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10/07/2015 | FRANCE | N°14PA05069

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 juillet 2015, 14PA05069


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 décembre 2014 et 21 janvier 2015, présentés par le préfet de police qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1411635 du 12 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 18 juin 2014 refusant de délivrer un titre de séjour à M. C...A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant son pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administ

ratif de Paris ;

Le préfet de police soutient que :

- c'est à tort que le Tribu...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 décembre 2014 et 21 janvier 2015, présentés par le préfet de police qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1411635 du 12 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 18 juin 2014 refusant de délivrer un titre de séjour à M. C...A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant son pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Le préfet de police soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a retenu une erreur de droit pour annuler son arrêté du 18 juin 2014 ;

- en effet, si M. A...a saisi, le 21 octobre 2013, la préfecture de police d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, celle-ci doit être regardée comme une nouvelle demande distincte de la demande initiale du 28 mai 2013 ;

- ainsi, en l'absence de présentation personnelle de l'intéressé à la préfecture conformément aux dispositions de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'était pas tenu d'examiner la nouvelle demande de M. A...sur le fondement de l'article

L. 313-14 du même code ;

- au surplus, M.A..., qui résidait régulièrement en France lorsqu'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour, n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14, qui concernent les étrangers qui résident irrégulièrement sur le territoire français ;

- s'agissant des autres moyens soulevés en première instance, il s'en rapporte à ses écritures devant le Tribunal administratif de Paris ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 février 2015, présenté pour M. A... par

MeB... ; M. A...conclut au rejet de la requête, à la réformation du jugement en ce qu'il a uniquement enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A...fait valoir que :

- sa demande par courrier du 28 octobre 2013 a été, à la fois, précédée et suivie d'un déplacement en préfecture ;

- l'admission exceptionnelle est invocable par tout étranger sollicitant un titre de séjour ;

- l'arrêté attaqué est signé par une autorité incompétente ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté attaqué n'a pas été pris à l'issue d'un examen particulier de sa situation personnelle, le préfet de police n'ayant pas examiné sa demande sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'erreurs de fait quant à la date de sa dernière présentation à la préfecture et quant à l'effectivité de ses attaches personnelles dans son pays d'origine ;

- en se fondant sur l'absence d'inscription à Pôle emploi, le préfet de police a ajouté une condition non posée par les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dans la mesure où il est entré mineur en France et a été pris en charge par les services de l'aide à l'enfance, il justifie d'une formation scolaire et d'une insertion professionnelle et il est dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 5 juin 2015, présenté par le préfet de police ; il conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; il soutient en outre que les conclusions aux fins d'injonction de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", qui ont la nature de conclusions incidentes, auraient dû faire l'objet d'un appel distinct et sont en conséquence irrecevables ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 23 juin 2015, présenté pour M. A... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2015 :

- le rapport de M. Cheylan, premier conseiller,

- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,

- et les observations de M. A...;

1. Considérant que M.A..., ressortissant malien né le 25 décembre 1993, est entré en France le 28 septembre 2009 selon ses déclarations ; qu'il a été pris en charge en tant que mineur isolé par les services de l'aide sociale à l'enfance à partir de mars 2010 pour une période de trois ans ; qu'il a sollicité le 28 mai 2013 le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 18 juin 2014, le préfet de police a opposé un refus à la demande de M.A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que le préfet de police relève appel du jugement du 12 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté ;

Sur l'appel du préfet de police :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; que ces dispositions définissent, pour les personnes qui ne satisfont pas aux conditions fixées par le code pour la délivrance des cartes de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-11 ou portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 et qui sollicitent leur régularisation, un régime d'admission exceptionnelle au séjour en France ; qu'il ressort des termes mêmes de cet article qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter, à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient. (...) " ;

4. Considérant qu'il est constant que M.A..., qui bénéficiait d'une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " valable jusqu'au 31 juillet 2013, s'est présenté en préfecture le 28 mai 2013 et le 18 septembre 2013 pour demander son maintien au séjour en invoquant sa vie privée et familiale ; que, par un courrier en date du 21 octobre 2013 dont le préfet a accusé réception le 28 octobre 2013, le conseil de M. A...a complété cette demande en sollicitant son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet soutient que M.A..., qui résidait régulièrement en France lorsqu'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour, n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14, que cette demande doit être regardée comme une nouvelle demande et que l'intéressé ne s'est pas présenté personnellement pour solliciter son admission exceptionnelle au séjour, ainsi qu'il était tenu de le faire en application des dispositions précitées de l'article R. 311-1 ; qu'il ressort toutefois des éléments du dossier que M. A...a par la suite été reçu en préfecture le 11 janvier 2014 pour la délivrance d'un récépissé de demande de carte de séjour ; qu'en tout état de cause, dans les circonstance particulières de l'espèce, eu égard aux termes précis du courrier du 21 octobre 2013, au délai de plus de sept mois qui s'est écoulé entre la demande initiale et l'arrêté contesté et à la présence en préfecture de l'intéressé à plusieurs reprises pendant l'instruction de sa demande, et alors même que M. A...était en situation régulière à la date de sa demande de renouvellement, celui-ci est fondé à soutenir que le préfet de police, en omettant de se prononcer sur son admission exceptionnelle au séjour, n'a pas procédé à un examen complet de sa situation personnelle ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 18 juin 2014 rejetant la demande d'admission au séjour de M. A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français en fixant son pays de destination ;

Sur les conclusions incidentes à fin d'injonction présentées par M.A... :

6. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution autre que celle déjà prononcée par le jugement attaqué ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction en vue de la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", déjà soumises aux premiers juges et rejetées par eux, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2015, à laquelle siégeaient :

Mme Driencourt, président de chambre,

Mme Mosser, président assesseur,

M. Cheylan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 juillet 2015.

Le rapporteur,

F. CHEYLAN Le président,

L. DRIENCOURT

Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA05069


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA05069
Date de la décision : 10/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Frédéric CHEYLAN
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : SHEBABO

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-07-10;14pa05069 ?
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