Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 janvier et 29 octobre 2014, présentés pour M. A... B..., demeurant..., par Me Benmansour, avocat ;
M. B... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1302363/8 du 24 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2013 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour ;
Il soutient que :
- le préfet du Val-de-Marne, qui ne lui a pas permis de présenter ses observations, a méconnu les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé, en méconnaissance de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le préfet du Val-de-Marne n'a pas procédé à un examen global de sa situation ;
- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il justifie de sa présence sur le territoire français depuis 2003, soit depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté, qu'il est parfaitement inséré socialement et professionnellement et justifie d'une vie privée et familiale en France ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de destination sont illégales pour les mêmes arguments que ceux exposés à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour ;
- le retour dans son pays d'origine aurait des conséquences manifestement excessives au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu la décision du 20 mars 2014 du bureau d'aide juridictionnelle, admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail modifié par les avenants du 8 septembre 2000 et du 28 avril 2008 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2015 :
- le rapport de Mme Notarianni, premier conseiller ;
1. Considérant que M.B..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 24 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 13 mars 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté vise notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et précise que M. B... qui déclare être entré en France en 1999 ne produit pas suffisamment de preuve de sa présence en France durant les dix dernières années notamment pour les années 2003, 2004, 2008, 2010 et 2012, pour se prévaloir des stipulations de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien susvisé, qu'il ne remplit pas les conditions des articles 3 dudit accord et 2 paragraphe 2.3.3 du protocole du 28 avril 2008 publié par le décret du 24 juillet 2009 pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité de salarié dès lors qu'il ne justifie ni d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ni d'aucune activité professionnelle, que sa demande ne relève pas d'un motif exceptionnel et qu'il ne peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour à titre humanitaire et qu'il est célibataire, sans charge de famille sur le territoire français et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté comporte l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent la décision portant refus de titre de séjour, ainsi que celle portant obligation de quitter le territoire français, qui n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte, et doit être regardé comme suffisamment motivé ; que les éléments factuels mentionnés permettent de vérifier que le préfet du Val-de-Marne a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B...;
3. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 aux termes desquelles : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales ", dès lors que l'arrêté contesté, qui a été pris sur demande de l'intéressé, relève de l'exception prévue par ces dispositions ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant que si le requérant fait valoir qu'il vit avec son frère et sa soeur en situation régulière, qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il justifie de certificats de travail et peut subvenir à ses besoins, il ressort des pièces du dossier que M. B...est célibataire, sans charge de famille sur le territoire français, qu'il n'allègue ni n'établit que sa présence sur le territoire français serait nécessaire au soutien des membres de sa famille qui y résident, et qu'il n'établit pas être démuni d'attaches dans son pays d'origine où réside sa mère ; que dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français auraient porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ou qu'elles seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur sa situation personnelle ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du d) de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, dans sa rédaction issue de l'article 2 de l'accord-cadre du 28 avril 2008 : " Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : / - les ressortissants tunisiens qui, à la date d'entrée en vigueur de l'accord signé à Tunis le 28 avril 2008, justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans " ; qu'il résulte de ces stipulations que les ressortissants tunisiens ne justifiant pas d'une présence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans au 1er juillet 2009, date d'entrée en vigueur de l'accord du 28 avril 2008, ne sont pas admissibles au bénéfice de l'article 7 ter d) de cet accord ;
7. Considérant que M. B...n'établit pas sa présence en France au cours notamment de l'année 2000, pour laquelle il ne présente aucun justificatif de présence, et des années 2003 pour laquelle il ne produit que deux ordonnances médicales datées du 4 décembre et 2004 pour laquelle il ne produit que trois factures d'achat et l'avis d'imposition sur les revenus de 2004 ; qu'ainsi, M. B... ne justifie pas du caractère habituel de sa résidence en France depuis plus de dix ans au 1er juillet 2009 ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant, en dernier lieu, que M. B...fait valoir que la décision fixant le pays de destination est illégale dès lors que son retour en Tunisie aurait des conséquences manifestement excessives sur sa situation personnelle contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que toutefois, ce moyen, qui n'est opérant qu'en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination et n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien fondé, ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne
Délibéré après l'audience du 5 mars 2015 à laquelle siégeaient :
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
- Mme Versol, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 mars 2015.
Le rapporteur,
L. NOTARIANNI Le président,
D. DALLE
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA00365