Vu la requête sommaire, enregistrée le 19 juillet 2013, et le mémoire complémentaire, enregistré le 31 octobre 2013, présentés pour M. C...B..., demeurant..., en Algérie, par Me A... D...; M. B...demande à la Cour :
1º) d'annuler le jugement n° 1118600/6-2 du 21 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de rejet née du silence gardé par le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, sur sa demande du 11 février 2009 tendant à la délivrance de la carte de combattant ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;
3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer la carte de combattant dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à Me A...-D... de la somme de
1 000 euros sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la violation de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors qu'aucune des pièces du dossier ne permettaient d'établir les motifs de fait et de droit sur lesquels l'administration s'était fondée pour rejeter la demande d'attribution de la carte du combattant ;
- la décision attaquée est entachée du vice de procédure résultant de la méconnaissance de l'article R. 227 quater du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en l'absence de saisine pour avis du conseil départemental pour les anciens combattants et victimes de guerre et la mémoire de la Nation ;
- la décision doit être annulée pour défaut de motivation, en l'absence de réponse à la demande de communication des motifs présentée auprès de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) ;
- dans la mesure où cette décision serait fondée sur l'article L. 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, elle serait illégale, dès lors, en premier lieu, que le Conseil constitutionnel a déclaré l'inconstitutionnalité de cet article par décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 et, en second lieu, que la mesure est contraire aux stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, en raison de la discrimination en fonction de la nationalité et du lieu de résidence qui découle des dispositions appliquées ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2014, présenté par le ministre de la défense, qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre fait valoir que :
- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement ne peut prospérer, dès lors que la décision attaquée, qui est une décision implicite, n'était pas fondée sur une condition de nationalité ou de résidence ;
- le moyen tiré du vice de procédure est inopérant ; en effet, le conseil départemental pour les anciens combattants et victimes de guerre n'avait pas à être saisi de la demande de M.B..., dans la mesure où celui-ci n'a produit aucun élément permettant d'authentifier la réalisation de services en qualité de militaire ou de supplétif ;
- le moyen tiré du vice de forme manque en fait ; la décision attaquée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas motivée, dès lors qu'il s'agit d'une décision implicite ; il a été répondu à la demande de communication de motifs présentée par M.B..., au demeurant tardive ;
- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés, dès lors que M. B...ne remplit pas les conditions prévues par l'article R. 224 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et que le refus qui a été opposé à sa demande n'est pas fondé sur une condition de nationalité ou de résidence ;
Vu la décision n° 2013/038833 en date du 26 septembre 2013 par laquelle la section Cour administrative d'appel du bureau d'aide juridictionnelle de Paris a admis M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2015 :
- le rapport de M. Cantié , premier conseiller,
- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;
1. Considérant que M. C...B..., ressortissant algérien né le 20 mai 1927, résidant à Tipaza (Algérie), a transmis aux services de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) une demande, signée le 11 février 2009, tendant à la délivrance de la carte du combattant ; que M. B...relève appel du jugement en date du 21 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de rejet née du silence gardé par le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, sur sa demande ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que, si M. B...fait grief au tribunal administratif d'avoir écarté son moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors qu'aucune pièce ne permettait de déterminer les motifs de la décision attaquée, les premiers juges n'ont commis aucune irrégularité en recherchant, au regard des pièces versées au dossier et des éléments issus du débat entre les parties, le ou les motifs du rejet tacite de la demande de l'intéressé et en estimant, compte tenu en particulier de la teneur des écritures présentées par l'administration, que le refus opposé à M. B...n'était pas fondé sur une condition de nationalité ou de résidence ; que le moyen susvisé doit, dès lors, être écarté ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués. " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de M.B..., tendant à la communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande, a été adressée à l'administration postérieurement au jugement du tribunal administratif ; que, dès lors, le requérant ne peut utilement soutenir que c'est en méconnaissance des dispositions précitées que les motifs de cette décision tacite ne lui ont pas été communiqués ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 227 quater du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de naissance de la décision attaquée : " La décision sur la demande d'attribution de la carte du combattant est prise par le préfet après avis du conseil départemental pour les anciens combattants et victimes de guerre et la mémoire de la Nation, dans les cas où le nombre d'actions de feu ou de combat détermine la décision, conformément aux directives définies par la commission d'experts instituée par l'article L. 253 bis (...) " ;
6. Considérant qu'il ressort de l'attestation établie le 2 mai 2012 par le chef du centre des archives du personnel militaire que M. B...a été classé exempté par le conseil de révision de la classe 1946 et n'a pas effectué de services militaires effectifs ; que M.B..., qui ne dément pas ces faits, n'a produit aucune pièce permettant d'établir qu'il aurait participé à des actions de feu ou de combat et pourrait, par suite, se voir reconnaître la qualité de combattant ; que, dès lors, à supposer même que la situation de l'intéressé entrait dans le champ des dispositions précitées de l'article R. 227 quater du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, l'absence de saisine du conseil départemental pour les anciens combattants et victimes de guerre et la mémoire de la Nation n'a pu, en l'espèce, priver M. B...d'une garantie et n'a pu avoir d'influence sur la décision de rejet de sa demande tendant à la délivrance de la carte de combattant ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie ne peut être accueilli ;
7. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le rejet de la demande de M. B...serait fondé sur la nationalité de l'intéressé ou sur la circonstance qu'il réside en Algérie ; qu'il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'administration a méconnu le principe constitutionnel d'égalité et les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que le présent arrêt n'implique, dès lors, le prononcé d'aucune mesure d'injonction ; qu'il suit de là que les conclusions présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de la défense.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Sanson, président,
- M. Dellevedove, premier conseiller,
- M. Cantié, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 février 2015.
Le rapporteur,
C. CANTIÉLe président,
M. SANSON
Le greffier,
A.-L. CALVAIRELa République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
2
N° 13PA02825