La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2015 | FRANCE | N°14PA02027

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 18 juin 2015, 14PA02027


Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2014, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par MeC... ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401435/12 du 18 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 13 février 2014 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a décidé de son placement en rétention administrative ainsi que des décisions du 14 février 2014 ordonnant sa reconduite à la frontière et refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire ;

2°) d'a

nnuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de ...

Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2014, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par MeC... ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401435/12 du 18 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 13 février 2014 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a décidé de son placement en rétention administrative ainsi que des décisions du 14 février 2014 ordonnant sa reconduite à la frontière et refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A...soutient que :

- il appartenait au Tribunal administratif de Melun de vérifier que la décision prise par les autorités grecques justifiait une inscription au " système d'information Schengen " (SIS) ;

- le préfet de Seine-et-Marne a commis une erreur de droit en décidant de sa reconduite à la frontière sans solliciter des autorités grecques la décision exécutoire dont il a fait l'objet en application de l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant reconduite à la frontière est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les autorités françaises se sont seulement fondées sur son signalement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen et n'ont pas pris en compte les éléments de sa vie personnelle, telle que sa résidence en France depuis plus de dix ans ainsi que la présence sur le territoire de son épouse enceinte et de ses deux enfants mineurs ;

- la décision portant placement en rétention n'est pas suffisamment motivée ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Directive du Conseil n° 2001/40/CE du 28 mai 2001 relative à la reconnaissance mutuelle des décisions d'éloignement des ressortissants de pays tiers ;

Vu la Décision d'exécution (UE) 2015/219 de la Commission du 29 janvier 2015 relative au manuel Sirene et à d'autres mesures d'application pour le système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II) ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2015, le rapport de Mme Julliard, première conseillère ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant turc, a été contrôlé sur son lieu de travail à Brou sur Chantereine le 13 février 2014, en situation irrégulière au regard du droit du travail ; qu'après avoir constaté qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le " système d'information Schengen " en vertu d'une décision des autorités grecques du 28 juin 2013, le préfet de Seine-et-Marne a pris à son encontre, le 13 février 2014, une décision de placement en centre de rétention pendant cinq jours et, le 14 février 2014, une décision portant obligation de quitter le territoire français et de reconduite à la frontière ; que M. A... relève appel du jugement du 18 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant reconduite à la frontière du 14 février 2014 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne a fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission en vertu d'une décision exécutoire prise par l'un des autres Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 et qu'il se trouve irrégulièrement sur le territoire métropolitain, l'autorité administrative peut décider qu'il sera d'office reconduit à la frontière " ; qu'aux termes de l'article 6 de la directive du Conseil n° 2001/40/CE du 28 mai 2001 : " les autorités de l'Etat membre auteur et de l'Etat membre d'exécution utilisent tout moyen approprié de coopération et d'échange d'informations pour la mise en oeuvre de la présente directive. L'Etat membre auteur fournit à l'Etat membre d'exécution tous les documents nécessaires pour attester la permanence du caractère exécutoire de la décision par les moyens appropriés les plus rapides " ; qu'aux termes de la décision d'exécution (UE) 2015/219 de la Commission du 29 janvier 2015 : " le système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II) (...) contient des informations suffisantes pour permettre l'identification d'une personne ou d'un objet et l'adoption des mesures nécessaires " ;

3. Considérant que M. A... soutient que les autorités françaises étaient tenues de solliciter la décision exécutoire prise à son encontre auprès des autorités grecques et telle que mentionnée dans l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité ; qu'il résulte toutefois des stipulations communautaires susmentionnées qu'un signalement au " Système d'information Schengen " a pour effet général et immédiat d'interdire l'entrée et la circulation de l'étranger au sein de l'espace Schengen ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de Seine-et-Marne s'est fondé sur la fiche active de non-admission dans l'espace Schengen émise par les autorités grecques, valide jusqu'au 18 novembre 2014 à l'encontre de M. A... et mentionnant ses nom, prénom, date de naissance, sexe, nationalité ainsi que le motif précis de son signalement ; que les autorités françaises se sont notamment fondées sur les informations contenues dans leur système " Sirene " permettant l'échange d'informations supplémentaires concernant l'introduction de signalements et permettant d'adopter des mesures appropriées à l'égard des personnes enregistrées dans le SIS ; qu'ainsi, la seule identification de M. A... dans le " Système d'information Schengen " a pu permettre au préfet de Seine-et-Marne de prononcer à son encontre une mesure de reconduite à la frontière ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant que M. A... doit être regardé comme se prévalant des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et les libertés fondamentales ; que, toutefois, s'il soutient résider en France depuis plus de dix ans, il ne l'atteste pas ni ne fait valoir aucune circonstance faisant obstacle à ce qu'il poursuive sa vie familiale hors de France avec son épouse et ses deux enfants encore en bas âge ; qu'ainsi, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a décidé sa reconduite à la frontière ; que le moyen ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant placement en rétention du 13 février 2014 :

6. Considérant que la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette décision ne serait pas suffisamment motivée manque en fait ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; / ( ...) " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation.(...) " ;

8. Considérant que M. A... soutient qu'ayant remis son passeport aux autorités de police le jour de son arrestation et ayant deux enfants mineurs à charge sur le territoire français, la mesure coercitive de placement en rétention prise à son encontre ne se justifiait pas et que le préfet aurait dû privilégier une mesure d'assignation à résidence ; que, toutefois, il convient par adoption des motifs retenus par les premiers juges et dès lors que la contradiction d'adresse relevée par eux ressort des pièces du dossier, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait méconnu les dispositions de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M.A... ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, première conseillère,

Lu en audience publique, le 18 juin 2015.

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

5

N° 10PA03855

5

N° 14PA02027


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02027
Date de la décision : 18/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : BREMAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-06-18;14pa02027 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award