Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de police a refusé de faire droit à sa demande du 12 novembre 2013 d'admission au séjour au titre de l'asile et d'enjoindre au dit préfet de l'admettre au séjour en qualité de demandeur d'asile dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement afin de lui permettre de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Par un jugement n° 1316659 du 3 juin 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 juin 2014, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1316659 du 3 juin 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet a refusé de l'admettre au séjour en qualité de demandeur d'asile et a prolongé le délai de transfert vers la Suède ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de l'admettre au séjour en qualité de demandeur d'asile dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir afin de lui permettre de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que la décision du préfet doit être annulée dès lors que la France était devenue responsable de sa demande d'asile en vertu de l'article 20 e du règlement (CE) n°343/2003 ; en effet, le délai de transfert de six mois s'est écoulé et il ne peut être regardé comme ayant pris la fuite dès lors qu'il n'a jamais reçu les convocations de la préfecture, et qu'au demeurant, ces convocations ne suffisent pas à démontrer que les autorités françaises auraient pris les diligences nécessaires à son transfert.
La requête a été communiquée le 18 août 2014 au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne ;
- le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Par décision du président de la formation de jugement, le rapporteur public a été dispensé, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
M. Marino, président assesseur, a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né le 1er février 1967, de nationalité congolaise, entré en France le 23 novembre 2012 selon ses déclarations, a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 29 mars 2013. Le préfet de police ayant constaté que la demande d'asile de M. C... relevait de la compétence de la Suède en application de l'article 16.1 c du règlement (CE) n°343/2003, a, par un arrêté du 24 mai 2013, rejeté sa demande d'admission au séjour en France au titre de l'asile, et décidé de la remise de M. C...aux autorités suédoises en lui accordant un délai de trente jours pour quitter volontairement le territoire français. M. C... s'est vu, le même jour, délivrer un laissez-passer d'un mois pour son transfert de France en Suède. M. C...s'étant présenté à nouveau, le 7 novembre 2013, à la préfecture de police pour déposer une demande d'asile, sa demande a été une nouvelle fois rejetée. Par la présente requête M. C...relève appel du jugement du 3 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision de rejet.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
2. Le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié. Si ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En vertu du 1° de cet article, l'admission en France d'un étranger qui demande à être admis au bénéfice de l'asile peut être refusée si l'examen de sa demande relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003. L'article 19 de ce règlement prévoit que le transfert du demandeur vers l'État membre responsable doit se faire dans un délai de six mois à compter de l'acceptation de la demande de prise en charge. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, la responsabilité de l'examen de la demande d'asile incombe en principe à l'Etat membre auprès duquel cette demande a été introduite. Toutefois, le délai de transfert peut être porté à dix-huit mois si l'intéressé " prend la fuite ". La notion de fuite au sens de ce texte doit s'entendre comme visant notamment le cas où un ressortissant étranger non admis au séjour se serait soustrait de façon intentionnelle et systématique au contrôle de l'autorité administrative en vue de faire obstacle à une mesure d'éloignement le concernant.
3. Il ressort des pièces du dossier, que, par un arrêté du 24 mai 2013, le préfet de police a refusé l'admission provisoire au séjour de M. C...au titre de l'asile sur le fondement du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a décidé sa réadmission vers la Suède, laquelle avait accepté de prendre en charge sa demande le 26 avril 2013, et lui a accordé un délai d'un mois pour quitter volontairement le territoire français. M. C... s'est maintenu sur le territoire français au-delà de ce délai. Le préfet de police fait valoir qu'il a envoyé en recommandé à M. C...deux convocations pour des rendez-vous en préfecture le 22 juillet 2013 et le 3 septembre 2013 et que M. C...ne s'est pas rendu à ces rendez-vous. Cependant, les convocations produites par le préfet, ne sont pas accompagnées de l'accusé de réception sur lequel figurerait l'adresse postale de l'intéressé et leur date de la réception, et n'ont ainsi pas de valeur probante. La seule production du laissez-passer délivré à M. C...ne suffit pas à établir que ce dernier se serait soustrait de façon intentionnelle et systématique au contrôle de l'autorité administrative dans le but de faire obstacle à la procédure de transfert et qu'il aurait ainsi pris la fuite au sens des dispositions de l'article 20 du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003. En conséquence, le préfet de police ne pouvait porter le délai de réadmission à 18 mois, la responsabilité de l'examen de la demande d'asile de M. C... incombait donc aux autorités françaises et le préfet de police ne pouvait refuser à ce dernier le bénéfice de l'autorisation provisoire de séjour.
4. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police délivre à M. C...une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement afin de lui permettre de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1316659 du 3 juin 2014 du Tribunal administratif de Paris et la décision implicite par laquelle le préfet de police a refusé d'admettre M. C...au séjour en qualité de demandeur d'asile et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M.C..., dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de présenter sa demande d'asile.
Article 3 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 2 février 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Marino, président assesseur,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 février 2015.
Le rapporteur,
Y. MARINOLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
L. BARRIERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA02602