Vu la requête, enregistrée le 22 avril 2014, présentée pour M. D... A...B..., demeurant..., par Me C...E...A...F...; M. A... B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1303190 du 19 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2013 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté préfectoral ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour temporaire l'autorisant à travailler dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
Il soutient :
- que la décision litigieuse méconnait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il justifie de motifs exceptionnels de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour en qualité de travailleur salarié ;
- qu'il remplissait les conditions posées par la circulaire du 28 novembre 2012 pour être régularisé en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que la décision litigieuse méconnait l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2014, présenté par le préfet des
Hauts-de-Seine qui conclut au rejet de la requête, s'en rapportant " aux considérations du magistrat du Tribunal administratif de Paris " ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne, signé à Tunis le
28 avril 2008 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires ;
Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2015, le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller ;
1. Considérant que M. A...B..., né le 20 août 1981, de nationalité tunisienne, qui allègue être en France au cours de l'année 2005, a sollicité le 25 septembre 2012 son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur sa demande ; que, ultérieurement, par un arrêté du 12 avril 2013, le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande ; que, par un jugement du 19 février 2014, dont l'intéressé relève appel, le Tribunal administratif de Paris, auquel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transmis la demande de M. A...B..., a rejeté celle-ci ;
2. Considérant que, si le silence gardé par l'administration sur une demande fait naître une décision implicite de rejet qui peut être déférée au juge de l'excès de pouvoir, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement se substitue à la première décision ; que si
M. A... B...persiste en appel à demander l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet des Hauts-de-Seine sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour du 25 septembre 2012, c'est à juste titre que les premiers juges ont regardé les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite comme étant dirigées contre la décision explicite de refus de séjour du 12 avril 2013 ;
3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'en ce qui concerne les ressortissants tunisiens, l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; que l'article 3 du même accord stipule que " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention ''salarié'' " ; que le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 stipule, à son point 2.3.3, que " le titre de séjour portant la mention ''salarié'', prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (....) " ;
4. Considérant que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7.(...) " ;
5. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; qu'il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme inopérant, ainsi que, par voie de conséquence, le moyen tiré de l'invocabilité de la circulaire du 28 novembre 2012 relative à l'application de l'article L. 313-14 du code ; qu'à ce titre, le préfet pouvait, sans commettre d'erreur de droit, indiquer que cet article était inapplicable sans se référer aux préconisations de la circulaire ;
6. Considérant, toutefois, que si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;
7. Considérant, en l'espèce, que, à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de travailleur salarié, M. A...B...fait état, d'une part, de l'ancienneté de son séjour en France, d'autre part, de son insertion professionnelle dans le secteur de la coiffure et, enfin, de sa bonne intégration dans la société française ; que, toutefois, ni une durée de séjour habituel en France de 7 ans, à la supposer même établie, ni la détention d'un contrat de travail à durée indéterminée, ni la maitrise de la langue française ne constituent un motif humanitaire ou exceptionnel susceptible de justifier la délivrance d'un titre de séjour ; que, partant, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de faire droit à la demande de régularisation exceptionnelle présentée par M. A...B...;
8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si M. A...B...soutient qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine en raison du contexte politique, il n'établit nullement qu'il pourrait y encourir des risques de la nature de ceux évoqués par l'article 3 précité de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations conventionnelles susvisées, qui n'est opérant qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, ne peut qu'être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2015 à laquelle siégeaient :
Mme Vettraino, président de chambre,
M. Romnicianu, premier conseiller,
M. Gouès, premier conseiller,
Lu en audience publique le 12 février 2015.
Le rapporteur,
M. ROMNICIANULe président,
M. VETTRAINO
Le greffier,
F. TROUYET
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11PA00434
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N° 14PA01791