Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 septembre 2013, présentée pour la société civile JTA, dont le siège social est 60 avenue Jean Jaurès à Ivry-sur-Seine (94200), représentée par son gérant, par la SELARL Confino ; la société civile JTA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1106797/4 du 20 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2011/2275 du préfet du Val-de-Marne du 11 juillet 2011 déclarant d'utilité publique l'opération d'aménagement, dénommée " ZAC Ivry - Confluences ", pour l'acquisition des immeubles et droits réels immobiliers situés dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté (ZAC), sur le territoire de la commune d'Ivry-sur-Seine ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté préfectoral ;
3°) de condamner l'État, la commune d'Ivry-sur-Seine et la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) à lui verser chacun une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, les premiers juges ayant pris en compte le mémoire enregistré le 8 avril 2013, après la clôture de l'instruction, présenté pour la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), sans le lui avoir préalablement communiqué ;
- le jugement attaqué est irrégulier, étant insuffisamment motivé : que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de production de l'évaluation prévue au 7° de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le jugement attaqué est entaché de contradiction de motifs : que le tribunal affirme qu'" il appartient au juge administratif [...] de vérifier que l'autorité expropriante ne dispose pas de terrains qui lui permettraient, sans recourir à l'expropriation, de réaliser l'opération envisagée dans des conditions équivalentes " ; que, pourtant, quelques lignes plus loin, il indique
qu'" il n'appartient pas à la juridiction administrative [...] de rechercher si d'autres emplacements eussent également permis de réaliser l'opération envisagée " ;
- le jugement est irrégulier, le tribunal n'ayant pas pris en compte le risque de saturation du réseau de voirie, l'atteinte à la maîtrise des dépenses énergétiques, l'atteinte à l'intérêt urbanistique et au confort des habitants du quartier ;
- la délégation de signature accordée à M. Christian Rock, signataire de l'arrêté préfectoral attaqué, est illégale, faute de fixer avec une précision suffisante l'objet et l'étendue des compétences déléguées ;
- en méconnaissance de l'article L. 11-1-1-3° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, l'arrêté litigieux n'est pas accompagné d'un document exposant les motifs et considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération ;
- le contenu de la notice explicative jointe au dossier d'enquête publique ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : la notice explicative n'indique en aucune manière les raisons pour lesquelles, du point de vue de son insertion dans l'environnement, parmi les partis envisagés, le projet soumis à enquête a été retenu ; l'objet de l'opération n'est pas précisément identifié ;
- en méconnaissance de l'article R. 11-3-7° du code de l'expropriation, le dossier d'enquête publique est incomplet, faute de comporter l'évaluation mentionnée à l'article 5 du décret du 17 juillet 1984 ; que les travaux litigieux constituent un " grand projet
d'infrastructures " ;
- la décision litigieuse méconnaît l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme dès lors qu'elle est intervenue avant que les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du PLU avec le projet aient fait l'objet d'un examen conjoint par les personnes mentionnées à cet article ; que cet examen n'a pas eu lieu ;
- l'arrêté du maire d'Ivry-sur-Seine du 16 novembre 2010 prescrivant l'ouverture de l'enquête publique est entaché d'illégalité : cet arrêté émane d'une autorité incompétente ; en méconnaissance de l'article R. 11-14-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, d'une part, le commissaire enquêteur n'a pas été consulté et, d'autre part, l'arrêté ne mentionne ni l'objet de l'enquête, ni la qualité du commissaire enquêteur ;
- le projet litigieux ne revêt pas un caractère d'utilité publique, dès lors que les atteintes à la propriété privée, le coût financier, les inconvénients d'ordre social et l'atteinte à d'autres intérêts publics excèdent l'intérêt public dudit projet ; l'expropriant pouvait réaliser l'opération projetée sans recourir à l'expropriation ; il ressort de l'enquête publique que de grandes emprises foncières sont en cours de libération et que l'acquisition de celles-ci par voie amiable ou par le biais du droit de préemption serait de nature à permettre le renouveau du quartier sans engendrer une atteinte aussi prononcée à la propriété privée ; ainsi les inconvénients générés par l'opération sont excessifs au regard de ses avantages ;
Vu le jugement et l'arrêté préfectoral attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2014, présenté pour la commune
d'Ivry-sur-Seine, représentée par son maire en exercice dûment habilité domicilié ...;
La commune d'Ivry-sur-Seine soutient qu'aucun des moyens invoqués par la société requérante n'est fondé ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2014, présenté pour la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), société anonyme d'économie mixte, dont le siège social est sis 31 rue Anatole France à Vincennes (94300), prise en la personne de son représentant légal, M. E...D..., par le cabinet DS avocats, tendant au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la société civile JTA le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société d'aménagement et de développement des villes et du département du
Val-de-Marne (SADEV 94) soutient qu'aucun des moyens invoqués par la société requérante n'est fondé ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 8 octobre 2014, présenté pour la société civile JTA, par la SELARL Confino, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens, faisant valoir en outre :
- que le moyen tiré de l'absence d'évaluation prévue au 7° de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation appelait une réponse précise et circonstanciée de la part des premiers juges ; que dans sa demande elle avait précisément démontré que le projet litigieux comprenait des ouvrages d'infrastructures de transports ; qu'il est donc faux d'affirmer que le moyen n'était pas suffisamment développé ; que le tribunal a analysé de façon insuffisante le moyen tiré de l'absence d'évaluation prévue au 7° de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation, en s'abstenant notamment de faire état des raisons pour lesquelles les voies de circulation, le pont, les lignes de transport en commun ou encore les canalisations d'intérêt général devant être réalisés ne pouvaient pas être qualifiés de "grands projets d'infrastructures de transports" (et ce indépendamment de leur coût) ;
- que la délibération du conseil municipal d'Ivry-sur-Seine du 28 avril 2011 n'expose pas les motifs et considérations susceptibles de justifier le caractère d'utilité publique de l'opération ; que cette délibération se borne à évoquer le contenu du projet, mais ne fait nullement état ni même allusion aux motifs et considérations d'utilité publique qui auraient conduit à l'élaboration du projet, et justifieraient ce dernier au regard de l'utilité publique ;
- que la notice explicative est insuffisante, faute de préciser les caractéristiques essentielles des ouvrages ou des espaces verts prévus par le projet et plus particulièrement leur dimensions et leur localisation ;
- sur l'absence de l'évaluation prévue au 7° de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation : qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit que la qualification d'un projet de " grand projet d'infrastructures de transport " serait exclue lorsque ledit projet s'inscrirait dans une opération plus globale ; qu'en toute hypothèse, la question de savoir si les ouvrages projetés doivent être considérés ensemble ou séparément est inopérante dès lors que ces ouvrages doivent être nécessairement qualifiés de " grands projets d'infrastructures de transport " au sens de l'article 2 du décret du 17 juillet 1984, puisque le projet litigieux porte sur la création de nombreuses voies de circulation nouvelles, d'un pont, de lignes de transport en commun, de canalisations d'intérêt général ; qu'ainsi il ne fait pas de doute qu'en application de l'article 2 du décret du 17 juillet 1984 le projet litigieux inclut des ouvrages qui doivent être qualifiés de " grand projet d'infrastructure " ; qu'au surplus et concernant le coût des ouvrages projetés d'infrastructures routières de transport et de canalisations d'intérêt général, il s'élève à 130 181 138 euros, soit un montant bien supérieur au seuil de 83 084 714,39 euros prévu par le décret précité ; ainsi, pour ces motifs encore, liés au coût du projet, il n'est pas sérieusement contestable que le projet soumis à l'enquête était un " grand projet d'infrastructures de transport " et qu'il devait, de ce fait, faire l'objet d'une évaluation jointe au dossier d'enquête ;
- sur la possibilité de réaliser l'opération sans recourir à l'expropriation : que la majeure partie du périmètre de l'opération est d'ores et déjà la propriété de personnes publiques,
semi-publiques ou para-publiques ; qu'en outre, une grande partie du secteur concerné par l'opération est également constituée par d'anciens sites industriels vacants ;
- sur l'absence d'utilité publique de l'opération envisagée : que les inconvénients de l'opération excèdent largement l'intérêt qu'elle pourrait représenter : que pas moins de 8441 habitants seront contraints de quitter leur logement ; que, s'agissant du relogement des habitants ou des entreprises, celui-ci n'est, contrairement aux affirmations de la SADEV et de la commune, nullement certain ; que le défaut de " relogement " de l'intégralité des occupants est d'ailleurs confirmé par l'indemnisation des expropriations envisagée, à hauteur de 472 000 000 euros ; qu'à cet égard, la commune est bien mal fondée à laisser entendre que la société JTA, qui se ferait " le chevalier des expropriés ", ne subirait aucun préjudice du fait de l'expropriation, ce qui ferait " douter de son véritable intérêt à agir personnel à l'encontre de la déclaration d'utilité publique " ; qu'en effet, la SCI JTA est propriétaire d'un immeuble comprenant un grand terrain avec cour de dégagement, un entrepôt et un bâtiment en rez-de-chaussée à usage de bureaux ainsi qu'un pavillon élevé sur rez-de-chaussée d'un étage sur cour, le tout situé sur des parcelles sises 1, 15 et 17 rue Emile Blin et 60 avenue Jean Jaurès, intégralement situées dans le périmètre de la Zac Ivry-Confluences créée par arrêté préfectoral du 28 octobre 2010 ; qu'ainsi les parcelles propriété de la SCI JTA sont destinées à être expropriées, sans que celle-ci ait pu bénéficier d'une proposition de vente d'une parcelle bénéficiant des mêmes caractéristiques dans le périmètre de l'opération ; que le coût financier du projet, d'environ 784 701 359,90 euros, est exorbitant ; que l'opération envisagée engendrera une saturation du réseau de voirie ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs ;
Vu la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ;
Vu le décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 relatif aux grands projets d'infrastructures, aux grands choix technologiques et aux schémas directeurs d'infrastructures en matière de transports intérieurs ;
Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'État dans les régions et départements ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2015 :
- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public,
- les observations de la MeF..., pour la société civile JTA, de
MeB..., pour la SADEV 94, et de MeC..., pour la commune d'Ivry-sur-Seine ;
1. Considérant que, par plusieurs délibérations du 25 juin 2009, le conseil municipal de la commune d'Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) a approuvé les objectifs d'aménagement de l'opération baptisée " Ivry-Confluences ", a défini les modalités de la concertation préalable unique portant, d'une part, sur la création de la ZAC " Ivry-Confluences " et, d'autre part, sur la révision simplifiée du PLU de la commune et, enfin, a engagé une procédure de mise en concurrence pour la désignation du concessionnaire de la ZAC en projet ; que la concertation préalable unique relative à la création de la ZAC " Ivry-Confluences " et à la révision simplifiée du PLU a été organisée entre le mois de juillet 2009 et le mois de juin 2010 ; que, par délibération du 24 juin 2010, le conseil municipal d'Ivry-sur-Seine a approuvé le bilan de cette concertation préalable unique et a demandé au préfet du Val-de-Marne de créer la ZAC ; que, par un arrêté du 28 octobre 2010, le préfet du Val-de-Marne a décidé la création de la ZAC
" Ivry-Confluences " ; que, par une délibération du 16 décembre 2010, le conseil municipal d'Ivry-sur-Seine a autorisé le maire à concéder l'aménagement de la ZAC " Ivry-Confluences " à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), société anonyme d'économie mixte ; que le traité de concession, conclu le
3 janvier 2011, prévoit que l'aménageur devra se rendre propriétaire des biens immobiliers compris dans le périmètre de la ZAC, soit par voie amiable, soit par voie de préemption, soit par voie d'expropriation ;
2. Considérant que, par arrêté du 16 novembre 2010, le maire d'Ivry-sur-Seine a prescrit l'ouverture d'une enquête publique relative à la révision simplifiée du PLU portant sur le secteur de la ZAC " Ivry-Confluences " valant enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique relative à ladite ZAC ; que l'enquête publique s'est déroulée du 15 décembre 2010 au 24 janvier 2011 ; qu'à l'issue de l'enquête, le commissaire enquêteur a émis, le 28 février 2011, un avis favorable sans réserve au caractère d'utilité publique de la ZAC " Ivry-Confluences " et à la révision simplifiée du PLU ; que, par une 1ère délibération du 28 avril 2011, le conseil municipal d'Ivry-sur-Seine a approuvé la révision simplifiée de son PLU ; que, par une 2nde délibération du même jour, exposant les motifs et les considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération, le conseil municipal a demandé à l'autorité préfectorale de déclarer l'opération d'utilité publique ; que, par arrêté du 11 juillet 2011, le préfet du
Val-de-Marne a déclaré d'utilité publique, au profit de la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), l'opération d'aménagement, dénommée ZAC " Ivry-Confluences ", pour l'acquisition des immeubles et droits réels immobiliers situés dans le périmètre de la ZAC, sur le territoire de la commune d'Ivry-sur-Seine ; que l'arrêté préfectoral indique que les expropriations éventuellement nécessaires à la réalisation de l'opération devront être réalisées dans un délai de cinq ans à compter de ce jour par la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) ;
3. Considérant que la société civile JTA, propriétaire de parcelles sises
1, 15 et 17 rue Emile Blin et 60 avenue Jean Jaurès à Ivry-sur-Seine, incluses dans le périmètre de la ZAC, relève appel du jugement du 20 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ; qu'aux termes de l'article R. 611-11-1 de ce code : " Lorsque l'affaire est en état d'être jugée, les parties peuvent être informées de la date ou de la période à laquelle il est envisagé de l'appeler à l'audience. Cette information précise alors la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2. Elle ne tient pas lieu de l'avertissement prévu à l'article R. 711-2. " ; qu'aux termes de l'article R. 613-1, dernier alinéa, de ce même code : " Lorsqu'une partie appelée à produire un mémoire n'a pas respecté, depuis plus d'un mois, le délai qui lui a été assigné par une mise en demeure comportant les mentions prévues par le troisième alinéa de l'article R. 612-3 ou lorsque la date prévue par l'article R. 611-11-1 est échue, l'instruction peut être close à la date d'émission de l'ordonnance prévue au premier alinéa. " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 613-3 de ce code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que lorsque, postérieurement à la clôture de l'instruction, le juge est saisi d'un mémoire émanant de l'une des parties à l'instance, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser ; que s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte - après l'avoir visé et, cette fois, analysé -, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ;
6. Considérant, en l'espèce, qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) a produit un mémoire enregistré au greffe du Tribunal administratif de Melun le
8 avril 2013, soit postérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 21 mars 2013 en application des dispositions précitées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, il ne ressort pas des énonciations du jugement attaqué que le tribunal se serait fondé sur le contenu de ce mémoire tardif ; que, dès lors, le tribunal, qui a visé ce mémoire, a fait une exacte application des règles prévues à l'article R. 613-3 du code de justice administrative en se bornant à le viser sans l'analyser et n'a pas méconnu le principe du contradictoire en statuant sans rouvrir l'instruction et sans communiquer ce mémoire à la société civile JTA ;
7. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. " ; que, contrairement à ce soutient la société civile JTA, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par cette société, a répondu dans le jugement attaqué aux moyens tirés, d'une part, du défaut de production de l'évaluation prévue à l'article R. 11-3-I-7° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et, d'autre part, du défaut d'utilité publique de l'opération litigieuse ; qu'ainsi, doit être écarté le moyen de régularité tiré de l'insuffisance de réponse à ces deux moyens par le jugement attaqué ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les moyens de légalité externe :
S'agissant de l'incompétence du signataire de l'arrêté portant déclaration d'utilité publique :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 11-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique dans sa version alors en vigueur : " I. - L'expropriation d'immeubles, en tout ou partie, ou de droits réels immobiliers ne peut être prononcée qu'autant qu'elle aura été précédée d'une déclaration d'utilité publique intervenue à la suite d'une enquête publique et qu'il aura été procédé contradictoirement à la détermination des parcelles à exproprier ainsi qu'à la recherche des propriétaires, des titulaires de droits réels et autres intéressés. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 11-2 du même code : " L'utilité publique est déclarée par arrêté ministériel ou par arrêté préfectoral. / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 11-1 du même code : " L'utilité publique, dans les cas autres que ceux énumérés à l'article R. 11-2, est déclarée : / 1° Par arrêté du préfet du lieu des immeubles faisant l'objet de l'opération lorsque l'opération se situe sur le territoire d'un seul département ; / (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 43 du décret du
29 avril 2004 susvisé : " Le préfet de département peut donner délégation de signature (... ) : / 1° En toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'État dans le département, au secrétaire général et aux chargés de mission " ;
9. Considérant que l'arrêté contesté a été signé, pour le préfet du Val-de-Marne, par
M. Christian Rock, secrétaire général de la préfecture ; que, par arrêté n° 2010/8039 du
30 décembre 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le
31 décembre 2010, M. A...a reçu du préfet du Val-de-Marne délégation " à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'État dans le département du Val-de-Marne " à l'exception de certains actes limitativement énumérés, au nombre desquels ne figurent pas les déclarations d'utilité publique ; qu'en outre, la délégation de signature accordée par le préfet du Val-de-Marne à
M. Christian Rock est conforme à l'article 43 du décret du 29 avril 2004 susvisé aux termes duquel : " Le préfet de département peut donner délégation de signature : 1°) En toutes matières (...) au secrétaire général et aux chargés de mission ; / (...) " ; qu'enfin, dans les termes où elle est rédigée, la délégation de signature dont justifiait pour prendre la décision litigieuse M.A..., était définie avec une précision suffisante ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte contesté manque en fait et doit, dès lors, être écarté ;
S'agissant de la méconnaissance de l'article L. 11-1-1-3° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :
10. Considérant que, si le 3° de l'article L. 11-1-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique prévoit que " l'acte déclarant l'utilité publique est accompagné d'un document qui expose les motifs et considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération ", ces dispositions, qui exigent que l'auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l'ont fondée, ne sauraient, à la lumière des travaux préparatoires de la loi susvisée du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité dont elles sont issues, être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la déclaration d'utilité publique qui serait une condition de légalité de cette dernière ; qu'ainsi, les dispositions de cet article ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'un acte déclarant une opération d'utilité publique ; que, dès lors, et en tout état de cause, la circonstance que le document explicatif prévu par les dispositions précitées du code de l'expropriation n'a pas été joint à l'arrêté litigieux est sans incidence sur la légalité de cet arrêté ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 3° de l'article L. 11-1-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne peut qu'être écarté comme inopérant ;
S'agissant de l'insuffisance de la notice explicative jointe au dossier d'enquête publique :
11. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, dans sa version alors en vigueur : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I. - Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : 1° une notice explicative [...] Dans les cas prévus aux I et II ci-dessus, la notice explicative indique l'objet de l'opération et les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'insertion dans l'environnement, parmi les partis envisagés, le projet soumis à l'enquête a été retenu. " ;
12. Considérant, d'une part, que, contrairement aux allégations de la société requérante, la notice explicative jointe au dossier soumis à l'enquête publique précise l'objet de l'opération en indiquant notamment, pages 19 et suivantes, les orientations d'aménagement retenues, la réorganisation des modes de transport ainsi que la programmation des constructions en fonction de leur destination ; que, par ailleurs, le document relatif aux caractéristiques principales des ouvrages les plus importants, également joint au dossier d'enquête publique, précise notamment la localisation préférentielle des voies et espaces publics ; qu'en outre, les seules circonstances relevées par la société requérante que le commissaire enquêteur estime que les principes de voiries, d'espaces verts et de faisceau paysager sont insuffisamment précis et que les dimensions des voies et espaces publics ne sont pas indiquées, ne sont pas de nature à caractériser l'insuffisance du contenu de la notice explicative, dès lors que les autres documents joints à l'enquête publique ont permis au public d'apprécier la nature et l'utilité publique du projet litigieux ;
13. Considérant, d'autre part, que les dispositions précitées du code de l'expropriation n'ont ni pour objet ni pour effet de contraindre la collectivité bénéficiaire de l'expropriation à envisager tous les projets éventuellement susceptibles de répondre à l'intérêt général recherché ; qu'ainsi, l'administration n'a l'obligation de mentionner les autres lieux possibles d'implantation d'un projet que pour autant qu'elle a envisagé et étudié différentes possibilités ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commune d'Ivry-sur-Seine n'a effectivement étudié que le seul projet qui était soumis à l'enquête, les autres options envisagées s'analysant comme de simples variantes dont la notice explicative n'avait pas à faire mention ; qu'il suit de là que, en l'absence d'autres partis envisagés par la commune, les dispositions précitées de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation prescrivant de mentionner dans la notice explicative les raisons pour lesquelles le projet avait été retenu parmi les partis envisagés se trouvaient sans application en l'espèce ; que le moyen tiré de l'insuffisance de la notice explicative jointe au dossier d'enquête publique doit ainsi être écarté ;
S'agissant du caractère incomplet du dossier soumis à enquête publique :
14. Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, dans sa version alors en vigueur : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I.- Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : (...) 7° l'évaluation mentionnée à l'article 5 du décret n° 84-617 du 17 juillet 1984 pris pour l'application de l'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, lorsque les travaux constituent un grand projet d'infrastructures tels que défini à l'article 3 du même décret (...) " ;
15. Considérant, d'autre part, que selon les dispositions du deuxième alinéa de l'article 14 de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982 susvisée : " Les grands projets d'infrastructures et les grands choix technologiques sont évalués sur la base de critères homogènes intégrant les impacts des effets externes des transports relatifs notamment à l'environnement, à la sécurité et à la santé et permettant de procéder à des comparaisons à l'intérieur d'un même mode de transport et entre différents modes ou combinaisons de modes. Ces évaluations sont rendues publiques avant l'adoption définitive des projets concernés (... " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 17 juillet 1984 pris pour l'application de la loi du 30 décembre 1982 : " Sont considérés comme grands projets d'infrastructures de transports : [...] 2. Les canalisations de transport pour lesquelles le maître d'ouvrage demande la déclaration d'utilité publique autres que celles destinées au transport de gaz naturel, dont le coût est égal ou supérieur à 42 000 000 euros ; toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas aux ouvrages utilisés pour les besoins de la défense nationale ou en application de traités ou accords internationaux en matière de défense, régulièrement entrés en vigueur ; 3. Les projets d'infrastructures de transport dont le coût est égal ou supérieur à 83 084 714,39 euros. " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : " Lorsqu'un projet est susceptible d'être réalisé par tranches successives, les conditions prévues à l'article 2 s'apprécient au regard de la totalité dudit projet et non de chacune de ses tranches ; l'évaluation (...) doit être préalable à la réalisation de la première tranche " ; qu'aux termes de l'article 5 du même décret : " L'évaluation d' un grand projet d'infrastructures incombe au maître d'ouvrage et est financée par lui " ;
16. Considérant, en l'espèce, qu'il ressort des pièces du dossier qu'aucun des travaux et ouvrages déclarés d'utilité publique par la décision préfectorale litigieuse ne correspond aux catégories de travaux énumérées à l'article 2 précité du décret du 17 juillet 1984, susceptibles d'être qualifiées de " grands projets d'infrastructures de transports " ; qu'à cet égard, d'une part, n'est prévue la réalisation d'aucune canalisation de transport autre que celles destinées au transport de gaz naturel, dont le coût serait égal ou supérieur à 42 000 000 euros au sens du 2° de cet article 2 ; que, d'autre part, si la société requérante allègue que les travaux relatifs aux voiries du projet en cause dépassent le seuil de 83 084 714, 39 euros prévu au 3° de cet article 2 et
au-delà duquel des travaux sont considérés comme de " grands projets d'infrastructures de transports ", elle n'établit pas que le montant de 130 181 138 euros dont elle se prévaut, qui est mentionné dans l'appréciation sommaire des dépenses et inclut également divers autres coûts, notamment celui de la réalisation des réseaux, correspondrait, à lui seul, au coût de réalisation d'une unique infrastructure de transport ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient la société civile JTA, la mise en oeuvre opérationnelle de la ZAC " Ivry-Confluences " ne saurait être regardée comme s'inscrivant dans le cadre d'une opération globale de réalisation d'un " grand projet d'infrastructures de transports ", dont les travaux contestés constitueraient la première tranche, au sens de l'article 3 précité du décret du 17 juillet 1984 ; qu'ainsi, les travaux et ouvrages déclarés d'utilité publique ne sauraient être regardés, ni comme la première tranche d'un projet global d'infrastructure de transport au sens de l'article 3 du décret du 17 juillet 1984, ni, a fortiori, comme constitutifs en eux-mêmes d'un " grand projet d'infrastructures de transports " au sens de l'article 2 de ce même décret ; qu'il suit de là que le dossier soumis à l'enquête publique concernant la réalisation de ces travaux et ouvrages n'avait pas à comporter l'évaluation prévue au 7° du I de l'article R. 11-3 précité du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
S'agissant de la méconnaissance de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme :
17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " La déclaration d'utilité publique [...] d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si : a) L'enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence ; b) L'acte déclaratif d'utilité publique [...] est pris après que les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du plan ont fait l'objet d'un examen conjoint du représentant de l'État dans le département, du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent, du maire de la commune sur le territoire de laquelle est situé le projet, de l'établissement public mentionné à l'article L. 122-4, s'il en existe un, de la région, du département et des organismes mentionnés à l'article L. 121-4, et après avis de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou, dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 123-6, du conseil municipal. La déclaration d'utilité publique emporte approbation des nouvelles dispositions du plan [...]" ;
18. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme que celles-ci ne s'appliquent qu'à l'acte déclaratif d'utilité publique d'opérations incompatibles avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme, emportant dès lors approbation des nouvelles dispositions du plan aux fins de mise en compatibilité de celui-ci ; qu'en l'espèce, il est constant que, si la concertation préalable et l'enquête publique ont porté conjointement sur la mise en compatibilité des dispositions du PLU concernant le secteur de la ZAC
" Ivry-Confluences ", d'une part, et sur la déclaration d'utilité publique relative à ladite ZAC, d'autre part, la mise en compatibilité des dispositions du PLU de la commune d'Ivry-sur-Seine relatives au secteur de la ZAC " Ivry-Confluences " n'a pas été décidée par l'arrêté préfectoral litigieux, mais par la délibération du conseil municipal d'Ivry-sur-Seine en date du 28 avril 2011 approuvant la révision simplifiée de son PLU ; que, par suite, la société civile JTA ne saurait utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 123-16 du code de l'urbanisme à l'encontre de l'arrêté préfectoral litigieux ;
En ce qui concerne les moyens de légalité interne :
S'agissant de l'exception d'illégalité de l'arrêté du maire d'Ivry-sur-Seine en date du 16 novembre 2010 prescrivant l'ouverture de l'enquête publique :
19. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le projet de plan local d'urbanisme est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par (...) le maire. (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 123-11 du même code : " Lorsque l'enquête prévue à l'article L. 123-10 concerne une zone d'aménagement concerté, elle vaut enquête préalable à la déclaration d'utilité publique des travaux prévus dans la zone à condition que le dossier soumis à l'enquête comprenne les pièces requises par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique " ; que l'article R. 123-19 du même code, dans sa rédaction en vigueur, ajoute : " (...) L'enquête concernant un plan local d'urbanisme vaut enquête préalable à la déclaration d'utilité publique des opérations, acquisitions ou expropriations prévues à ce plan à l'intérieur d'une zone d'aménagement concerté lorsque le dossier soumis à l'enquête comprend les pièces mentionnées au I de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Dans ce cas, l'enquête publique est organisée dans les formes prévues par les articles R. 11-14-1 et suivants du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Toutefois, le maire ou le président de l'établissement public exerce les compétences attribuées au préfet par les articles R. 11-14-2 à R. 11-14-5 et R. 11-14-7 à R. 11-14-15 du même code. " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'enquête publique préalable à l'approbation d'une révision simplifiée du plan local d'urbanisme relative à une zone d'aménagement concerté vaut enquête préalable à la déclaration d'utilité publique des travaux prévus dans cette zone sous réserve du respect de la composition du dossier d'enquête prévu par l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et des formes prévues par les articles R. 11-14-1 et suivants de ce même code ; qu'en outre, dans ce cadre, le maire exerce les compétences attribuées au préfet par les articles R. 11-14-2 à R. 11-14-5 et R. 11-14-7 à R. 11-14-15 du code de l'expropriation pour cause d' utilité publique ;
20. Considérant, par suite, qu'il appartenait au maire de la commune d'Ivry-sur-Seine de prescrire l'ouverture de l'enquête publique relative au projet de révision simplifiée du plan local d'urbanisme de la commune intégrant la ZAC " Ivry-Confluences ", laquelle valait enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de l'opération d'aménagement et des acquisitions foncières nécessaires à sa mise en oeuvre ; qu'ainsi, l'article L. 123-1 du code de l'environnement dans sa rédaction alors en vigueur et en vertu duquel la décision d'ouverture de l'enquête préalable à une déclaration d'utilité publique ressort en principe de la compétence du préfet, n'était pas applicable à la présente procédure de déclaration d'utilité publique ; que, par suite, le moyen tiré du vice d'incompétence entachant l'arrêté du maire d'Ivry-sur-Seine en date du 16 novembre 2010 prescrivant l'ouverture de l'enquête publique manque en droit et doit, dès lors, être écarté ;
21. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 11-14-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " Le préfet, après consultation du commissaire enquêteur ou du président de la commission d'enquête, précise par arrêté : / 1° L'objet de l'enquête (...) 4° Les noms et qualités du commissaire enquêteur ou des membres de la commission d'enquête et de leurs suppléants éventuels ; (...) " ;
22. Considérant, d'une part, que la société requérante soutient qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le commissaire enquêteur aurait été consulté avant l'intervention de l'arrêté du maire d'Ivry-sur-Seine en date du 16 novembre 2010 prescrivant l'ouverture de l'enquête publique ; que, toutefois, ces allégations, de même que celles qui consistent à mettre en cause la valeur probante de l'attestation du commissaire enquêteur mentionnant qu'il a été consulté avant l'édiction de cet arrêté, lesquelles sont fondées sur la circonstance que cette attestation est postérieure à l'arrêté, ne sont pas de nature à établir que le maire n'aurait pas respecté cette obligation procédurale ;
23. Considérant, d'autre part, que l'arrêté municipal dont la requérante invoque l'illégalité par la voie de l'exception mentionne que l'enquête publique relative au projet de révision simplifiée du plan local d'urbanisme de la commune concerne le projet de zone d'aménagement concerté " Ivry-Confluences " et vaut également enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de ce projet ; qu'ainsi, contrairement aux affirmations de la société civile JTA, cet arrêté précise l'objet de l'enquête ; que, par suite, et dès lors que la circonstance que cet arrêté ne mentionne pas la qualité du commissaire enquêteur est sans incidence sur sa légalité, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 11-14-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne peut qu'être écarté ;
S'agissant de l'utilité publique du projet litigieux :
24. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il doit se prononcer sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
25. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que la mise en oeuvre opérationnelle de la ZAC " Ivry-Confluences ", justifiant de procéder à l'expropriation de certaines parcelles inclues dans le périmètre de celle-ci, répond à une finalité d'intérêt général ;
26. Considérant, en deuxième lieu, que, si la société civile JTA soutient que le projet pouvait être réalisé sans qu'il soit procédé à l'ensemble des expropriations projetées, dès lors qu'existeraient de nombreux autres terrains disponibles, notamment des terrains appartenant à des personnes publiques, en particulier la ville de Paris, elle n'établit pas, ni même n'allègue, faute d'identifier avec précision les terrains appartenant à la commune d'Ivry-sur-Seine susceptibles de dispenser cette dernière de recourir à l'expropriation, que l'opération projetée pourrait être réalisée dans des conditions équivalentes ; que, de la même façon, en se bornant à faire état, sans autre précision, d'" importantes emprises foncières en cours de libération " ou de l'existence d'" anciens sites industriels vacants ", la société requérante n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe, que la commune d'Ivry-sur-Seine ou son aménageur était en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir aux expropriations litigieuses ; qu'ainsi, dès lors qu'il n'appartient pas à la juridiction administrative d'apprécier l'opportunité du choix des terrains à exproprier, ni de se substituer à la requérante, à laquelle il incombait d'identifier précisément les terrains susceptibles de procurer une solution équivalente de nature à satisfaire aux objectifs poursuivis par la commune d'Ivry-sur-Seine et la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) chargée de l'aménagement de la ZAC, le moyen susanalysé doit être écarté ; que, sur ce point, contrairement à ce que soutient la société requérante, les premiers juges, qui ont fait une exacte application des règles de dévolution de charge de la preuve, n'ont pas entaché leur jugement de contradiction de motifs ;
27. Considérant, en troisième lieu, que la société civile JTA soutient que l'opération projetée comporte des inconvénients excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente, dès lors que la réalisation de la zone d'aménagement concerté " Ivry-Confluence " implique l'expropriation immédiate de 8 441 habitants afin de réaliser un projet dont le coût exorbitant et les incidences en termes, notamment, de densification du trafic et du bâti, excèdent l'intérêt s'attachant au renouvellement du quartier par la création de logements, de locaux d'activités, de bureaux et d'équipements, alors que le secteur concerné comporte déjà l'ensemble de ces éléments ; que, toutefois, le projet en cause a pour objet une restructuration d'ensemble du secteur dont les objectifs principaux sont de réorganiser les modes de transport par la création d'espaces multimodaux, d'assurer une meilleure relation entre la ville et son fleuve par un réaménagement des berges, de renouveler le maillage routier du quartier par la création de nouvelles voies, la fermeture de certaines voies sur berges et l'extension de voies existantes, de restructurer le quartier en s'appuyant sur les pôles que constituent l'axe de Brandebourg, la place de l'Insurrection et la place Léon Gambetta, de valoriser la place des espaces publics et des espaces verts ; qu'il ressort également des pièces du dossier que l'opération " Ivry-Confluences " a pour objet d'assurer la redynamisation du secteur et prévoit à cet effet, d'une part, la réalisation de 520 000 m² de surface hors oeuvre nette consacrée au logement, comprenant 35 % de logements sociaux, ce qui correspond à une augmentation d'environ 5 600 logements et à un afflux de 11 000 à 14 000 personnes dont la réalisation traduit une préoccupation du respect de la mixité sociale et des considérations environnementales, d'autre part, la création de 650 000 m² de surface hors-oeuvre nette dédiée aux activités industrielles, artisanales, de commerces et autres permettant d'assurer le maintien et l'accueil de nouvelles entreprises dans un cadre rénové et fonctionnel, leur assurant un meilleur fonctionnement et un, meilleur développement, afin de permettre la création d'un bassin de 18 000 emplois ; qu'enfin, le projet vise à réaliser 130 000 m² de surface hors-oeuvre nette consacrée aux équipements publics, dont un collège, cinq équipements liés à la petite enfance, la réalisation de soixante à quatre-vingt classes d'écoles ainsi qu' un équipement universitaire et à accroître la qualité de vie des habitants en réaménageant les quais, en développant et favorisant les transports en commun et en réalisant un parc public d'environ 3,8 hectares qui comprendra une promenade paysagée de près de deux kilomètres sur berges ; que, par suite, eu égard à l'importance de ce projet et aux objectifs poursuivis ainsi qu'aux mesures compensatoires envisagées et aux retombées économiques et sociales attendues, il ne ressort pas des pièces du dossier que les inconvénients dudit projet excèderaient ses avantages ; que le moyen tiré de l'absence d'utilité publique du projet contesté doit dès lors être écarté ;
28. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société civile JTA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du
11 juillet 2011 déclarant d'utilité publique la ZAC " Ivry-Confluences " ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
29. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, de la commune
d'Ivry-sur-Seine et de la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société civile JTA demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société civile JTA, d'une part, une somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Ivry-sur-Seine et, d'autre part, une somme de 1 500 euros à verser à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94), sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société civile JTA est rejetée.
Article 2 : La société civile JTA versera à la commune d'Ivry-sur-Seine une somme de
1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La société civile JTA versera à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile JTA, au ministre de l'intérieur, à la société d'aménagement et de développement des villes et du département du Val-de-Marne (SADEV 94) et à la commune d'Ivry-sur-Seine.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 16 avril 2015 à laquelle siégeaient :
Mme Vettraino, président de chambre,
Mme Terrasse, président assesseur,
M. Romnicianu, premier conseiller,
Lu en audience publique le 12 mai 2015.
Le rapporteur,
M. ROMNICIANULe président,
M. VETTRAINO
Le greffier,
E. CLEMENT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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7
N° 11PA00434
2
N° 13PA03633