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27/01/2015 | FRANCE | N°13PA00300

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 27 janvier 2015, 13PA00300


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et

1er mars 2013, présentés pour l'université Pierre et Marie Curie, Paris VI, dont le siège est situé 4 place Jussieu à Paris (75252) Cedex 05, par Me Mazetier ; l'université Pierre et Marie Curie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108705/2-1 en date du 27 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, à la demande du Syndicat National de l'Enseignement Supérieur (SNESup-FSU) et du syndicat FERC-SUP-CGT, a annulé la délibération du 14 mars 2011 du cons

eil d'administration de l'université en tant qu'elle a approuvé le calendrier ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et

1er mars 2013, présentés pour l'université Pierre et Marie Curie, Paris VI, dont le siège est situé 4 place Jussieu à Paris (75252) Cedex 05, par Me Mazetier ; l'université Pierre et Marie Curie demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108705/2-1 en date du 27 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris, à la demande du Syndicat National de l'Enseignement Supérieur (SNESup-FSU) et du syndicat FERC-SUP-CGT, a annulé la délibération du 14 mars 2011 du conseil d'administration de l'université en tant qu'elle a approuvé le calendrier universitaire de l'année 2011-2012 ;

2°) de rejeter la demande présentée par les syndicats susvisés devant le Tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge desdits syndicats la somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L'université soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il n'est pas suffisamment motivé, qu'un mémoire comportant des moyens nouveaux a été communiqué tardivement et qu'un représentant du second syndicat susvisé a présenté des observations orales alors qu'il n'y était pas habilité ;

- les premiers juges ont appliqué à tort les dispositions de l'article 34 du décret du 15 février 2011 alors qu'ils auraient dû appliquer celles de l'article 12 du décret du 28 mai 1982 ;

- la mesure litigieuse, de caractère essentiellement pédagogique, n'avait pas à être précédée de la consultation du comité technique car elle n'a que peu d'incidence sur la charge de travail du personnel, les modifications intervenant d'une année sur l'autre étant ponctuelles et limitées alors, d'ailleurs, que le conseil d'administration a approuvé le calendrier universitaire à une large majorité ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2013, présenté pour le Syndicat National de l'Enseignement Supérieur (SNESup-FSU), dont le siège est situé 78 rue du Faubourg Saint-Denis à Paris (75010), et pour le syndicat FERC-SUP-CGT de l'université Pierre et Marie Curie, dont le siège est situé Maison des syndicats, Quai Saint-Bernard à Paris (75005), par Me A... ; les syndicats SNESup-FSU et FERC-SUP-CGT concluent au rejet de la requête, à la confirmation du jugement entrepris et à ce que soit mise à la charge de l'université Pierre et Marie Curie la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les syndicats font valoir que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle est mal dirigée et qu'elle ne saurait critiquer un jugement aux termes duquel l'université a acquiescé dès lors que l'établissement public a décidé désormais de soumettre une telle mesure au comité technique de l'établissement ;

- à supposer que la requête soit dirigée effectivement contre le jugement susvisé, il y aura lieu de prononcer un non-lieu à statuer, le calendrier universitaire pour l'année 2011-2012 ayant épuisé tous ses effets ;

- la délibération contestée est entachée d'un vice de procédure, le comité technique paritaire n'ayant pas été consulté au préalable sur cette mesure ayant des répercussions sur l'organisation et le fonctionnement général des services universitaires, et notamment sur la définition des périodes d'enseignement et des sessions d'examen mais aussi sur la situation statutaire des enseignants et personnels qui se trouvent affectés au sein des établissements ;

- la circulaire du 30 avril 2012 précise clairement qu'une telle décision doit être adoptée par le conseil d'administration après consultation du comité technique d'établissement ;

- subsidiairement, la délibération litigieuse a été prise en méconnaissance de l'article 4 du décret du 25 août 2000 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré 24 septembre 2013, présenté pour l'université Pierre et Marie Curie, par Me Mazetier qui confirme ses précédentes écritures ;

L'université soutient, en outre, que :

- contrairement à ce qui est soutenu en défense, la requête est recevable car, d'une part, l'erreur sur la date du jugement est une simple erreur de plume et, d'autre part, l'université n'a nullement acquiescé au jugement attaqué mais en a tiré les conséquences en décidant de soumettre désormais le projet de calendrier universitaire à l'avis du comité technique ;

- les conclusions au fond de l'université sont conformes à l'arrêt rendu par la Cour de céans en date du 22 avril 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le décret n° 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux comités techniques paritaires ;

Vu le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État et dans la magistrature ;

Vu le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2015 :

- le rapport de M. Dellevedove, premier conseiller,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

- et les observations de Me Mazetier, avocat de l'université requérante ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par les syndicats défendeurs :

1. Considérant, d'une part, que la circonstance que, dans sa requête, l'université a commis une erreur de plume sur la date du jugement attaqué est sans incidence sur sa recevabilité dès lors que, dans les termes où elle est libellée, la requête doit être regardée sans équivoque comme dirigée contre ledit jugement ; que, par ailleurs, le jugement attaqué ayant continué à produire ses effets, contraignant notamment, eu égard à ses motifs, l'université à soumettre chaque année le projet de calendrier de l'année universitaire à l'avis du comité technique paritaire, les syndicats défendeurs ne sont pas fondés à soutenir que la requête serait devenue sans objet, après la date d'entrée en vigueur du calendrier universitaire applicable à l'année universitaire 2012-2013, et qu'un non lieu à statuer devrait être prononcé ;

2. Considérant, d'autre part, que la circonstance que l'université a décidé, en exécution dudit jugement, de soumettre l'adoption du calendrier universitaire à la consultation préalable du comité technique, ne saurait la faire regarder comme ayant acquiescé aux termes de ce jugement ; que, en tout état de cause, cette circonstance est sans incidence sur la recevabilité de la requête ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative :

" La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ; que, selon l'article R. 613-4 du même code : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction (...) " ;

4. Considérant que la simple communication d'un mémoire la veille de la clôture de l'instruction ne saurait avoir pour effet de reporter de plein droit la date de clôture, à défaut de toute décision expresse de réouverture de l'instruction ; qu'il ressort des pièces du dossier que, alors que la date de clôture de l'instruction avait été fixée au 30 octobre 2012, un mémoire complémentaire a été produit par les syndicats demandeurs et enregistré au greffe du tribunal administratif le 29 octobre 2012 ; que ce mémoire, qui comportait des éléments de droit nouveau, a été communiqué ce même jour à l'université Pierre et Marie Curie, défenderesse, qui l'a reçu seulement le 31 octobre 2012 alors que l'instruction était close en sorte que l'établissement public n'a pas été mis en mesure de répliquer à ce mémoire ; que, dès lors, l'université Pierre et Marie Curie est fondée à soutenir que le jugement attaqué est intervenu en méconnaissance du principe du contradictoire et à en demander, pour ce motif, l'annulation; qu'il y a lieu, par suite, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le Syndicat National de l'Enseignement Supérieur (SNESup-FSU) et le syndicat FERC-SUP-CGT de l'université Pierre et Marie Curie devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur l'irrecevabilité de la demande de première instance en tant qu'elle émane du syndicat SNESup-FSU :

5. Considérant qu'en l'absence, dans les statuts du syndicat SNESup-FSU, de stipulation réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif, celle-ci ne pouvait être régulièrement engagée que par le congrès d'orientation ou l'assemblée générale, organes délibérants du syndicat, et non, comme en l'espèce, par sa commission administrative qui se voit seulement confier par l'article 9 des statuts " la gestion et l'administration " du syndicat et qui se réunit pour " diriger l'activité du syndicat dans le cadre des décisions du congrès d'orientation " ; que, dès lors, à supposer même que le SNESup-FSU, syndicat national, a intérêt à contester la mesure litigieuse qui ne concerne que l'université Pierre et Marie Curie, M. B...C...ne pouvait être regardé comme ayant qualité pour introduire régulièrement la demande au nom du syndicat sur le fondement d'une délibération de la seule commission administrative ;

Sur la légalité de la délibération du 14 mars 2011 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens présentés par le syndicat FERC-SUP-CGT de l'université Pierre et Marie Curie :

6. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 951-1-1 du code de l'éducation : " Un comité technique paritaire est créé dans chaque établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel par délibération du conseil d'administration. Outre les compétences qui lui sont conférées en application de l'article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, il est consulté sur la politique de gestion des ressources humaines de l'établissement. Un bilan de la politique sociale de l'établissement lui est présenté chaque année. " ; qu'aux termes de l'article 15 de la loi précitée dans sa rédaction alors applicable : " I.-Dans toutes les administrations de l'État et dans tous les établissements publics de l'État ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques. / (...) II.-Les comités techniques connaissent des questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des services, des questions relatives aux effectifs, aux emplois et aux compétences, des projets de statuts particuliers ainsi que des questions prévues par un décret en Conseil d'État (...) " ; qu'aux termes de l'article 12 du décret susvisé du 28 mai 1982 relatif aux comités techniques paritaires, applicable à la délibération religieuse : " Les comités techniques paritaires connaissent dans les conditions et les limites précisées pour chaque catégorie de comité par les articles 13 et 14 du présent décret des questions et des projets de textes relatifs : - 1° Aux problèmes généraux d'organisation des administrations, établissements ou services ; - 2° Aux conditions générales de fonctionnement des administrations et services (...) " ;

7. Considérant que, ainsi que le soutient à juste titre le syndicat FERC-SUP-CGT, les calendriers universitaires présentent des différences notables selon les universités en termes de durée des périodes d'enseignement et de congés, du nombre de sessions d'examen, de définition et d'organisation des sessions de rattrapage du premier et du second semestre, de sessions d'examens supplémentaires, témoignant ainsi, d'une part, d'une large autonomie des universités pour arrêter leur calendrier universitaire et, d'autre part, au-delà de sa dimension pédagogique, des répercussions importantes de ce calendrier sur l'organisation et la charge de travail des personnels enseignants et administratifs affectés au sein des universités ; que, si l'université Pierre et Marie Curie affirme sans être contredite que, depuis quelques années, les modifications de calendrier d'une année sur l'autre intervenant à l'université ne portent que sur quelques jours et sur des périodes restreintes, cette circonstance ne saurait remettre en cause ni la marge d'appréciation de l'université dans la définition de ce calendrier pour l'année universitaire 2011-2012, ni l'impact de ce calendrier en termes d'organisation des services et des conditions de leur fonctionnement au sens des dispositions susmentionnées, tous deux de nature à rendre nécessaire pour son élaboration la consultation du comité technique de l'université ; que, dès lors, à défaut d'avoir été précédée de la consultation du comité technique, la délibération litigieuse du 14 mars 2011 du conseil d'administration de l'université en tant qu'elle a approuvé le calendrier universitaire de l'année 2011-2012 est entachée sur ce point d'illégalité et doit être annulée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat FERC-SUP-CGT, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés par l'université Pierre et Marie Curie et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, d'une part, de mettre à la charge de l'université Pierre et Marie Curie la somme de 1500 euros, au titre des frais exposés par le syndicat FERC-SUP-CGT et non compris dans les dépens et, d'autre part, de rejeter les conclusions des syndicats défendeurs tendant à ce que soit mise à la charge de l'université Pierre et Marie Curie une quelconque somme au bénéfice du syndicat SNESup-FSU au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Paris du 27 novembre 2012 est annulé.

Article 2 : La délibération du conseil d'administration de l'université Pierre et Marie Curie du

14 mars 2011, en tant qu'elle a approuvé le calendrier de l'année universitaire 2011-2012, est annulée.

Article 3 : L'université Pierre et Marie Curie versera au syndicat FERC-SUP-CGT de l'université Pierre et Marie Curie la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions du syndicat SNESup-FSU présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetés ;

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'université Pierre et Marie Curie, au Syndicat National de l'Enseignement Supérieur (SNESup-FSU) et au syndicat FERC-SUP-CGT de l'université Pierre et Marie Curie.

Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Coënt-Bochard, président de chambre,

- Mme Sanson, président assesseur,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 janvier 2015.

Le rapporteur,

E. DELLEVEDOVELe président,

E. COËNT-BOCHARD

Le greffier,

A-L. CALVAIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA00300


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA00300
Date de la décision : 27/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-06-04 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Comités techniques paritaires. Consultation non obligatoire.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : MAZETIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-01-27;13pa00300 ?
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