Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2014, présentée pour Mme B...A...épouseC..., demeurant..., par
Me D...; Mme A...épouse C...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1400825 du 16 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du
20 janvier 2014 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour a été prise en violation du principe du contradictoire, n'ayant pas été mise à même de présenter des observations écrites ;
- l'administration n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation individuelle, notamment au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée méconnait les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la procédure de divorce pour faute intentée par son époux à son encontre nécessite sa présence en France ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que ce moyen était inopérant ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 312-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle a bien été victime de violences conjugales, même s'il est difficile pour elle de l'établir en l'absence d'éléments matériels ;
- elle méconnaît également les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard notamment à sa situation professionnelle, étant titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée daté du 3 janvier 2014, et de sa situation conjugale ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu les pièces du dossier attestant que la requête de Mme A...a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 2015 :
- le rapport de Mme Larsonnier, premier conseiller ;
1. Considérant que MmeA..., ressortissante marocaine, est entrée en France sous couvert d'un visa de long séjour valable du 18 mai 2011 au
18 mai 2012 qui lui avait été délivré en qualité de conjoint de ressortissant français ; qu'elle a, en cette même qualité, obtenu une carte de séjour temporaire qui expirait le 18 mai 2013 ; que, par un arrêté en date du 20 janvier 2014, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de procéder au renouvellement de son titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination ; que
Mme A...fait appel du jugement du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'à l'appui de sa requête, Mme A...soutient que la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire, que l'administration n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation individuelle, notamment au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la décision contestée méconnaît le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois la requérante n'apporte aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le Tribunal administratif de Melun sur son argumentation de première instance, reprise en appel sans élément nouveau ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article
L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" " ; que si les dispositions précitées de l'article L. 312-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne créent aucun droit au renouvellement du titre de séjour d'un étranger dont la communauté de vie avec son conjoint de nationalité française a été rompue en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de ce dernier, de telles violences, subies pendant la vie commune, ouvrent la faculté d'obtenir, sur le fondement de cet article, un titre de séjour, sans que cette possibilité soit limitée au premier renouvellement d'un tel titre ; qu'il incombe à l'autorité préfectorale, saisie d'une telle demande, d'apprécier, sous l'entier contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'intéressé justifie le renouvellement du titre à la date où elle se prononce, en tenant compte, notamment, du délai qui s'est écoulé depuis la cessation de la vie commune et des conséquences qui peuvent encore résulter, à cette date, des violences subies ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...s'est mariée avec un ressortissant français le 21 janvier 2011 ; qu'elle a été titulaire d'un visa de long séjour valable du 18 mai 2011 au 18 mai 2012 et d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " qui expirait le 18 mai 2013 ; que le conjoint de Mme A...a déposé une requête en divorce près le tribunal de grande instance de Melun le
1er octobre 2012, qui a rendu une ordonnance de non-conciliation entre les époux le
6 juin 2013 ; que le préfet de Seine-et-Marne a alors estimé que la communauté de vie entre les époux était rompue et a, par suite, refusé de renouveler à Mme A...sa carte de séjour temporaire en qualité de conjointe de ressortissant français ; que Mme A...soutient toutefois que la rupture de la communauté de vie résulte des violences qu'elle a subies de la part de son conjoint ; qu'à l'appui de ses dires, Mme A...produit une déclaration de main courante enregistrée le 4 janvier 2013 faisant état du harcèlement dont elle est victime de la part de son époux qui lui impose des privations de toutes sortes, la menace et l'insulte, une attestation rédigée le 30 janvier 2014, par la directrice de l'association Le Relais de Sénart attestant d'une consultation le 3 juin 2013 dans le cadre d'un accueil écoute et orientation pour les femmes victimes de violences conjugales et trois attestations de proches des 24 août, 2 et 4 septembre 2014 relatant les relations dégradées du couple ; que, par ces seuls documents, la réalité d'une rupture de la vie commune pour faits de violence de la part de son époux ne peut être regardée comme établie ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que le préfet de Seine-et-Marne a inexactement appliqué les dispositions précitées de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 susvisé : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des motifs exceptionnels exigés par la loi ; qu'il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;
6. Considérant, qu'en ce qui concerne la décision de refus d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale, il ressort des pièces du dossier que
Mme A...est entrée récemment en France, qu'elle est séparée de son époux, qu'elle est sans charge de famille et n'établit pas être dépourvue de liens familiaux dans son pays d'origine ; qu'elle ne justifie, par suite, d'aucune circonstance exceptionnelle ni de considération humanitaire justifiant la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, qu'en ce qui concerne la décision de refus d'admission exceptionnelle au séjour au titre d'une activité salariée, l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée et que, dès lors, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;
8. Considérant que si Mme A...se prévaut de la circonstance qu'elle justifie d'un contrat de travail à durée indéterminée du 3 janvier 2014 émanant de la société Carrefour en qualité d'équipière de vente et de ce qu'elle dispose de bulletins de paie d'octobre à décembre 2013, il ressort des pièces du dossier que le rejet de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salariée n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...épouse C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...épouse C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 2 février 2015, à laquelle siégeaient :
Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
M. Auvray, président assesseur,
Mme Larsonnier, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 13 février 2015.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAULe greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA04647