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03/03/2015 | FRANCE | N°14PA01652

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 03 mars 2015, 14PA01652


Vu le recours, enregistré le 14 avril 2014 sous forme dématérialisée, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1212727 du 19 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 6 juillet 2012 par laquelle les autorités de police aux frontières en poste à Douvres ont refusé à M. B...l'accès au territoire français ;

2°) à titre principal, de prononcer un non-lieu à statuer sur les demandes de M. B...;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter les demandes de M.B...

;

Le ministre soutient que :

- le jugement attaqué est mal fondé pour omission à statu...

Vu le recours, enregistré le 14 avril 2014 sous forme dématérialisée, présenté par le ministre de l'intérieur ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1212727 du 19 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 6 juillet 2012 par laquelle les autorités de police aux frontières en poste à Douvres ont refusé à M. B...l'accès au territoire français ;

2°) à titre principal, de prononcer un non-lieu à statuer sur les demandes de M. B...;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter les demandes de M.B... ;

Le ministre soutient que :

- le jugement attaqué est mal fondé pour omission à statuer sur ses conclusions, formulées à titre principal, tendant au prononcé d'un non-lieu à statuer ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'existence d'une menace sérieuse pour

l'ordre public justifiant le maintien de l'inscription de l'intimé au FPR n'était pas établie par les pièces du dossier au motif que le signalement de l'intéressé au SIS avait été supprimé dès le

9 décembre 2009 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2015, présenté pour M.B..., par

MeC..., qui conclut au rejet du recours ;

Il soutient que la décision contestée est illégale par les mêmes motifs que ceux qu'il a

invoqués en première instance, étant en outre rappelé qu'après l'avoir radié du SIS, le ministre a également procédé à sa radiation du fichier des personnes recherchées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2015 :

- le rapport de M. Auvray, président-assesseur,

- et les conclusions de Mme Vrignon, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant que le ministre de l'intérieur fait grief au jugement attaqué d'avoir omis

de statuer sur ses conclusions, formulées à titre principal, tendant au prononcé d'un non-lieu sur la demande de M. B... ; que, toutefois, en statuant au fond, les premiers juges ont implicitement mais nécessairement estimé que la demande de M. B... n'était pas dépourvue d'objet ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement serait, pour ce motif, entaché d'irrégularité, doit être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif

n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif ; que si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge à statuer sur le mérite du recours dont il était saisi ; qu'il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution ; que, dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le recours formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive ;

3. Considérant que la décision attaquée du 6 juillet 2012, par laquelle les autorités de

police aux frontières en poste à Douvres ont refusé l'accès au territoire français à M.B..., de nationalité russe né le 26 avril 1959 à Posselok Kirova (Russie), est motivée par " le signalement de l'intéressé aux fins de non-admission dans le fichier national " ; que dans ses écritures tant devant le tribunal que devant la Cour, le ministre indique que la présence en France de M. B... constituait une menace à l'ordre public et que l'intéressé était, pour cette raison, alors inscrit au fichier des personnes recherchées (FPR) ;

4. Considérant qu'il n'est pas contesté que la décision attaquée du 6 juillet 2012 n'a été ni retirée, ni même abrogée par les autorités compétentes ; que cette décision, refusant à M. B... l'accès au territoire national, a, en outre, produit des effets ; que, par suite, la circonstance, invoquée par le ministre, tirée de ce que l'inscription de l'intéressé au FPR, seul fondement légal de la décision litigieuse, a été retirée le 11 février 2013, ne rendait pas sans objet la demande de M. B...tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cette décision ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 213-1 du code de l'entrée et du séjour des

étrangers et du droit d'asile : " L'accès au territoire français peut être refusé à tout étranger dont la présence constituerait une menace pour l'ordre public ou qui a fait l'objet soit d'une peine d'interdiction judiciaire du territoire, soit d'un arrêté d'expulsion, soit d'un arrêté de reconduite à la frontière pris moins de trois ans auparavant en application de l'article L. 533-1, soit d'une interdiction de retour sur le territoire français " ; qu'aux termes du III de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées : " Peuvent être inscrits dans le fichier à la demande des autorités administratives compétentes : 1° Les étrangers pour lesquels il existe, eu égard aux informations recueillies, des éléments sérieux de nature à établir que leur présence en France constituerait une menace pour l'ordre public susceptible de justifier que l'accès au territoire français leur soit refusé dans les conditions prévues à l'article L. 213-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (...) " ;

6. Considérant que, pour justifier que la présence en France de M. B...représentait alors une menace pour l'ordre public, le ministre de l'intérieur indique que l'intéressé était un activiste indépendantiste tchétchène, qu'il était visé par un mandat d'arrêt international pour des faits de terrorisme commis durant la guerre en Tchétchénie et qu'après sa rupture avec " l'émirat " du Caucase en 2007, il était considéré comme un adversaire par les indépendantistes islamistes, ce qui avait donné lieu à signalement de l'intéressé aux fin de non admission dans le système d'information Schengen (SIS) dès le 31 décembre 2003 ;

7. Considérant, toutefois, d'une part, que l'administration ne produit aucun document concernant M. B...à l'exception d'une note du 14 février 2013 du directeur général de la police nationale, laquelle ne concerne que les raisons pour lesquelles le ministre de l'intérieur a, le 14 août 2009, demandé le maintien, au sein du SIS, de la fiche nationale prévue à l'article 92 de la convention d'application de l'accord de Schengen, d'autre part, qu'il est constant que les autorités ont mis fin au signalement de M. B...dans le SIS dès le 9 décembre 2009 ; que si l'administration est fondée à soutenir que le retrait du signalement de l'intéressé du fichier du SIS n'implique pas nécessairement que son inscription dans le FPR soit sans objet eu égard au fait que ces deux fichiers ne poursuivent en effet pas les mêmes finalités, l'administration, qui n'indique en outre pas à quelle date M. B...a fait l'objet d'une inscription au FPR, se borne, tant devant le Tribunal que devant la Cour, à indiquer sans plus de précisions que l'intéressé représentait toujours un risque pour l'ordre public justifiant le maintien de son inscription au FPR " par le fait que le ministre dispose d'éléments propres aux risques intéressant le territoire national mais qui n'ont pas nécessairement d'incidence à l'échelle des autres Etats de l'espace Schengen " ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 6 juillet 2012 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....

Délibéré après l'audience du 13 février 2015 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Auvray, président-assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 mars 2015.

Le rapporteur,

B. AUVRAYLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU Le greffier,

S. LAVABRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01652


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01652
Date de la décision : 03/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: Mme VRIGNON-VILLALBA
Avocat(s) : PIQUOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-03;14pa01652 ?
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