Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée Youni a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 24 septembre 2011 par le préfet de police pour le recouvrement d'une somme de 2 309 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement d'un étranger dans son pays d'origine, ensemble le commandement de payer la somme de 2 378 euros émis à son encontre le 28 novembre 2011 et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Par un jugement n° 1219400 du 29 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 mars 2014, la société Youni, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 24 septembre 2011 par le préfet de police pour le recouvrement d'une somme de 2 309 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement d'un étranger dans son pays d'origine ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Elle soutient que :
- la personne contrôlée le 7 juillet 2009 dans le restaurant qu'elle exploite est bien celle qui s'est présentée le lendemain au bureau des contrôleurs du travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;
- cette personne était titulaire d'un titre de séjour l'autorisant à travailler et avait fait l'objet d'une déclaration préalablement à son embauche ;
- par un jugement du 28 août 2012, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a jugé que l'usurpation d'identité n'était pas établie et a débouté l'URSSAF de Paris de sa demande tendant au paiement de rappel de cotisations.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2014, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Youni ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;
- le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bernard,
- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet de police a émis le 24 septembre 2011 à l'encontre de la société Youni un titre de perception exécutoire d'un montant de 2 309 euros pour le recouvrement de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement d'un étranger dans son pays d'origine. La société Youni doit être regardée comme relevant appel du jugement du 29 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation dudit titre de perception, ensemble le commandement de payer la somme de 2 378 euros émis à son encontre le 28 novembre 2011, et, d'autre part, à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 626-1 du même code, dans sa version applicable, ladite contribution forfaitaire " est due par l'employeur qui, en violation des dispositions du premier alinéa de l'article [L. 8251-1] du code du travail, aura occupé un travailleur étranger soumis à l'obligation de détention d'un titre de séjour et qui en est dépourvu. Elle est due pour chaque employé étranger en situation de séjour irrégulier ". Aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou par personne interposée, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France ". Enfin, aux termes de l'article R. 626-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " Une copie des procès-verbaux établis par les agents de contrôle mentionnés à l'article [L. 8271-17] du code du travail et constatant les infractions aux dispositions du premier alinéa de l'article [L. 8251-1] du même code est transmise au préfet du département dans lequel l'infraction a été constatée, et à Paris, au préfet de police. / Le préfet vérifie la situation des salariés mentionnés dans ces procès-verbaux au regard du droit au séjour. Lorsque ces vérifications font apparaître l'irrégularité du séjour d'un salarié mentionné dans un procès-verbal, le préfet indique à l'employeur, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la mesure envisagée en application des dispositions de l'article L. 626-1 et l'invite à présenter ses observations dans un délai de quinze jours. / A l'expiration du délai ainsi fixé, le préfet décide, au vu des observations éventuelles de l'employeur, de l'application de la contribution forfaitaire prévue à l'article L. 626-1 et notifie sa décision à l'employeur ainsi que, le cas échéant, le titre de recouvrement. / Cette contribution est recouvrée par le comptable du Trésor conformément aux dispositions régissant le recouvrement des créances non fiscales de l'Etat ".
3. Le 7 juillet 2009, trois contrôleurs des services de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Paris ont constaté la présence d'une personne dépourvue de titre de séjour, employée en qualité de serveuse dans le restaurant à l'enseigne " Odori " que la société Youni exploite dans le quinzième arrondissement de Paris. Il ressort du procès-verbal établi par les contrôleurs le 28 août 2009 que cette employée, vêtue de noir ou de gris foncé et s'exprimant en français, a déclaré à l'un d'eux se dénommer " Lee Ro-Un ". Toutefois, les contrôleurs n'ont pas reconnu la personne, plus grande et plus mince, qui s'est présentée le lendemain dans leurs bureaux, munie de sa carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " au nom de Mlle " B... " résidant à Tours. Par ailleurs, celle-ci, qui ne parlait pas le français, leur a indiqué, par le truchement de la gérante de la société, que, la veille, elle était vêtue de rouge. Les contrôleurs du travail ont conclut de l'ensemble de ces éléments que la personne qui travaillait en qualité de serveuse dans le restaurant de la société Youni n'était pas celle qui s'était présentée dans leurs bureaux et qu'elle était par conséquent dépourvue de titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. Ce procès-verbal a été transmis au préfet de police qui, après enquête contradictoire, a émis le titre de perception contesté.
4. La société requérante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'exactitude des mentions portées sur le procès-verbal établi par les contrôleurs du travail, lesquelles font foi jusqu'à preuve du contraire en vertu des dispositions de l'article L. 8113-7 du code du travail. En outre, contrairement à ce que soutient la société requérante, pour conclure à l'usurpation d'identité, les contrôleurs du travail ne se sont pas fondés sur la seule inversion du nom et du prénom de la personne titulaire d'un titre de séjour, mais sur un ensemble de faits, rappelés au point précédent, qui sont de nature à établir que la personne vue en situation de travail lors du contrôle ne disposait pas d'un titre de séjour. Enfin, la circonstance que, par jugement du 28 août 2012, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a débouté l'URSSAF de Paris de sa demande tendant au paiement, par la société Youni, d'un rappel de cotisations à raison de l'emploi non déclaré de ladite salariée est sans emport sur le présent litige, qui présente un caractère distinct. Au surplus, ledit tribunal a écarté de ses débats le procès-verbal établi par les contrôleurs du travail le 28 août 2009 en raison d'un vice affectant la procédure juridictionnelle et n'a donc pas pris en compte ses mentions. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le préfet de police a mis à la charge de la société Youni la contribution forfaitaire prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En conséquence de ce qui précède, les conclusions de la société Youni tendant au versement d'une somme à titre de dommages et intérêts, pour lesquelles au demeurant le contentieux n'a pas été lié et qui ne sont assorties d'aucun moyen, ne peuvent qu'être rejetées.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Youni n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Youni est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Youni et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 2 février 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Marino, président assesseur,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 février 2015.
Le rapporteur,
A. BERNARDLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
L. BARRIERELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA01397