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28/05/2015 | FRANCE | N°13PA00572

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 28 mai 2015, 13PA00572


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Institut d'études politiques de Paris à lui verser la somme de 42 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de la carence de cet établissement à remplacer son directeur de thèse.

Par jugement n° 1109253/5-3 du 12 décembre 2012, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 4 février 2013 et

6 novembre 2014, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Institut d'études politiques de Paris à lui verser la somme de 42 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de la carence de cet établissement à remplacer son directeur de thèse.

Par jugement n° 1109253/5-3 du 12 décembre 2012, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 4 février 2013 et 6 novembre 2014, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1109253/5-3 du 12 décembre 2012 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de condamner l'Institut d'études politiques de Paris à lui verser la somme de 42 000 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait de la carence de cet établissement à remplacer son directeur de thèse, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date de notification de l'arrêt et de la capitalisation des intérêts, sous astreinte de 50 jours par jour de retard à compter de " l'arrêt à venir " ;

3°) d'enjoindre à l'Institut d'études politiques de Paris de réexaminer sa demande d'indemnisation sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la date d'enregistrement de sa requête ;

4°) de condamner l'Institut d'études politiques de Paris aux entiers dépens ;

5°) de mettre à la charge de l'Institut d'études politiques de Paris la somme de 2 500 euros à verser à son avocat, MeC..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

6°) de dire que l'arrêt à intervenir sera exécutoire aussitôt qu'il aura été rendu ;

Il soutient que :

- le tribunal ne lui a pas demandé, par une mesure d'instruction, de produire les courriers des professeurs refusant de diriger sa thèse alors qu'il s'agit de la seule objection sérieuse retenue par le tribunal à l'encontre de sa demande de première instance ;

- l'Institut d'études politiques de Paris a commis une faute en ne remplaçant pas son directeur de thèse qui avait quitté l'établissement, en méconnaissance de la charte des thèses ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'autorisation de soutenir sa thèse lui avait été accordée dès son inscription à l'école doctorale soit dès 1986 ;

- ses nombreuses recherches pour retrouver un directeur de thèse ont été infructueuses ;

- il a subi un préjudice certain du fait de la carence de l'Institut d'études politiques de Paris à remplacer son directeur de thèse dès lors qu'il avait déjà rédigé 226 pages représentant environ une année de travail de doctorant et qu'il a perdu toute chance de carrière dans la recherche en économie ;

- le lien de causalité entre la faute commise par l'institut et ses préjudices est établi ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2015, l'Institut d'études politiques de Paris, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que le requérant n'a pas présenté dans le délai de recours contentieux les moyens qu'il entendait soulever à l'encontre du jugement du 12 décembre 2012 du Tribunal administratif de Paris ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;

Par ordonnance du 4 mars 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mars 2015.

Par un mémoire, enregistré le 20 mars 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche déclare s'associer aux conclusions de l'Institut d'études politiques de Paris.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 25 avril 2013.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 23 novembre 1988 relatif aux études doctorales ;

- l'arrêté du 30 mars 1992 relatif aux études de troisième cycle ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de Mme Vrignon, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A...fait appel du jugement du 12 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions indemnitaires dirigées à l'encontre de l'Institut d'études politiques de Paris au titre des préjudices qu'il a subis du fait de la carence de celui-ci à remplacer son directeur de thèse pendant son doctorat ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'Institut d'études politiques de Paris ;

Sur la responsabilité de l'Institut d'études politiques de Paris :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur : " le titre de docteur est conféré après la soutenance d'une thèse ou la présentation d'un ensemble de travaux scientifiques originaux " ; que le troisième alinéa de l'article 17 de la même loi habilite le ministre chargé de l'enseignement supérieur à fixer les règles communes pour la poursuite des études conduisant à des diplômes nationaux ainsi que les conditions d'obtention de ces titres et diplômes ; qu'aux termes de l'article 11 de l'arrêté du 23 novembre 1988 relatif aux études doctorales, en vigueur à la date à laquelle le directeur de thèse de M. A... a quitté l'Institut d'études politiques de Paris et n'a plus assuré la direction des recherches du requérant : " L'autorisation d'inscription à la préparation du doctorat est prononcée par le président ou le directeur de l'établissement sur proposition d'un directeur de thèse ou de travaux.(...) " ; qu'aux termes de l'article 13 de cet arrêté : " les candidats déposent le sujet de recherche, après agrément par leur directeur de thèse ou de travaux, auprès du président ou du directeur de l'établissement. / Ils effectuent leurs travaux sous le contrôle et la responsabilité de leur directeur de thèse ou de travaux (...) " ; que l'article 15 de ce même arrêté dispose que : " L'autorisation de présenter une thèse ou un ensemble de travaux en soutenance est accordée par le président ou le directeur de l'établissement après examen des travaux du candidat par au moins deux rapporteurs habilités à diriger des recherches et choisis par le président ou le directeur de l'établissement après avis du directeur de thèse ou de travaux (...) " ; qu'aux termes de l'article 20 de l'arrêté du 30 mars 1992 relatif aux études de troisième cycle, applicable à la date de la dernière demande de M. A... tendant à ce que l'Institut d'études politiques de Paris désigne un directeur de thèse pour diriger ses travaux : " L'autorisation d'inscription à la préparation du doctorat est prononcée par le président ou le directeur d'un établissement d'enseignement public relevant de l'article 4 du présent arrêté, sur proposition du responsable de l'école doctorale lorsqu'elle existe. La demande doit comporter l'avis du directeur de thèse ou de travaux. (...) / L'inscription en doctorat doit être renouvelée au début de chaque année universitaire. / Au moment de leur inscription, les candidats déposent le sujet de leur recherche, après agrément par leur directeur de thèse ou de travaux, auprès du chef d'établissement, ou auparavant auprès du responsable de l'école doctorale lorsqu'elle existe.(...) " ; qu'aux termes de l'article 22 de ce même arrêté : " Les candidats effectuent leurs travaux sous le contrôle et la responsabilité de leur directeur de thèse ou de travaux.(...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 25 de ce même arrêté : " l'autorisation de présenter une thèse en soutenance est accordée par le chef d'établissement, sur avis du responsable de l'école doctorale lorsqu'elle existe, après avis du directeur de thèse (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, que la garantie de l'indépendance des professeurs de l'enseignement supérieur constitue un principe fondamental reconnu par les lois de la République ; qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, codifié à l'article L. 952-2 du code de l'éducation : " Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions de la présente loi, les principes de tolérance et d'objectivité " ;

4. Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire ni, en tout état de cause, la charte des thèses prévue par l'arrêté du 3 septembre 1998 qui n'a ni pour objet, ni pour effet d'établir une relation de nature contractuelle entre les signataires, n'imposait au directeur de l'Institut d'études politiques de Paris de désigner un nouveau directeur de thèse pour diriger les travaux de M. A...après le départ de son directeur de thèse, ce qui contreviendrait au demeurant au principe fondamental reconnu par les lois de la République et aux dispositions de la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur mentionnés au point précédent ; que les courriers présentés devant la Cour témoignant des démarches personnelles infructueuses de M. A... pour tenter de poursuivre ses travaux de recherche sous la direction d'un autre directeur de thèse ne sont pas de nature à remettre en cause cette appréciation ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que le directeur de l'école doctorale de l'Institut d'études politiques de Paris a soumis à deux reprises, en 1990 et en 2001, la demande de M. A...à l'ensemble de ses collègues susceptibles d'encadrer sa thèse ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions citées au point 2 que l'autorisation de soutenir une thèse ne peut être donnée qu'à un candidat dont les travaux sont dirigés par un directeur de thèse ; que M. A...ne peut donc soutenir que l'autorisation de soutenir sa thèse lui avait été accordée par l'Institut d'études politiques de Paris lors de son inscription en doctorat en 1986 ;

6. Considérant qu'il résulte des points 2 à 5 que l'Institut d'études politiques de Paris, qui n'avait ainsi pas l'obligation de désigner un nouveau directeur de thèse, n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de M. A... ; que, par suite, les conclusions indemnitaires présentées par celui-ci ne peuvent qu'être rejetées ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

8. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. A...ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Institut d'études politiques de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...le versement de la somme que l'Institut d'études politiques de Paris demande sur le fondement des mêmes dispositions ; que M. A...ne saurait davantage solliciter la condamnation de l'Institut d'études politiques de Paris aux entiers dépens ;

Sur les conclusions tendant à ce que le présent arrêt soit déclaré immédiatement exécutoire :

10. Considérant que le présent arrêt est exécutoire de plein droit à compter de sa notification aux parties; qu'il en résulte que les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'Institut d'études politiques de Paris tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à l'Institut d'études politiques de Paris et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de la formation de jugement,

- Mme Petit, premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 mai 2015.

Le rapporteur,

V. LARSONNIERLe président,

B. AUVRAYLe greffier,

S. LAVABRE

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA00572


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA00572
Date de la décision : 28/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme VRIGNON-VILLALBA
Avocat(s) : PUILLANDRE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-28;13pa00572 ?
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