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20/12/2013 | FRANCE | N°13PA00184

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 20 décembre 2013, 13PA00184


Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2013, présentée pour M. et Mme B...A..., demeurant au..., par MeC... ; M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1121204 du 16 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

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Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2013, présentée pour M. et Mme B...A..., demeurant au..., par MeC... ; M. et Mme A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1121204 du 16 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2013 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président assesseur,

- et les conclusions de M. Boissy, rapporteur public ;

1. Considérant que l'EURL Terrassement Démolition A...(TDP), dont M. A...était le gérant et l'unique associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle M. et Mme A...ont été assujettis, dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire, au titre des années 2007 et 2008, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et à des cotisations supplémentaires de contributions sociales ; qu'ils relèvent appel du jugement du 16 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) " ; et qu'aux termes de l'article L. 13 A de ce code : " Le défaut de présentation de la comptabilité est constaté par procès-verbal que le contribuable est invité à contresigner. Mention est faite de son refus éventuel " ; que l'établissement d'un procès-verbal en application de ces dernières dispositions ne constitue pour le vérificateur qu'une simple faculté, destinée à lui faciliter l'administration de la preuve ; qu'en conséquence d'éventuelles irrégularités entachant ce procès-verbal au regard des exigences prévues par l'article L. 13 A précité, si elles privent celui-ci de sa valeur probante, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

3. Considérant qu'il s'ensuit que M. et Mme A...ne peuvent utilement soutenir que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité au motif que M. A...ne disposait pas des capacités de discernement nécessaires lorsqu'il a contresigné, le 16 avril 2010, le procès-verbal constatant que la comptabilité de l'EURL TDP était irrégulière, non sincère et non probante ;

4. Considérant, par ailleurs, que les requérants n'établissent pas que le vérificateur aurait manqué à son devoir de loyauté lors de la procédure de contrôle en se bornant à alléguer, sans l'établir, qu'il aurait abusé de l'état de faiblesse de M. A...pour obtenir qu'il signe ce procès-verbal, alors qu'il est constant que ce dernier avait, préalablement à l'établissement de ce procès-verbal, reconnu, en présence de son expert-comptable, le caractère fictif de plusieurs factures ayant donné lieu à la comptabilisation de charges ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, a adressé, les 12 mars 2010, 15 mars 2010 et 22 avril 2010 des demandes de renseignements à divers fournisseurs ou clients de l'EURL TDP ainsi qu'à des établissements bancaires tenant ses comptes ; que la teneur et l'origine des réponses de ces sociétés ont été précisées dans la proposition de rectification du 27 mai 2010 adressée à l'EURL TDP ; qu'il est constant que M. A... a obtenu, dans la réponse de l'administration en date du 5 juillet 2010 faite aux observations qu'il avait présentées en tant que gérant de cette société, la communication d'une copie des pièces obtenues par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication ; que l'administration a ainsi satisfait aux obligations résultant pour elle des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, alors même qu'elle n'a pas communiqué aux contribuables le rapport de vérification établi par le vérificateur, qui n'est pas au nombre des " documents obtenus de tiers " mentionné par ces dispositions ; que les requérants ne sauraient utilement soutenir qu'en s'abstenant de leur communiquer ce rapport l'administration a méconnu les dispositions de la loi du 17 juillet 1978, qui ont pour objet de faciliter, de manière générale, l'accès des personnes qui le demandent aux documents administratifs et non de modifier les règles particulières qui régissent la procédure d'imposition à l'impôt sur le revenu ;

7. Considérant, en troisième lieu, d'une part, que les membres d'une des sociétés de personnes énumérées à l'article 8 du code général des impôts sont personnellement assujettis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondants à leurs droits dans la société ; que d'après l'article 60 de ce code, les sociétés de l'article 8 sont tenues aux obligations incombant normalement aux exploitants individuels ; qu'en vertu de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales, la procédure de vérification des déclarations déposées par ces sociétés est suivie avec celles-ci ; que les articles L. 55 et suivants du même livre prévoient les conditions dans lesquelles d'une part, les déclarations fiscales ne peuvent être corrigées qu'après envoi d'une notification de redressement motivée, et d'autre part, le contribuable peut demander, lorsque le désaccord persiste sur le redressement notifié, que le litige soit soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

8. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que c'est avec la société de personnes que l'administration fiscale doit engager la procédure de vérification des résultats sociaux régulièrement déclarés par cette société, au regard de la comptabilité qu'elle doit tenir en vertu de l'article 60 du code général des impôts ; que la notification de redressement adressée à la société à l'issue de cette vérification implique directement certains effets pour l'imposition personnelle des associés, tels que l'interruption du délai de prescription à leur égard ou l'inversion de la charge de prouver le mal fondé des redressements auxquels la société aurait acquiescé ; que seule la société peut soumettre à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le désaccord persistant sur les redressements qui lui ont été notifiés ; que l'administration ne peut légalement mettre des suppléments d'imposition à la charge personnelle des associés sans leur avoir notifié, dans les conditions prévues à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, les corrections apportées aux déclarations qu'ils ont eux-mêmes souscrites, en motivant cette notification au moins par une référence aux rehaussements apportés aux bénéfices sociaux et par l'indication de la

quote-part de ces bénéfices à raison de laquelle les intéressés seront imposés ; que toutefois, dans le cas d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le gérant était l'unique associé, l'administration n'a pas à réitérer à son égard la notification précédemment adressée à la société ;

9. Considérant qu'il suit de là que l'administration, qui n'était pas tenue de suivre avec M. A... une procédure contradictoire de redressements de son revenu global distincte de la procédure de redressements contradictoire régulièrement suivie avec l'EURL TDP, n'avait pas à réitérer à son égard la notification adressée le 27 mai 2010 à cette société, dont il était le gérant et l'unique associé ;

10. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions des articles L. 9 et L. 54, chacun des époux a qualité pour suivre les procédures relatives à l'impôt dû à raison de l'ensemble des revenus du foyer. Les déclarations, les réponses, les actes de procédure faits par l'un des conjoints ou notifiés à l'un d'eux sont opposables de plein droit à l'autre " ;

11. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la notification en date du 27 mai 2010 adressée à l'EURL TDP, représentée par son gérant et unique associé, M.A..., et qui dispensait l'administration de notifier personnellement à ce dernier les corrections apportées à ses déclarations au titre de l'impôt sur le revenu des années 2007 et 2008, serait irrégulière faute d'avoir été également adressée à MmeA... ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service a remis en cause la déduction des résultats de l'EURL TDP, au titre des exercices clos en 2007, pour un montant total de 75 454 euros, et en 2008, pour un montant total de 51 857 euros, d'une part, de charges non justifiées comptabilisées au débit du compte de charge intitulé " sous-traitance " et, d'autre part, des charges correspondant à six factures de location de matériel et d'engins de chantier émanant de trois sociétés tierces, que le service a regardées comme fictives ; que, pour contester le rejet de ces dernières charges, les requérants soutiennent que l'administration n'a pas apporté la preuve qu'elles étaient dépourvues de contrepartie ; que, toutefois, alors que c'est aux contribuables qu'il appartient de justifier du principe même de la déductibilité des charges venant en déduction du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts, ceux-ci n'établissent pas que l'EURL TDP aurait déduit en charges des dépenses réellement supportées, conformément à des factures régulières relatives à la location de matériel et d'engins de chantier, dès lors qu'il résulte du droit de communication exercé par l'administration que les sociétés à l'en-tête desquelles ont été émises ces factures n'ont en réalité pas émis celles-ci, l'administration ayant en outre établi que les chèques de l'EURL TDP émis en règlement de ces factures ont, en fait, été établis à l'ordre de M. ou Mme A... et encaissés par ces derniers ;

14. Considérant, par ailleurs, qu'alors qu'il résulte des indications non contredites de la proposition de rectification en date du 27 mai 2010 que, au cours de la vérification de sa comptabilité l'EURL TDP n'a présenté aucune des factures de ses fournisseurs à l'exception des six factures susmentionnées, les requérants soutiennent qu'ils disposent de nombreuses autres factures de leurs fournisseurs correspondant à la location de divers engins, pour un montant total de 45 021, 97 euros HT au titre de l'exercice clos en 2007 et de 55 852, 58 euros HT au titre de l'exercice clos en 2008 ; que, toutefois, en tout état de cause, les requérants ne produisent pas davantage en appel qu'en première instance les factures en question ;

15. Considérant, en second lieu, qu'en vertu du 1. de l'article 6 du code général des impôts les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles ; qu'il suit de là que, dès lors que les bénéfices industriels et commerciaux réalisés par M. A... en tant qu'unique associé de l'EURL TDP et rehaussés par l'administration fiscale ont concouru à l'établissement de l'impôt sur le revenu de son foyer fiscal, Mme A...ne peut utilement soutenir qu'elle n'est pas redevable d'un impôt résultant de rectifications apportées aux résultats d'une entreprise à laquelle elle n'est pas liée ;

Sur les pénalités :

16. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : (...) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) " ;

17. Considérant que l'administration justifie l'application des pénalités litigieuses par les nombreuses charges fictives révélées à la suite de l'exercice du droit de communication au cours des deux exercices vérifiés et par l'émission de factures fictives et l'encaissement par M. et Mme A...des chèques correspondants ; que, si les requérants font valoir que M. A...a coopéré aux opérations de contrôle de la comptabilité de l'EURL TDP, une telle circonstance est sans incidence sur le bien-fondé des pénalités en litige dès lors que, pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative et son intention d'égarer l'administration dans son pouvoir de contrôle, l'administration doit se placer au moment de la déclaration comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt sans pouvoir se fonder sur des éléments tirés du comportement du contribuable pendant la vérification ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que M. et Mme A...se sont rendus coupables de manoeuvres frauduleuses, justifiant l'application des pénalités de 80 % prévues par les dispositions susmentionnées du c. de l'article 1729 ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

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N° 13PA00184


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA00184
Date de la décision : 20/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : SCP HB et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-20;13pa00184 ?
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