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20/01/2014 | FRANCE | N°13PA00200

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 janvier 2014, 13PA00200


Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me C... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1209620/9 du Tribunal administratif de Melun en date du 19 novembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président dudit tribunal a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la production de son entier dossier, d'autre part, à l'annulation des arrêtés du 15 novembre 2012 par lesquels le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire à destination de son pays d'origine sans délai de départ vol

ontaire et l'a placé en rétention administrative, à ce qu'il soit, en outr...

Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me C... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1209620/9 du Tribunal administratif de Melun en date du 19 novembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président dudit tribunal a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la production de son entier dossier, d'autre part, à l'annulation des arrêtés du 15 novembre 2012 par lesquels le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire à destination de son pays d'origine sans délai de départ volontaire et l'a placé en rétention administrative, à ce qu'il soit, en outre, enjoint au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation administrative dans un délais de 15 jours à compter du jugement à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, et, enfin, à ce qu'il soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les arrêtés préfectoraux susvisés ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour mention

" vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou à défaut d'enjoindre au préfet

du Val-de-Marne de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié en dernier lieu par l'avenant du 11 juillet 2001 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du

16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2014 :

- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller ;

1. Considérant que M. B..., né le 25 juin 1977, de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un premier arrêté du préfet du Val-de-Marne en date du 15 novembre 2012 portant obligation de quitter le territoire français, à destination de son pays d'origine, et refus de délai de départ volontaire ; que, par un second arrêté du même jour, le préfet du Val-de-Marne l'a placé en rétention administrative ; que M. B... relève régulièrement appel du jugement du

19 novembre 2012 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation du premier de ces deux arrêtés ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que l'arrêté de placement en rétention administrative du

15 novembre 2012 a fait l'objet d'une annulation par le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à l'annulation dudit arrêté ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / III. En cas de décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision dans les quarante-huit heures suivant sa notification. (...) L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. " ; que M. B... soutient que ces dispositions ont été méconnues, le juge de première instance ayant cru pouvoir statuer sur sa demande alors que le préfet du Val-de-Marne n'aurait pas communiqué à l'instance les pièces qui lui ont permis de prendre l'ensemble des décisions contestées, le privant ainsi du droit à un procès équitable au sens de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, il n'apporte aucune précision sur les pièces manquantes, alors que le dossier contentieux contient tous les éléments d'informations nécessaires pour que le juge statue en toute connaissance de cause sur le litige dont il est saisi ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à un procès équitable, qui n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, doit, en tout état de cause, être écarté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'ensemble des décisions contestées :

4. Considérant que M. B... se borne à reprendre en appel ses moyens de première instance tirés de ce que l'arrêté contesté ne serait pas suffisamment motivé et que son auteur n'aurait pas reçu une délégation de signature régulière ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens ainsi articulés devant la Cour par M. B..., qui ne présente aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation qu'il avait développée devant le Tribunal administratif de Melun ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus

d' autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus. " ;

6. Considérant que si M. B... soutient qu'il réside habituellement en France depuis le 11 août 2001, il ne produit, sous réserve d'une attestation établie en 2001 par France terre d'asile lui accordant une domiciliation postale pour un an et une facture au titre de l'année 2003, aucune autre pièce établissant sa présence sur le territoire national au titre des années 2002 à 2004, de même qu'il n'en produit aucune au titre de la période s'étalant du 5 juin 2011 au

30 mai 2012 ; que les attestations qu'il verse au dossier se bornent à faire mention de ce que l'intéressé résidait en France en 2002, sans indiquer qu'il y aurait résidé sans discontinuer depuis ; qu'en outre, si M. B..., célibataire et sans charges de famille en France, fait valoir qu'il réside chez son oncle, il n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvu d'attaches familiales en Algérie ; qu'enfin, pour justifier de son insertion dans la société française, il ne se prévaut que d'une promesse d'embauche du 9 octobre 2010, soit plus de deux ans avant la date de l'arrêté contesté ; que, par suite, l'obligation de quitter le territoire français du

15 novembre 2012 n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée compte tenu des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet du Val-de-Marne n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé ;

7. Considérant, en raison des mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, que le préfet du Val-de-Marne n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

8. Considérant que, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire ayant été écartés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté par voie de conséquence ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 II du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;(...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) " ;

10. Considérant que M. B... fait valoir qu'il est entré régulièrement sur le territoire français le 11 août 2001, qu'il justifie de son hébergement de longue date au domicile de son oncle et qu'il n'est pas en mesure de présenter des documents de voyage en cours de validité pour avoir remis son passeport à l'administration au moment de son placement en rétention ; que, toutefois, il n'établit pas avoir sollicité un titre de séjour avant le 11 septembre 2007, soit plus de quatre ans après la limite de validité du visa sous couvert duquel il est entré en France ; qu'en tout état de cause, il ne présente pas des garanties suffisantes de représentation dans la mesure où le passeport qu'il a remis à l'administration n'était valide que jusqu'au

15 octobre 2008, ainsi qu'il ressort du récépissé de remise de document d'identité du

15 novembre 2012 versé au dossier ; que, par suite, le préfet du Val-de-Marne a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, refuser à l'intéressé le bénéfice d'un délai de départ volontaire sur le fondement des dispositions précitées du b) et du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 4. (...) / 4. S'il existe un risque de fuite, (...) les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même directive : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 7) " risque de

fuite " : le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite (...) " ; que le législateur a déterminé six cas dans lesquels le risque de fuite doit être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, qui sont énoncés au 3° du II de l'article L. 511-1 précité ; que si M. B... soutient que les critères retenus sont manifestement contraires à l'objectif de proportionnalité et qu'ils présument le risque de fuite, les six cas énoncés reposent cependant sur des critères objectifs permettant de penser qu'un étranger faisant l'objet d'une procédure de retour serait susceptible de prendre la fuite ; que l'application de ces critères n'exclut pas que soit portée par l'autorité administrative compétente une appréciation particulière sur chaque situation individuelle ; que les dispositions précitées de la directive ne s'opposent pas à ce que les Etats membres prévoient que le risque de fuite soit regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans le cas où l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; que, dans ces conditions, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur ce point ne méconnaissent pas les objectifs de la directive 2008/115/CE susvisée et notamment ceux qui résultent des dispositions précitées ; qu'il s'ensuit que doit être écarté le moyen tiré par M. B... de ce que la décision attaquée aurait été prise sur le fondement de dispositions législatives contraires aux objectifs de cette directive ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

12. Considérant que, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire ayant été écartés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut qu'être également écarté ;

13. Considérant que M. B... se borne à reprendre en appel son moyen de première instance tiré de ce que l'arrêté contesté violerait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen ainsi articulé devant la Cour par M. B..., qui ne présente aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation qu'il avait développée devant le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

15 novembre 2012 par lesquels le préfet du Val-de-Marne l'a obligé à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine sans délai de départ volontaire ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

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N° 13PA00200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA00200
Date de la décision : 20/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Michel ROMNICIANU
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : NAMIGOHAR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-01-20;13pa00200 ?
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