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22/01/2015 | FRANCE | N°14PA03430

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 22 janvier 2015, 14PA03430


Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2014, présentée pour Mlle A...C..., élisant domicile..., par Me B... ; Mlle C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1315753 du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 29 janvier 2013 rejetant sa demande de renouvellement de son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son éloignement ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de sé

jour à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros p...

Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2014, présentée pour Mlle A...C..., élisant domicile..., par Me B... ; Mlle C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1315753 du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 29 janvier 2013 rejetant sa demande de renouvellement de son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son éloignement ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- il ne procède pas d'un examen approfondi de sa situation ;

- le préfet de police s'est cru lié par l'avis du médecin de l'administration ;

- le refus de titre méconnait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier en ce qui concerne la gravité de sa pathologie et l'absence de possibilité de traitement dans son pays d'origine ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- cette obligation méconnaît le 10° de l'article L 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de la requérante ;

- l'obligation porte gravement atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et l'exposerait, en cas de retour, à des traitements dégradants compte tenu des difficultés d'accès aux soins dans son pays d'origine ; elle méconnaît par suite les articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant, âgé de trois ans ;

Vu les pièces du dossier dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas produit de mémoire en défense ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 19 juin 2014 accordant à Mlle C...l'aide juridictionnelle totale pour la présente procédure ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015, le rapport de M. Vincelet, premier conseiller ;

1. Considérant que MlleC..., ressortissante tunisienne née en 1982, a demandé le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été accordé pour raison médicale sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 29 janvier 2013, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de son éloignement ; que Mlle C...fait appel du jugement du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité du refus de titre :

2. Considérant, en premier lieu, que le refus de titre énonce les motifs de droit et les considérations de fait qui en constituent le fondement ; qu'en particulier, il indique que le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a estimé que si l'état de santé de Mlle C...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, cette dernière peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine; qu'il ajoute qu'après un examen approfondi de sa situation, Mlle C...ne remplit plus les conditions prévues par le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi ce refus de titre, qui ne pouvait donner davantage de précisions sur la pathologie de la demanderesse et les modalités de son traitement en Tunisie, est régulièrement motivé ; qu'il résulte en outre de cette motivation que le préfet de police ne s'est pas cru lié par l'avis du médecin de l'administration, mais qu'il a au contraire procédé à un examen circonstancié de la situation de l'intéressée ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

4. Considérant que, consulté par l'autorité administrative sur la demande de MlleC..., le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a, ainsi qu'il a été dit au point 2, estimé, le 26 décembre 2012, que si l'état de santé de la demanderesse nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celle-ci pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant que les certificats médicaux produits par Mlle C...établissent qu'elle souffre d'un diabète sévère mettant en jeu son pronostic vital à raison duquel elle est prise en charge au centre hospitalier de Saint-Denis ; que ces certificats ne font que confirmer que cette pathologie nécessite une surveillance médicale dont la défaut l'exposerait à un risque d'exceptionnelle gravité ; que, si l'un d'entre eux ajoute que " le traitement nécessaire aux soins n'est pas disponible " dans son pays d'origine, cette affirmation non circonstanciée est à elle seule insusceptible de remettre en cause l'appréciation du médecin de l'administration sur ce point ; que, dans ces conditions, le refus de titre n'a pas méconnu les dispositions précitées ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que la seule circonstance que le préfet qui refuse la délivrance ou le renouvellement du titre sollicité par l'étranger en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français n'ait pas, préalablement à l'édiction de cette mesure d'éloignement, et de sa propre initiative, expressément informé l'étranger qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, alors que l'intéressée, qui ne pouvait l'ignorer, n'a pas été privée de la possibilité de présenter utilement des observations écrites ou orales sur ce point au cours de la procédure administrative à l'issue de laquelle a été prise la décision d'éloignement, n'est pas de nature à permettre de regarder la requérante comme ayant été privée de son droit à être entendue au sens du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'impose au préfet en pareille circonstance de convoquer l'étranger pour un nouvel examen de situation ; que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne déroge pas aux stipulations de cet article ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que Mlle C...est susceptible de bénéficier d'un traitement approprié de sa pathologie en Tunisie, elle n'est pas fondée à soutenir que l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français méconnaîtrait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code qui s'opposent à l'éloignement d'un étranger dont l'état de santé implique un traitement médical indisponible dans son pays d'origine ;

8. Considérant, en troisième lieu, que si Mlle C...soutient que l'obligation de quitter le territoire contrevient aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des pièces du dossier qu'elle est entrée en France seulement le 27 septembre 2010 ; qu'elle n'allègue pas être dépourvue d'attaches en Tunisie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans ; que son compagnon, de nationalité indienne, est également en situation irrégulière ; que, dans ces conditions, bien qu'elle soit mère d'un enfant né en 2011, l'obligation de quitter le territoire n'a pas porté atteinte de manière disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, pour les mêmes motifs, il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation;

9. Considérant, en quatrième lieu, que si Mlle C...soutient que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'intérêt supérieur de son enfant au sens des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, un tel moyen n'est pas fondé dès lors que l'obligation n'a pas pour effet de séparer l'enfant de sa mère et qu'il n'est pas même allégué que le compagnon de cette dernière serait le père de l'enfant ou qu'il contribuerait à son éducation ou à son entretien ;

10. Considérant, en dernier lieu, que si la requérante invoque la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, un tel moyen est sans portée à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire, qui ne fixe pas le pays de destination ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en annulation de l'arrêté attaqué ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mlle C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- M Vincelet, premier conseiller,

Lu en audience publique le 22 janvier 2015

Le rapporteur Le président

A. VINCELET S.-L. FORMERY

Le greffier

S. CHALBOT-SANTT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 06PA02638

Mme Anne SEFRIOUI

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N° 14PA03430

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03430
Date de la décision : 22/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : DINGA ATIPO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-01-22;14pa03430 ?
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