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19/01/2015 | FRANCE | N°14PA02119

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 19 janvier 2015, 14PA02119


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 16 octobre 2013 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et en ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1314800 du 19 octobre 2013, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une req

uête, enregistrée le 13 mai 2014, M. B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 16 octobre 2013 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et en ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1314800 du 19 octobre 2013, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mai 2014, M. B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1314800 du 19 octobre 2013 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 16 octobre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 20 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat, MeA..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté du préfet de police est entaché d'un défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle ;

- l'arrêté est également entaché d'un défaut de motivation ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations des articles 3-1 et 2-2 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il réside en France de manière habituelle depuis plus de dix années, qu'il a occupé plusieurs emplois au cours de ces années, qu'il est titulaire du bail de son logement et qu'il est père d'un enfant né en France à l'éducation et à l'entretien duquel il participe ;

- pour les mêmes motifs, l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée le 5 juin 2014 au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une décision du 10 avril 2014, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Marino, président-assesseur.

1. Considérant que M. B..., né le 15 juin 1975, de nationalité malienne, relève appel du jugement du 19 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 16 octobre 2013 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et ordonnant son placement en rétention administrative ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, pour écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle de M.B..., le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a notamment indiqué que le requérant avait lui-même précisé lors de son audition par les services de police, que s'il était le père de deux enfants âgés de deux et quatre ans, il n'avait aucun enfant à charge et qu'il ne pouvait pas participer à l'entretien et à l'éducation de ses enfants ; qu'en statuant ainsi, le magistrat désigné a suffisamment motivé son jugement sur ce point ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de M. B... au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables avant de l'obliger à quitter le territoire et d'ordonner son placement en rétention administrative ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " la motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que l'arrêté contesté vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les articles L. 511-1-I 1°, L. 511-1-II, L. 512-1, L. 551-1 à L. 551-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que la convention franco-malienne du 11 février 1977 ; qu'il rappelle la nationalité de l'intéressé, les causes de son interpellation, les raisons pour lesquelles sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public et celles pour lesquelles il risque de se soustraire à l'obligation de quitter le territoire français et qui justifient qu'il ne lui soit pas accordé de délai de départ volontaire et que dans l'impossibilité d'exécuter immédiatement son éloignement, il soit placé en centre de rétention ; que l'arrêté contesté comporte ainsi l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui le fondent et doit être regardé comme suffisamment motivé, alors même que toutes les indications relatives à la situation privée et familiale de M. B... n'y sont pas mentionnées ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 16 octobre 2013 doit être écarté comme manquant en fait ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2-2 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Les Etats parties prennent toutes mesures appropriées pour que l'enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la même convention : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants, notamment en le protégeant de toutes formes de discrimination, dans toutes les décisions le concernant ;

6. Considérant que si M. B...établit être le père d'un enfant né sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier qu'il ne vit pas avec cet enfant et il ne démontre par aucune pièce qu'il participerait effectivement à son éducation et à son entretien ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de son enfant aurait été méconnu ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

8. Considérant que si M. B... fait valoir qu'il a établi le centre de ses attaches familiales et amicales en France dès lors qu'il est le père d'un enfant né sur le territoire français, il résulte de ce qui a été dit au point 6 qu'il n'établit pas participer à l'éducation et à l'entretien de ce dernier qui ne vit pas avec lui ; qu'il ressort également des pièces du dossier qu'il est célibataire et n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 24 ans ; qu'en outre, s'il soutient qu'il réside de manière habituelle en France depuis plus de dix années, qu'il a exercé dès que possible une activité salariée et qu'il est titulaire du bail de son logement, il n'établit ni l'ancienneté du séjour ni de l'exercice d'une activité professionnelle stable dont il se prévaut ; que dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations précitées, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'un ressortissant étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour ;

10. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir que l'arrêté du 16 octobre 2013 serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Marino, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 janvier 2015.

Le rapporteur,

Y. MARINOLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02119


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02119
Date de la décision : 19/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : LAMINE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-01-19;14pa02119 ?
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