Vu la requête, enregistrée le 4 août 2014, présentée pour la Sarl Selina dont le siège est 54 boulevard Barbès à Paris (75018), par MeB... ; la Sarl Selina demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1315667/3-3 du 24 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant notamment à titre principal, à la décharger du paiement de la somme de 33 600 euros et, à titre subsidiaire, de réduire le montant de la contribution spéciale à la somme de 6 720 euros ;
2°) de prononcer la décharge de la contribution spéciale de 33 600 euros et, à titre subsidiaire, de réduire son montant à la somme de 3 360 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la décision du 3 septembre 2013 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne répond pas aux observations formulées pendant la procédure et qu'elle ne justifie pas de l'application du taux de 5000 ; qu'elle est infondée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 décembre 2014, présenté pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration par MeG... ; il conclut à titre principal au rejet de la requête ; à titre subsidiaire à ce que soit validée la décision d'application de la contribution spéciale de 16 800 euros notifiée le 3 septembre 2013 par l'OFII à la Sarl Selina pour ce qui concerne M. A...D...et à dire qu'il n'y a pas lieu à réduction de la contribution spéciale ; mettre à la charge de la Sarl Selina à verser à l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 2 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la requête est infondée dès lors que la décision est suffisamment motivée et qu'elle est infondée ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ;
Vu la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 ;
Vu le décret n° 2013-467 du 4 juin 2013 relatif au montant de la contribution spéciale instituée par l'article L. 8253-1 du code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2015 :
- le rapport de M. Polizzi, président assesseur,
- et les conclusions de M. Roussel, rapport public ;
1. Considérant que la société Selina exploite un restaurant dénommé " Kamer ", situé 54, boulevard Barbès à Paris ; qu'à l'issue du contrôle diligenté dans l'établissement le 22 mars 2011 par les agents de la police nationale, assistant les inspecteurs de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf), un procès-verbal d'infraction à l'article L. 8251-1 du code du travail a été dressé à l'encontre de la société au motif qu'un ressortissant turc, M. A... D..., et un ressortissant bulgare, M. C... F..., démunis d'autorisation de travail, étaient employés dans le restaurant en qualité de cuisiniers ; que, par une décision du 3 septembre 2013, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a informé la société Selina qu'elle était redevable de la somme de 33 600 euros correspondant à la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail ; qu'un titre exécutoire a été émis à son encontre le 7 octobre 2013 pour le recouvrement de cette somme ; que la société Selina demande la décharge du paiement de la somme de 33 600 euros ainsi mise à sa charge par l'OFII ou, à défaut, de réduire le montant dû à la somme de 3 360 euros ; que, toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal, l'OFII a décidé le 5 mai 2014 de décharger la société Selina du paiement de la contribution spéciale due au titre de l'emploi de M. F..., à hauteur de 16 800 euros ; que, par suite, il y a lieu de regarder la requête comme tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa requête et à la décharge de 16 800 euros ou, à titre subsidiaire, de 3 360 euros ;
Sur les conclusions tendant à la décharge du paiement de la contribution spéciale :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 8253-3 code du travail : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 8253-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-4 du même code : " A l'expiration du délai fixé, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration décide, au vu des observations éventuelles de l'employeur, de l'application de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1, la liquide et émet le titre de perception correspondant. " ; que si de telles dispositions prévoient que les employeurs à l'encontre desquels ont été dressés des procès-verbaux doivent être informés de ce qu'ils sont susceptibles de se voir réclamer cette contribution spéciale et de ce qu'ils disposent d'un délai de quinze jours pour présenter des observations, aucune disposition n'impose qu'il soit explicitement répondu à leurs éventuelles observations ; que, par suite, la société Selina n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse du 3 septembre 2013 est insuffisamment motivée en ce que l'office n'aurait pas répondu à ses observations émises le 15 juillet 2013 ;
3. Considérant que l'article L. 8251-1 du code du travail dispose : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 8253-1 du même code dans sa rédaction issue de l'article 78 de la loi du 29 décembre 2010 applicable à la date de constatation de l'infraction : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat et est au moins égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 et, en cas de réitération, à 25 000 fois ce même taux (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-8 du code du travail : " Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à mille fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 (...) " ; qu'aux termes toutefois de l'article L. 8253-1 du code du travail dans sa rédaction issue de l'article 42 de la loi du 29 décembre 2012 : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger sans titre mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8352-2 du code du travail dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 4 juin 2013 : " I. - Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. II. - Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7. III. - Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du II, le montant de la contribution spéciale est réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) " ;
4. Considérant que si l'article L. 8253-1 du code du travail, en vigueur à la date du 22 mars 2011 à laquelle les faits reprochés à la société Selina ont été constatés, dispose que le montant de la contribution spéciale qu'il institue est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, cet article, en tant qu'il dispose que le montant de cette contribution est " au moins égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12 " a édicté une règle suffisamment précise pour être applicable sans attendre l'intervention du décret d'application qu'il prévoit ; que, par suite, ces dispositions législatives ont, dès leur entrée en vigueur, abrogé les dispositions réglementaires précitées de l'article R. 8253-8 du code du travail ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait dépourvue de base légale doit être écarté ;
5. Considérant qu'il découle de tout ce qui précède que la société Selina n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;
Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'OFII, qui n'est pas la partie perdante en l'instance, verse une somme à la société Selina au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante une somme de 1 500 euros au bénéfice de l'OFII sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Sarl Selina est rejetée.
Article 2 : La Sarl Selina versera à l'OFII une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Selina et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 18 juin 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bouleau, premier vice-président,
- M. Polizzi, président assesseur,
- Mme Chavrier, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 2 juillet 2015.
Le rapporteur,
F. POLIZZILe président,
M. BOULEAU
Le greffier,
M. E...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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