Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2013, présentée pour le Syndicat de la fonction publique, dont le siège est BP 42105 à Papeete (98713), Polynésie française, par Me A... ; le Syndicat de la fonction publique demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1200553 du 26 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le directeur général des ressources humaines sur sa demande de modification de la délibération n° 95-230/AT du 14 décembre 1995 portant statut particulier du cadre d'emplois des ingénieurs de la fonction publique de la Polynésie française, présentée le 3 juillet 2012 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir le refus implicite de modifier la délibération n° 95- 230 du 14 décembre 1995 ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française une somme de 660 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 et la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et le complétant ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 95-97 du 1er février 1995 étendant dans les territoires d'outre mer certaines dispositions du code de la route et portant dispositions diverses ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu la délibération n° 95-219 AT du 14 décembre 1995 relatives aux différentes positions des fonctionnaires du territoire de Polynésie française ;
Vu la délibération n° 95-230 AT du 14 décembre 1995 portant statut particulier du cadre d'emplois des ingénieurs de la fonction publique du territoire de Polynésie française ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2014 :
- le rapport de Mme Sanson, président assesseur :
- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;
1. Considérant qu'à l'occasion de la diffusion par la direction générale des ressources humaines de la Polynésie française du calendrier prévisionnel des concours de recrutement, notamment dans la filière technique de la fonction publique du territoire, le Syndicat des cadres de la fonction publique, devenu Syndicat de la fonction publique, a sollicité la modification de l'article 3 de la délibération susvisée du 14 décembre 1995, portant statut particulier du cadre d'emplois des ingénieurs ainsi que l'établissement de conditions de concours internes identiques pour toutes les filières ; qu'il a saisi la Tribunal administratif de Papeete d'un recours tendant à l'annulation du refus que lui a implicitement opposé l'administration ; que, par un jugement du 26 février 2013 dont le Syndicat relève régulièrement appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans un second mémoire en défense enregistré le 27 novembre 2012 au greffe du tribunal avant la clôture de l'instruction, la Polynésie française, qui avait conclu à titre principal à l'irrecevabilité de la demande du Syndicat de la fonction publique, a pour la première fois présenté une défense au fond ; qu'il appartenait dès lors au tribunal de communiquer ce mémoire au requérant ; qu'en s'abstenant de procéder de la sorte, le tribunal a méconnu les exigences qui découlent des dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative qui sont destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction ; qu'il suit de là que le Syndicat de la fonction publique est fondé à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
4. Considérant que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête relatif à la régularité du jugement, il y a lieu d'annuler ledit jugement en date du 26 février 2013 et de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par le Syndicat de la fonction publique ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la Polynésie française :
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par courrier électronique expédié le 5 juillet 2012, le Syndicat des cadres de la fonction publique a demandé la modification des dispositions du 2° de l'article 3 de la délibération n° 95-230/APF du 14 décembre 1995 susvisée ; que ce courriel a été adressé à l'ancienne adresse électronique de la direction du personnel de la Polynésie française, alors même que l'information concernant le calendrier de ce concours, parvenu au syndicat par la même voie, comportait l'indication de la nouvelle adresse électronique de cette direction ; que toutefois, la Polynésie française doit être regardée comme ayant été saisie de la demande à la date à laquelle le syndicat lui a adressé sa demande à une nouvelle adresse, soit le 18 octobre 2012 , comme en atteste l'accusé réception produit au dossier ; qu'à la date à laquelle le tribunal avait statué et à celle à laquelle la Cour statue, un délai de quatre mois s'étant écoulé, le contentieux est lié ; que la fin de non recevoir opposée par la Polynésie française tirée du caractère prématuré de la demande doit dès lors être écartée ;
Au fond :
6. Considérant, d'une part, que le Syndicat de la fonction publique a demandé la modification de l'article 3 de la délibération du 14 décembre 1995précitée en tant qu'il prévoit le recrutement des ingénieurs subdivisionnaires par la voie d'un " concours interne sur épreuves, ouvert pour 25 % au plus des postes à pourvoir, aux fonctionnaires relevant du statut de la fonction publique de la Polynésie française qui sont titulaires d'un B.T.S. ou d'un D.U.T. ou de tout autre diplôme reconnu équivalent, et qui justifient au 1er janvier de l'année du concours de 10 ans de services publics effectifs, ou qui sont techniciens et justifient au 1er janvier de l'année du concours de 20 ans de services publics effectifs, compte tenu de la période de stage ou de formation " ; que le refus de procéder à la modification demandée et, plus généralement, de modifier les dispositions statutaires applicables en matière de concours internes de recrutement, qui présente un caractère règlementaire, ne constitue pas une décision individuelle défavorable devant être motivée en application de la loi susvisée du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs ;
7. Considérant, d'autre part, que le principe d'égalité n'implique pas que des personnes placées dans des situations différentes soient traitées de manière identique ; que le principe d'égalité de traitement des agents publics ne peut être invoqué que pour des agents appartenant à un même corps ou à un même cadre d'emploi qui sont placés dans une situation identique et qu'aucune disposition législative ni aucun principe général n'oblige à ce que les agents appartenant à un corps bénéficient des mêmes conditions statutaires que celles prévues pour les agents d'un autre corps ; que, par suite, la circonstance que les dispositions critiquées seraient plus restrictives que celles qui sont posées par les statuts particuliers des autres agents des filières techniques ou administratives de la fonction publique de la Polynésie française, ainsi que par ceux des ingénieurs de la fonction publique de l'État ou de la fonction publique territoriale, pour l'accès au recrutement par la voie du concours interne, n'est pas contraire au principe d'égalité des agents publics ;
8. Considérant, par ailleurs, que, si l'article 14 de la loi du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, rendu applicable en Polynésie française par l'article 12 de la loi du 1er février 1995 susvisée, dispose que : " l'accès des fonctionnaires de l'Etat, des fonctionnaires territoriaux et des fonctionnaires hospitaliers aux deux autres fonctions publiques, ainsi que leur mobilité au sein de chacune de ces trois fonctions publiques, constituent des garanties fondamentales de leur carrière ", il ne fait pas obligation aux autorités compétentes de définir des modalités de recrutement identiques dans des corps ou cadres d'emplois comparables ; que, par suite, le refus par l'administration polynésienne de modifier le statut particulier du cadre d'emploi des ingénieurs du territoire, ainsi que ceux des autres cadres d'emplois des filières technique et administrative, n'est pas constitutif d'une discrimination illégale ;
9. Considérant, enfin, que le moyen tiré de la méconnaissance par l'administration polynésienne des dispositions de la délibération susvisée du 14 décembre 1995, relative aux différentes positions des fonctionnaires du territoire, dans la procédure de réintégration des agents placés en détachement ou en disponibilité est inopérant à l'encontre de la décision attaquée qui ne porte que sur le recrutement par concours interne ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Syndicat de la fonction publique n'est pas fondé à demander l'annulation du refus implicite opposé par la Polynésie française à sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par le Syndicat de la fonction publique, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions présentées à fin d'injonction doivent dès lors être rejetées :
Sur l'application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au Syndicat de la fonction publique ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du Syndicat de la fonction publique la somme que demande la Polynésie française au titre de frais de même nature ; que les dispositions de l'article R. 761-1 du même code font de même obstacle à ce que la contribution à l'aide juridictionnelle acquittée par le syndicat requérant soit mise à la charge de la Polynésie française ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française en date du 26 février 2013 est annulé.
Article 2 : La demande du Syndicat de la fonction publique devant le Tribunal administratif de Polynésie française et le surplus des conclusions de la requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions de la Polynésie française présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N°1302085