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02/07/2015 | FRANCE | N°14PA02531

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 02 juillet 2015, 14PA02531


Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2014, présentée pour la société L'Oasis du Nord, dont le siège est 13 rue de Dunkerque à Paris (75010), représentée par M. E...A..., par la SCP Interbarreaux Maloyer et Genefort ; la société L'Oasis du Nord demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300470/3-3 du 8 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 décembre 2012 du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, refusant de délivrer l'autorisation de travail sollicitée au p

rofit de M. B...C... ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision...

Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2014, présentée pour la société L'Oasis du Nord, dont le siège est 13 rue de Dunkerque à Paris (75010), représentée par M. E...A..., par la SCP Interbarreaux Maloyer et Genefort ; la société L'Oasis du Nord demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300470/3-3 du 8 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 7 décembre 2012 du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, refusant de délivrer l'autorisation de travail sollicitée au profit de M. B...C... ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, de délivrer à M. C... un " titre de séjour " ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat ;

La société L'Oasis du Nord soutient que :

- M. C...s'étant vu délivrer le 1er février 2013 un titre de séjour temporaire valable jusqu'au 31 janvier 2014 en qualité de travailleur temporaire au-delà de sa présence de 24 mois sur le territoire français, l'administration française a expressément fait le choix d'exclure M. C... des dispositions de l'accord franco-tunisien limitant la durée de travail des jeunes professionnels tunisiens en France : ainsi, M. C...aurait dû se voir appliquer les dispositions du droit commun du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

- M. C... doit pouvoir bénéficier d'un titre de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2015, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'intérieur soutient que :

- le protocole relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne du 28 avril 2008 dispose que la durée d'emploi du jeune professionnel est de maximum 24 mois et qu'avant de quitter leur pays, les jeunes professionnels français et tunisiens doivent s'engager à ne pas poursuivre leur séjour dans l'Etat d'accueil à l'expiration de la période autorisée ;

- M. C...ne pouvait prétendre à un renouvellement de son autorisation de travail ou à un changement de statut en qualité de salarié ;

- l'administration n'avait nullement l'intention d'exclure l'application des dispositions de l'accord franco-tunisien en matière d'autorisation de travail et d'échange de jeunes professionnels : M. C...était simplement autorisé à séjourner jusqu'au 31 janvier 2014, mais il ne pouvait plus y travailler à partir du 6 mars 2013, date d'expiration de son autorisation de travail ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant en ce qui concerne le refus de délivrance d'une autorisation de travail ;

- la circulaire Valls du 28 novembre 2012 ne saurait être invoquée par le requérant en ce qu'elle ne pose que des orientations générales qui ne peuvent être invoquées par les administrés devant le juge administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988, modifié ;

Vu le décret n° 2004-579 du 17 juin 2004 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne relatif aux échanges de jeunes professionnels, signé à Tunis le 4 décembre 2003 ;

Vu le décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009 portant publication de l'accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire, du protocole relatif à la gestion concertée des migrations (ensemble deux annexes) et du protocole en matière de développement solidaire (ensemble trois annexes) entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signés à Tunis le 28 avril 2008 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2015, le rapport de Mme Chavrier, premier conseiller ;

1. Considérant que M.C..., ressortissant tunisien, né le 27 août 1984, est entré en France en 2011, sous couvert d'un visa valable du 14 février 2011 au 14 février 2012 valant autorisation de travail délivrée en application des stipulations de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne relatif aux échanges de jeunes professionnels ; qu'il a obtenu le renouvellement de son autorisation de travail pour la période courant du 7 mars 2012 au 6 mars 2013 ; qu'un titre de séjour l'autorisant à travailler valable du 15 février 2012 au 31 janvier 2013 lui a été octroyé ; que son titre de séjour arrivant à échéance antérieurement à la date d'échéance de son autorisation de travail, celui-ci lui a été renouvelé pour une période d'un an ; que la société L'Oasis du Nord qui l'employait en tant que cuisinier dans le cadre de son contrat de jeune professionnel a sollicité auprès du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, une demande de renouvellement de son autorisation de travail ; que par une décision du 7 décembre 2012, le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, a refusé de faire droit à cette demande ; que la société L'Oasis du Nord a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision ; que la société relève régulièrement appel du jugement du 8 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ladite demande ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'accord franco-tunisien relatif aux échanges de jeunes professionnels du 4 décembre 2003 : " Les dispositions du présent Accord sont applicables à des ressortissants français ou tunisiens entrant dans la vie active ou ayant une expérience professionnelle et qui se rendent dans l'autre Etat pour approfondir leur connaissance et leur compréhension de l'Etat d'accueil et de sa langue, ainsi que pour améliorer leurs perspectives de carrière, grâce à une expérience de travail salarié dans un établissement à caractère sanitaire ou social, une entreprise agricole, artisanale, industrielle ou commerciale dudit Etat. / Ces ressortissants, ci-après dénommés " jeunes professionnels ", sont autorisés à occuper un emploi dans les conditions fixées au présent Accord, sans que la situation du marché du travail de l'Etat d'accueil, dans la profession dont il s'agit, puisse être prise en considération. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de ce même accord : " La durée autorisée de l'emploi peut varier de trois à douze mois et faire éventuellement l'objet d'une prolongation de six mois. / Avant de quitter leur pays, les jeunes professionnels français et tunisiens doivent s'engager à ne pas poursuivre leur séjour dans l'Etat d'accueil à l'expiration de la période autorisée, ni à prendre un emploi autre que celui prévu aux termes des conditions de leur entrée dans l'Etat d'accueil. (...) " ; qu'aux termes du point 2.3.1 du protocole annexé à l'accord franco-tunisien du 28 avril 2008 susvisé : " (...) La durée d'emploi du jeune professionnel est portée à 24 mois si l'intéressé présente à l'appui de sa candidature un projet professionnel de retour élaboré avec l'appui de l'organisme public compétent de son pays (...) " ;

3. Considérant que M. C... était titulaire d'une autorisation de travail " travailleur temporaire " valable du 7 mars 2011 au 6 mars 2012, délivrée dans le cadre de l'accord franco-tunisien relatif aux échanges de jeunes professionnels précité, en vue d'exercer durant un an le métier de cuisinier au sein de la société L'Oasis du Nord ; que cette autorisation lui a été renouvelée pour une durée d'un an en application du point 2.3.1 du protocole précité ; qu'il a sollicité, à l'expiration de ce titre, une autorisation de travail dans le cadre d'un changement de statut de travailleur temporaire à salarié, afin d'occuper un emploi au sein de la même société ; qu'il résulte des termes mêmes de ces stipulations que ces dernières ne permettent à un jeune professionnel ni de prendre un emploi autre que celui prévu lors de son entrée dans l'Etat d'accueil, ni, à l'issue de la période au titre de laquelle il a été autorisé à travailler, à poursuivre son séjour dans cet Etat ; que, par suite, alors au demeurant que l'intéressé s'était engagé, en application de l'article 3 de l'accord du 4 décembre 2003, à ne pas poursuivre son séjour en France au terme de la période pendant laquelle il a été employé en qualité de " jeune professionnel ", le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, a pu légalement se fonder sur le motif tiré de ce que M. C... était entré en France dans le cadre de cet accord pour refuser de délivrer l'autorisation de travail sollicitée ; que la délivrance simultanée d'une carte de séjour temporaire autorisant l'intéressé à travailler et dont la validité dépassait la date d'échéance de l'autorisation temporaire de travail ne saurait à l'évidence exclure M. C... des stipulations de l'accord franco-tunisien et lui permettre d'obtenir auprès des autorités françaises compétentes une autorisation de travail sur le fondement des dispositions du droit commun ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet a commis une erreur de droit doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, que la décision litigieuse n'a pas pour objet de statuer sur le droit au séjour de M. C... ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de la circulaire du 28 novembre 2012 qui, au surplus, n'a pas de caractère règlementaire, ne peut qu'être écarté comme inopérant ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société L'Oasis du Nord n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société L'Oasis du Nord est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société L'Oasis du Nord et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France et à M. B...C....

Délibéré après l'audience du 18 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Chavrier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 juillet 2015.

Le rapporteur,

A-L. CHAVRIERLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02531


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02531
Date de la décision : 02/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Anne Laure CHAVRIER
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP INTERBARREAUX MALOYER ET GENEFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-07-02;14pa02531 ?
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