Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Financière MN, venant aux droits et obligations des sociétés Etablissements Legros Burette, Laboratoires Henri Vial, UBK n° 1, UBK n° 2 et UBK n° 4, a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % sur cet impôt et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2003 et 2004.
Par un jugement n° 0708147 du 7 juillet 2009, le Tribunal administratif de Paris a prononcé cette décharge.
Le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat a interjeté appel de ce jugement, en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la société Financière MN tendant à la décharge des impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes, résultant de la remise en cause du régime d'exonération prévu en faveur des sociétés mères par les articles 145, 146 et 216 du code général des impôts.
Par un arrêt n° 09PA06362 du 29 juillet 2011, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté le recours du ministre.
Par une décision du 14 novembre 2014, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 29 juillet 2011 et a renvoyé l'affaire devant la même Cour.
Procédure devant la Cour :
Par un recours et des mémoires complémentaires, enregistrés les 10 novembre 2009, 7 juillet 2011, 9 février 2015 et 19 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2009 du Tribunal administratif de Paris, en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la société Financière MN tendant à la décharge des impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes, résultant de la remise en cause du régime d'exonération prévu en faveur des sociétés mères par les articles 145, 146 et 216 du code général des impôts ;
2°) de remettre les impositions et pénalités en litige à la charge de la société Financière MN.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et entaché d'omission à statuer ;
- le Tribunal a dénaturé les écritures de l'administration ;
- le Tribunal a inexactement qualifié les faits de l'espèce en considérant que le montage auquel s'étaient livrées les sociétés en cause n'était pas purement artificiel ;
- le Tribunal a inexactement qualifié les faits de l'espèce et commis une erreur de droit en estimant que les opérations auxquelles s'étaient livrées les sociétés étaient conformes à l'intention du législateur.
Par des mémoires, enregistrés les 30 juillet 2010 et 2 mars 2015, les société Esol et Z Immobilier, venant aux droits et obligations, respectivement de la société Financière MN et de la société Hivea, concluent au rejet du recours et à ce qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le moyen tiré du défaut de motivation du jugement est inopérant ;
- les sociétés concernées n'ont pas poursuivi un but exclusivement fiscal dès lors que leurs bénéfices comptables ont augmenté à la suite des opérations ;
- en tout état de cause, la recherche d'un avantage fiscal à travers l'option pour le régime des sociétés mères est expressément admis par la doctrine administrative (instruction du 27 avril 1993 BOI 4H-12-93) ;
- les sociétés concernées n'ont pas recherché un avantage contraire à l'objectif du législateur dès lors qu'elles se sont bornées à appliquer les dispositions légales relatives à l'exonération des dividendes perçus par les sociétés mères et que ces dispositions, contrairement à ce que soutient l'administration, ne subordonnent pas le bénéfice de l'exonération à un rôle actif de l'actionnaire dans la filiale, à un délai entre l'acquisition des titres et l'exercice de l'option ou à l'acquisition de titres ayant le caractère de titres de participation et non de placement ;
- la doctrine administrative (DB 44 2114 et instruction du 29 juin 1995 BOI 4H-10-95 du 13 juillet 1995) confirme que les titres n'ont pas nécessairement à être " de participation " ;
- les opérations litigieuses ne sont pas constitutives d'un montage purement artificiel dès lors qu'elles sont courantes, ont été conclues à des conditions normales et que ni les sociétés mères ni les sociétés filiales n'ont été constituées de manière ad hoc en vue de créer une situation artificielle ;
- l'administration ne démontre pas que les filiales auraient distribué toutes leurs liquidités.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dalle,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.
1. Considérant que la société Financière MN, aux droits de laquelle sont venues successivement les sociétés Esol, Hivea et Z Immobilier, a fait l'objet en 2006 de redressements en matière d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés, qui ont été mis à sa charge au titre des années 2003 et 2004, en conséquence, d'une part, de la remise en cause par le service de l'exonération de dividendes, dont en application de l'article 145 du code général des impôts, elle avait bénéficié et dont avaient également bénéficié les sociétés, absorbées par elle, Entreprises Legros Burette et Cie, UBK French Property Compagny n°1, UBK French Property Compagny n° 2, UBK French Property Compagny n° 4 et Laboratoires Henri Vial, d'autre part, de l'imposition, sur le fondement du 2 de l'article 209 quater du code général des impôts, de plus-values réalisées par la société Entreprises Legros Burette et Cie ; que ces impositions supplémentaires ont été entièrement dégrevées par jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 juillet 2009 ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce jugement mais seulement en tant qu'il a déchargé la société Financière MN des impositions supplémentaires procédant de la remise en cause du régime d'exonération des dividendes prévu à l'article 145 du code général des impôts ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 145 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : " 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : a. les titres de participations doivent revêtir la forme nominative ou être déposés dans un établissement désigné par l'administration ; b. les titres de participation doivent représenter au moins 5 % du capital de la société émettrice (...) ; c. les titres de participations doivent avoir été souscrits à l'émission. A défaut, la personne morale participante doit avoir pris l'engagement de les conserver pendant un délai de deux ans. (...). " ; qu'aux termes de l'article 216 du même code : " I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges (...) " ; qu'aux termes du I de l'article 219 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " (...) a ter. Le régime des plus-values et moins-values à long terme cesse de s'appliquer au résultat de la cession de titres du portefeuille réalisée au cours d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1994 à l'exclusion des parts ou actions de sociétés revêtant le caractère de titres de participation (...). Pour les exercices ouverts à compter de la même date, le régime des plus ou moins-values à long terme cesse également de s'appliquer en ce qui concerne les titres de sociétés dont l'actif est constitué principalement par des titres exclus de ce régime ou dont l'activité consiste de manière prépondérante en la gestion des mêmes valeurs pour leur propre compte. Pour l'application des premier et deuxième alinéas, constituent des titres de participation les parts ou actions de sociétés revêtant ce caractère sur le plan comptable. Il en va de même (...) des titres ouvrant droit au régime des sociétés mères, (...) si ces (...) titres sont inscrits en comptabilité au compte de titres de participation ou à une subdivision spéciale d'un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable (...) " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; (...) L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, auraient normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SAS Financière MN a acquis le 8 décembre 2003, le 1er janvier, le 20 avril, les 12, 14 et 21 mai et le 13 octobre 2004, les titres, respectivement, des sociétés Cathecor, OM Consulting, JSM Music, Profadi puis Sogefa, pour un montant total de 9 341 123 euros ; que la société Financière MN, après s'être engagée à les conserver pendant une durée de deux ans, les a inscrits en comptabilité à son actif en tant que valeurs mobilières de placement ; qu'avant la clôture des exercices de 2003 et 2004, ces sociétés ont versé à la société Financière MN des dividendes d'un montant total de 2 436 794 euros, soit 6 904 329 euros de moins que le coût d'acquisition des titres, qui ont bénéficié du régime des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts ; que, parallèlement, la SAS Financière MN a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres litigieux et a ainsi dégagé un déficit fiscal qui lui a permis de réaliser une économie immédiate d'impôt sur les sociétés de 14 405 euros au titre de l'exercice clos en 2003 et de 18 755 euros au titre de l'exercice clos en 2004 ; que la société des entreprises Legros Burette et compagnie a acquis les titres de la société JSM Music le 30 décembre 2003 pour un montant de 7 472 552 euros et, après s'être engagée à les conserver pendant une durée de deux ans, les a inscrits en comptabilité à son actif en tant que valeurs mobilières de placement ; qu'avant la clôture de l'exercice de 2003, la société JSM Music a versé à la société des entreprises Legros Burette et Cie des dividendes d'un montant total de 7 150 000 euros, soit 322 552 euros de moins que le coût d'acquisition des titres, qui ont bénéficié du régime des sociétés mères ; que, parallèlement, la société des entreprises Legros Burette et Cie a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres litigieux et a ainsi dégagé un déficit fiscal qui lui a permis de réaliser une économie immédiate d'impôt sur les sociétés de 2 232 129 euros au titre de l'exercice clos en 2003 ; que la SA Laboratoires Henri Vial a acquis les titres de la société SEP 2, le 22 juin 2004, pour un montant de 1 708 135 euros et, après s'être engagée à les conserver pendant une durée de deux ans, les a inscrits en comptabilité à son actif en tant que valeurs mobilières de placement ; qu'avant la clôture de l'exercice de 2004, la société SEP 2 a versé à la SA Laboratoires Henri Vial des dividendes d'un montant total de 1 632 000 euros, soit 176 135 euros de moins que le coût d'acquisition des titres, qui ont bénéficié du régime des sociétés mères ; que, parallèlement, la SA laboratoires Henri Vial a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres litigieux et a ainsi dégagé un déficit fiscal qui lui a permis de réaliser une économie immédiate d'impôt sur les sociétés de 296 358 euros au titre de l'exercice clos en 2004 ; que la SA UBK French property compagny 1 a acquis, le 20 septembre, les 8 et 15 novembre et les 16 et 29 décembre 2004, les titres, respectivement, des sociétés LHOM, et des trois sociétés, LB, Mat et Raymond pour un montant total de 9 945 279 euros ; qu'après s'être engagée à les conserver pendant une durée de deux ans, elle les a inscrits en comptabilité à son actif en tant que valeurs mobilières de placement ; qu'avant la clôture de l'exercice de 2004, ces sociétés ont versé à la SA UBK French Property Compagny 1 des dividendes d'un montant total de 5 975 360 euros, soit 3 969 919 euros de moins que le coût d'acquisition des titres, qui ont bénéficié du régime des sociétés mères ; que, parallèlement, la SA UBK 1 a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres litigieux et a ainsi dégagé un déficit fiscal qui lui a permis de réaliser une économie immédiate d'impôt sur les sociétés de 1 568 562 euros, au titre de l'exercice clos en 2004 ; que la SA UBK French Property Compagny 2 a acquis, les 9 et 10 novembre et le 15 décembre 2004, les titres, respectivement, des sociétés Equid et Deregnaucourt pour un montant total de 6 607 972 euros ; qu'après s'être engagée à les conserver pendant une durée de deux ans, elle les a inscrits en comptabilité à son actif en tant que valeurs mobilières de placement ; qu'avant la clôture de l'exercice clos en 2004, ces sociétés ont versé à la SA UBK French Property Compagny 2 des dividendes d'un montant total de 6 157 125 euros, soit 450 847 euros de moins que le coût d'acquisition des titres, qui ont bénéficié du régime des sociétés mères ; que, parallèlement, la SA UBK French Property Compagny 2 a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres litigieux et a ainsi dégagé un déficit fiscal qui lui a permis de réaliser une économie immédiate d'impôt sur les sociétés de 1 798 408 euros au titre de l'exercice clos en 2004 ; qu'enfin, la SA UBK French Property Compagny 4 a acquis le 19 octobre, les 16 et 18 novembre et le 27 décembre 2004, les titres, respectivement, des sociétés BMC, Joly Bijoux et GD Finances pour un montant total de 3 534 330 euros ; qu'après s'être engagée à les conserver pendant une durée de deux ans, elle les a inscrits en comptabilité à son actif en tant que valeurs mobilières de placement ; qu'avant la clôture de l'exercice clos en 2004, ces sociétés ont versé à la SA UBK French Property Compagny 4 des dividendes d'un montant total de 3 200 596 euros, soit 2 031 777 euros de moins que le coût d'acquisition des titres, qui ont bénéficié du régime des sociétés mères ; que, parallèlement, la SA UBK French Property Compagny 4 a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres litigieux et a ainsi dégagé un déficit fiscal qui lui a permis de réaliser une économie immédiate d'impôt sur les sociétés de 817 947 euros au titre de l'exercice clos en 2004 ;
5. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des travaux préparatoires du régime fiscal des sociétés mères, en particulier des travaux préparatoires de l'article 27 de la loi du 31 juillet 1920 portant fixation du budget général de l'exercice 1920, de l'article 53 de la loi du 31 décembre 1936 portant réforme fiscale, de l'article 45 de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952 portant loi de finances pour 1952, des article 20 et 21 de la loi n° 65-566 du 12 juillet 1965 modifiant l'imposition des entreprises et des revenus de capitaux mobiliers et de l'article 9 de la loi de finances pour 2001, ainsi que de la circonstance que le bénéfice de ce régime fiscal a toujours été subordonné à une condition de détention des titres depuis l'origine ou de durée minimale de détention, et, depuis 1936, à une condition de seuil de participation minimale dans le capital des sociétés émettrices, que le législateur, en cherchant à supprimer ou à limiter la succession d'impositions susceptibles de frapper les produits que les sociétés mères perçoivent de leurs participations dans des sociétés filles et ceux qu'elles redistribuent à leurs propres actionnaires, a eu comme objectif de favoriser l'implication de sociétés mères dans le développement économique des sociétés filles pour les besoins de la structuration et du renforcement de l'économie française ; que le fait d'acquérir des sociétés ayant cessé leur activité initiale et liquidé leurs actifs, dans le but d'en récupérer les liquidités par le versement de dividendes exonérés d'impôt sur les sociétés en application du régime de faveur des sociétés mères, sans prendre aucune mesure de nature à leur permettre de reprendre et développer leur ancienne activité ou d'en trouver une nouvelle, va à l'encontre de cet objectif ; qu'en l'espèce, l'administration a relevé que les diverses sociétés acquises par les sociétés Financière MN, Entreprises Legros Burette et Cie, UBK French Property Compagny n°1, UBK French Property Compagny n° 2, UBK French Property Compagny n° 4 et Laboratoires Henri Vial avaient cessé toute activité et étaient dépourvues de moyens matériels et humains ; que les distributions successives de dividendes ont eu pour effet de priver ces filiales des moyens susceptibles de leur permettre de retrouver une activité ; que si les sociétés susmentionnées remplissaient les conditions légales pour bénéficier du régime des sociétés mères prévu par les articles 145 et 216 du code général des impôts dans leur rédaction alors applicable, si elles ont pris et tenu l'engagement de conserver les titres pendant deux ans et si les opérations litigieuses n'ont pas été rendues possibles par l'interposition d'une ou de sociétés spécialement créées à cette fin, il résulte des circonstances rappelées ci-dessus que ces sociétés n'ont pris aucune mesure de nature à favoriser le développement des sociétés qu'elles venaient d'acquérir ; que la société Z Immobilier ne remet pas en cause les constatations opérées par le service, en se bornant à soutenir que les allégations de l'administration quant à l'absence de moyens laissés aux filiales ne sont pas démontrées et " qu'il ne ressort d'aucun élément " que les filiales n'auraient pas conservé une partie de leurs liquidités, dès lors qu'elle n'apporte aucun commencement de preuve de ce que les filiales auraient conservé des moyens humains ou matériels et que la circonstance que certaines filiales n'aient pas immédiatement distribué la totalité de leurs liquidités aux sociétés mères n'implique pas qu'elles auraient eu, ou poursuivi, une activité quelconque ; qu'il suit de là que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de ce que les opérations litigieuses ont méconnu les objectifs poursuivis par le législateur quand il a institué le régime des sociétés mères ;
6. Considérant, par ailleurs, que les opérations en cause ont, grâce à la déduction immédiate des provisions correspondant à la dépréciation des titres et à l'exonération d'impôt dont ont bénéficié, à l'exception d'une quote-part, les dividendes reçus des sociétés filles en application du régime des sociétés mères, permis aux sociétés Financière MN, Entreprises Legros Burette et Cie, UBK French Property Compagny n°1, UBK French Property Compagny n° 2, UBK French Property Compagny n° 4 et Laboratoires Henri Vial de dégager d'importants déficits fiscaux pour partie imputables sur leurs autres bénéfices et, pour le reste, reportables ; qu'elles ne leur ont procuré aucun gain de trésorerie, dès lors que le prix d'acquisition des titres excédait dans tous les cas le montant des dividendes distribués ; que si les sociétés Esol, puis Z Immobilier, font état d'un accroissement des bénéfices comptables des sociétés mères, ou d'un " avantage économique " dont elles auraient bénéficié, égal à la différence entre les dividendes qu'elles ont reçus des filiales et le montant des provisions qu'elles ont constituées pour tenir compte de la perte de valeur consécutive à ces distributions, une telle différence comptable ne peut être regardée comme de nature à justifier les montages litigieux, dès lors qu'en l'absence de tout autre effet des opérations, elle ne peut résulter que d'un partage de l'avantage fiscal entre le cédant et le cessionnaire de chaque filiale ; que l'administration démontre par suite également que les opérations litigieuses ont été inspirées par un but exclusivement fiscal ;
7. Considérant que si la société Z Immobilier invoque la doctrine administrative référencée 4 H-12-93 du 27 avril 1993 , reprise par la documentation administrative 4 H-2113 à jour au 1er mars 1995, celle-ci, en indiquant que le régime des sociétés mères-filiales présente un caractère optionnel et a notamment pour objectif d'atténuer la double imposition des dividendes, n'énonce aucune interprétation formelle de la loi fiscale différente de celle dont il est fait ici application ; qu'il en va de même de la doctrine référencée 4H-10-95 du 13 juillet 1995, qui énonce que les titres acquis n'ont pas nécessairement à être des titres de participation ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a jugé que l'administration n'apportait pas la preuve, qui lui incombait, de ce que les opérations litigieuses avaient été inspirées par un but exclusivement fiscal et avaient méconnu les objectifs poursuivis par le législateur quand il a institué le régime des sociétés mères, et de ce qu'elles constituaient ainsi un abus de droit ;
9. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés tant devant le tribunal administratif par la société Financière MN, que devant elle par les sociétés Esol puis Z Immobilier ;
10. Considérant, en premier lieu, que l'intérêt de retard institué par l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et de payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'il suit de là que la société Financière MN ne peut utilement soutenir que le taux annuel de l'intérêt de retard devait être limité au taux annuel de l'intérêt légal ;
11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales " ; qu'eu égard aux objectifs de prévention et de répression de la fraude et de l'évasion fiscale auxquels répondent les pénalités fiscales, le principe de personnalité des peines ne fait pas obstacle à ce que, à l'occasion d'une opération de fusion ou de scission, ces sanctions pécuniaires soient mises, compte tenu de la transmission universelle du patrimoine, à la charge de la société absorbante, d'une nouvelle société créée pour réaliser la fusion ou de sociétés issues de la scission, à raison des manquements commis, avant cette opération, par la société absorbée ou fusionnée ou par la société scindée ; que la société Financière MN, qui est venue aux droits des sociétés Entreprises Legros Burette et Cie, UBK French Property Compagny n°1, UBK French Property Compagny n° 2, UBK French Property Compagny n° 4 et Laboratoires Henri Vial, ne peut donc soutenir que la pénalité de 80 % qui lui a été infligée en application de l'article 1729 précité ne saurait lui être réclamée faute pour elle d'avoir commis les faits reprochés ;
12. Considérant, en troisième et dernier lieu, que la société requérante ne peut se prévaloir de l'instruction administrative référencée 4 I-1242 § 26 en date du 1er novembre 1995, reprise le 26 mars 2001 au BOI 41-1-01 n° 64, qui ne concerne pas le régime en litige des sociétés mères et des filiales, mais celui des fusions institué par les articles 210 A et 210 B du code général des impôts ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Financière MN des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, à raison de la remise en cause de l'exonération prévue par l'article 145 du code général des impôts ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler, dans cette mesure, le jugement attaqué, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les moyens soulevés par le ministre relatifs à la régularité dudit jugement et de remettre les impositions et pénalités litigieuses à la charge de la société Financière MN ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de cet article s'opposent à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, en remboursement des frais exposés par la société Esol, aux droits de laquelle sont venues les sociétés Hivea puis Z Immobilier ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du 7 juillet 2009 du Tribunal administratif de Paris est annulé, en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la société Financière MN tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003 et 2004, procédant de la remise en cause de l'exonération prévue par l'article 145 du code général des impôts, et des pénalités y afférentes.
Article 2 : Les cotisations et pénalités mentionnées à l'article 1er sont remises à la charge de la société Financière MN.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société Esol, aux droits de laquelle sont venues les sociétés Hivea puis Z Immobilier, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Z Immobilier et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2015 à laquelle siégeaient :
M. Jardin, président de chambre,
M. Dalle, président assesseur,
Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 octobre 2015.
Le rapporteur, Le président,
D. DALLE C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA04782