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23/01/2014 | FRANCE | N°13PA03011

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 23 janvier 2014, 13PA03011


Vu la requête, enregistrée le 1er août 2013, présentée pour MeA..., domicilié..., agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Planet Bloo, et la société Planet Bloo Holding, dont le siège est 22 rue Freycinet à Paris (75016), par la SELARL Lexcap ; Me A... et la Société Planet Bloo Holding demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107709/2-1 du 4 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 54 millions d'euros et à ce qu'il soit mis à la char

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Vu la requête, enregistrée le 1er août 2013, présentée pour MeA..., domicilié..., agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Planet Bloo, et la société Planet Bloo Holding, dont le siège est 22 rue Freycinet à Paris (75016), par la SELARL Lexcap ; Me A... et la Société Planet Bloo Holding demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107709/2-1 du 4 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 54 millions d'euros et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser respectivement les sommes de 21 288 354 euros et de 32 663 454 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la présentation de leur réclamation préalable ;

3°) à titre subsidiaire d'ordonner avant dire droit une expertise comptable afin de fournir au tribunal administratif les informations lui permettant d'évaluer le préjudice subi ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2009/28/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 ;

Vu le code de l'énergie ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

Vu la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ;

Vu le décret n° 2001-410 du 10 mai 2001 relatif aux conditions d'achat de l'électricité produite par des producteurs bénéficiant de l'obligation d'achat ;

Vu le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil ;

Vu l'arrêté du 12 janvier 2010 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 ;

Vu l'arrêté du 31 août 2010 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 200-1196 du 6 décembre 2000 ;

Vu l'arrêté du 4 mars 2011 portant abrogation de l'arrêté du 31 août 2010 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 ;

Vu l'arrêté du 4 mars 2011 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014 :

- le rapport de M. Polizzi, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Macaud, rapporteur public ;

1. Considérant que les sociétés Planet Bloo SAS et Planet Bloo Holding soutiennent que le décret du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil et les deux arrêtés du 4 mars 2011 contreviennent, d'une part, aux principes de confiance légitime, de sécurité juridique, et de non discrimination et à la liberté du commerce et de l'industrie et, d'autre part, au principe d'égalité ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, aujourd'hui reprises à l'article L. 314-1 du code de l'énergie : " Sous réserve de la nécessité de préserver le bon fonctionnement des réseaux, Electricité de France et, dans le cadre de leur objet légal et dès lors que les installations de production sont raccordées aux réseaux publics de distribution qu'ils exploitent, les distributeurs non nationalisés mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée sont tenus de conclure, si les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l'achat de l'électricité produite sur le territoire national par : / (...) / 2° Les installations de production d'électricité qui utilisent des énergies renouvelables (...). Un décret en Conseil d'Etat fixe les limites de puissance installée des installations de production qui peuvent bénéficier de l'obligation d'achat " ; qu'aux termes du quatorzième alinéa du même article, aujourd'hui repris à l'article L. 314-6 du code de l'énergie : " Sous réserve du maintien des contrats en cours (...), l'obligation de conclure un contrat d'achat prévu au présent article peut être partiellement ou totalement suspendue par décret, pour une durée qui ne peut excéder dix ans, si cette obligation ne répond plus aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements " ; que, par le décret du 9 décembre 2010, le Premier ministre a suspendu pour une durée de trois mois l'obligation de conclure un contrat d'achat de l'électricité produite par les installations, d'une puissance installée inférieure ou égale à 12 mégawatts, utilisant l'énergie radiative du soleil, à l'exception, d'une part, des installations pour lesquelles la somme des puissances crêtes situées sur la même toiture ou la même parcelle est inférieure ou égale à 3 kilowatts et, d'autre part, de celles dont le producteur avait notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau, sous réserve, pour ces dernières installations, qu'elles soient mises en service dans des délais qu'il a précisés ; qu'il a prévu qu'à l'issue de la période de suspension, les pétitionnaires dont la demande avait fait l'objet d'une suspension devraient présenter une nouvelle demande complète de raccordement au réseau pour bénéficier d'un contrat d'obligation d'achat ;

3. Considérant, en premier lieu, que le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit de l'Union européenne, peut être invoqué par tout opérateur économique auprès duquel une autorité nationale a fait naître à l'occasion de la mise en oeuvre du droit de l'Union, des espérances fondées. que, toutefois, lorsqu'un opérateur économique prudent et avisé est en mesure de prévoir l'adoption d'une mesure de nature à affecter ses intérêts, il ne peut invoquer le bénéfice d'un tel principe lorsque cette mesure est finalement adoptée ; qu'en l'espèce, aucune disposition du droit de l'Union européenne n'imposait le maintien d'une obligation de conclure un contrat d'achat d'électricité à des conditions tarifaires inchangées ; que les dispositions de l'article 10 de la loi du 10 février 2000, qui prévoient l'obligation de conclure un contrat d'achat d'électricité, ont également, dès l'origine, autorisé le Gouvernement à suspendre cette obligation dans l'hypothèse où elle ne répondrait plus aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements ; que, par la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, le législateur est intervenu pour préciser que les contrats régis par l'article 10 de la loi du 10 février 2000 n'étaient conclus et n'engageaient les parties qu'à compter de leur signature ; que le développement trop rapide des installations de production d'électricité à partir de l'énergie radiative du soleil et le niveau excessif du tarif d'achat, pesant sur le coût de l'électricité pour le consommateur, avaient été soulignés, notamment, par différents avis de la Commission de régulation de l'énergie et par un rapport du conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et de l'inspection générale des finances ; que, dans ces conditions, alors même que les arrêtés fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil prévoyaient que la date de demande complète de raccordement au réseau public par le producteur déterminait les tarifs applicables à une installation, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un opérateur prudent et avisé n'aurait pas été mis en mesure de prévoir la suspension provisoire de l'obligation d'achat et la remise en cause des tarifs applicables aux installations pour lesquelles un contrat n'aurait pas encore été signé ; que, par suite, le décret n'a pas méconnu le principe de confiance légitime ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il incombe à l'autorité investie du pouvoir réglementaire d'édicter, pour des motifs de sécurité juridique, les mesures transitoires qu'implique, s'il y a lieu, une réglementation nouvelle ; qu'en l'espèce, au regard de l'intérêt général qui s'attachait à redéfinir les conditions d'achat de l'électricité issue de l'énergie radiative du soleil et des effets limités dans le temps de la mesure de suspension prononcée, qui réservait en outre les projets les plus avancés, son application immédiate ne peut être regardée comme ayant entraîné une atteinte excessive aux intérêts en cause ; qu'en subordonnant le maintien de l'obligation de conclure un contrat d'achat aux conditions antérieures, pour les installations ayant fait l'objet d'une acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau avant le 2 décembre 2010, à la mise en service des installations dans un délai au moins égal à neuf mois à compter de la publication du décret, prorogé le cas échéant des délais nécessaires à la réalisation des travaux de raccordement, le pouvoir réglementaire a laissé aux producteurs un délai raisonnable ; que le moyen tiré de la méconnaissance du principe de sécurité juridique doit, dès lors, être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que ces règlements portent atteinte au principe d'égalité en ce qu'ils ne concernent pas les autres énergies renouvelables doit être écarté dès lors qu'il n'est pas établi ni même allégué que les différents producteurs seraient dans une situation identique justifiant un même traitement ;

6. Considérant, enfin, que si la suspension décidée par le décret du 9 décembre 2010 a pu entraîner un préjudice économique pour les deux sociétés appelantes, ce préjudice n'est pas anormal compte tenu, d'une part, de la faible durée de la suspension, fixée à trois mois, d'autre part, de la possibilité de bénéficier, à l'expiration de la période de suspension, d'un contrat d'obligation d'achat après avoir déposé une nouvelle demande de raccordement au réseau comme le prévoit l'article 5 du décret ; qu'à supposer même que cette suspension restreigne la liberté du commerce et de l'industrie, cette restriction résulterait directement de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 qui autorise le gouvernement à suspendre l'obligation de conclure un contrat d'achat lorsqu'elle ne correspond plus aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements ; que la distinction que les dispositions du décret opèrent selon la puissance de l'installation et la date d'acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ne porte pas, par elle-même, atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie ; que le moyen doit, par suite, être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Me A..., pour la société Planet Bloo, et la société Planet Bloo Holding ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'enfin, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions relatives aux dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Me A... et de la société Planet Bloo Holding est rejetée.

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N° 10PA03855

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N° 13PA03011


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA03011
Date de la décision : 23/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. MOREAU
Rapporteur ?: M. Francis POLIZZI
Rapporteur public ?: Mme MACAUD
Avocat(s) : LEXCAP ANGERS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-01-23;13pa03011 ?
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