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16/04/2015 | FRANCE | N°13PA02866

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 16 avril 2015, 13PA02866


Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2013, présentée pour Mme B...C...demeurant..., par MeA... ; Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007991/4 du 20 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2009 par lequel le préfet du Val-de-Marne a déclaré immédiatement cessibles pour cause d'utilité publique au profit de la société d'aménagement et d'équipement de la région parisienne, les immeubles biens et droits immobiliers désignés dans l'enquête parcellaire et

nécessaires à la réalisation de la ZAC des bords de Marne à Alfortville ;

2°...

Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2013, présentée pour Mme B...C...demeurant..., par MeA... ; Mme C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007991/4 du 20 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2009 par lequel le préfet du Val-de-Marne a déclaré immédiatement cessibles pour cause d'utilité publique au profit de la société d'aménagement et d'équipement de la région parisienne, les immeubles biens et droits immobiliers désignés dans l'enquête parcellaire et nécessaires à la réalisation de la ZAC des bords de Marne à Alfortville ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du 30 octobre 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- sa requête d'appel a été déposée dans les délais ;

- la notice explicative jointe au dossier n'informe pas le public sur l'objet réel de l'opération, alors même qu'un équipement pour la petite enfance était prévu, notamment sur la construction d'une école, qui génèrera des nuisances sonores et liées à la circulation ;

- le coût de construction de cette école a également été omis dans le projet ;

- la notice explicative omet aussi de dire que 18 000 m2 de bureaux seront construits dans la ZAC au détriment des commerces qui étaient initialement prévus ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire ampliatif, enregistré le 23 décembre 2013, présenté pour MmeC..., par Me A...qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 7 avril 2014, présenté pour MmeC..., par

Me A...qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- le projet initial était exclusivement tourné vers l'habitat et les commerces y afférents et non vers la construction de bureaux ;

- la construction de bureaux est une opération nouvelle, distincte du projet initial, qui n'a aucun lien avec l'habitat, ce qui aurait dû entrainer une nouvelle enquête publique ;

- le projet de construire principalement des logements en accession à la propriété a été abandonné pour construire à la place des logements sociaux, ce qui vicie la procédure d'enquête publique ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2014, présenté pour la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne (SAERP) par Maîtres Chausse et Guillot qui concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme C...le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- compte tenu du délai de 10 ans qui s'est écoulé entre l'enquête publique et la décision de la commune de construire l'école par délibération du 11 avril 2011, ce projet ne pouvait et ne devait être présenté dans le cadre de l'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique ;

- la notice explicative précise bel et bien qu'un projet de groupe scolaire était l'objet de réflexions ;

- l'école, projet distinct de la ZAC, ne pouvait figurer dans la notice et encore moins dans l'état prévisionnel des dépenses ;

- les nuisances engendrés par une école ne sont pas plus importantes que celles émanant d'une crèche ;

- la construction d'équipements pour la petite enfance a bien eu lieu conformément à ce qui était prévu ;

- il n'y a pas eu d' évolution substantielle du projet, mais seulement, en raison de l'embellie du marché de l'immobilier de bureau, des ajustements dans le programme de construction, notamment en ce qui concerne les bureaux, le tout étant conforme à la notice explicative ;

- l'enquête publique qui s'est déroulée du 9 mai au 15 juin 2001 a pris en compte ce changement dans le ratio logements/bureaux ;

- si par extraordinaire la Cour décidait d'annuler l'arrêté de cessibilité, cette annulation ne pourrait intervenir qu'après un délai de 9 mois à compter de la notification de la décision compte tenu des enjeux financiers et de l'intérêt général puisque l'opération est très avancée ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 mai 2014, présenté pour MmeC..., par Me A...qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- l'école n'est pas un équipement public distinct de la ZAC ;

- il est inexact d'affirmer que dès le départ 8 000 m2 de bureaux devaient être construits ;

- la délibération du conseil municipal d'Alfortville du 8 février 2001 est entachée d'inexactitudes ;

- le délai de 9 mois réclamé par la SAERP ne peut être accordé si l'illégalité commise n'est pas substantielle ;

- la réalisation de l'école n'est pas d'intérêt public ;

- l'article 1er du Premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu dans la mesure où Mme C...a eu à supporter une charge disproportionnée ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 juin 2014, présenté pour la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne (SAERP), par Maîtres Chausse et Guillot, tendant au rejet de la requête par les mêmes moyens que précédemment et faisant valoir en outre que :

- l'évolution du programme de construction a fait l'objet d'une enquête publique préalable à la modification du règlement du PAZ puis d'une délibération du Conseil municipal du 11 octobre 2001 ;

- l'augmentation de la surface consacrée aux bureaux n'est pas une opération distincte de la ZAC ;

- le commerce de proximité n'était pas nécessairement promu par le projet ;

- la réalisation de logements sociaux n'est pas contraire aux objectifs de la ZAC ;

- le dossier soumis à enquête préalablement à la modification du PAZ est complet et conforme aux exigences de l'article R. 311-10 du code de l'urbanisme ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 septembre 2014, présenté pour MmeC..., par

Me A...qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- aucune crèche n'est implantée sur la ZAC puisque la seule crèche construite se situe en dehors du périmètre de l'opération ;

- elle n'a jamais soutenu que le dossier du PAZ était incomplet ;

- elle n'a jamais affirmé que la notification de l'ordonnance d'expropriation et de l'arrêté de cessibilité étaient tardifs ;

Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 23 mars 2015, présenté pour la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne (SAERP), par Maîtres Chausse et Guillot ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 mars 2015, présenté pour MmeC..., par Me A...qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que les pièces produites par l'intimée, qui ne concernent que l'enquête préalable à la modification du Plan d'aménagement de la zone (PAZ), ne remettent pas en cause ses écritures ;

Vu la décision n° 2013/010869 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris, en date du 25 avril 2013, accordant l'aide juridictionnelle totale à

MmeC... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2015 :

- le rapport de M. Gouès, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public,

- les observations de Mme C...et celles de MeD..., pour la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne,

1. Considérant que MmeC..., propriétaire d'un terrain bâti d'une superficie de

319 m², cadastré section A n° 44, situé au 23 du quai d'Alfortville à Alfortville (94), relève appel du jugement du 20 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2009 par lequel le préfet du Val-de-Marne a déclaré immédiatement cessibles pour cause d'utilité publique au profit de la société d'aménagement et d'équipement de la région parisienne (SAERP), les immeubles biens et droits immobiliers désignés dans l'enquête parcellaire et nécessaires à la réalisation de la ZAC des bords de Marne à Alfortville, au nombre desquels figure sa propriété ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique dans sa rédaction applicable : " L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : (...) III - Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée pour des opérations ou acquisitions prévues par les plans d'occupation des sols ou les documents d'urbanisme en tenant lieu et à l'occasion de l'approbation de ces plans; / 1° Une notice explicative ; / 2° L'ordre de grandeur des dépenses. / Dans les trois cas visés aux I, II, II, ci-dessus, la notice explicative indique l'objet de l'opération et les raisons pour lesquelles notamment du point de vue de l'insertion dans l'environnement, parmi les partis envisagés, le projet soumis à l'enquête a été retenu. " ;

3. Considérant que Mme C...soutient qu'en raison de la modification apportée au projet initial, en ce qui concerne la construction de bureaux dont la surface est passée de

8 000 m2 à 18 000 m2, une nouvelle enquête publique aurait dû être diligentée ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'une enquête préalable à la modification du PAZ a bien eu lieu du 9 mai au 15 juin 2001, portant précisément sur l'extension de la surface de bureaux à construire ; que le moyen tiré de ce qu'en réalité la SAERP avait signé dès le 15 février 2001, soit avant même le début de la nouvelle enquête publique, une promesse de vente afin de permettre la réalisation d'une implantation tertiaire de 18 000 m2 de bureaux sur le site de la ZAC, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de cessibilité litigieux ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme C...soutient également qu'une nouvelle enquête publique aurait dû être diligentée dans la mesure où un groupe scolaire, non prévu dans la notice explicative, a été édifié par la suite ; que , toutefois, il ressort de cette notice explicative, en page 17, que " la construction d'un nouvel équipement scolaire fait actuellement l'objet de réflexions. Sa localisation reste encore à déterminer " ; qu'ainsi, ce moyen manque en fait ; qu'il en va de même de celui relatif au projet de construction d'une crèche, cette dernière étant également prévue à la page 17 de la notice explicative " En ce qui concerne la petite enfance, une étude est actuellement en cours pour l'implantation d'un nouvel équipement d'environ 800 m2 dans l'emprise de la ZAC ou ses abords " ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si Mme C...soutient que la destination des logements prévus dans le projet a changé, passant de logements en accession à la propriété à des logements sociaux, d'une part, il ressort de la notice explicative, en page 7, que " Il s'agira pour majorité de programmes de logements en accession à la propriété. L'opération comprendra également des programmes locatifs sociaux. " et, d'autre part, Mme C...n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que tous les logements construits sur la ZAC seraient des logements sociaux ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que Mme C...soutient que le coût de construction de l'école précitée a été omis dans le projet ; que, toutefois, s'agissant de l'appréciation des dépenses, il ressort de l'article R. 11-3 précité du code de l'expropriation dont il n'est pas contesté que le III s'applique en l'espèce, que seul l'ordre de grandeur des dépenses doit être indiqué au public, ce qui est le cas en l'espèce dès lors que figurent au dossier soumis à enquête publique le montant des acquisitions nécessaires à la réalisation du projet, le montant des frais d'études et de travaux, enfin le montant des taxes et frais divers ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'ordre de grandeur des dépenses ait fait l'objet d'une sous-évaluation manifeste ; qu'ainsi, l'estimation sommaire des dépenses, qui n'avait pas à préciser le coût de chaque ouvrage et notamment celui de l'école en litige, n'a pas été entachée d'erreur de nature à vicier la procédure ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'à supposer le moyen opérant, les allégations de Mme C...selon lesquelles les commerces de proximité prévus dans le projet initial n'auraient pas été réalisés ne sont établies par aucune pièce du dossier ; ;

8. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 1er du Premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. " ;

9. Considérant que Mme C...soutient que l'arrêté de cessibilité qu'elle conteste a été pris en méconnaissance de l'article 1er du Premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle a eu à supporter " une charge disproportionnée ", que, toutefois, l'introduction d'une requête devant le tribunal administratif et la présente procédure d'appel établissent suffisamment que Mme C...a été mise en mesure de contester l'arrêté de cessibilité la concernant dans le cadre d'une procédure contradictoire lui permettant de contester la position de l'administration ; qu'ainsi elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée de sa propriété en méconnaissance de l'article 1er précité du 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche il y a lieu de mettre à la charge de Mme C...une somme de 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Mme C...versera à la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et à la Société d'Aménagement et d'Equipement de la Région Parisienne.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2015 à laquelle siégeaient :

- Mme Vettraino, président de chambre,

- M. Romnicianu, premier conseiller,

- M. Gouès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 16 avril 2015.

Le rapporteur,

S. GOUESLe président,

M. VETTRAINO

Le greffier,

F. TROUYET

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11PA00434

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N° 13PA02866


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13PA02866
Date de la décision : 16/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Serge GOUES
Rapporteur public ?: Mme BONNEAU-MATHELOT
Avocat(s) : GOMEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-04-16;13pa02866 ?
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