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26/05/2015 | FRANCE | N°14PA02259

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 26 mai 2015, 14PA02259


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2014, présentée par le préfet de police de Paris qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1314698/5-1 du 20 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 28 août 2013 refusant d'admettre M. B...A...au séjour au titre de l'asile et décidant sa remise aux autorités autrichiennes ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que l'arrêté litigieux n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 741-2 du code

de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2014, présentée par le préfet de police de Paris qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1314698/5-1 du 20 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 28 août 2013 refusant d'admettre M. B...A...au séjour au titre de l'asile et décidant sa remise aux autorités autrichiennes ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que l'arrêté litigieux n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2014, présenté pour M. A..., domicilié..., par Me Dannaud, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du 4 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 et du 1 de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 ;

Vu les mémoires, enregistrés les 20 janvier et 22 avril 2015, présentés pour M. A... par Me Dannaud, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement n° 343/2003/CE du Conseil du 18 février 2003 ;

Vu la directive n° 2003/9/CE du Conseil du 27 janvier 2003 ;

Vu la directive n° 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;

Vu l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-179/11 du 27 septembre 2012 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2015 :

- le rapport de M. Dellevedove, premier conseiller,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- et les observations de Me Dannaud avocat de M.A... ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant afghan né le 5 janvier 1984, a déclaré être entré en France le 3 mars 2013 ; qu'il a sollicité, le 25 juin 2013, son admission au séjour au titre de l'asile ; que, par l'arrêté contesté en date du 28 août 2013, le préfet de police de Paris lui a refusé son admission au titre de l'asile et a décidé de sa remise aux autorités autrichiennes ; que le préfet de police fait appel du jugement en date du 20 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté ;

2. Considérant que le préfet de police soutient qu'il n'était pas tenu de délivrer l'information prévue à l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à M.A..., avant de lui refuser le séjour sur le fondement du 1° de l'article L. 741-4 du même code, dès lors que l'examen de sa demande d'asile relevait de la compétence de l'Autriche et que, dans ces conditions, cette disposition, issue de la transposition de la directive susvisée du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres, ne lui serait pas applicable en vertu du point 29 de cette même directive qui exclut expressément son application aux procédures régies par le règlement susvisé du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres États " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 741-2 de ce même code : " L'indication des pièces à fournir par l'étranger qui sollicite son admission au séjour au titre de l'asile en application du présent article est portée à sa connaissance par les services de la préfecture. Ces derniers remettent alors à l'étranger un document d'information sur ses droits et sur les obligations qu'il doit respecter eu égard aux conditions d'accueil des demandeurs d'asile, ainsi que sur les organisations qui assurent une assistance juridique spécifique et celles susceptibles de l'aider ou de l'informer sur les conditions d'accueil dont il peut bénéficier, y compris les soins médicaux. Cette information se fait dans une langue dont il est raisonnable de penser que le demandeur d'asile la comprend " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la directive susvisée du Conseil du 27 janvier 2003 relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres : " La présente directive s'applique à tous les ressortissants de pays tiers et apatrides qui déposent une demande d'asile à la frontière ou sur le territoire d'un Etat membre tant qu'ils sont autorisés à demeurer sur le territoire en qualité de demandeurs d'asile, ainsi qu'aux membres de leur famille, s'ils sont couverts par cette demande d'asile conformément au droit national " ; qu'aux termes de l'article 5 de cette directive : " Information / 1. Les États membres informent, au minimum, les demandeurs d'asile, dans un délai raisonnable n'excédant pas quinze jours après le dépôt de leur demande d'asile auprès de l'autorité compétente, des avantages dont ils peuvent bénéficier et des obligations qu'ils doivent respecter eu égard aux conditions d'accueil. / Les États membres garantissent que des informations sont fournies aux demandeurs sur les organisations ou les groupes de personnes qui assurent une assistance juridique spécifique et sur les organisations susceptibles de les aider ou de les informer en ce qui concerne les conditions d'accueil dont ils peuvent bénéficier, y compris les soins médicaux. / 2. Les États membres font en sorte que les informations prévues au paragraphe 1 soient fournies par écrit et, dans la mesure du possible, dans une langue dont les demandeurs sont censés avoir une connaissance suffisante. Le cas échéant, ces informations peuvent également être fournies oralement. " ;

5. Considérant, enfin, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 10 de la directive susvisée du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres : " 1. En ce qui concerne les procédures prévues au chapitre III, les États membres veillent à ce que tous les demandeurs d'asile bénéficient des garanties suivantes : a) ils sont informés, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'ils la comprennent, de la procédure à suivre et de leurs droits et obligations au cours de la procédure ainsi que des conséquences que pourrait avoir le non-respect de leurs obligations ou le refus de coopérer avec les autorités. Ils sont informés du calendrier, ainsi que des moyens dont ils disposent pour remplir leur obligation de présenter les éléments visés à l'article 4 de la directive 2004/83/CE. Ces informations leur sont communiquées à temps pour leur permettre d'exercer les droits garantis par la présente directive et de se conformer aux obligations décrites à l'article 11 " ; que selon le point 29 de cette même directive : " La présente directive ne s'applique pas aux procédures régies par le règlement (CE) no 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers " ;

6. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'étranger présent sur le territoire français qui, n'étant pas admis à séjourner en France, sollicite son admission au titre de l'asile, est informé par les services de la préfecture des pièces à fournir en vue de cette admission et doit se voir remettre un document d'information, dans une langue dont il est raisonnable de penser que l'intéressé la comprend, sur ses droits et sur les obligations qu'il doit respecter, ainsi que sur les organisations susceptibles de lui procurer une assistance juridique, de l'aider ou de l'informer sur les conditions d'accueil offertes aux demandeurs d'asile ; que ces dispositions ont été adoptées pour assurer la transposition en droit français à la fois des objectifs fixés par l'article 10 précité de la directive du Conseil du 1er décembre 2005 et ceux fixés par l'article 5 précité de la directive du Conseil du 27 janvier 2003 ; que, si les garanties prévues par l'article 10 précité de la directive susvisée du Conseil du 1er décembre 2005, conformément à son point 29, ne s'appliquent pas aux demandeurs d'asile pour lesquels l'État membre décide, en application du règlement susvisé du Conseil du 18 février 2003, dit " Dublin II ", de requérir un autre État membre aux fins de prendre en charge ou de reprendre en charge ce demandeur en tant qu'État membre responsable de l'examen de sa demande d'asile, il résulte des dispositions de la directive du 27 janvier 2003 susvisée, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt C-179/11 du 27 septembre 2012, qu'un État membre est, toutefois, tenu d'octroyer les conditions minimales d'accueil garanties par cette dernière directive, notamment, comme en l'espèce, celles prévues à son article 5, y compris à un demandeur d'asile pour lequel il décide de mettre en oeuvre la procédure régie par le règlement du Conseil du 18 février 2003, et que cette obligation ne prend fin, le cas échéant, que lors du transfert effectif du demandeur par l'Etat membre requérant, la charge financière de l'octroi des conditions minimales incombant, jusqu'à cette date, à ce dernier État membre ;

7. Considérant que, si M.A..., dont la demande relève de la compétence de l'Autriche, peut se voir refuser l'admission au séjour en application du 1° de l'article L. 741-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il dispose cependant du droit de rester en France jusqu'à son transfert effectif vers l'État membre chargé de l'examen de sa demande d'asile ; qu'il doit, par suite, pouvoir accéder à l'information prévue par le dernier alinéa de l'article R. 741-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, correspondant aux conditions minimales d'accueil prévues par la directive susvisée du 27 janvier 2003, en tant qu'elles sont issues de la transposition de cette directive ; que le préfet de police ne conteste pas en appel que M. A... n'a pas eu communication de ces informations ;

8. Considérant que, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé l'intéressé d'une garantie ; que le vice de procédure entachant la légalité de l'arrêté contesté du 28 août 2013 a eu pour effet de priver M. A...d'une garantie, ce que le préfet de police ne conteste d'ailleurs pas en appel ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 28 août 2013 et lui a enjoint de réexaminer la demande de M. A...;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police de Paris est rejetée.

Article 2 : L'État versera à M. A...la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.

Délibéré après l'audience du 5 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Coënt-Bochard, président de chambre,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- M. Cantié, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 mai 2015.

Le rapporteur,

E. DELLEVEDOVELe président,

E. COËNT-BOCHARD Le greffier,

A. LOUNIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02259


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02259
Date de la décision : 26/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour - Procédure.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : DANNAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-26;14pa02259 ?
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