La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2015 | FRANCE | N°14PA03694

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 07 mai 2015, 14PA03694


Vu la requête, enregistrée le 14 août 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Moumni, avocat à la Cour ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403700/2-3 du 25 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 janvier 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'une carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°)

d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de résident, sur le fondement d...

Vu la requête, enregistrée le 14 août 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Moumni, avocat à la Cour ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403700/2-3 du 25 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 janvier 2014 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'une carte de résident, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de résident, sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;

Il soutient que :

- il était titulaire d'une carte de résident, ainsi qu'il résulte de sa convocation à la préfecture du 17 octobre 2013 en vue de la remise de son titre et de ce qu'il lui était demandé de se munir d'un timbre fiscal ;

- que l'arrêté attaqué procède en conséquence au retrait de son titre, et que ce retrait est illégal car il contrevient aux dispositions applicables des articles R. 311-14 et R. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- aucun fait nouveau susceptible de justifier le retrait n'est intervenu entre sa convocation à la préfecture et l'arrêté attaqué ;

- le requérant justifie de la régularité de son séjour en France depuis son engagement au sein de la légion étrangère dès lors qu'il détient une carte d'identité militaire ;

- la condition tenant à la régularité du séjour, figurant à l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui est pas applicable dès lors qu'en tant que militaire engagé dans la Légion étrangère, il bénéficiait nécessairement d'une carte d'identité militaire valant titre de séjour ;

- il a en outre servi dans une unité combattante de l'armée française, en sorte qu'il satisfait les conditions du 4° de l'article L 314-11 ;

- l'exigence de régularité du séjour, énoncée au 4° de l'article L 314-11, constitue une discrimination entre administrés car elle ne figure pas au 7° du même article, applicable aux militaires engagés titulaires d'un certificat de bonne conduite ; qu'elle est contraire au principe d'égalité ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, eu égard à son insertion dans la société française, à son parcours militaire et aux services rendus lui ayant valu de nombreuses décorations ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance du 21 janvier 2015 fixant la clôture de l'instruction de la présente affaire le 16 février 2015 à 12 heures en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie le 13 février 2015, présenté pour M.A..., qui tend aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu les pièces du dossier dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 9 avril 2015 :

- le rapport de M. Vincelet, premier conseiller,

- et les observations de Me Moumni, avocat de M.A... ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité mongole, né le 17 novembre 1985, est entré en France le 29 mai 2004 ; qu'ayant servi dans la Légion étrangère du 7 juin 2004 au 7 juin 2009, soit pendant cinq ans, il a demandé la délivrance d'une carte de résident sur le fondement des 4°) et 7°) de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 21 janvier 2014, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. A...fait appel du jugement du 25 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 4° A l'étranger ayant servi dans une unité combattante de l'armée française ; (...) 7° A l'étranger ayant servi dans la Légion étrangère, comptant au moins trois ans de services dans l'armée française, titulaire du certificat de bonne conduite (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-1 du même code : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 121-1 ou des stipulations d 'un accord international, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France doit, après l'expiration d'un délai de trois mois depuis son entrée en France, être muni d'une carte de séjour (...) " ;

3. Considérant d'une part, que M. A...n'est pas titulaire du certificat de bonne conduite ; qu'en conséquence, il ne pouvait légalement se voir délivrer un certificat de résidence sur le fondement du 7° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile; que, d'autre part, si M. A...a pu, durant la période de cinq ans qu'il a effectuée dans la Légion étrangère, séjourner en France sous couvert d'une carte d'identité militaire, il n'était pas titulaire d'un titre de séjour délivré sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en cours de validité lors de sa demande d'attribution d'un certificat de résidence ; qu'ainsi, il n'avait pas davantage droit à la délivrance d'une carte de résident sur le fondement du 4° du même article ;

4. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France, ainsi qu'il a été dit, en mai 2004 à l'âge de dix-huit ans ; que, durant la période de cinq ans durant laquelle il a servi sous contrat dans la Légion étrangère, il a participé à de nombreuses opérations à l'étranger, notamment en participant à une mission dans le cadre d'une unité combattante en Afghanistan, et qu'il a reçu plusieurs médailles en reconnaissance de ses services ; qu'il a de plus fait des efforts d'intégration par l'apprentissage de la langue française ; que, compte tenu de ces circonstances très particulières, l'arrêté attaqué procède d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, et doit, pour ce seul motif, être annulé ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

7. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance à M. A... d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ; qu'il y a lieu de prescrire la délivrance d'un tel titre, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A...de la somme de 1 500 euros au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris, ensemble l'arrêté du préfet de police du 21 janvier 2014, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A...un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; le préfet de police tiendra le greffe (service de l'exécution) informé des mesures prises pour l'exécution de l'arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M. Vincelet, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 7 mai 2015.

Le rapporteur,

A. VINCELETLe président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

S. CHALBOT-SANTT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

3

N° 14PA03694


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03694
Date de la décision : 07/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : CABINET MDMH

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-07;14pa03694 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award