Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2013, présentée pour M. B...
F..., demeurant..., par MeD... ; M. F...demande à la Cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 1300188 du 10 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a fait droit à la demande de cette dernière en le condamnant à une amende de 150 000 francs CFP, au versement de 953 407 francs CFP au titre de la remise en état des lieux et en mettant à sa charge une somme de 20 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement précité en ce qu'il l'a condamné à verser à la Polynésie française une somme de 953 407 francs CFP au titre de la remise en état des lieux ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'agent verbalisateur n'était porteur d'aucune commission régulière de la part de la direction des ressources marines ;
- le procès-verbal en litige n'a pas été rédigé de façon contradictoire ;
- M. G...A...n'avait pas été désigné comme le représentant de la SCA ;
- sa responsabilité ne peut être recherchée sur le terrain d'une contravention de grande voirie ;
- le procès-verbal est insuffisamment précis, notamment pour ce qui a trait à la surface litigieuse incriminée ;
- les lignes en infraction évoquées par l'agent verbalisateur sont des lignes de collectage ;
- dans la mesure où il a remis en état le site on ne peut le condamner et on ne peut pas tirer comme conséquence de cette remise en état qu'il s'estimerait responsable du litige allégué ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2014, présenté par la Polynésie française, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. F...le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'agent verbalisateur avait toutes les compétences et habilitations pour procéder à la rédaction du procès-verbal ;
- aucune disposition réglementaire n'impose la présence du contrevenant ou de son représentant lors de la constatation de faits susceptibles de caractériser une contravention de grande voirie ;
- par application de la théorie de l'apparence M. A...était le représentant de
M. F...;
- le recours à l'encontre M. F...ne concerne que les surfaces exploitées sans autorisation ;
- les éléments matériels du procès-verbal litigieux sont suffisamment précis en ce qui concerne les surfaces occupées illégalement ;
- la remise en état du site a eu lieu après le constat de l'infraction ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 mars 2015, présenté pour M.F..., par MeD... qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens et soutenant en outre qu'en raison d'un arrêté complémentaire du 18 novembre 2013 il bénéficie d'autorisations d'occupation du domaine public pour une superficie de 20 hectares et pour 25 lignes de collectage ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 27 mars 2015, présenté par la Polynésie française, qui persiste dans le rejet de la requête et fait valoir en outre que l'arrêté produit dans le dernier mémoire du requérant ne le concerne pas mais est relatif à la SCA Takume Pearls Producers ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 avril 2014, présenté par la Polynésie française ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu l'arrêté n° 1296-CM du 29 août 2012 fixant la procédure de recevabilité et d'instruction des demandes d'occupation du domaine public maritime pour l'exercice des activités de perliculture et précisant les conditions particulières d'exploitation inhérentes à ces occupations ;
Vu la délibération n° 2002-51 APF du 27 mars 2002 règlementant les activités de producteur d'huîtres perlières et de producteur de perles de culture de Tahiti ;
Vu la délibération n° 2004-34 APF du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;
Vu le procès-verbal de constat dressé le 7 janvier 2013 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2015 :
- le rapport de M. Gouès, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public ;
1. Considérant que M. F...relève appel du jugement du 10 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française l'a condamné à payer à la Polynésie française une amende de 150 000 francs CFP, une somme de 953 407 francs CFP au titre de la remise en état des lieux et une somme de 20 000 francs CFP sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative, le tout consécutif à l'occupation du domaine public pour la culture de perles d'une surface supérieure à celle autorisée par l'arrêté du 23 septembre 2010 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la régularité de la procédure suivie :
2. Considérant, en premier lieu, que si M. F...soutient que
M. C...E..., agent qui a dressé le procès-verbal en litige, n'avait pas reçu compétence pour le signer, il ressort cependant des termes des arrêtés n° 1594/PR du 5 juin 2009 et n° 1914/CM du 25 novembre 2011, ainsi que de l'article 809-II du code de procédure pénale, que M. E...était bien compétent pour ce faire ; que la circonstance qu'un nouvel arrêté du 15 juillet 2013, en tout état de cause postérieur aux faits en litige, ait modifié les missions de M. E...est sans incidence dans la mesure où celles-ci n'ont été qu'étendues ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, que M. F...reproche à la Polynésie française de ne pas l'avoir convié à la visite des installations perlicoles en compagnie de l'agent verbalisateur, arguant qu'ainsi le procès-verbal n'a pas été établi de manière contradictoire ; que, toutefois, aucune disposition législative ou règlementaire n'exige que le procès verbal constatant une contravention de grande voirie soit établi de façon contradictoire ou que le contrevenant soit présent lors de la visite de ses installations ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ; qu'en tout état de cause il résulte de l'instruction que lors de la visite sur les lieux, l'agent verbalisateur était accompagné, en l'absence du requérant, de M. G...A..., en charge de l'exploitation de la ferme perlicole ;
Au fond :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la délibération
n° 2004-34 de l'assemblée de la Polynésie française du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française : " Le domaine public naturel comprend : le domaine public maritime qui se compose notamment des rivages de la mer, des lais et relais de mer, des étangs salés communiquant librement ou par infiltration ou par immersion avec la mer, du sol et du sous-sol des eaux intérieures dont les havres et rades non aménagés et les lagons jusqu'à la laisse de basse mer sur le récif côté large, du sol et du sous-sol des golfes, baies et détroits de peu d'étendue, et du sol et du sous-sol des eaux territoriales (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de la même délibération : " Nul ne peut sans autorisation préalable délivrée par l'autorité compétente, effectuer aucun remblaiement, travaux, extraction, installation et aménagement quelconque sur le domaine public, occuper une dépendance dudit domaine ou l'utiliser dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous..." ; que l'article 27 de ladite délibération dispose que : " Les infractions à la réglementation en matière de domaine public (...) constituent des contraventions de grande voirie et donnent lieu à poursuite devant le tribunal administratif, hormis le cas des infractions à la police de la conservation du domaine public routier qui relèvent des juridictions judiciaires. Les contrevenants pourront être punis des peines d'amende ou des peines privatives ou restrictives de droit, telles que définies dans le code pénal pour les contraventions de la cinquième classe. En cas de récidive, le montant maximum de l'amende pourra être doublé. En outre, l'auteur d'une contravention de grande voirie pourra être tenu de réparer le dommage causé, au besoin sous astreinte " ;
5. Considérant que si M. F...soutient qu'en l'espèce sa responsabilité ne peut être recherchée sur le terrain d'une contravention de grande voirie, il résulte de la combinaison des dispositions précitées que l'infraction en litige relève bien d'une telle contravention puisque consécutive à l'occupation illégale du domaine public maritime ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que M. F...soutient que le procès-verbal en litige est insuffisamment précis quant aux surfaces que l'administration lui reproche d'occuper illégalement ; que, toutefois, il ressort des termes de ce procès-verbal que la zone d'élevage occupe une superficie totale de 16,57 hectares contre une surface autorisée, par arrêté
n° 6737/MRM du 23 septembre 2010, de 10 hectares, soit plus de 65 % d'occupation illégale en plus ; que, de son côté, les allégations de M.F..., selon lesquelles, d'une part, l'agent verbalisateur ne s'est pas appuyé sur la présence de bouées pour constater l'infraction et, d'autre part, les lignes en litige ne sont que des lignes de collectage qui peuvent dériver sans qu'aucune infraction ne puisse être signifiée, ne sont étayées par aucun élément de preuve ; qu'enfin, il ne peut, pour les mêmes raisons, sérieusement soutenir que l'agent verbalisateur aurait dû préciser l'identité du propriétaire des lignes en litige ;
7. Considérant en troisième et dernier lieu, que M. F...soutient que dans la mesure où il a procédé au retrait des lignes en litige et ou un nouvel arrêté autorise son exploitation en toute légalité la Polynésie française ne peut obtenir sa condamnation de ce chef ; que toutefois, d'une part, le retrait des lignes, postérieur au litige, est sans incidence et, d'autre part, le nouvel arrêté dont fait état le requérant concerne la SCA Takume Pearls Producers et non M. F...;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Polynésie française a fait droit à la demande de la Polynésie française ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. F...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche il y a lieu de mettre à la charge de M. F...le versement à la Polynésie française d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.
Article 2 : M. F...versera à la Polynésie française une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...F...et à la Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2015 à laquelle siégeaient :
- Mme Vettraino, président de chambre,
- M. Romnicianu, premier conseiller,
- M. Gouès, premier conseiller,
Lu en audience publique le 16 avril 2015.
Le rapporteur,
S. GOUESLe président,
M. VETTRAINO
Le greffier,
F. TROUYET
La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13PA04168