La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/01/2014 | FRANCE | N°12PA05130

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 janvier 2014, 12PA05130


Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., demeurant ...Fare Tony à Papeete (98713), par Me D...; M. B..., M. et Mme C... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200234 en date du 25 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 206/CM du président de la Polynésie française en date du 9 février 2012 fixant le taux de cotisation maladie et le plafond mensuel des revenus soumis à cotisations du régime d'assurance m

aladie des personnes non-salariées de la Polynésie française ;

2°) d'annul...

Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., demeurant ...Fare Tony à Papeete (98713), par Me D...; M. B..., M. et Mme C... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200234 en date du 25 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 206/CM du président de la Polynésie française en date du 9 février 2012 fixant le taux de cotisation maladie et le plafond mensuel des revenus soumis à cotisations du régime d'assurance maladie des personnes non-salariées de la Polynésie française ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 440 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, modifiée, portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la délibération n° 94-19 AT de la commission permanente de l'assemblée territoriale de Polynésie française, en date du 10 mars 1994, portant institution du conseil d'administration du régime des non-salariés ;

Vu la délibération n° 94-171 AT de l'assemblée territoriale de Polynésie française, en date du 29 décembre 1994, relative aux dispositions administratives et financières du régime des non-salariés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2014 :

- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,

- les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public,

- et les observations de Me de Chaisemartin, avocat de la Polynésie française ;

1. Considérant que, par l'arrêté litigieux n° 206/CM en date du 9 février 2012, délibéré en conseil des ministres lors de sa séance du 8 février 2012, le président de la Polynésie française, d'une part, a fixé à 9,54% à compter du 1er mars 2012 le taux de cotisation maladie du régime d'assurance-maladie des personnes non salariées (RNS) de la Polynésie française auparavant fixé à 8% et, d'autre part, a porté de un à trois millions F CFP à compter du

1er juillet 2012 le plafond mensuel des revenus soumis à cotisations dudit RNS de la Polynésie française ; que M. B...et autres relèvent régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française en date du 25 septembre 2012 ayant rejeté leur demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 72-1 de la loi organique du 27 février 2004 susvisée : " En cas d'absence ou d'empêchement du président de la Polynésie française, son intérim est assuré par le vice-président nommé dans les conditions prévues à l'article 73 " ; qu'aux termes de l'article 73 de la même loi : " Dans le délai de cinq jours suivant son élection, le président de la Polynésie française notifie au haut-commissaire et au président de l'assemblée de la Polynésie française l'arrêté par lequel il nomme un vice-président, chargé d'assurer son intérim en cas d'absence ou d'empêchement " ; qu'enfin, l'article 83 prévoit en son second alinéa: " Les séances du conseil des ministres sont présidées par le président de la Polynésie française ou par le vice-président, ou, en l'absence de ce dernier, par un ministre désigné à cet effet par le président de la Polynésie française." ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions législatives organiques que le vice-président de la Polynésie française est chargé d'assurer l'intérim du président de la Polynésie française en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier ; que les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir, et il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, que le président de la Polynésie française n'aurait pas été empêché de participer aux délibérations du conseil des ministres lors de sa séance du 8 février 2012 ; qu'en tout état de cause, il incombe au vice-président de la Polynésie française, au même titre que le président, de présider le conseil des ministres et, partant, de signer les actes adoptés à l'issue des délibérations de ce conseil ; qu'en conséquence, le moyen tiré de l'incompétence du vice-président pour signer l'arrêté litigieux doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 83 de la loi organique du

27 février 2004 susvisée : " Le gouvernement de la Polynésie française se réunit en conseil des ministres au chef-lieu de la Polynésie française. Il est convoqué par son président. [...] Les séances du conseil des ministres sont présidées par le président de la Polynésie française ou par le vice-président, ou, en l'absence de ce dernier, par un ministre désigné à cet effet par le président de la Polynésie française. Le conseil des ministres ne peut valablement délibérer que sur les questions inscrites à l'ordre du jour." ; qu'aux termes de l'article 84 de cette même loi : " Le président de la Polynésie française arrête l'ordre du jour du conseil des ministres. Il en adresse copie au haut-commissaire avant la séance. Sauf urgence, cette copie doit être parvenue au haut-commissaire vingt-quatre heures au moins avant la séance. [...] " ;

5. Considérant qu'il ressort du bordereau de transmission daté du 7 février 2012 qu'un projet de décision fixant les taux de cotisation maladie et le plafond mensuel des revenus soumis à cotisation du régime d'assurance maladie des personnes non salariées de Polynésie française était inscrit à l'ordre du jour de la séance du conseil des ministres du 8 févier 2012 ; que cet ordre du jour a été communiqué en temps utile au haut-commissaire de la République en Polynésie française ; que le moyen tiré de ce que le projet d'arrêté litigieux n'aurait pas été régulièrement inscrit à l'ordre du jour de la séance du conseil des ministres manque en fait et doit, par suite, être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article 64 de la loi organique du

27 février 2004 susvisée le président de la Polynésie française signe les actes délibérés en conseil des ministres ; que, toutefois, sur le fondement des dispositions sus rappelées de ladite loi organique le chargeant d'exercer l'intérim du président en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier, le vice-président de la Polynésie française a pu légalement, sans qu'il soit besoin d'une délégation spécifique consentie à cet effet par le président, assurer la présidence du conseil des ministres le 8 février 2012 en lieu et place du président et, partant, signer les actes adoptés à l'issue des délibérations de celui-ci ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que l'arrêté de nomination du vice-président de la Polynésie française ne précisait pas que l'intéressé était chargé d'assurer l'intérim du président en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier n'est pas de nature à faire obstacle à ce que le vice-président de la Polynésie française exerce l'intérim du président lors de la séance du conseil des ministres du 8 février 2012, dès lors que le vice-président, dont la nomination est intervenue conformément aux dispositions sus rappelées, tient directement des articles 72-1, 73 et 83 suscités de la loi organique du 27 février 2004 la compétence pour exercer un tel intérim ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 90 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut de la Polynésie française susvisée : " Sous réserve du domaine des actes prévus par l'article 140 dénommés " lois du pays ", le conseil des ministres fixe les règles applicables aux matières suivantes : [...] 17° Plafonds de rémunérations soumises à cotisation et taux de cotisation pour le financement des régimes de protection sociale... " ; qu'en application de cette disposition, l'article 6 de la délibération n° 94-171 AT de l'assemblée territoriale de la Polynésie française en date du 29 décembre 1994 dispose : " Le taux des cotisations est fixé par arrêté en conseil des ministres, sur proposition du conseil d'administration " ; que l'article 7 ajoute : " Les cotisations sont applicables sur les revenus nets non salariaux encaissés au cours de l'année précédente, dans la limite d'un plafond fixé par arrêté en conseil des ministres, sur proposition du conseil d'administration. " ; qu'en outre, l'article 6 de la délibération n° 94-19 AT de la commission permanente de l'assemblée territoriale de Polynésie française en date du 10 mars 1994 prévoit : " Le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires du régime des non-salariés. Il est obligatoirement appelé à délibérer sur notamment : le budget annuel du régime et les actes modificatifs du budget ; [...] Les décisions en matière de cotisations ou de prestations sont prises par les autorités territoriales compétentes sur proposition du conseil d'administration. " ;

9. Considérant que, en application des dispositions précitées des délibérations susvisées de l'assemblée territoriale de Polynésie française, le conseil d'administration du régime des non salariés a émis, par une première délibération en date du 25 novembre 2011, confirmée par une seconde délibération en date du 12 janvier 2012, la proposition d'augmentation de 8% à 8,80% du taux de cotisation avec maintien à 1 million F CFP du plafond des revenus soumis à cotisation ; que, par l'arrêté litigieux en date du 9 février 2012, le président de la Polynésie française, qui n'était pas lié par le sens de cette proposition, a refusé d'entériner celle-ci et a décidé, après en avoir délibéré en conseil des ministres lors de la séance du 8 février 2012, de fixer la hausse des cotisations et le relèvement du plafond de revenus soumis à cotisation, ainsi qu'exposé au point 1 du présent arrêt ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'absence de proposition du conseil d'administration du régime des non salariés et de " notification d'opposition " ne peut qu'être écarté ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le gouvernement a dûment notifié au conseil d'administration, le 23 décembre 2011, son opposition aux propositions budgétaires dudit conseil d'administration ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté litigieux aurait été adopté par une autorité incompétente ou suivant une procédure irrégulière ;

Sur la légalité interne :

11. Considérant, en premier lieu, qu'à l'appui de leurs conclusions dirigées contre l'arrêté litigieux du président de la Polynésie française en date du 9 février 2012, les requérants critiquent les modalités de détermination de l'assiette des cotisations telles que fixées par une délibération de l'assemblée territoriale de la Polynésie française en date du 29 décembre 1994, d'après eux constitutives d'une rupture d'égalité ; que, cependant, comme il a été exposé au point 1 du présent arrêt, l'arrêté litigieux s'est borné à relever, à compter du 1er mars 2012, le taux de cotisation maladie du régime des personnes non salariées, ainsi que, à compter du

1er juillet 2012, le plafond mensuel des revenus soumis à cotisations précédemment en vigueur ; que, dans ces conditions, les requérants ne peuvent utilement exciper de l'illégalité des dispositions de la délibération sus évoquée en date du 24 décembre 1994, non contestées par eux dans le délai du recours pour excès de pouvoir, dès lors que l'arrêté litigieux du président de la Polynésie française n'en constitue pas une mesure d'application ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que les requérants invoquent une rupture d'égalité caractérisée entre catégories socioprofessionnelles, le taux de cotisation maladie applicable aux non salariés fixé par l'arrêté litigieux étant près du double de celui applicable aux salariés ; que, toutefois, le principe général d'égalité devant les charges publiques ne s'oppose pas à ce que des personnes affiliées à des régimes de sécurité sociale différents, lesquels forment un ensemble dont les dispositions ne peuvent être envisagées isolément, soient soumises à des règles de taux et d'assiette différentes pour le calcul du montant des cotisations ; que les salariés et les non salariés constituent des catégories d'assurés sociaux dont les conditions de gestion, d'assujettissement, d'affiliation et de maintien des droits sont nettement distinctes et qui peuvent, par suite, faire l'objet d'un traitement différencié par le pouvoir réglementaire ; que, dès lors, le moyen tiré d'une soi-disant rupture d'égalité entre catégories socioprofessionnelles doit être écarté ;

13. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché l'arrêté litigieux n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...et M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté

n° 206/CM du 9 février 2012 du président de la Polynésie française ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Polynésie française, qui n'est pas la partie perdante, le versement de la somme que M. B...et M. et Mme C...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants, d'une part, la somme de 1 500 euros que le la Polynésie française sollicite au titre des mêmes dispositions et, d'autre part, la somme de 1 500 euros que demande la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...et M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : M. B..., M. C...et Mme C...verseront à la Polynésie française une somme de 1 500 euros et à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

''

''

''

''

2

N° 12PA05130


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA05130
Date de la décision : 20/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

62-01 Sécurité sociale. Organisation de la sécurité sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Michel ROMNICIANU
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : USANG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-01-20;12pa05130 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award