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23/10/2015 | FRANCE | N°15PA00030

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 23 octobre 2015, 15PA00030


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'annuler l'arrêté en date du 30 décembre 2014, par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, ne lui a pas accordé de délai de départ volontaire et a décidé de le placer en rétention administrative ;

2°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir sous astreinte de 50

euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de met...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris :

1°) d'annuler l'arrêté en date du 30 décembre 2014, par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, ne lui a pas accordé de délai de départ volontaire et a décidé de le placer en rétention administrative ;

2°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la date de notification du jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1432233/8 du 2 janvier 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris du 2 janvier 2015 ;

2°) d'annuler les décisions attaquées.

Il soutient que :

- l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations a été méconnu ;

- l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne a été méconnu ;

- le principe général de respect des droits de la défense a été méconnu ;

- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;

- la situation personnelle de l'intéressé n'a pas fait l'objet d'un examen concret.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2015, le Préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur l'Union européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Magnard a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. B... fait appel du jugement n° 1432233/8 du 2 janvier 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 décembre 2014 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, ne lui a pas accordé de délai de départ volontaire et a décidé de le placer en rétention administrative ;

2. Considérant en premier lieu que l'arrêté litigieux comporte, au regard de l'ensemble des décisions qu'il comprend, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est, en conséquence, suffisamment motivé ; qu'il ne ressort en outre pas des pièces du dossier que la situation du requérant n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier ;

3. Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000: " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) - Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : - (...) 3º Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire

particulière (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des dispositions des articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français, fixe le délai de départ volontaire et le place en rétention administrative ; que, dès lors, l'article 24 de la loi

du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre des décisions précitées ;

5. Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne: " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires réglées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2.Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ; qu'aux termes de l'article 51 de cette charte: " 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions et organes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. En conséquence, ils respectent les droits, observent les principes et en promeuvent l'application, conformément à leurs compétences respectives. / (...) ";

6. Considérant que lorsqu'il fait obligation à un étranger de quitter le territoire français sur le fondement de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit être regardé comme mettant en oeuvre le droit de l'Union européenne ; qu'il lui appartient, dès lors, d'en appliquer les principes généraux, dont celui du droit à une bonne administration ; que, parmi les principes que sous-tend ce dernier, figure celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de

l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, ce droit se définit comme le droit de toute personne à faire connaître, de manière utile et effective, ses observations écrites ou orales au cours d'une procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible de lui faire grief ; que ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales; qu'enfin, une atteinte à ce droit n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative ne peut procéder d'office à l'exécution de la mesure d'éloignement prise à l'encontre d'un étranger avant l'expiration du délai prévu par ces dispositions, ni avant que le tribunal administratif éventuellement saisi n'ait statué, ce qui met l'intéressé en mesure de faire valoir son point de vue avant que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne soit susceptible de l'affecter défavorablement par une telle exécution ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...ait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de s'exprimer avant que ne soient prises les décisions attaquées, alors qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux d'audition signé par l'intéressé, que M. B...a été entendu par les services de police le 30 décembre 2014, et a notamment été interrogé en vue d'une éventuelle mesure d'éloignement vers son pays d'origine et d'un éventuel placement en rétention administrative ; que le requérant a ainsi eu la possibilité, au cours de cet entretien, de faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur les décisions prises à son encontre ; qu'ainsi, la procédure suivie par le préfet de police ne portait pas atteinte au principe fondamental du droit d'être entendu tel qu'énoncé au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

8. Considérant enfin qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que le principe général des droits de la défense ne peut en tout état de cause être regardé comme ayant été méconnu ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Brotons, président de chambre,

Mme Appèche, président assesseur,

M. Magnard, premier conseiller,

Lu en audience publique le 23 octobre 2015.

Le rapporteur,

M. MAGNARDLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00030
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. EGLOFF
Avocat(s) : SELARL GARCIA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-23;15pa00030 ?
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