La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2015 | FRANCE | N°14PA03035

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 15 juin 2015, 14PA03035


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Région Ile-de-France, représentée par son président, a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler le titre exécutoire émis le 7 septembre 2011 par lequel le Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne (Sytradem) lui réclame le versement d'une subvention d'un montant de 5 918 070 euros pour la construction d'une usine de traitement thermique des déchets ménagers et la réalisation d'une plate-forme de mâchefers à Montereau-Fault-Yonne (77130).

Par un jug

ement n° 1108608 du 14 mai 2014, le Tribunal administratif de Melun a annulé ce tit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Région Ile-de-France, représentée par son président, a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler le titre exécutoire émis le 7 septembre 2011 par lequel le Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne (Sytradem) lui réclame le versement d'une subvention d'un montant de 5 918 070 euros pour la construction d'une usine de traitement thermique des déchets ménagers et la réalisation d'une plate-forme de mâchefers à Montereau-Fault-Yonne (77130).

Par un jugement n° 1108608 du 14 mai 2014, le Tribunal administratif de Melun a annulé ce titre exécutoire du 7 septembre 2011.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2014 sous forme de télécopie régularisée le lendemain, le Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne, représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 mai 2014 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de dire et juger que le titre exécutoire du 7 septembre 2011 qu'il a émis à l'encontre de la Région Ile-de-France est régulier ;

3°) de mettre à la charge de la Région Ile-de-France une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le jugement attaqué a retenu que la première demande de paiement était intervenue au-delà du délai de deux ans, lequel n'a commencé à courir qu'à compter de la réception de l'acte de notification de la convention du 28 février 2007, soit le 1er avril 2007, voire à compter du jour de la signature de cet acte de notification de la convention, soit le 27 mai 2007 ;

- la Région a, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, manqué à son obligation de loyauté dans ses relations contractuelles ;

- il a respecté les conditions d'octroi de la subvention en cause, lequel est subordonné à la conclusion de la convention ainsi qu'à sa notification qui, effectuée le 28 mars 2007, empêchait de considérer que le délai courait depuis le 29 janvier 2007 ;

- la Région, en réalité désireuse de se soustraire à son engagement, l'a sciemment trompé, en méconnaissance du principe général de confiance légitime reconnu par le droit communautaire, corollaire du principe de sécurité juridique, et de l'exigence de loyauté des relations contractuelles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2015, la Région Ile-de-France, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne le versement d'une somme de 2 520 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens du Syndicat requérant n'est fondé, que le titre exécutoire est entaché d'illégalité externe pour ne pas comporter la signature du président du Sytradem et que ce dernier ne produit toujours pas, en cause d'appel, le bordereau de titre de recettes signé de l'ordonnateur.

Par ordonnance du 27 février 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique.

- le rapport de M. Auvray ;

- les conclusions de Mme Vrignon rapporteur public ;

- les observations de MeA..., représentant le Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne ;

- et les observations de MeB..., représentant la région d'Ile-de-France.

1. Considérant que, par délibération n° 06-1071 du 30 novembre 2006, le conseil

régional d'Ile-de-France a attribué au Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne (Sytradem) une subvention de 5 918 070 euros pour la construction d'une usine de traitement thermique et la réalisation d'une plate-forme de mâchefers à Montereau-Fault-Yonne (77130), subvention qui a fait l'objet d'une convention de subventionnement signée par les parties le 28 février 2007 ; que le conseil régional d'Ile-de-France ayant refusé de verser le premier acompte sollicité le 25 mars 2009 par le Sytradem au motif que sa demande était tardive, ce dernier a alors émis, le 7 septembre 2011, un titre exécutoire de 5 918 070 euros à l'encontre de la Région Ile-de-France ; que, par jugement du 14 mai 2014 dont le Sytradem relève appel, le Tribunal administratif de Melun a prononcé l'annulation de ce titre exécutoire ;

2. Considérant que l'attribution d'une subvention par une personne publique crée des droits au profit de son bénéficiaire ; que, toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement, mais nécessairement, de l'objet même de la subvention ;

3. Considérant, en premier lieu, que, conformément à l'article 10 du règlement budgétaire et financier de la Région Ile-de-France adopté le 4 février 2005, relatif à la caducité des autorisations de programme engagées et non mandatées, l'article 2 de la convention n° 02-06 conclue le 28 février 2007 entre le Sytradem et la Région Ile-de-France stipule : " (...) La première demande de paiement doit être présentée par le Sytradem dans un délai de deux ans à compter de la date de notification d'attribution de la subvention. Dans le cas contraire, la subvention devient caduque et est annulée (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Région Ile-de-France a adressé au Sytradem un courrier daté du 29 janvier 2007, reçu par ce dernier le 13 février suivant, intitulé " notification d'attribution de subventions de la Région ", que la convention susmentionnée, conclue le 28 février 2007 entre les parties a, quant à elle, été notifiée par lettre du 29 mars 2007 au Sytradem qui l'a reçue au plus tard le 11 avril 2007 et non le 21 mai 2007 comme soutenu par ce dernier, et que ce n'est que par courrier daté du 25 mars 2009 que le Syndicat requérant a sollicité de la Région Ile-de-France le versement d'un premier acompte de 27 256,50 euros au titre de la subvention litigieuse, soit plus de deux ans après la notification d'attribution de la subvention en cause ;

5. Considérant que, contrairement à ce que soutient le Sytradem, il ressort clairement des stipulations de l'article 2 de la convention signée le 28 février 2007 que le délai de deux ans prévu à peine de caducité de la subvention courait à compter de la date de notification d'attribution de la subvention en cause, soit le 13 février 2007, et non à compter de celle de notification de la convention, reçue par le syndicat requérant le 11 avril 2007 ; que si, comme le relève le Sytradem, l'article 10 du règlement budgétaire et financier de la Région Ile-de-France ne lui a pas été notifié en annexe à la convention signée, seuls ayant été joints les articles 12 à 38 composant la deuxième partie de ce règlement, d'une part, ce règlement a été régulièrement publié, d'autre part, l'article 13 de la deuxième partie de ce règlement dispose que : " La notification est l'acte par lequel la délibération portant attribution d'une subvention est, après transmission au contrôle de légalité, portée à la connaissance de son bénéficiaire. La date de notification d'attribution de la subvention constitue le fait générateur de la décision d'attribution, lorsqu'il s'agit d'une subvention affectée à une dépense déterminée ", étant précisé que la décision susmentionnée du 29 janvier 2007 portant notification d'attribution d'une subvention mentionnait la référence de la délibération d'affectation 06-1071 du 30 novembre 2006 ;

6. Considérant, en second lieu, que le Sytradem fait grief à la région Ile-de-France d'avoir failli à l'exigence de loyauté des relations contractuelles et d'avoir méconnu le principe de confiance légitime, motif pris que, pour lui opposer la caducité de sa décision de lui allouer la subvention qu'elle s'était engagée à lui verser, la région a fait courir le délai de deux ans non pas à compter du 11 avril 2007, date à laquelle elle a reçu un exemplaire signé de la convention conclue le 28 février 2007, mais à compter de la date de notification de sa décision du 29 janvier 2007 de lui accorder la subvention en cause, ce qui a pour effet de réduire de plus de deux mois le délai fixé contractuellement à deux ans ;

7. Considérant, toutefois, qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, il ressort clairement des stipulations de la convention en cause, que le Sytradem a signée, que le délai de deux ans courait à compter de la date de notification d'attribution de la subvention, soit le 13 février 2007 ; qu'au surplus, lorsque le syndicat requérant a reçu, le 11 avril 2007, la convention en cause dûment signée des deux parties, il ne pouvait ignorer que le point de départ du délai de deux ans serait décompté dès le 13 février 2007, dès lors que le Sytradem avait, par courrier daté du 8 décembre 2006 reçu le 14 décembre suivant, déjà été destinataire de cette convention pour y apposer sa signature ; qu'enfin, et dans ces conditions, le syndicat requérant ne peut utilement soutenir qu'il aurait été induit en erreur par la teneur d'un courrier électronique du 12 février 2009, qui au demeurant n'émane pas d'un agent de la Région Ile-de-France, lui indiquant que le délai de deux ans expirerait le 1er avril 2009 ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Sytradem n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a prononcé l'annulation du titre exécutoire, d'un montant de 5 918 070 euros, qu'il avait émis le 7 septembre 2011 à l'encontre de la Région Ile-de-France ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Région Ile-de-France qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que demande le Sytradem au titre des frais qu'il a exposés à l'occasion du litige et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a en revanche lieu de mettre à la charge du Sytradem le versement, au profit de la région Ile-de-France, de la somme de 1 000 euros au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne est rejetée.

Article 2 : Le Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne versera à la Région Ile-de-France une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Syndicat de traitement des déchets ménagers du Sud-Est Seine-et-Marne et à la Région Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

Mme Petit, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 juin 2015.

Le rapporteur, Le président,

B. AUVRAY O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 14PA03035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03035
Date de la décision : 15/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-04-02-03-01 Collectivités territoriales. Région. Attributions. Interventions économiques. Aides directes et indirectes.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: Mme VRIGNON-VILLALBA
Avocat(s) : CABINET RAVETTO ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-06-15;14pa03035 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award