Vu la requête, enregistrée le 30 octobre 2013, présentée pour M. C... D..., demeurant..., par Me Baudouin ; M. D... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1222035/3-3 du 1er octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et de Réseau ferré de France (RFF) à lui verser une indemnité de 161 425,89 euros, assortie des intérêts au taux légal et des intérêts des intérêts à compter de la date du dépôt de la requête, en réparation du préjudice résultant des désordres affectant le mur et la cour intérieure de l'immeuble sis 123 rue Didot à Paris (75014) dont il est propriétaire, causés par le ravinement du talus de la voie ferrée ;
2°) de condamner solidairement la SNCF et RFF à lui verser des dommages-intérêts d'un montant de 149 600 euros HT, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du
26 décembre 2012 et la capitalisation de ces intérêts, en réparation du préjudice résultant desdits désordres ;
3°) de mettre à la charge de la SNCF et de RFF la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2014 :
- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,
- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,
- les observations de MeB..., substituant Me Baudouin, avocat de M.D...,
- les observations de Me Poulet, avocat de la SNCF,
- les observations de MeE..., substituant Me Chetrit, avocat de la RFF,
- et les observations de M. F...A..., expert ;
1. Considérant que M.D..., propriétaire d'un immeuble sis 123 rue Didot à Paris
14ème, situé en surplomb d'une voie ferrée désaffectée, dite de " la petite ceinture " a subi des désordres affectant la terrasse de cet immeuble ainsi que le mur de soutènement qui la longe en surplombant le talus bordant la voie ; qu'imputant ces désordres à un affaissement du talus, il a demandé, à plusieurs reprises depuis 2007, à la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et à Réseau ferré de France (RFF) de les constater et de déterminer les mesures de nature à y mettre fin ; qu'en l'absence de réponse, M. D...a saisi le juge des référés du Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant, à titre principal, à ce qu'il soit ordonné à la SNCF et à RFF d'effectuer des travaux de confortement et de mise en sécurité du talus et, à titre subsidiaire, à ce qu'une expertise soit prescrite afin, notamment, de déterminer l'origine des désordres et les mesures propres à y mettre fin ; que, par une ordonnance en date du
27 mars 2012, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a confié cette mission à un expert ingénieur, qui a remis son rapport le 23 novembre 2012 ; que, par le jugement attaqué en date du 1er octobre 2013, dont M. D...interjette régulièrement appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande indemnitaire ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la responsabilité :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. La mission confiée à l'expert peut viser à concilier les parties " ;
3. Considérant que, pour rejeter la demande de M.D..., les premiers juges ont considéré que les conclusions de l'expert judiciaire, selon lesquelles les désordres " sont dus au glissement très lent du talus (ferroviaire) qui entraîne avec lui le mur séparatif de propriété " vers la voie ferrée, ce basculement du mur ayant lui-même entraîné un affaissement et des fissurations de la terrasse, sont basées sur des suppositions et des déductions empiriques sérieusement contestées par les défendeurs qui, à partir de relevés topographiques et de terrain établis par un expert géotechnicien qu'ils ont mandaté, mettent plutôt en cause le remblai de comblement du sous-sol de la terrasse du requérant, constitué d'une simple maçonnerie centenaire, et relèvent que la base du mur, encastrée dans le talus, n'est pas affectée par le basculement de la tête du mur, qui est vétuste et n'a pas été entretenue par M. D...depuis sa construction en
1901 ; que le tribunal en a déduit que le requérant n'établissait pas que la cause certaine, directe et déterminante du basculement du mur résidait dans le talus de la voie ferrée désaffectée ;
4. Considérant que pour contester cette analyse du tribunal, le requérant fait valoir, d'une part, qu'avant l'expertise judiciaire, un architecte qui s'occupe de l'immeuble avait, dès 2007, considéré que les désordres étaient " consécutifs au mouvement du talus qui surplombe la voie ferrée " et, d'autre part, que dans son rapport, l'expert a lui-même envisagé le rôle possible du remblai pour l'écarter en précisant que la principale contrainte exercée par le remblai s'est exercée " verticalement sur le terrain du talus, la contrainte horizontale étant limitée " et en ajoutant qu'à d'autres endroits, notamment la rue Ledion qui longe la crête du talus, peuvent être constatées une fissuration de la chaussée et une inclinaison de la clôture vers le talus alors " qu'à cet endroit, il n'y a pas de remblai supposé exercer une pression générant un renversement " ; que pourtant, ainsi que le soulignent les défendeurs, il ressort des " notes aux parties " établies par l'expert en cours d'expertise, à la suite des deux visites sur les lieux, que le talus " ne présente pas de signe de déplacement dans son ensemble " et que " la fondation du mur n'a subi aucun désordre " ; que par ailleurs, en s'appuyant sur une " coupe à l'échelle déduite des documents de géomètres de 1901 et 2012 " procédant à la comparaison des profils en 1901 et en 2012, les défendeurs affirment, sans être contredits par la production de pièces et d'études techniques, que le talus centenaire n'a bougé que de deux millimètres ;
5. Considérant qu'eu égard, d'une part, aux insuffisances du rapport d'expertise qui procède par affirmations non étayées par des considérations techniques susceptibles de contredire efficacement les critiques formulées par l'expert des défendeurs et, d'autre part, à la nécessité d'obtenir un avis impartial sur les différentes thèses en présence, il y a lieu, en l'absence au dossier d'éléments permettant à la Cour de se prononcer sur le bien-fondé du jugement, d'ordonner une expertise contradictoire complémentaire qui sera confiée à un géotechnicien et qui aura pour objet de déterminer la ou les causes des désordres affectant le mur et la terrasse de la propriété de M. D...;
D E C I D E :
Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de M.D..., procédé à un complément d'expertise réalisé par un géotechnicien en présence de M.D..., de RFF et de la SNCF, en vue de déterminer la ou les causes des désordres affectant le mur et la terrasse de la propriété de M.D....
Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la Cour dans un délai de 4 mois suivant la prestation de serment.
Article 3 : Il aura pour mission :
- de prendre connaissance des pièces du dossier, du rapport d'expertise ordonné par le tribunal et de l'analyse critique de ce rapport élaborée, en cours d'expertise, par le géotechnicien mandaté par la SNCF et RFF et de se faire remettre tous documents susceptibles d'être utiles à l'accomplissement de sa mission ;
- de se rendre sur place à l'immeuble situé 123 rue Didot à Paris 14ème, de visiter les lieux, de décrire les désordres litigieux, de se prononcer, si possible, sur leurs dates d'apparition, et si besoin, de procéder à des investigations supplémentaires ;
- de donner un avis, argumenté et fondé sur des références techniques et scientifiques, sur la ou les cause(s) de ces désordres, en précisant le cas échéant, la ou les cause(s) première(s), et la ou les causes suivantes provoquées par la ou les premières ;
- d'indiquer la nature et le coût des travaux propres à y remédier et les moins-values éventuelles ;
- de déposer un pré-rapport soumis aux observations des parties, de répondre à leurs dires par écrit, de manière détaillée et technique et si nécessaire, de prévoir une réunion à cet effet ;
Article 4 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-1 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la Cour.
Article 5 : L'expert déposera son rapport au greffe de la Cour en 2 exemplaires. Il notifiera les copies de son rapport aux parties intéressées telles que précisées au dernier article du présent arrêt, le cas échéant, avec leur accord, sous forme électronique.
Article 6 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.
Article 7 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.
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N° 13PA03942