Vu le recours, enregistré le 7 juillet 2014, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre de l'intérieur demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1317857/3-3 du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, du 4 novembre 2013 refusant la délivrance d'une autorisation de travail à Mme A...B..., lui a enjoint de délivrer à l'intéressée une autorisation de travail dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'État le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris ;
Il soutient que le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail, dès lors que :
- les diplômes de niveau " Bac + 4 " et l'expérience de l'intéressée n'étaient pas en adéquation avec le poste de chef de rang proposé qui ne requiert qu'un niveau " CAP/BEP à Bac " ;
- l'employeur n'a pas justifié des raisons pour lesquelles les autres candidats ont été écartés, alors qu'ils présentaient manifestement un profil adéquat ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2014, présenté pour Mme B..., demeurant au..., par MeC... ; Mme B...conclut :
- au rejet du recours du ministre de l'intérieur ;
- à l'annulation de la décision du 4 novembre 2013 du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris ;
- à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- son profil est en adéquation avec le poste proposé compte tenu des caractéristiques de l'établissement, et du fait qu'il s'agit pour elle de son premier emploi ;
- l'employeur justifiait des difficultés de recrutement rencontrées, dès lors qu'aucun autre candidat ayant postulé à l'offre ne répondait à l'ensemble des exigences de ce poste ; le ministre n'identifie d'ailleurs aucun candidat répondant à l'ensemble de ces exigences ; le poste était toujours vacant au jour du jugement du tribunal administratif ;
- la décision litigieuse du 4 novembre 2013 est insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, les spécificités requises pour le poste et présentées par l'employeur n'ayant pas été prises en considération ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation tant au regard des spécificités du poste en cause que de l'adéquation de ses compétences avec ce dernier ;
- cette décision est entachée d'une erreur de fait tenant aux difficultés de recrutement rencontrées par l'employeur, dès lors que le nombre de candidatures était peu élevé et qu'aucun candidat postulant n'a satisfait à l'ensemble des exigences requises pour le poste ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 septembre 2015 :
- le rapport de M. Niollet, président-rapporteur,
- et les observations de MeC..., pour MmeB... ;
1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne, née le 15 août 1987 à Bouzareah (Algérie), est entrée en France, selon ses déclarations, en octobre 2008, munie d'un passeport revêtu d'un visa " étudiant " et y a été titulaire de plusieurs titres de séjour en qualité d'étudiante qui se sont succédés jusqu'au 31 décembre 2013 ; que la société SNC Management Hôtel a sollicité, le 20 avril 2013, la délivrance d'une autorisation de travail en vue de l'employer en qualité de chef de rang ; que, par une décision du 4 novembre 2013, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a opposé un refus à cette demande en se fondant sur la situation de l'emploi et sur le fait que ses diplômes n'étaient selon lui pas en adéquation avec le poste proposé ; que le ministre de l'intérieur relève régulièrement appel du jugement n° 1317857/3-3 du 20 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cette décision ;
Sur les conclusions du ministre de l'intérieur :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) " ;
3. Considérant que, pour annuler la décision refusant la délivrance d'une autorisation de travail à MmeB..., le tribunal administratif a relevé que l'intéressée est notamment titulaire d'un diplôme de management en tourisme et hôtellerie internationale délivré en 2012 par l'Université de Perpignan, et que, si ses titres et diplômes révèlent un niveau d'étude supérieure à celui de " bac + 2 " requis dans l'offre d'emploi publiée, ils sont néanmoins en adéquation avec l'emploi de chef de rang proposé et les perspectives qui s'offrent à elle dans ce secteur d'activité ; que le tribunal administratif s'est également fondé sur le fait que, résidant en France et ayant accompli des stages dans l'hôtellerie, Mme B... justifie d'une expérience professionnelle en adéquation avec cet emploi ; que le tribunal a en outre relevé qu'il n'était pas contesté que l'employeur avait accompli des recherches préalables pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail et qu'il justifiait des motifs pour lesquels, il avait retenu la candidature de MmeB... ;
4. Considérant que le ministre de l'intérieur conteste ce jugement en faisant valoir que le poste proposé à Mme B...ne nécessitait qu'un niveau " CAP/BEP à Bac ", qu'il ressort des pièces du dossier que si les diplômes en tourisme et en hôtellerie internationale dont Mme B...est titulaire sont de niveau " Bac + 4 " alors que l'offre d'emploi exigeait un niveau " bac + 2 ", ils ne peuvent être regardés comme n'étant pas en adéquation avec l'emploi auquel elle postule ; que contrairement à ce que soutient le ministre, l'employeur qui a accompli des recherches pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail, a suffisamment justifié des raisons pour lesquelles les autres candidatures ont été écartées ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision en litige ;
Sur les conclusions de Mme B...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à Mme B...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A...B....
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs-Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Petit, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 septembre 2015.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS-TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA02938