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23/10/2015 | FRANCE | N°13PA04565

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 23 octobre 2015, 13PA04565


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...-E... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1211682/1-2 du 18 octobre 2013, le Tribunal administratif de Paris l'a déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2006, 2007 et 2008.

Procédure devan

t la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 décembre 2013, 14 août 2014, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...-E... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 à 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1211682/1-2 du 18 octobre 2013, le Tribunal administratif de Paris l'a déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2006, 2007 et 2008.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 décembre 2013, 14 août 2014,

2 octobre 2014, 29 décembre 2014, 3 février 2015 et 27 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n°.1211682/1-2 du 18 octobre 2013 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de remettre à la charge de Mme B...-E..., les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 2006, 2007 et 2008.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, en ce qu'il n'a pas été répondu aux arguments relatifs à la contestation des éléments de comparaison utilisés pour évaluer l'ensemble immobilier ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit au regard des principes d'une déduction pour dépréciation des stocks résultant des articles 38-3, 39-1-5° et 38 déciès de l'annexe III du code général des impôts ;

- le tribunal a dénaturé les éléments du dossier ;

- les moyens présentés en première instance par Mme B...-E... ne sont pas fondés et la proposition de rectification est suffisamment motivée.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 avril 2014, 15 septembre 2014,

30 octobre 2014, 13 janvier 2015, 14 avril 2015, Mme C...B...-E..., représentée par Selarl JTBB avocats , conclut au rejet du recours et à ce que le versement la somme de 5 000 euros soit mis à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens ne sont pas fondés ;

- la procédure est irrégulière à raison de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification.

Par un mémoire, enregistré le 31 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics s'est désisté de ses conclusions tendant au rétablissement des rappels d'impôt sur le revenu mis à la charge de Mme B...-E... au titre de l'année 2006.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la réclamation préalable ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me A...D...de la Selarl JTBB, avocat de

Mme C...B...-E... ;

1. Considérant que Mme B...-E... est associée, à hauteur de 31,16 % des parts, de la SCI Jemmapes Ecole, société de construction-vente d'immeubles relevant du régime fiscal des sociétés de personnes prévu aux articles 8 et 239 ter du code général des impôts ; que cette société a fait édifier en 1990, un ensemble immobilier situé au 44, quai de Jemmapes, à Paris, d'une surface totale de 1 465 m² ; qu'elle est restée propriétaire de cet immeuble dont 1 081 m² sont affectés à des locaux d'enseignement et l'a comptabilisé dans ses stocks pour un coût de revient fixé, à l'époque, à 41 691 898 francs, soit 6 355 889 euros ; que la SCI Jemmapes Ecole a fait l'objet, en 2009, d'une vérification de comptabilité portant, en matière de bénéfices industriels et commerciaux notamment, sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 ; que, lors de ce contrôle, l'administration a constaté que la SCI Jemmapes Ecole avait, dès 1990, comptabilisé une provision pour dépréciation de l'immeuble ainsi inscrit dans ses stocks et que cette provision avait fait l'objet de dotations complémentaires au titre de chacun des exercices suivants ; qu'estimant ces dotations injustifiées, elle en a, suivant la procédure contradictoire, rejeté la déduction à hauteur respective de

1 361 130 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et de 150 000 euros au titre de chacun des exercices clos en 2007 et 2008 ; qu'en conséquence de cette rectification, le service a ensuite rehaussé, à proportion de leur participation respective dans ladite société, les revenus imposables de ses associés, dont Mme B... -E..., dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 2006, 2007 et 2008 ; que, par jugement en date du 18 octobre 2013, dont le ministre des finances et des comptes public relève appel, le Tribunal administratif de Paris a accordé à

Mme B...-E..., la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été consécutivement assujettie au titre desdites années ;

Sur les conclusions relatives à l'année 2006 :

2. Considérant que, par un mémoire enregistré le 31 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics s'est désisté de ses conclusions tendant au rétablissement des rappels d'impôt sur le revenu mis à la charge de Mme B...-E... au titre de l'année 2006 ; que ce désistement est pur et simple ; qu'il y a lieu de lui en donner acte ;

Sur les conclusions relatives aux années 2007 et 2008 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant(...) notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) " ; qu'aux termes du 3 de l'article 38 du même code : " (...) les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient " ; qu'aux termes de l'article 38 nonies de l'annexe III au même code : " 1. Les (...) produits en stock (...) au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût de revient (...) " ; qu'aux termes de l'article 38 decies de la même annexe : " Si le cours du jour à la date de l'inventaire des marchandises (...) en stock au jour de l'inventaire est inférieur au coût de revient défini à l'article 38 nonies, l'entreprise doit constituer, à due concurrence, des provisions pour dépréciation " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation ; que pareille provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart avec une approximation suffisante ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des mentions non contestées du tableau récapitulatif figurant dans le mémoire en défense produit par le ministre, que, compte tenu des dotations annuelles aux provisions pour dépréciation déjà pratiquées par la SCI Jemmapes Ecole, au titre des exercices 1990 à 2006 inclus, pour un total de 3 295 888 euros, la valeur nette comptable de l'ensemble immobilier ici en cause s'établissait, au cours du jour à la clôture de l'exercice 2006, à 3 060 001 euros ; que la requérante soutient que la dépréciation croissante de ce bien justifierait les dotations complémentaires de 150 000 euros ultérieurement comptabilisées par la société au titre de chacun des exercices clos en 2007 et 2008 ; que, toutefois, les explications et pièces qu'elle produit aux débats, à savoir, d'une part, une expertise réalisée par le cabinet Bourdais le 8 juillet 1998 dont les résultats ont été actualisés jusqu'au 31 décembre 2005 d'après la base de données statistiques " Bien " établie par l'organisme Paris Notaires Services et, d'autre part, les rapports d'expertise dressés par la société CB Richard Ellis Valuation les 10 décembre 2009 et

4 février 2010, font apparaître que la valeur vénale réelle de l'immeuble concerné s'élevait encore respectivement à 3 110 930 euros, au 1er janvier 2006, et à 3 070 000 euros, au 31 décembre 2008, soit des valeurs demeurant... ; qu'ainsi, ces documents produits par Mme B...-E... ne permettent pas de justifier de la dépréciation du bien, ni par suite ne permettent de démontrer le bien-fondé des dotations complémentaires de 150 000 euros pratiquées par la société au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ; que c'est, dès lors, à bon droit que le service en a réintégré le montant aux résultats imposables de la SCI Jemmapes Ecole, au titre des exercices correspondants ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ni l'autre moyen du recours, que le Ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le Tribunal administratif a, pour accorder à Mme B...-E... la décharge des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007 et 2008, retenu que l'administration fiscale n'était pas fondée à reprendre les provisions en litige ;

6. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par Mme B...-E... devant le Tribunal administratif de Paris ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une notification de redressement doit comporter

la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations ;

8. Considérant que la proposition de rectification du 16 décembre 2009 adressée à

Mme B...-E... indique la désignation de l'impôt concerné, l'année d'imposition et reprend le montant des provisions contestées par année d'imposition ; qu'en annexe à cette proposition de rectification, l'administration fiscale a joint la proposition de rectification adressée à la SCI Jemmapes qui exposait les motifs de fait et de droit sur lesquels elle était fondée et comportait les conséquences financières du rehaussement ; qu'ainsi, Mme B...-E..., qui pouvait utilement formuler ses observations, n'est pas fondée à soutenir que la procédure de rectification est insuffisamment motivée au regard des exigences découlant des dispositions précitées de l'article

L. 57 du livre des procédures fiscales, ni par suite pour ce motif à obtenir la décharge des impositions en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a accordé à Mme B...-E... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 2007 et 2008 ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B...-E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions du recours du Ministre des finances et des comptes publics tendant au rétablissement des rappels d'impôt sur le revenu mis à la charge de Mme B...-E... au titre de l'année 2006.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été assignées à

Mme B...-E... au titre des années 2007 et 2008 sont remises à sa charge.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 18 octobre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4° : Les conclusions de Mme B...-E... présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au Ministre des finances et des comptes publics et à Mme C... B...-E...

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- Mme Stahlberger, président,

Lu en audience publique, le 23 octobre 2015.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

J. BOUCLY La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA04565


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA04565
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Provisions.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SELARL JTBB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-23;13pa04565 ?
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