Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2013, présentée par Mme A...B..., demeurant..., et les mémoires complémentaires, enregistrés les 27 août et 10 septembre 2013, présentés pour MmeB..., par Me Le Doré ; Mme B... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1000074/6-2 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à lui verser une somme de 5 millions d'euros en réparation de ses préjudices liés à l'intervention chirurgicale subie à l'hôpital Saint-Louis le 2 juillet 1999 ;
2°) de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à lui verser la somme de 1 900 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2009 ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris au versement de la somme totale de 3 230 000 euros au titre de la perte de chance de se soustraire aux différents préjudices ;
4°) d'ordonner la capitalisation des intérêts ;
5°) de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son avocat renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 juin 2014, présentée pour MmeB..., par Me Le Doré ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :
- le rapport de M. Roussel, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Macaud, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Doré, avocat de Mme B..., et celles de Me Tsoudéros, avocat de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;
1. Considérant que Mme B...a subi le 2 juillet 1999 à l'hôpital Saint-Louis à Paris, une opération de chirurgie esthétique consistant en la réalisation d'une mammoplastie verticale destinée à corriger une ptose mammaire ; que se plaignant de divers troubles qu'elle estime liés à cette opération, elle a saisi l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, le 30 juillet 2009, d'une réclamation préalable ;qu'à la suite du rejet de cette demande, le 11 août suivant, elle a introduit une requête devant le Tribunal administratif de Paris tendant à l'indemnisation de ses préjudices ; que par jugement du 21 février 2012, le tribunal a ordonné une expertise ; que celle-ci a été confiée au Docteur Kapron, qui a déposé son rapport le 3 juillet 2012 ; que par le jugement attaqué, en date du 9 avril 2013, le tribunal a rejeté la requête et mis les frais d'expertise à la charge de l'Etat ;
Sur la régularité des opérations d'expertise :
2. Considérant, en premier lieu, que l'expert a indiqué dans son rapport que les troubles dont se plaignait Mme B...étaient sans rapport avec l'intervention chirurgicale subie le 2 juillet 1999 et en a déduit que la question relative à l'information préalable de l'intéressée sur le risque de survenue de tels troubles était sans objet ; qu'elle a ainsi répondu à la question posée par le tribunal ; que l'expert n'ayant pas été en mesure de déterminer avec certitude l'origine des troubles subis par l'intéressée, elle a pu se borner à évoquer sur ce point dans son rapport deux hypothèses générales ; que la réponse précédemment apportée par l'expert sur l'absence de lien de causalité avec l'intervention chirurgicale litigieuse suffisait d'ailleurs à éclairer le tribunal dans le cadre du présent litige ; que l'absence de réponse par l'expert à certaines questions posées, si elle peut justifier, le cas échéant, la réalisation d'une expertise complémentaire, est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité des opérations d'expertise ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'expert n'aurait pas pris en compte le dossier médical que lui avait adressé Mme B...et qu'elle aurait négligé certaines pièces ;
Sur la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris :
En ce qui concerne la responsabilité sans faute :
4. Considérant que lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;
5. Considérant que si Mme B...fait valoir qu'elle est atteinte depuis l'intervention chirurgicale subie le 2 juillet 1999 de divers symptômes invalidants, et notamment de douleurs multiples, de céphalées, d'insomnies, de chute des cheveux, de problèmes mnésiques, gastro-intestinaux, respiratoires, de concentration, de mémorisation et de la vision, il ne résulte pas de l'instruction que ces troubles multiples, dont l'origine n'a pu être identifiée, et qui correspondraient selon certains praticiens consultés par l'intéressée au syndrome dit de " fatigue chronique ", seraient en lien avec cette opération ;
En ce qui concerne le traitement de la ptose :
6. Considérant que si Mme B...fait valoir qu'à la suite de l'opération du 2 juillet 1999, un de ses seins est affecté d'un pli disgracieux, il ne résulte pas de l'instruction que ce pli serait lié à un manquement du chirurgien aux règles de l'art ;
En ce qui concerne le suivi post-opératoire :
7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les troubles dont la requérante a fait état à la suite de l'opération chirurgicale du 2 juillet 1999 n'auraient pas été pris aux sérieux par les médecins ; que si aucun diagnostic n'a pu, ainsi qu'il a été dit, être établi avec certitude, de nombreux examens ont été pratiqués ; que la circonstance que les médecins n'aient évoqué que tardivement l'hypothèse que ces troubles soient liés à un syndrome de fatigue chronique, sans d'ailleurs que les traitements administrés aient permis d'y remédier, ne saurait à elle seule caractériser une faute de l'hôpital dans son obligation de suivi post-opératoire ;
En ce qui concerne la perte du dossier médical :
8. Considérant que la perte du dossier médical de MmeB..., aussi regrettable soit-elle, n'est pas à l'origine directe des préjudices dont elle demande réparation ;
En ce qui concerne le défaut d'information :
9. Considérant qu'en matière de chirurgie esthétique le praticien est tenu d'une obligation d'information particulièrement étendue à l'égard de son client ;
10. Considérant toutefois que Mme B...ne peut utilement soutenir qu'elle n'aurait pas été informée par les médecins, préalablement à l'intervention chirurgicale réalisée le 2 juillet 1999, du risque de survenue des troubles multiples dont elle fait état depuis cette opération, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit, il ne résulte pas de l'instruction que ces troubles seraient en lien avec celle-ci ou même en constitueraient une conséquence connue ;
11. Considérant qu'à supposer que les praticiens n'aient pas informé MmeB..., comme ils en avaient l'obligation, du risque de récidive de la ptose mammaire plusieurs années après l'opération, et ne lui aient ainsi pas permis de consentir de façon suffisamment éclairée à sa réalisation, la faute ainsi commise est sans lien avec les différents préjudices dont Mme B...demande à être indemnisée ; qu'en particulier, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de réalisation de l'intervention chirurgicale du 2 juillet 1999 aurait permis à MmeB..., qui admettait d'ailleurs elle-même dans ses écritures devant le tribunal que la ptose mammaire n'était pas aussi importante qu'avant l'opération, de se soustraire à un préjudice esthétique ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par Mme B...est non compris dans les dépens ;
14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...une somme de 500 euros au titre des frais exposés par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme B...versera à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
''
''
''
''
3
N° 10PA03855
2
N° 13PA02201