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31/03/2014 | FRANCE | N°13PA03418

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 31 mars 2014, 13PA03418


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 août 2013 et

30 décembre 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Bouard ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221518 du 16 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2012 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de poli...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 août 2013 et

30 décembre 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Bouard ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221518 du 16 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 juillet 2012 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Bouard, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du

10 juillet 1991 ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2014 :

- le rapport de Mme Larsonnier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dewailly , rapporteur public,

1. Considérant que M.B..., ressortissant marocain, né en 1978, entré en France en 1999 selon ses déclarations, a sollicité, le 16 mai 2012, un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 10 juillet 2012, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. B...fait appel du jugement du 16 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

3. Considérant que, pour prendre l'arrêté contesté, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du 6 février 2012 du médecin chef du service médical de la préfecture de police qui a estimé que l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale, que ce défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que les soins nécessités par son état de santé présentaient un caractère de longue durée mais qu'il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement et d'un suivi appropriés dans son pays d'origine et qu'en conséquence, le séjour n'était pas médicalement justifié ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de plusieurs certificats médicaux du docteur Andreu, psychiatre, praticien hospitalier au centre hospitalier de Sainte-Anne, que le requérant est suivi, depuis septembre 2004, pour une schizophrénie paranoïde évoluant depuis plusieurs années, qui a nécessité, en raison de conduites de mise en danger, plusieurs hospitalisations entre septembre 2004 et 2005 ; que son état s'est stabilisé grâce à un traitement psychotrope à base de Risperdal et de Tercian, à un suivi mensuel au centre médico-psychologique de l'hôpital Sainte-Anne depuis 2005 et à une prise en charge dans un hôpital de jour ; qu'il ressort de la " liste des médicaments essentiels vitaux " émanant du ministère de la santé marocain ainsi que du certificat médical du 15 octobre 2012 du docteur Andreu, se référant au guide de santé publique des pays du Maghreb, que le traitement médicamenteux suivi par le requérant n'est pas commercialisé au Maroc ; que l'article de presse du 30 août 2012, faisant état d'une intervention de la présidente de l'association marocaine pour l'appui, le lien et l'initiation des familles des personnes souffrant de troubles psychiques, versé au dossier par le préfet de police, selon laquelle " la prise en charge médicamenteuse se généralise au Maroc ", alors qu'au demeurant cette intervention dénonce l'insuffisance de personnel soignant et d'encadrement ainsi que la marginalisation des malades atteints de troubles mentaux au Maroc, ne permet pas d'établir que le traitement suivi par le requérant serait disponible au Maroc ; qu'il ressort, également, des pièces versées au dossier par le requérant, concernant les informations sanitaires récentes disponibles sur le Maroc, que si ce pays n'est pas totalement dépourvu de structures susceptibles d'accueillir des patients souffrant de maladies psychiatriques, il fait preuve, néanmoins, d'une réelle déficience dans le traitement de telles maladies, comme en atteste le faible nombre de lits réservés aux services hospitaliers dédiés à ces pathologies (0,7 lit pour 10 000 habitants entre 2005 et 2010), et l'insuffisance de spécialistes dont le nombre, restreint à 292 sur la même période (soit 0,1 psychiatre pour 10 000 habitants), n'autorise pas un suivi satisfaisant et effectif de l'ensemble des malades concernés ; que la pathologie de M. B...n'avait pas été mise en évidence dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que l'arrêté du 10 juillet 2012 doit, par conséquent, être annulé ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. B...une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bouard, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Bouard de la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1221518/3 du 16 avril 2013 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 10 juillet 2012 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. B...un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Bouard, avocat de M.B..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Bouard renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

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N° 13PA03418


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA03418
Date de la décision : 31/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. DEWAILLY
Avocat(s) : BOUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-03-31;13pa03418 ?
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