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08/06/2015 | FRANCE | N°14PA03763

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 08 juin 2015, 14PA03763


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2013 par lequel le préfet de police a décidé de lui retirer sa carte professionnelle de conducteur de taxi pour une durée d'un an ferme.

Par un jugement n° 1400915 du 17 juin 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 août 2014, M. C...A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le j

ugement n° 1400915 du 17 juin 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2013 par lequel le préfet de police a décidé de lui retirer sa carte professionnelle de conducteur de taxi pour une durée d'un an ferme.

Par un jugement n° 1400915 du 17 juin 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 août 2014, M. C...A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400915 du 17 juin 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 13 septembre 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée a été prise en violation du principe de respect des droits de la défense dans la mesure où la commission de discipline des conducteurs de taxi a rendu son avis sans l'avoir mis à même de présenter des observations, ni l'avoir confronté avec les auteurs des plaintes ;

- les dispositions des articles 6 et 13 de l'arrêté préfectoral du 22 mars 2011 sont illégales en ce qu'elles méconnaissent le principe de respect des droits de la défense ;

- la sanction de retrait de sa carte professionnelle qui lui a été infligée est fondée sur des faits erronés, ces erreurs concernant notamment les faits qui se sont déroulés les 5 février 2012, 7 juillet 2012, 21 septembre 2012 ;

- le préfet a inexactement qualifié les faits en retenant que le paiement d'une somme forfaitaire pour la course du 5 février 2012 constituait un manquement à ses obligations professionnelles alors que cette course a été effectuée dans le cadre d'un service occasionnel de transport public routier de personnes, pour laquelle il dispose d'une licence ;

- la sanction est disproportionnée par rapport aux faits qui lui sont reprochés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2014, le préfet de police conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 300 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des transports ;

- le décret n° 85-891 du 16 août 1985 ;

- le décret n° 86-427 du 13 mars 1986 ;

- l'arrêté n° 01-16385 du 31 juillet 2001 ;

- l'arrêté n° 2011-00173 du 22 mars 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dhiver,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 septembre 2013, le préfet de police a, sur proposition de la commission de discipline des conducteurs de taxi, procédé au retrait de la carte professionnelle de conducteur de taxi de M. A...pour une durée d'un an ferme. Cette sanction a été prise au motif que M. A...a commis plusieurs infractions à la réglementation applicable à sa profession le 5 février 2012, le 7 juillet 2012 et le 21 septembre 2012. M. A...relève appel du jugement du 17 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen tiré de la violation du principe général des droits de la défense :

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 13 mars 1986 portant création de la commission des taxis et des voitures de petite remise : " Il est créé une commission départementale des taxis et des voitures de petite remise dans les conditions prévues par le présent décret, chargée de formuler des avis sur les questions (...) de discipline des professions concernées ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté préfectoral du 22 mars 2011 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de la commission de discipline des titulaires d'autorisations de stationnement, alors en vigueur : " Il est créé, au sein de la commission des taxis et des voitures de petite remise instituée auprès du préfet de police, une sous-commission intitulée "commission de discipline des conducteurs de taxi". Cette dernière a qualité pour connaître des violations, par les conducteurs de taxis parisiens, de la réglementation applicable à la profession ". Cet arrêté dispose, à son article 4, que : " La convocation du conducteur de taxi concerné doit indiquer qu'il a le droit d'obtenir communication des pièces à l'origine de la procédure engagée, ainsi que la possibilité de se faire assister d'un défenseur de son choix ", à son article 5, que " Le conducteur de taxi concerné peut présenter, devant la commission de discipline, des observations écrites ou orales et citer des témoins. (...) " et, au dernier alinéa de son article 7 que " Les observations écrites éventuellement présentées par le conducteur de taxi sont lues en séance ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Sur demande du conducteur de taxi ou de son défenseur, adressée au président de la commission de discipline, l'examen de l'affaire peut être renvoyé à une réunion ultérieure. Un tel report n'est possible qu'une seule fois ". Enfin, le deuxième alinéa de l'article 13 de l'arrêté énonce que " Si le conducteur de taxi ne se présente pas devant la commission de discipline, une mesure peut être prononcée à son encontre par défaut ".

3. Le respect du principe général des droits de la défense implique que la personne concernée, après avoir été informée des griefs formulés à son encontre, soit mise à même de demander la communication de son dossier et dispose de la faculté de pouvoir présenter utilement ses observations avant que l'autorité disposant du pouvoir de sanction se prononce.

4. Il résulte des dispositions de l'article 1er du décret du 13 mars 1986 que l'autorité administrative qui a délivré une carte professionnelle à un conducteur de taxi peut procéder au retrait de cette carte après avoir recueilli l'avis d'une commission départementale des taxis et des voitures de petite remise. L'arrêté du 22 mars 2011, qui crée une sous-commission chargée des questions de discipline des conducteurs de taxis au sein de la commission instituée auprès du préfet de police, organise une procédure contradictoire. Cet arrêté prévoit le droit pour le conducteur de taxi en cause d'obtenir communication de son dossier avant la tenue de la commission, d'être assisté par un défenseur de son choix, de formuler ses observations écrites ou orales et de citer des témoins. Cette procédure répond aux exigences qu'implique le respect des droits de la défense. En revanche, aucun principe général du droit et en particulier celui des droits de la défense n'impose que l'intéressé soit nécessairement présent lors de la séance de la commission examinant son cas et entendu par cette commission dès lors que celle-ci, avant de se prononcer, prend connaissance des observations écrites que l'intéressé a, le cas échéant, formulées. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que les dispositions des articles 6 et 13 de l'arrêté du 22 mars 2011, qui prévoient que le conducteur de taxi ne peut demander qu'un seul report de la commission de discipline et qui autorisent la commission, si le conducteur de taxi ne se présente pas, à prendre une mesure par défaut, méconnaissent le principe général des droits de la défense. Dès lors, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

5. M. A...a été convoqué une première fois par courrier du 11 juin 2013, notifié le 13 juin suivant, à une audience devant la commission de discipline des conducteurs de taxis du 3 juillet 2013. Il a présenté un arrêt de travail daté du 2 juillet 2013 et son absence a conduit la commission à reporter la réunion. M. A...a été convoqué à nouveau par lettre du 8 août 2013, notifiée le 22 août suivant, à une audience du 5 septembre 2013, à laquelle il n'a pas non plus assisté, son absence étant justifiée par un nouvel arrêt de travail du 3 septembre 2013. Après avoir constaté cette absence, la commission, faisant application des dispositions de l'article 13 de l'arrêté du 22 mars 2011, a examiné le dossier de M. A...et proposé une mesure de retrait de carte professionnelle pour une durée d'un an ferme.

6. Il ressort des pièces du dossier que tant la convocation du 11 juin 2013 que celle du 8 août 2013 mentionnent à M. A...qu'il a fait l'objet de plusieurs plaintes et rapports de police dont les dates sont précisées et lui indiquent qu'il peut obtenir communication préalable de ces pièces et qu'il peut se faire assister d'un défenseur. Ces convocations informent également le requérant que, dans l'hypothèse où il ne se présenterait pas devant la commission, celle-ci est susceptible d'examiner son cas en son absence. M.A..., qui ne fait état d'aucune circonstance susceptible de l'avoir empêché de formuler des observations écrites, n'est pas fondé à soutenir que la commission aurait irrégulièrement émis son avis sans l'avoir au préalable entendu.

7. Enfin, aux termes de l'article 8 de l'arrêté du 22 mars 2011 : " La commission de discipline entend séparément chaque témoin cité. A la demande d'un membre de la commission, du conducteur de taxi ou de son défenseur, le président peut décider de procéder à une confrontation des témoins, ou à une nouvelle audition d'un témoin déjà entendu (...) ". Il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucun principe général du droit, que la commission a l'obligation d'entendre des témoins ni que le président de la commission est tenu d'organiser une confrontation entre le chauffeur de taxi et les témoins. En l'espèce, M.A..., qui n'établit pas, ni même n'allègue, qu'il aurait demandé à être confronté avec les personnes ayant déposé des plaintes relatant ses agissements, n'est pas fondé à soutenir que ses droits auraient été méconnus du fait de l'absence d'une telle confrontation.

Sur la légalité interne de la décision de retrait de carte professionnelle :

8. Aux termes de l'article L. 3121-10 du code des transports : " L'exercice de l'activité de conducteur de taxi est subordonné à la délivrance d'une carte professionnelle par l'autorité administrative ". Aux termes de l'article L. 3124-2 de ce code : " En cas de violation par un conducteur de taxi de la réglementation applicable à la profession, l'autorité administrative peut lui donner un avertissement ou procéder au retrait temporaire ou définitif de sa carte professionnelle ". Aux termes de l'article 20 de l'arrêté interpréfectoral du 31 juillet 2001 : " La carte professionnelle de conducteur de taxi peut être retirée à titre temporaire ou définitif, par le préfet de police, après avis de la commission de discipline des conducteurs de taxi, en cas de violation par le conducteur de la réglementation applicable à la profession (...) ".

9. Le préfet de police a décidé de retirer à M. A...sa carte professionnelle de conducteur de taxi pendant un an au motif que l'intéressé avait commis plusieurs infractions à la réglementation applicable à la profession de conducteur de taxi. Il a ainsi relevé que, le 5 février 2012, M. A...avait imposé à son client un tarif forfaitaire réglé en espèces de 60 euros et refusé de lui délivrer un bulletin de course, puis que le 7 juillet 2012, l'intéressé était stationné à la gare de l'est en dehors des emplacements réglementaires, avait pris en charge des personnes en ayant une somme de 14 euros inscrite d'avance au compteur et leur avait réclamé un supplémentaire forfaitaire, enfin que le 21 septembre 2012, il était arrêté sur la zone aéroportuaire de Roissy Charles-de-Gaulle en dehors des emplacements réglementaires et avait pris en charge un client hors ces emplacements.

10. En premier lieu, M. A...ne conteste pas avoir réclamé à un client une somme forfaitaire de 60 euros le 5 février 2012 et avoir refusé d'établir un bulletin de course mais fait valoir qu'il a effectué cette course non pas dans le cadre de son activité de taxi mais de celle de service occasionnel de transport public routier de personnes, pour laquelle il bénéficiait d'une licence qui lui avait été délivrée le 26 janvier 2012. Il n'apporte toutefois aucun début de preuve à l'appui de ses allégations alors qu'il ressort de la plainte de la cliente, rédigée dès le lendemain des faits en des termes circonstanciés et complétée par un courrier du 26 mars 2012, que M. A...l'a prise en charge entre la rue du Pont des Halles à Rungis et la place de la porte de St Cloud à Paris en qualité de taxi et qu'elle n'avait pas effectué de réservation préalable pour cette course. Dès lors, le préfet de police n'a pas inexactement qualifié les faits intervenus le 5 février 2012 en relevant qu'ils constituaient un manquement aux dispositions des 9° et 15° de l'article 24 de l'arrêté du 31 juillet 2001.

11. En deuxième lieu, il ressort de la réclamation déposée auprès des services de la préfecture de police le 11 juillet 2012, rédigée en des termes précis et circonstanciés, que, le 7 juillet 2012, M. A...a pris en charge quatre personnes à la gare de l'est alors qu'il était stationné en dehors des emplacements réglementaires. Cette réclamation indique également que, bien que les clients n'aient effectué aucune réservation, une somme de 14 euros était inscrite au compteur dès la prise en charge, et que le conducteur de taxi a exigé le paiement d'un supplément forfaitaire à deux des quatre clients. Si M. A... conteste la matérialité de ces faits, il n'apporte aucun début de preuve de l'appui de sa contestation. Dès lors, le préfet de police pouvait se fonder sur ces faits, qui constituent des manquements aux dispositions des 5° et 9° de l'article 24 de l'arrêté du 31 juillet 2001.

12. En troisième lieu, il ressort des procès-verbaux de contravention établis le 21 septembre 2012 que M. A...était stationné ce même jour devant le terminal 2C de l'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle en dehors des emplacements réglementaires et qu'il a pris en charge un client sur le lieu où il était irrégulièrement stationné. M.A..., qui conteste la matérialité de ces faits, se borne à faire valoir que les amendes qui lui ont été infligées du fait de ces infractions auraient été annulées par la juridiction de proximité sans toutefois produire le jugement en cause ni justifier des motifs pour lesquels les annulations auraient été prononcées. Dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis. Ils constituent des manquements aux dispositions des 5° et 7° de l'article 24 de l'arrêté du 31 juillet 2001.

13. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A...avait déjà fait l'objet, le 31 mai 2011, d'une mesure disciplinaire de retrait de sa carte professionnelle pour une durée de trois mois pour des faits similaires. Eu égard à la nature et au caractère répété des infractions commises par M.A..., le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en décidant de retirer à l'intéressé sa carte professionnelle pendant une durée ferme d'un an.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, faute pour le préfet de police de faire état précisément des frais que l'Etat aurait exposés pour défendre à l'instance, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de police présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Marino, président,

- Mme Dhiver, premier conseiller,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 juin 2015.

Le rapporteur,

M. DHIVERLe président,

Y. MARINO

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA03763


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03763
Date de la décision : 08/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-06 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Taxis.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Martine DHIVER
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : NJOYA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-06-08;14pa03763 ?
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