, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me E... A... ; Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305830/10 du 16 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 6 juin 2013 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé la pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite et à ce qu'il soit

enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un...

Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2015, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me E... A... ; Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305830/10 du 16 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 6 juin 2013 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé la pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite et à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme B...soutient que :

- sur la décision lui refusant un titre de séjour : elle n'est pas suffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée d'un entretien préalable en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour préalablement à son édiction ; elle est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sur l'obligation de quitter le territoire français : elle doit être annulée, par la voie de l'exception, au regard de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- ses parents vivent depuis plus de quarante ans en France où elle-même est arrivée très jeune et a fait ses études ;

- elle a été contrainte de retourner en Algérie pour se marier selon les prescriptions coraniques en 1986 ;

- elle a introduit une demande en divorce en 2008 puis a rejoint la France le 13 décembre de la même année, sous couvert d'un visa ; que ses parents ainsi que ses frères et soeurs résident en France et disposent de la nationalité française ; qu'elle vit en France avec deux de ses cinq enfants ; que sa fille est scolarisée en France et que son fils a épousé une ressortissante française ; que son divorce a été prononcé le 25 janvier 2012 à la demande de son époux ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2015, le rapport de M. Polizzi, président assesseur ;

1. Considérant que Mme B..., née le 19 décembre 1967 à Taourirt (Algérie), de nationalité algérienne, est entrée en France le 13 décembre 2008 sous couvert d'un visa touristique ; qu'elle a sollicité la régularisation de sa situation administrative ; que par un arrêté en date du 6 juin 2013, le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite ; que Mme B...demande à la Cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun rejetant sa requête dirigée contre cet arrêté ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée du 6 juin 2013 vise les textes dont elle fait application ; qu'elle précise notamment que Mme B...ne justifie pas résider sur le territoire français depuis plus de dix ans et ne peut par conséquent se prévaloir des dispositions de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; que n'ayant produit ni contrat de travail visé par les autorités compétentes, ni visa de long séjour, elle ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée sur le fondement des articles 7 b) et 9 de cet accord ; que les stipulations de celui-ci régissant de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis au séjour en qualité de salarié, Mme B...ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en tout état de cause, en l'absence de production d'un contrat de travail et à défaut d'intégration professionnelle en France, sa demande d'admission au séjour ne se justifie par aucun motif exceptionnel ; que son divorce a été prononcé le 25 janvier 2012 et qu'elle a reconnu l'abandon du domicile conjugal et la renonciation à ses droits sur ses enfants mineurs ; que si elle déclare la présence en France de deux de ses enfants, aucun ne réside à son domicile et elle ne justifie pas de sa participation à leur entretien ; qu'elle ne justifie pas de l'intensité de ses liens avec sa famille résidant en France ; qu'elle possède de très solides attaches familiales dans son pays d'origine et notamment trois enfants dont un mineur, un frère et une soeur, qu'elle n'établit pas être dans l'impossibilité de s'établir hors de France et d'y poursuivre une vie privée et familiale normale, que, par suite, elle ne peut se prévaloir d'un droit au séjour sur le fondement des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; qu'elle n'a pas démontré remplir les conditions lui permettant de se voir attribuer une carte de séjour sur un autre fondement ; qu'ainsi, la décision attaqué énonce très précisément les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ; que, dès lors, le moyen manque en fait et doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 (...) n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites, et, le cas échéant, des observations orales (...) " ; que la décision contestée a été prise sur une demande de Mme B...formée auprès de la préfecture du Val-de-Marne le 16 avril 2013 ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance de la procédure prévue par les dispositions précitées, qui ne lui étaient pas applicables ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : "(...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; que Mme B...soutient qu'elle est arrivée sur le territoire français vers l'âge de 3 ans et y a vécu jusqu'à l'âge de 19 ans avant d'être contrainte de retourner en Algérie en 1986 pour épouser un ressortissant algérien à la demande de ses parents, qu'elle réside habituellement en France depuis décembre 2008 et que deux de ses enfants résident en France où résident également ses parents depuis de nombreuses années ainsi que ses frères et soeurs qui sont de nationalité française ; qu'elle ne produit cependant aucun justificatif à l'appui de ses allégations ; qu'ainsi que l'a mentionné le préfet dans la décision attaquée, elle n'établit ni que ses enfants vivent auprès d'elle, ni qu'elle contribue à leur entretien ; qu'elle ne justifie pas de l'intensité de ses liens familiaux en France ; qu'elle ne conteste pas avoir des attaches familiales en Algérie, et notamment trois enfants dont un mineur, ainsi qu'un frère et une soeur ; que si elle indique ne pouvoir poursuivre une vie privée et familiale normale en Algérie au regard de son statut de femme divorcée, elle ne l'établit pas ; que, dans ces circonstances, la décision attaquée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;

5. Considérant, en dernier lieu, que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls ressortissants algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'accord franco-algérien, et non de celui de tous ressortissants qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme B...n'établit pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour au titre de l'accord franco-algérien ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de statuer sur la demande de titre de séjour de l'intéressée ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en l'absence de la saisine de cette commission doit, dès lors, être écarté ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour entache d'illégalité la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que sa requête doit donc être rejetée, y compris en ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au préfet du Val-de-Marne. Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Bouleau, premier vice-président,

M. Polizzi, président-assesseur,

MmeD..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 23 octobre 2015.

Le rapporteur,

F. POLIZZI

Le président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

5

N° 10PA03855

2

N° 15PA01673


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01673
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Francis POLIZZI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : NGUYEN VAN HO

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-23;15pa01673 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award